Le diabète de type 1
Physiopathologie du diabète de type 1
Le diabète de type 1 est dû à une réaction auto-immune qui entraîne la destruction des cellules Béta (= cellules insulinosécrétrices), consécutive à l’infiltration de lymphocytes T helper CD4 et T cytotoxiques CD8 dans les îlots de Langherans du pancréas. Au cours de cette réaction, des auto-anticorps sont produits : auto anticorps anti-insuline, anti-îlots (ICA,) anti-GAD et anti-IA2, dirigés contre certains antigènes pancréatiques, principalement les antigènes insuline et pro-insuline, GAD (décarboxylase de l’acide glutamique) et IA2 (islet antigen number 2 apparenté à une tyrosine phosphatase). Cette destruction peut se dérouler à bas bruit pendant de nombreux mois, elle est asymptomatique, elle est aussi appelée phase de latence ou insulite. S’en suit une phase de pré-diabète, toujours asymptomatique. Celle-ci aboutit ensuite au diabète de type 1, symptomatique, lorsqu’il ne reste plus que 10 à 20 % des cellules Béta fonctionnelles, l’insulinémie étant insuffisante pour maintenir des valeurs de glycémies normales (Schémas 1 et 2). Dans 10 à 15% des cas, le diabète de type 1 est associé à une autre maladie autoimmune et dans 30% des cas il est associé à des anticorps spécifiques d’organes, ce qui le fait entrer dans le cadre des syndromes poly-endocriniens auto-immuns [9 ; 10 ; 11].
Ce processus auto-immun apparaît sur un terrain de susceptibilité génétique, déclenché par des facteurs environnementaux.
– La prévalence du diabète de type 1 dans la population générale est de 0,3 %, elle passe à 5 % si un membre de la fratrie est atteint et de 30 à 70 % pour un jumeau homozygote [12]. Elle est oligogénique. Les principaux gènes de prédisposition appartiennent au complexe majeur d’histocompatibilité (CMH). Il s’agit de différents antigènes de classe 2 appelés HLA (human leukocyte antigen) : HLA-DR3, – DR4, – DQB1*0201 et DQB1*0302 (il existe aussi des HLA protecteurs DR2 DQ W1-2 DQB1*0602) [9] [10] [11].
– L’existence des facteurs environnementaux est suggérée par le fait que le taux de concordance pour la maladie chez les jumeaux monozygotes n’est que de 30 à 70 % [12] et que l’incidence du diabète de type 1 augmente à une vitesse plus rapide que celle d’une pathologie qui serait causée par une éventuelle sélection génique [9].
Il y a plusieurs hypothèses quant à l’existence de facteurs environnementaux dans l’apparition du diabète de type 1 :
● Hypothèse infectieuse
De nombreux virus ont été incriminés sans preuve formelle : coxsackies, cytomégalovirus (CMV), virus de la rubéole, virus des oreillons. Certaines études montrent une augmentation des infections virales dans l’année précédant le diagnostic du diabète [13 ; 14] (Schéma 3). Dans une étude réalisée en 2006, un épisode infectieux fébrile a été noté dans les 42 jours précédant le diagnostic de diabète, pour 18 % des patients [15].
● Hypothèse alimentaire
Selon une étude Finlandaise, publiée en 1998, qui a analysé les cas de diabète en fonction du type d’allaitement, l’introduction des protéines de lait de vache avant 4 ans engendrerait un taux plus élevé de diabète de type 1 [16]. Mais d’autres études ont été réalisées, celles-ci ne montrant aucun effet de l’introduction des protéines de lait de vache avant 4 ans sur l’incidence du diabète [17]. D’autres études suggèrent que l’introduction précoce des céréales pourrait être en cause, et ainsi engendrer un taux plus élevé de diabète de type 1 [18].
● Hypothèse concernant la vitamine D
La carence en vitamine D semble être une piste intéressante, et ainsi expliquerait le gradient Nord – Sud dans la prévalence du diabète de type 1 retrouvé dans l’étude Eurodiab, qui montre une prévalence plus forte dans les pays moins ensoleillés [19 ; 20].
Epidémiologie du diabète de type 1 chez l’enfant et l’adolescent
En France, il était jusqu’à très récemment difficile de connaitre l’incidence du DT1, car la référence pour estimer l’incidence de cette pathologie est un registre. Or le dernier registre que nous possédons se basant sur 4 régions représentatives de la population française a été réalisé entre 1988 et 1997. Depuis, il n’existe que 3 registres régionaux : Aquitaine, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon sur lesquels nous pouvons déduire un taux d’incidence national de DT1 valable. Un autre est en construction : celui du Grand-Ouest. Dans cette situation, les données de la CPAM fournissent des informations intéressantes : en 2013, 19 217 enfants et jeunes adultes de moins de 20 ans étaient pris en charge au régime général de la Sécurité Sociale pour un diabète de type 1. Sachant que 90 % de la population est couverte par ce régime général, on pouvait évaluer à 21 000 le nombre de patients diabétiques de moins de 20 ans en France en 2013, mais ces informations restent minces. A partir de ce constat, une étude a été réalisée récemment pour analyser l’évolution de l’incidence du diabète de type 1 chez l’enfant et l’adolescent en France entre 2010 et 2015 à partir des données du SNIIRAM (Système National d’Information Interrégimes de l’Assurance Maladie) et du PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information), représentatives de 98 % de la population française [24]. Celle-ci met en évidence une augmentation du taux d’incidence du DT1. Entre 2010 et 2015, le taux d’incidence du diabète de type 1 a augmenté de 15,4 à 19,1 pour 100 000 habitants par an. L’incidence nationale était à 18/100 000 entre 2013 et 2015 (Figure 2).
