LE DIMAR AUX XVIII E ET XIX E SIECLES : TRAJECTOIRE D’UN ÉTAT THEOCRATIQUE

Les ouvrages spécialisés

        Nous avons répertorié plus d’une vingtaine d’articles et autant d’auteurs. Deux thèmes sont en général abordés: l’islam et les mouvements sociaux. Les articles relatifs au Fuuta Tooro sont rares. Aucun des autres articles de revues ne traite d’un quelconque événement politique, social ou militaire concernant spécifiquement le Dimatt. Nous avons aussi utilisé directement les travaux inédits ou publiés dans des revues scientifiques telles que le Bulletin de l’IFAN. L’article de O. Kane35 est d’un grand intérêt pour quelqu’un qui s’intéresse à l’histoire politique et administrative du Fuuta. Celui de Ahmed – Baba Miské36, nous permet de mieux comprendre l’organisation sociale de la société des Maures. Les Cahiers des sciences humaines, avec notamment les articles de J. Schmitz nous donnent des informations importantes sur l’histoire sociale des peuples de la vallée. L’article du Journal of African history de D. Robinson relatif à la politique musulmane française en Sénégambie à partir de la première moitié du XIXe siècle38 résume toutes les facettes de la stratégie mise en œuvre par la colonie pour contenir l’avancée de l’islam. Humphreys R. S39. et Yanagihashi H.40, dans des articles publiés dans Working Paper Series of the Islamic Area Studies Project, nous livrent des renseignements sur les tendances récentes des études relatives à l’histoire de l’islam et l’organisation des États islamiques. L’ouvrage de Shaykh Moussa Kamara, Zuhur al basatine, traduit par une équipe dirigée par Jean Schmitz nous a permis d’accéder à cette source monumentale de l’histoire de la vallée du Sénégal

Les modalités d’exploitation des ressources du milieu

        Les communautés locales avaient un cheptel bovin, ovin, caprin, camelin et ânin. Les Fulbe étaient de grands éleveurs de bovins appartenant à l’espèce «bos indicus» appelé bœuf à bosse en référence à la bosse adipeuse sur le garrot. Les chiens et chats étaient élevés pour lutter respectivement contre l’insécurité et les rongeurs très nombreux dans la contrée. Les sédentaires élevaient en priorité le petit bétail, moins encombrant. L’élevage de type extensif, fondé uniquement sur la pâture de la végétation naturelle sur les bords du lac Rkiz, était pratiqué par les Fulbe et Maures semi-nomades. Des milliers d’hectares, constituant une immense réserve fourragère, y étaient disponibles pendant la saison sèche. Les sédentaires isolaient le plus souvent quelques éléments du cheptel qui étaient alors retenus dans un parc situé dans la concession. Le tufundi (quai) permet dans ce milieu amphibie de traverser les cours d’eau. Il existait par exemple sept lieux de traversées (tuffuli) à Dimatt-Jalmac: tufundi Fakkar, tufundi Njulibi, tufundi Gecci, tufungel jaaltabe ou kaggu jane, tufunguel Mammudu Ali, tufundi Langoobe et tufundi Elimaan. Les quais de débarquement et de transit les plus usités et garantis par le  jaaltabe Dimatt étaient le tufundi Gecci et le tufundi jaaltabe79. À ces lieux précis, était garantie la sécurité des personnes et des biens chargés dans les embarcations. Le tufundi, seul lieu autorisé pour la traversée des pasteurs transhumants qui payaient une taxe en nature, était la porte d’entrée dans l’espace fluvio-lacustre. Le jaaltabe, qui en était le principal gérant, ordonnait les périodes de fiifiire (chasse aux caïmans) et indiquait les tronçons du marigot interdits de pêche, etc.81 L’agriculture se déroulait sur le falo ou champ de berges et les kolaade du walo (terrains de culture de décrue). Ces champs sont situés sur les deux rives du fleuve Sénégal et des marigots, sur un espace exigu et convoité. Le falo, terrain généralement très en pente longeant le lit mineur du fleuve,82 abrite plusieurs variétés de cultures : maïs, niébé, courges, citrouilles, patates douces, tomates, tabac… Selon A. Ba, « les Toucouleurs disent falo falotoo ko heege » (le falo empêche la famine)83. Les kolaade du walo très disputés sont partagés entre leurs propriétaires Fulbe, Toorobe, Waylube et Awlube. Les esclaves et les Gallunkobe louaient ou empruntaient un lopin de terrain. Cependant, il y a une exception .Elle a été constituée par une famille gallunke qui avait reçu une donation en terres d’Elimaan Bubakar Kan84. La mise à disposition du falo et des kolaade du walo renseigne sur la hiérarchie sociale et la succession des vagues de peuplement85. Les Toorobe et les Subalbe se partagent presque toutes les parcelles. Un seul falo appartenant réellement aux Waylube a été répertorié à Dimatt. Les Kolaade du jeeri étaient moins disputés que ceux du walo par des villageois qui valsaient entre le nord et le sud. Jaanum Saare, par exemple, était habité par des exploitants agricoles venus du walo86 et élevaient en même temps les chevaux d’Elimaan, utilisés lors des campagnes militaires. Le jeeri ou l’espace de prédation et d’élevage extensif était le lieu de rencontre des cueilleurs de feuilles de baobabs, de fruits, de chasseurs et éleveurs transhumants ou semi-transhumants. C’est un vaste espace dont les limites variaient selon l’importance de la quantité de pluie tombée. La cueillette de la gomme arabique était effectuée dans les forêts du jeeri. L’extraction du matériau de construction des maisons en banco ou de confection d’objets de poteries se faisait sur les dorumaaji. Chaque quartier avait son jinnde (dépotoir d’ordures ménagères)88. Le dow wuro est l’espace utilisé pour se soulager. Chaque quartier utilisait le bois le plus proche. Par exemple, le quartier Fakkar de Dimatt Jalmac avait pour principale destination le Yondol situé à l’est du village, zone dépressive et couverte de végétations. À la périphérie, se trouvaient aussi les cimetières qui reflétaient la ségrégation sociale89.

