Le genre Weinmannia
Contexte géographique et climatique des îles de Madagascar et de
La Réunion L’individualisation de Madagascar résulte de l’éclatement au Mésozoïque moyen (vers 165 M d’années) du supercontinent de Gondwana (qui regroupait aussi l’Afrique, les Seychelles, le Dekkan, l’Australie, l’Antarctique, et une partie de l’Amérique du Sud) (Battistini and Richard-Vindard 2013). L’île de Madagascar se situe actuellement à 300 km de la côte du Mozambique, de ce fait Madagascar n’est pas une dépendance de l’Afrique sur le plan biogéographique (Battistini and Richard-Vindard 2013). Madagascar est située au sud de l’équateur, dans l’océan Indien entre 43°20’ et 50°50’ de longitude Est et entre 11°50’ et 25°30’ de latitude Sud. Cette île est la cinquième au monde en superficie (587 000 km²) après l’Australie, le Groenland, la Nouvelle-Guinée et Bornéo. La diversité géographique de Madagascar fait qu’elle est un véritable petit continent, avec une diversité de milieux naturels exceptionnels (Battistini and Richard-Vindard 2013).
Madagascar présente une structure géologique, géographique et hydraulique dissymétrique opposant l’Est et l’Ouest. L’Est et le Centre sont surtout constitués par un socle cristallin, marqué du plan orographique par des métamorphismes, des plissements et des failles ; la descente est brutale vers l’océan Indien. Le Centre a des reliefs complexes avec divers paysages. L’Ouest, de nature sédimentaire, forme une plate-forme inclinée progressivement vers le canal de Mozambique. Cette dissymétrie orographique fait que les fleuves les plus longs se localisent sur la côte Ouest et sur la côte Est on observe des fleuves courts, mais nombreux. Ces deux parties présentent aussi des dissymétries au niveau du climat : le versant oriental, exposé à l’alizé du Sud-Est véhiculant des masses d’air tièdes et humides, reçoit les plus fortes précipitations (2 000 à 4 000 mm par an). L’alizé en heurtant les sommets orientaux, le phénomène de foehn se produit et il en résulte une pluviométrie moins abondante vers l’Ouest et le Sud-Ouest, jusqu’à la semi-aridité de la région de Tuléar et de l’Extrême-Sud (500 mm) (Figure 2).
Madagascar ne possède pas de très hautes montagnes, mais de Hautes Terres, avec des climats tropicaux d’altitude de type montagnard avec des pluviométries entre 1600 mm et 800 mm, et des sommets de 2876 m au Tsaratanana dans le nord de l’île, 2658 m dans l’Andringitra dans le centre sud et 2643 m dans 1’Ankaratra au sud de Tananarive. Vu la grande taille de Madagascar qui couvre plusieurs degrés en latitude (15) et longitude (7), on observe une véritable mosaïque de climats, et la température moyenne annuelle varie de 27°C dans le Nord littoral à 24°C dans le Sud. Sur les Hautes Terres, des températures moyennes annuelles de 16 °C sont enregistrées. Et la dissymétrie entre l’Est et l’Ouest fait que le versant occidental est plus chaud que le versant oriental avec une différence de 1,5 à 2 °C dans les températures moyennes annuelles à latitude égale (Figure 3).
De nombreuses îles entourent Madagascar dont l’archipel des Mascareignes, à l’Est, qui est constitué de trois îles volcaniques : La Réunion, Maurice et Rodrigues (Figure 1). La Réunion est de forme elliptique (75 km sur 55 km) avec un relief montagneux et un massif ancien formé par le Piton des Neiges culminant à 3069 m, qui est défoncé en trois grands cirques : Cilaos, Salazie, et Mafate. La partie Sud-Est est le siège du volcanisme actif avec le massif de la Fournaise qui évolue au fur et à mesure de la répartition des coulées récentes. L’île de La Réunion présente un climat tropical et une forte dissymétrie pluviométrique. La région orientale, soumise à l’action directe de l’alizé est humide, elle reçoit des pluies assez bien réparties sur toute l’année avec 3 à 10 m/an. La région occidentale, subissant l’action de la mousson en été, se caractérise par un climat plus sec avec une pluviométrie annuelle irrégulière et inférieure à 2 m/an (Figure 4).