La croissance annuelle moyenne du taux d’incidence entre 2010 et 2015 était de 3,71 % (3,69 % chez les garçons et 3,73 % chez les filles). Elle était de 3,2 % chez les enfants de 6 mois à 4 ans (2,6 % chez les garçons, 3,9 % chez les filles), 3,4 % chez les enfants 5 à 9 ans (4,4 % chez les garçons, 2,3 % chez les filles) et 4,1 % chez les enfants de 10 à 14 ans (3,5 % chez les garçons et 4,8 % chez les filles) .
Les différentes études menées prévoient une poursuite de l’augmentation de l’incidence. Selon les projections d’EURODIAB, on peut même s’attendre à un doublement de l’incidence entre 2005 et 2020 et tout particulièrement chez les moins de 5 ans [18 ; 25 ; 26]. Les autres études réalisées à échelle régionale montrent la même tendance [27 ; 28 ; 29]. Le taux d’incidence national estimé par l’étude [24] réalisée entre 2010 et 2015, était de 19,1 pour 100 000 chez les enfants de 6 mois à 14 ans en 2015, soit beaucoup plus élevé que celui du registre national de diabète de type 1 de 1997, qui était de 9,6 pour 100 000 chez les enfants de 0 à 19 ans [28]. Il est également plus élevé que les estimations de deux registres français régionaux : 13,4 en 2004 en Aquitaine [29] chez les enfants de 0 à 14 ans et 16,8 en 2005 en Languedoc-Roussillon chez les enfants de 0 à 15 ans [30]. Ce qui est en accord avec l’estimation d’une augmentation du taux de croissance annuel moyen du taux d’incidence de 3,7 % par an.
Le diagnostic de diabète de type 1 chez l’enfant et l’adolescent
Symptômes cliniques devant faire suspecter un diabète de type 1
Chez l’enfant et l’adolescent, selon l’ISPAD [31 ; 32] :
– Début rapide (quelques semaines) ou explosif « coup de tonnerre dans un ciel serein »
– Syndrome cardinal : polyuro-polydipsie
– Hyperphagie
– Douleurs abdominales
– Enurésie nocturne chez un enfant habituellement « propre » .
Définition biologique du diabète de type 1
Selon l’ISPAD [9 ; 32] :
– Glycémie à jeun > 1,26 g/l (7 mmol/l) ou glycémie à n’importe quel moment de la journée > 2 g/l (11,1 mmol/l) ou glycémie veineuse supérieure à 2 g/l ou 11,1 mmol/l, 2 heures après la prise de 1,75 mg/kg (max 75 g) d’anhydrate de glucose dissous dans de l’eau lors d’une épreuve d’hyperglycémie provoquée orale
– Glycosurie seule ou glycosurie associée à une cétonurie sur une bandelette urinaire
Complications aiguës du diabète de type 1
L’acidocétose diabétique
Soixante-cinq pour cent des ACD sont inaugurales d’un diabète, les autres cas d’ACD sont dus à des erreurs thérapeutiques telles que le sous-dosage voire l’arrêt de l’insulinothérapie chez des enfants diabétiques connus [33 ; 34 ; 35 ; 36].
L’hypoglycémie
L’hypoglycémie est une complication aigüe fréquente chez les patients diabétiques connus, traités [37]. Nous ne la traiterons pas ici, car elle n’a pas sa place dans le diagnostic de DT1.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. LE DIABETE DE TYPE 1 CHEZ L’ENFANT ET L’ADOLESCENT ET SES COMPLICATIONS
A. Le diabète de type 1
1. Physiopathologie du diabète de type 1
2. Epidémiologie du diabète de type 1 chez l’enfant et l’adolescent
B. Le diagnostic de diabète de type 1 chez l’enfant et l’adolescent
1. Symptômes cliniques devant faire suspecter un diabète de type 1
2. Définition biologique du diabète de type 1
3. Complications aiguës du diabète de type 1
4. Conduite à tenir devant une suspicion de DT1
C. L’acidocétose
1. Physiopathologie de l’acidocétose
2. Signes cliniques de l’acidocétose
3. Définition biologique de l’acidocétose
4. Complications de l’acidocétose
5. Epidémiologie des complications aiguës
D. Mortalité liée au diabète chez l’enfant
E. Les campagnes de prévention de l’ACD
1. Campagne Italienne
2. Campagne nationale française
III. MATERIEL ET METHODE
A. Enquête auprès des médecins généralistes
1. Population étudiée
2. Recueil de données : questionnaire
3. Analyse des données
B. Les diagnostics de DT1 chez les enfants du département du Vaucluse de 2010 à 2016
1. Population étudiée
2. Recueil de données
3. Analyse des données
IV. RESULTATS
A. Enquête auprès des médecins généralistes
1. Caractéristiques de l’échantillon
2. Connaissances des médecins généralistes du Vaucluse sur le diabète de type 1
B. Les découvertes de DT1 chez les enfants du département du Vaucluse de 2010 à 2016
1. Caractéristiques de la population étudiée
2. Les signes cliniques présents au diagnostic
3. Le diagnostic
4. Fréquence et sévérité de l’ACD
5. La prise en charge
6. Recherche de facteurs influençant l’apparition d’une acidocétose
7. Cas particulier d’un enfant décédé
V. DISCUSSION
A. Enquête auprès des médecins généralistes du Vaucluse
1. Les différents biais
2. Le diabète de type 1 de l’enfant et l’adolescent en médecine générale et ses difficulté
B. Les découvertes de diabète de type 1 chez les enfants du Vaucluse de 2010 à 2016
1. La population étudiée
2. Symptomatologie du diabète
3. La prise en charge
4. Acidocétose
VI. CONCLUSION