L’organisation sociale avant le XVIII e siècle

       Des éleveurs de bovins habitués, jusque là, au dudal (aire de parcage du troupeau défini en fonction de la corde à veau et surtout du feu, allumé pendant l’hivernage172) et convertis à l’islam, se sédentarisèrent au XVI e siècle dans le sud mauritanien. Ils envoyèrent leurs progénitures à un autre dudal/daara, c’est à dire «un ensemble humain et un espace concentrique, mais il s’agit du groupe des élèves coraniques, regroupés autour du feu allumé lors de l’apprentissage nocturne» 173. Dans la seconde moitié du XVI e siècle, ils s’installèrent définitivement autour du lac Rkiz174, cohabitèrent avec des noirs sédentaires175 et des blancs transhumants. Dans cet espace géographique ouvert, la vie sociale s’organisait dans le galle/ kër, qui est l’unité familiale de la plus grande cohésion et le cadre de la vie quotidienne.176Le lignage leňol/xeet comprend tous les descendants d’un ancêtre commun suivant la filiation patrilinéaire, chez les Pulaar et matrilinéaire chez les Wolof. Il existait des jom galle/borom kër (patriarche) pour chacun des segments de lignage. Tous les membres portent le nom du lignage comme dernier nom, c’est le yettode/ sant. Chaque concession familiale comprenait plusieurs foyre (ménages). Par extension, le mot galle a pris un sens abstrait en désignant les membres d’un même lignage: les grands parents, les fils, les belles – filles et les petits- enfants. Par exemple, les Kan de Cangay appartiennent au galle Lamin Dowdu177. Les mariages inter-ethniques allaient être un moyen efficace de tisser un puissant réseau lignager. Un chef de village, choisi dans la branche aînée de la famille fondatrice, devait gérer les terres communautaires et régler les litiges fonciers. Il devait aussi organiser l’exploitation des ressources lacustres et pastorales de son territoire, en cas de guerre, recruter et mobiliser les combattants et les mettre à la disposition de Elimaan Dimatt. Il était entouré d’un conseil de notables pour débattre des problèmes importants.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1- Problématique du sujet
2- Revue critique de la littérature
Les sources manuscrites
Les documents d’archives
Les manuscrits privés
Les sources imprimées
Une autre source imprimée : le fonds Faliu
Le Moniteur du Sénégal et dépendances
Les études publiées
Les ouvrages spécialisés
Thèses et mémoires
Les sources orales
Les bandes sonores
3- Méthodologie de l’exposé
PREMIERE PARTIE : LE MILIEU ET SES OCCUPANTS
CHAPITRE I : LE MILIEU ET SES POTENTIALITES ECOLOGIQUES
I – Toponymie et situation géographique
a-Toponymie
b- Situation géographique
II –Relief, climat, sols et végétation
a- Le relief
b- Le climat
c- Les potentialités écologiques
d- Un agenda rural chargé
e– Les modalités d’exploitation des ressources du milieu
Conclusion
CHAPITRE II : AUTOCHTONES ET MIGRANTS
I- Le proto-peuplement
a- Un peuplement qui remonte au néolithique
b- Populations anciennes et intégration
II – Les communautés installées à la fin du XVIIIe siècle
a- Les sources écrites
b- Les sources orales
Des généalogies reconstruites : l’identité en question
Conclusion
CHAPITRE III : SOCIETE ET POUVOIR POLITIQUE
I- Les sociétés en présence
a- L´organisation sociale avant le XVIII e siècle
b- Les groupes sociaux en présence depuis la fin du XVIII e siècle
Le cas des Pulaar
Le cas des Fulbe Wodaabe semi- sédentaires
L’exemple des wolof
