LE DEVENIR DE LA TECHNIQUE EN MILIEU PAYSAN

LE DEVENIR DE LA TECHNIQUE EN MILIEU PAYSAN

De L’ IMPACT DE LA POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT HEVEICOLE Ali DEVENIR DE LA MONOCULTURE CLONALE EN MILIEU PAYSAN

Depuis le début du 20ieme siècle, la demande en caoutchouc naturel sur le marché mondial n’a cessé de croître. D’un peu plus de 50000 tonnes en 1900. la consommation mondiale de cette matière première est passée à presque 7 millions de tonnes en 1999. La tendance doit se poursuivre encore dans les années à venir : le marché du caoutchouc naturel est important et continue son expansion malgré la concurrence du caoutchouc synthétique. L’hévéa (hevea brasiliensis) est une plante forestière originaire du bassin amazonien où elle faisait de longue date l’objet de cueillette ; la production était faible. A la fin du 19’emc siècle, à la suite de l’intervention des anglais qui souhaitaient ainsi prévenir une éventuelle pénurie de caoutchouc, l’hévéa a commencé à être cultivé dans les pays d’Asie du Sud Est et notamment en Indonésie. Le développement des plantations d ’hévéas dans cette région du monde a permis une nette augmentation de la production globale. En 1995. 94% du caoutchouc naturel consommé dans le monde provenaient de l’Asie du Sud Est. Les trois pays principaux producteurs sont la Thaïlande. l’Indonésie et la Malaisie. En 1995. à lui seul, l’archipel indonésien produisait 26% du caoutchouc naturel mondial. A la même époque, il représentait 34% des surfaces plantées en hévéas dans le monde (données IRSG1). Ainsi, même si en 2000. l’Indonésie conserve sa deuxième place de producteur mondial de caoutchouc naturel derrière la Thaïlande, ces deux chiffres suffisent à mettre en évidence une productivité des plantations d’hévéas indonésiennes globalement faible2. L’essentiel de la production mondiale de caoutchouc naturel est issu des plantations paysannes, principalement développées en Asie : en 1996. ces plantations représentent 78% des surfaces et 81% de la production (données IRSG). D’une façon générale, au sein du secteur hévéicole. on distingue les plantations paysannes des plantations industrielles encore appelées grandes plantations. Les premières sont des exploitations familiales qui mettent en valeur des surfaces restreintes, en moyenne 2 ou 3 hectares, en utilisant principalement de la main d’œuvre familiale. Les plantations industrielles sont gérées par l’Etat ou par des grands groupes privés. Elles exploitent des surfaces beaucoup plus étendues, au minimum 40 hectares ; elles ont. de ce fait, nécessairement recours à de la main d’œuvre salariée. En Indonésie, les plantations industrielles ont été développées par les colons hollandais, parfois aussi par d’autres occidentaux comme par exemple les américains. La population autochtone était employée comme main d’œuvre dans ces plantations. Par contre, les plantations paysannes ont été mises en place spontanément par les populations indigènes, à l’origine, en dehors des zones d’influence des grandes plantations. Pendant très longtemps, aucune relation n’était établie entre les deux types d’exploitation, même lorsque des plantations paysannes ont par la suite été développées à proximité des grandes plantations. Avec presque 3 millions d’hectares en 1996. les plantations paysannes représentaient 85% des surfaces hévéicoles et assuraient 76% de la production indonésienne de caoutchouc naturel (BPS. 1997). Elles sont largement responsables de la faible productivité globale des plantations d’hévéas. En effet, elles produiraient environ 600 kg/ha/an de caoutchouc sec’ quand les grandes plantations ont un rendement qui varie entre 1000 et 1200 kg/ha/an selon qu’elle sont publiques ou privées. La faible production des plantations paysannes s’explique en grande partie par les méthodes culturales mises en œuvre par les petits planteurs. Ces méthodes n’ont subi que des modifications mineures depuis que l’hévéa a commencé à être cultivé par les populations indigènes des îles de Sumatra et de Bornéo. L’agroforêt à hévéas (« jungle rubber » en anglais ou « hutan karet » en indonésien littéralement traduit par forêt à hévéas) est le système de culture hévéicole traditionnel des petits planteurs indonésiens. C’est un système de culture agroforestier – comme son nom l’indique – et extensif. Il est caractérisé par l’utilisation de matériel végétal local donc facilement accessible, par la faible mobilisation de main d’œuvre limitée à la mise en place et à l’exploitation des arbres et par l’absence de fertilisation ou de tout autre traitement chimique que ce soit avant ou après la mise en saignée des hévéas. Par conséquent, le potentiel d’accroissement