Écosystèmes forestiers existant à Madagascar et à La Réunion Madagascar a une grande originalité de sa flore et de sa faune. Et l’existence d’une variété de milieux a favorisé la différenciation des espèces. Madagascar possède une potentialité biologique énorme sur le plan floristique, car le pays abrite environ 12.000 espèces de plantes (Dejardin et al. 1973, Schatz et al. 1996) avec des taux d’endémisme allant jusqu’à 83% dans l’ensemble, et jusqu’à 96% d’endémisme dans la flore (Morat and Lowry 1993, Phillipson 1994, Schatz 2002, Goodman and Benstead 2005, Phillipson et al. 2006). Sur les 160 à 180 familles reconnues à Madagascar, 5 familles y sont entièrement endémiques (Callmander et al. 2011). La diversification est extraordinaire à l’exemple du genre Adansonia (Malvaceae) (Figure 6a) qui compte 6 espèces endémiques parmi les 8 espèces mondialement connues. Cette diversité est aussi observée chez le genre Diospyros (Ebenaceae) représenté par 100 espèces soit 20% de la diversité des espèces mondiales. Nous pouvons aussi citer la famille des Orchidaceae (Figure 6b) dont le nombre d’espèces est estimé entre 1000 – 1500 avec 58% d’endémicité, et la famille des Arecaceae (Figure 6c) qui comptent 171 espèces dont 166 endémiques (Ganzhorn et al. 2001, Goodman and Benstead 2005). Selon Strasberg et al. (2005) et le Conservatoire Botanique National de Mascarin (2017), la Réunion compte 150 espèces d’arbres, 500 espèces de plantes à fleurs dont 30 % sont endémiques de l’île. Le nombre d’espèces de fougères s’élève à 240 dont 12% sont endémiques de la Réunion. L’île de Madagascar et l’île de La Réunion ont une formation forestière naturelle de type « forêt dense humide sempervirente » dans leur partie Est et de type « forêt dense sèche » dans leur partie Ouest (Schatz et al. 1996, Strasberg et al. 2005).
Formations forestières naturelles
Les formations naturelles sont constituées de forêts relativement sèches hétérogènes de basse altitude couvrant la base des pentes occidentales de l’île de 700 à 800 m d’altitude. Les espèces caractéristiques de cette zone sont Fernelia buxifolia, Poupartia borbonica et Scolopia heterophylla. Il y a aussi la forêt humide hétérogène de basse altitude couvrant les parties les plus chaudes et humides de l’île, présente dans la partie au vent du bord de mer jusque vers 500 m d’altitude. On y trouve une abondance particulière de certaines espèces comme Cordeomoya integrifolia (Figure 10a), Maillardia borbonica (Figure 10h), Phyllanthus phillyreifolium (Figure 10c) et Syzygium cordemoyi (Figure 10b). La forêt humide hétérogène de moyenne altitude se trouve entre 600 et 900 m d’altitude au vent et 750 et 1 100 m sous le vent. On y trouve une abondance particulière de certaines espèces comme Cordeomoya integrifolia, Maillardia borbonica, Phyllanthus phillyreifolius et Syzygium cordemoyi. La forêt de piédmont des cirques sous le vent se trouve dans les zones de moyenne altitude.
On y trouve des espèces des secteurs à climatologie différente tels que Claoxylon glandulosum (Figure 10e), Dodonaea viscosa (Figure 10d), Melicope obtusifolia var. arborea, Pleurostylia pachyphloea (Figure 10d) et Psiadia dentala. Les formations végétales de montagne sont les formations les mieux conservées de la Réunion. Cette formation apparait entre 800 m (Sud-Est) et 1200 m (Nord-Ouest) pour disparaître respectivement entre 1600 m et 2000 m. D’après Cadet (1980), elles peuvent être comparées aux formations montagnardes africaines et malgaches. La végétation éricoïde d’altitude couvre 1/5 de la superficie de l’île, située entre 1600 m et 2000 m d’altitude, elle se trouve sous deux faciès les fourrés éricoïdes altimontaines constitués de plusieurs arbustes ou arbrisseaux dont Erica reunionensis, Phylica nitida et Stoebe passeroïdes.
Le genre Weinmannia Un des composants clés des formations forestières de Ranomafana et présent à Mare Longue est le genre Weinmannia, ce genre appartient à la famille des Cunoniaceae qui compte 26 genres et 300 espèces (Angiosperm Phylogeny Group 1998). La distribution de Weinmannia dans le monde va des régions tempérées jusqu’aux régions tropicales, des Amériques, de la région du Sud-Ouest de l’océan Indien, des régions du Sud du Pacifique, de Polynésie et de Malaisie (Figure 13)(Bradford 1998, Bradford and Hopkins 1998, Bradford 2001). Mais ce genre est absent en Afrique et en Australie (Barnes et al. 2001). Le genre Weinmannia est subdivisé en cinq sections, Fasciculatae (Asie du Sud-Est et Mélanésie), Inspersae et Spicatae (Madagascar), Leiospermum (Mélanésie et Polynésie) et Weinmannia (Amérique latine et Îles Mascareignes). Les sections sont limitées à des régions géographiques propres à chacune (Pillon 2008).