L’exemple des Maures
Un groupe social transversal : les captifs
II- La distribution sociale du pouvoir : le cas du Bodangu et de Jalmac
a- Le cas du Bodangu
b- Le politique à Jalmac : un pouvoir partagé
c-Les grands détenteurs de charges
Elimaan Dimatt ou le chef de l’État
Le jagaraf
Le jagodin
Le Jaaltabe
Elimaan Juma
d- Les lieux du pouvoir
Le galle Elimaan Dimatt
Le Galle Sissibe
Le site du pouvoir intérimaire
La forge
Le galle awlube
Conclusion
DEUXIEME PARTIE : LE TULDE DIMATT DE LA CONSTRUCTION A LA CONSOLIDATION DE L´ETAT  FIN XVIII E SIECLE – 1817
CHAPITRE I : LA CONSTRUCTION DE L´ÉTAT
I – Un État marginal construit par la négociation et les alliances
a- La négociation des élites
b- Les alliances entre les élites à la fin du XVIIIe siècle
Cangay, une cité – État
Le cas de Pendaw
Le cas de Fanay
Gaya, un exemple de « l’enclave wolof »
Cile Bubakar
L’exemple de Njaayen Saare
II- Islam et ethnie dans la construction de l’État
a- Un État théocratique
b- Un pouvoir multi- ethnique
III Les fondements de l’État
a – Les fondements de la puissance économique
b- Les fondements de la puissance militaire
L’armée d’un État théocratique marginal
Le boowre gajaate et le tata de Jalmac
c -Les bases institutionnelles de l’État
Le dudal/daara
Le Mbaar jama, le nouvel arbre à palabre
Conclusion
CHAPITRE II : LA CONSOLIDATION DU POUVOIR
I- L’ islam, ses hommes et ses lieux saints comme référents
a- Idéologie de conservation du pouvoir et enjeux des reconstructions identitaires
Une reconstruction identitaire pour magnifier les clercs
b-Les Fulbe Wodaabe et la reconstruction identitaire
II- Se battre ou s’entendre avec les voisins
a- Le contrôle des ressources de la moyenne vallée du Sénégal comme enjeu géopolitique
b- S´allier puis rompre avec le pouvoir almamal
III- Elimaan Bubakar Kan, une figure de légende
a- L’ homme
Un arbre généalogique réinventé ?
Un âge controversé
Une date de décès précise : octobre 1851
b- Elimaan Bubakar Kan, l´artisan de la consolidation du pouvoir clérical
c- Elimaan Bubakar, précurseur de la résistance à la présence coloniale en Sénégambie
Conclusion
TROISIEME PARTIE : LA LUTTE POUR LA PRESERVATION DE L´ORDRE ISLAMIQUE (1807- 1862)
CHAPITRE I : CONTRE TOUTES LES VELLEITES HEGEMONIQUES, (1807-1837)
I- Le Tulde Dimatt face au retour des Français dans le bas fleuve, (1807-1817)
a- Le retour des Français et la montée en puissance du Tulde Dimatt
b- La fin de l’entente cordiale et ses implications
II – De la Bataille diplomatique à la confrontation armée
a- Où implanter les établissements agricoles? Les prémices d’un long conflit, (1818-1819)
b- Le statut de Dagana: une autre menace à la paix
c- Les négociations de Podor et la mise sur pieds d’un front anti-français
d- Le Tulde Dimatt, initiateur de la coalition anti-française (février-mars 1820)
e- Elimaan Bubakar accusé par Saint-Louis d’être manipulé
III – Contre toutes les velléités hégémoniques sur le Waalo (1820- 1837)
a- Le Tulde Dimatt et la volonté hégémonique des Maures
b- L’impact politique des rivalités commerciales
c-Le Tulde Dimatt et le Waalo
d- Elimaan Bubakar s’oppose aux nouvelles offres religieuses et politiques (1828-1830)
IV- Vers la paix définitive ? (1830-1837)
a- Le Waalo hésite entre Mohamed El Habib et Elimaan Bubakar
b-Le mariage de Njëmbët et ses implications géopolitiques (1833)
c- Un outil de consolidation de la paix : les traités de paix (août et septembre 1835)