de la production de caoutchouc naturel en Indonésie reste important, surtout au niveau des petits planteurs. Depuis la première moitié du 20ieme siècle, les chercheurs comme les planteurs ont reconnu que la meilleure façon d’améliorer la productivité des plantations d’hévéas est d’utiliser du matériel végétal greffé qui limite fortement la variabilité de production : les clones. Les méthodes culturales permettant d ’optimiser le potentiel de production de ce type de matériel végétal ont rapidement été développées. La monoculture clónale, un système de culture intensif assurant un haut niveau de productivité des facteurs de production, particulièrement de la terre et du travail, est devenue le modèle technique dominant dans les grandes plantations. Le système de culture a été spécifiquement mis au point pour ce type d’exploitation . En Indonésie, la monoculture clónale est longtemps restée l’apanage des grandes plantations. Pendant plusieurs décennies, les plantations paysannes ont en effet été écartées de l’avancée technique que constituait le matériel végétal greffé. Lorsqu’ils étaient localisés à proximité des plantations industrielles, les petits planteurs ont parfois spontanément emprunté certaines méthodes culturales propres à la monoculture clónale. Mais, il leur était difficile, voire impossible d’adopter seuls les clones qui représentent pourtant l’élément déterminant pour améliorer la production des plantations. La grande majorité des petits planteurs a d’ailleurs continué à mettre en place des agroforêts à hévéas ; elles restent jusqu’à présent le système de culture de base de la grande majorité des exploitations hévéicoles paysannes. Ce dualisme opposant les plantations industrielles avec leurs méthodes culturales modernes et intensives aux plantations paysannes mettant en œuvre des systèmes de culture faiblement productifs a longtemps caractérisé le secteur hévéicole en Indonésie. Il a été mis en évidence dès les années 1950 (Boeke, 1953). Issu de la colonisation, il s’est maintenu bien après l’indépendance de l’archipel (proclamée en 1945 et effective en 1949). Pourtant, à partir des années 1950. le gouvernement indonésien a démarré ses premières interventions d’aide au développement de Fhévéaculture paysanne cherchant ainsi à diminuer le dualisme du secteur hévéicole. Dans un premier temps, hésitant encore « entre assistance et répression » (Gouyon. 1995a), les pouvoirs publics n’ont pas fait diffuser les clones auprès des petits planteurs. De 1950 à 1973, l’intervention prend ainsi la forme d’une distribution individuelle de matériel végétal amélioré mais non greffé accompagnée d’un peu de vulgarisation (Barlow. 1991b). Cette intervention n’a eu que peu d’incidence sur les petits planteurs. La raison souvent évoquée est la faiblesse des moyens employés compte tenu de l’ampleur de la tâche à réaliser. Depuis le début des années 1970, les pouvoirs publics indonésiens ont entrepris plusieurs programmes de transfert de la monoculture clónale en milieu paysan. Désormais, exceptés un ou deux cas particuliers, seul le clone est utilisé lors des interventions du gouvernement en faveur de l’hévéaculture paysanne. Les moyens mobilisés et les populations cibles sont variés mais le modèle technique transféré est unique. Deux grands types de projet ont été développés en Indonésie. Les premiers apportent une assistance technique et financière à crédit pour l’établissement et l’entretien jusqu’à l’entrée en production (au bout de 6 ans) d’un ou deux hectares de plantation clónale. Ce sont les projets en approche complète ; il en existe deux sortes présentant quelques différences dans les modalités d’intervention. Les seconds appelés projets en approche partielle aident les paysans gratuitement mais pendant un an seulement pour planter et entretenir un hectare de clones ; parfois, les interventions visent simplement à faciliter l’accès des paysans au matériel végétal greffé en leur donnant les moyens de le produire eux-mêmes. Tous ces programmes de transfert de la monoculture clónale aux petits planteurs, particulièrement les projets en approche complète, ont eu un impact globalement positif sur les paysans. Mais, il est limité d’un point de vue quantitatif. En 1999. seulement 20% des exploitations paysannes hévéicoles ont participé à un projet de développement. De plus, même s’ils ont largement contribué à diffuser la monoculture clonale en milieu paysan, une proportion non négligeable de plantations ainsi établies ont des résultats techniques en dessous des standards attendus. Malgré presque trente années d ’intervention impliquant d’importants investissements, le gouvernement indonésien n’est pas parvenu à éliminer le dualisme existant au niveau du secteur hévéicole. C’est ce succès, relatif seulement, que note la plupart des chercheurs qui se sont intéressés aux programmes de transfert de la monoculture clonale en milieu paysan et, d’une façon plus générale, à l’ensemble des interventions des pouvoirs publics indonésiens en faveur de l’hévéaculture paysanne. « Les projets hévéicoles sont sévèrement critiqués. Pour certains d’entre eux. les effets directs sur les exploitations sont douteux: les gains de productivité sont insuffisants en regard des sommes engagées, la rentabilité du projet est faillie voire nulle » (Gouyon. 