Les espèces de Madagascar forment un clade monophylétique d’après les analyses moléculaires et l’analyse de la morphologie (Figure 14). Weinmannia est représenté par l’espèce W. tinctoria (sect. Weinmannia). Ce dernier a des fleurs dioïques. Cette espèce croit entre 800 et 1700 m d’altitude sur la côte Ouest et entre et 400 et 1200 m à l’Est de La Réunion (Tassin et al. 2004). Les espèces de ce genre constituent la strate arborée et la canopée des forêts denses humides d’altitude. Ce genre, compte plus de 40 espèces à Madagascar et une espèce dans les Mascareignes (Bradford 1998, Bradford 2001, Bradford 2002). Les espèces les plus répandues à Ranomafana sont Weinmannia bojeriana et W. rutenbergii. – Weinmannia bojeriana est un arbre très répandu sur les hautes terres de Madagascar. Les feuilles de cette espèce sont pubescentes, unifoliolées, de taille moyenne, avec un pétiole plus court et des nervures proéminentes avec des fleurs regroupées le long de l’axe de la pointe couvrant le rachis (Bradford 2001).
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Table des matières
Table des figures
Liste des tableaux
INTRODUCTION GÉNÉRALE
SYNTHÈSE BIBLIOGRAPHIQUE
Contexte géographique et climatique des îles de Madagascar et de La Réunion
Écosystèmes forestiers existant à Madagascar et à La Réunion
Formations forestières à Madagascar
Formations forestières à La Réunion
Zone d’étude
Ranomafana, zone d’étude à Madagascar
Mare Longue, zone d’étude à La Réunion
Le genre Weinmannia
L’abeille mellifère
Taxonomie de l’abeille
Eusocialité et cycle de vie de l’abeille
La communication sociale entre les abeilles pour partager les informations pour les besoins de la colonie
La communication chimique
La danse frétillante et les interactions trophallactiques
Ressources exploitées par l’abeille mellifère
Nectar et miellat comme source d’énergie
Pollen, indispensable à la vie des abeilles
Autres substances
Interaction plantes-pollinisateurs
Adaptation des fleurs pour attirer les abeilles pollinisatrices
Anatomie de l’abeille montrant son adaptation aux récoltes des réserves alimentaires
Apis mellifera unicolor à Madagascar
Méliss opalynologie
Analyses mélissopalynologiques
Détermination des pollens
OBJECTIFS ET PROBLÉMATIQUE
CHAPITRE I: Pollen morphology of melliferous plants for Apis mellifera unicolor in the tropical rainfor est of Ranomafana National Park, Madagascar
Introduction
Materials and methods
Area of sampling
Sample collection
Laboratory Sample Processing
Pollen Description
Results
Pollen Description
Symmetry and Form
Shape
Dimensions
Apertures
Exine
Pollen type
Discussion
Pollen Morphology regarding pollination
Pollen dispersal unit and exine ornamentation
Size of pollen grains
Aperture type
Conclusions
References
CHAPITRE II et III : Comportement de butinage d’une sous-espèce indigène de la lignée africaine d’abeilles domestiques (Apis mellifera unicolor Latreille) dans une formation forestière tropicale humide à la Réunion (le cas de Mare Longue) et à Madagascar (le cas de Ranomafana)
CHAPITRE II: Foraging behaviour of a native subspecies of the African lineage of honeybees (Apis mellifera unicolor Latreille) in a tropical rainforest of Reunion Island
Introduction
Materials and methods
Study site
Survey of resource diversity
Pollen and honey sampling
Honey analysis
Pollen identification
Statistical analysis
Results
Analyses of flora
Pollen analysis
Discussion
Conclusion
Appendix
CHAPITRE III: Foraging behaviour of a native subspecies of the African lineage of honeybees (Apis mellifera unicolor Latreille.) in a tropical rainforest of Madagascar
Introduction
Materials and Methods
Study site and apiary set up
Study of the diversity of available resources
Honey sampling
Honey analysis
Identification of pollen grains
Pollen analysis of the preparations
Statistical analysis
Results
Analyses of flora
Honey analysis
Discussion
Appendix
CHAPITRE IV : Activité de butinage d’Apis mellifera unicolor et autres visiteurs sur les fleurs du genre Weinmannia à Madagascar et La Réunion
Introduction
Materials and methods
Study areas
Studied species
Data set
Results
Presence of honeybees depending on weather conditions
Presence of honeybees according to the number of inflorescences considered.
Hourly presence of Apis mellifera depending on weather conditions
Daily distribution of other visitors
Discussion
DISCUSSION GÉNÉRALE
Les ressources floristiques disponibles au sein de l’aire de butinage des deux ruchers
Les ressources mellifères exploitées par l’abeille dans les paysages forestiers étudiés
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
PUBLICATIONS
CONGRES :
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