d- Le traité de paix de Dagana du 10 mars 1837 : une manifestation de la pax franca
Conclusion
CHAPITRE II : S´ALLIER POUR RESTER SUR LA SCENE, (1840-1858)
I- Une alliance circonstancielle avec la France (avril 1840- 1846)
a- Elimaan Bubakar et le changement de la politique française dans le fleuve (1840- 1845)
b- L’octroi d’une coutume à Elimaan Bubakar, un acte en contradiction avec la nouvelle politique de Saint-Louis (avril 1842)
II- Une alliance stratégique avec El Hajji Omar : (1846- 1858)
a- Elimaan Bubakar parraine la nouvelle offre religieuse (1846-1847)
b- Elimaan Saydu scelle un nouveau pacte d’alliance avec le Shayku (1858)
c- L’occupation du Tulde Dimatt par les talibabe Omariens
d – El Hajji Omar au Fuuta Tooro occidental : le triomphe du mouvement de libération nationale islamique
e- El Hajji Omar établit son autorité au Fuuta Tooro occidental : l’enjeu économique et politique
f- Le camp d’observation de Fanay : un bouclier militaire contre l’avancée d’El Hajji Omar vers la Sénégambie occidentale
g-Vers un affrontement ?
Conclusion
CHAPITRE III : DES CONFLITS MAJEURS A LA FIN DE L´ORDRE LEGAL ISLAMIQUE (1854- 1862)
I – Les conflits de 1854 à 1857
a- Elimaan Saïdou face à la nouvelle politique de libération du Sénégal (1852-1857)
b- L’attaque de Jalmac de 1854 : le dénouement logique d’un long contentieux
c- La prise en otage d’un officier de l’armée française (3 mai 1854-08 juillet 1854)
II- Les relations entre le Tulde Dimatt et la France au lendemain de la libération de Lebrun (juillet 1854-décembre 1857)
a- Une nouvelle source de conflit : les désertions de soldats noirs des forts de Podor et Dagana
b- La question de la mobilité méridienne entre les deux rives du Sénégal
III- Les conflits de 1858 à 1859
a- La persistance des menaces de dislocation: Gaya et Boxol annexés par la France (janvier 1858)
b- Le début de la dyarchie (février 1858-août 1859)
c- La consolidation du camp pro-français : le traité du 18 juin 1858
IV- Le dénouement tragique de la dyarchie (1859 – 1862)
a- L’enlèvement d’Elimaan Saïdou et ses implications
b- L’assassinat d’Abdul Booli et ses conséquences politiques
c- L’épilogue de la crise au sommet de l’État
V – La résistance au fait colonial
a- Le Tulde Dimatt et la dépendance
b- Le peuple face à ses nouveaux chefs
c- La population et la perception de l’impôt personnel (janvier 1862)
d- Un autre mouvement de résistance populaire : l’exil des habitants du Dimatt (juillet 1862- août 1862)
Conclusion
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
Pièce annexe I : Liste des Elimaan Cangay selon Abduul Qadir Kan, annotée par M. Sih.
Pièce annexe II : Liste des Elimaan Dimatt aux XVIII e et XIX e siècles reconstituée par la combinaison des sources orales et archivistiques
Pièce annexe III : Traité passé entre Bouët – Willaumez gouverneur du Sénégal et Elimane Bubakar chef du pays du Dimar, aux confins du Tooro, le 05 juillet 1843
Pièce Annexe IV : Le traité de paix conclu à Saint – Louis le 18 juin 1858 avec Elimane Abdoul Boly du Dimar
PIECE ANNEXE V : Les patronymes de Fanay et leurs origines
PIECE ANNEXE VI : Le Fuuta occidental et le fergo omarien : Liste des jambar compagnons de Shayku Omar originaires de Fanay (Source Mamadou Bakadié Ly)
PIECE ANNEXE VII : Liste des Elimaan Fanay (Source Mamadou Bakadié Ly)
DOCUMENTATION
I- SOURCES ÉCRITES
II -SOURCES ORALES
III- DOCUMENTS D’ARCHIVES
INDEX

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