1995a; p 252). En réalité, ces critiques s’adressent aux projets de développement qui mobilisent des moyens humains et financiers importants. Les projets en approche partielle n’ont pas vraiment été étudiés, certainement du fait qu’ils ont été développés pour la plupart bien plus récemment et ont touché un nombre beaucoup plus limité de paysans. A notre connaissance, jusqu’à présent, aucune étude n’a tenté de mesurer et d’analyser l’impact de la politique de développement hévéicole de façon globale. Pourtant, compte tenu de la diversité des formes d’intervention mises en œuvre par les pouvoirs publics indonésiens, il semble pertinent de s’interroger sur la manière dont elles ont pu déterminer le comportement des paysans vis à vis de la technique proposée. Bien que les interventions du gouvernement indonésien en faveur de Fhévéaculture paysanne aient débuté dans les années 1950, la thèse étudie seulement la période 1973-1999. Notre travail de recherche se focalise sur les programmes de transfert de la monoculture clónale. En effet, dans les conditions que nous avons précédemment décrites (demande en caoutchouc naturel croissante sur le marché mondial, rendement des plantations paysannes faible et possibilité de l’améliorer en modifiant les méthodes culturales), l’adoption de la monoculture clónale, ou du moins des clones, par les petits planteurs revêt un caractère fondamental. F ‘intérêt économique d’un accroissement de la productivité des plantations paysannes est accentué, au niveau national, par une pression foncière croissante dans les zones productrices de caoutchouc en Indonésie, nécessitant à terme l’intensification des systèmes de culture hévéicoles. Par ailleurs, depuis les années 1970. le coût de la vie s’est fortement accru obligeant les petits planteurs à améliorer leurs revenus afin de maintenir leur niveau de vie. Et surtout, la rémunération de la main d’œuvre par les agroforêts à hévéas est devenue insuffisante. Compte tenu de sa faible production et du renchérissement de la main d’œuvre, le système de culture n’est plus compétitif. Sur le plan international aussi, l’accroissement de la production de caoutchouc naturel indonésien est parfaitement justifié. La Thaïlande et la Malaisie qui représentent sur ce marché les principaux concurrents de l’Indonésie n’ont qu’une marge relativement limitée pour améliorer leur production et donc faire face à une demande en caoutchouc naturel croissante. En effet, ces deux pays ont démarré les programmes de replantation des plantations paysannes en clones bien avant l’Indonésie ; les interventions développées ont globalement réussi. De ce fait, actuellement, 80% des plantations paysannes en Thaïlande et 95% en Malaisie ont déjà été replantées en clones (Penot, comm. perso.). Par ailleurs, la Malaisie se tourne depuis plusieurs années vers d’autres cultures de rente (palmier à huile notamment) et d’autres sources de revenu (industrie). Ainsi, dès le début des années 1980. les surfaces plantées en hévéas baissent régulièrement et. à partir de 1988. la production malaise de caoutchouc n’a cessé de diminuer. Cela libère des parts sur le marché international du caoutchouc naturel auxquelles l’Indonésie peut légitimement prétendre. Mais pour cela, il lui est indispensable d’améliorer sa compétitivité en la productivité des plantations paysannes d’hévéas.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : DIFFUSION ET APPROPRIATION PAR LES
PAYSANS DE LA MONOCULTURE CLONALE D’HÉVÉAS
CHAPITRE 1 – L’HISTOIRE DU DEVELOPPEMENT DE LA MONOCULTURE
CLONALE D ’HEVEA EN INDONESIE
CHAPITRE 2-LE ROLE DES POUVOIRS PUBLICS
CHAPITRE 3 – LE DEVENIR DE LA MONOCULTURE CLONALE A LA LUMIERE
DES ANALYSES EVOLUTIONNISTES
DEUXIEME PARTIE : LE DEVENIR DE LA TECHNIQUE EN MILIEU
PAYSAN
CHAPITRE 4 – LES METHODES D ’ENQUETE ET D’ANAL YSE
CHAPITRE 5 – CONTEXTE ECONOMIQUE ET CHANGEMENT DES
TECHNIQUES HEVEICOLES
CHAPITRE 6 – MONOCULTURE CLONALE D’HEVEAS ET SOCIETES
PAYSANNES
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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