Bien que souvent décrite comme douce et veloutée, lisse et parfumée, et même « à croquer », la peau du bébé est d’abord une peau dont la structure est tout à fait semblable à celle de tous les êtres humains. Mais c’est aussi un organe en cours de formation, pas tout à fait mature, plus fragile et plus sensible, aux caractéristiques spécifiques durant les premières années de vie. Cette peau peut être affectée d’évènements bien particuliers (érythème fessier, croûtes de lait…) et demande alors des soins et des produits adaptés à ses besoins.
Le marché de la dermo-cosmétique pour bébés est très concurrentiel et en perpétuelle évolution. Des dizaines de nouveaux produits se développent chaque année pour satisfaire les besoins de cette population enfantine, tandis que d’autres disparaissent. Le développement d’un produit dermo-cosmétique destiné au jeune enfant a pour vocation essentielle de prolonger l’équilibre physiologique naturel, sans modifier les fonctions de l’organisme. Et ce, dans le respect de l’écosystème cutané. De plus, la formulation d’une émulsion dermo-cosmétique est orientée par : la fonction prévue et les effets souhaités du produit, la facilité d’utilisation (influençant la galénique) et les propriétés sensorielles recherchées (imposant le sens de l’émulsion et le choix de certains ingrédients). Il est évident que les parents souhaitent le meilleur pour leur enfant. Ils exigent une qualité et une sécurité irréprochables des produits qu’ils appliquent sur la peau de ces derniers. Mais comment sont-ils sûrs que le produit mis sur le marché est parfaitement «safe» et approprié à la peau de leur bébé ? L’espoir misé sur le produit, par le fabricant industriel, est-il retrouvé à l’officine ? Les conseils du pharmacien suivent ils le même raisonnement ?
Les principes primordiaux de rigueur et de sécurité de la Réglementation Européenne doivent être respectés lors du développement d’un produit cosmétique et plus particulièrement lorsque celui-ci est destiné à l’enfant. Différent du médicament, le produit dermo-cosmétique n’a pas besoin d’une autorisation de mise sur le marché pour être commercialisé. La mise en place du Règlement cosmétique européen 1223/2009, en application depuis le 11 Juillet 2013, a notamment imposé aux industriels du marché cosmétique d’assurer l’innocuité des produits qu’ils commercialisent. De plus, une réglementation spécifiquement adaptée à la population enfantine, permet une évaluation poussée de la sécurité des ingrédients et des produits finis. Aussi, de nombreuses recommandations de l’Agence Nationale pour la Sécurité du Médicament et des produits de santé, concernant les enfants de moins de trois ans, ont été élaborées.
LE PRODUIT DESTINE A L’ENFANT ET SA REGLEMENTATION
ETAT DES LIEUX ET CONSOMMATION DES PRODUITS DESTINES A L’ENFANT
Directement corrélée à la progression des naissances, la vente des produits de soin et d’hygiène pour bébés est à la baisse ces dernières années car la tendance démographique française est négative. Cependant, le marché français des produits pour bébés essaye tant bien que mal de tirer son épingle du jeu, que ce soit en Grandes et Moyennes Surfaces (GMS) ou en pharmacies.
Secteurs de distribution
Plusieurs secteurs de distribution se partagent le marché des produits pour bébés. Même si les mamans sont considérées assez « zappeuses », car elles achètent leurs produits dans plusieurs circuits de distribution, la pharmacie reste le circuit de première intention quand elles sortent de la maternité.
Grandes et moyennes surfaces
Facile d’accès et offrant des prix bas, le secteur GMS est le leader de la distribution des produits cosmétiques pour bébés. Ainsi, deux tiers des volumes de vente ont lieu en grandes surfaces. Cependant, la catégorie hygiène pour bébés commence à peiner dans ce secteur. Celui-ci doit faire de plus en plus face à la concurrence des pharmacies et parapharmacies. Pour retrouver la croissance, les marques rassurent et jouent la proximité. Mais la grande distribution investit massivement le circuit des parapharmacies (E.Leclerc, Monoprix, Carrefour, etc.) qui conquiert des parts de marché, au détriment des enseignes historiques, comme Parashop. Le développement de la grande distribution sur le marché de la parapharmacie est d’autant plus ambitieux qu’il mêle une politique soutenue de croissance du parc de magasins et le passage à de nouveaux concepts, plus attractifs, dont les codes se rapprochent de ceux de l’officine.
Concernant la publicité en GMS, les dispositifs plurimédias sont fréquents. Des partenariats avec des coffrets naissance, des salons pour la maternité et des numéros d’appel de soutien et d’écoute pour les jeunes parents sont largement répandus. Parallèlement, des campagnes presse et télévision sont retrouvées afin de conserver les valeurs des GMS : « proximité, partage et complicité ». Un ton ludique et rassurant est souvent employé dans les spots télévision. Des campagnes d’échantillonnage auprès des mères et des sages-femmes, en maternité et en crèche, ont également lieu.
Pharmacies et Parapharmacies
Face à la GMS, la pharmacie n’hésite pas à tirer avantage de son atout, connu et reconnu : le conseil. Le pharmacien, bénéficiant d’un capital confiance, est particulièrement bien placé pour orienter et aider la maman dans ses achats. Les garanties de qualité, sécurité et efficacité de ses produits tendent à amener, en première intention, les parents vers les pharmacies. La pharmacie c’est aussi la prouesse médicale. On y trouve des produits de plus en plus pointus, à vocation très spécifique. Plusieurs marques ont établi de nouvelles gammes à haute visée dermatologique, répondant aux problèmes précis de la peau des tout-petits. Certains produits particuliers, comme ceux contre la dermatite atopique, ne se trouvent d’ailleurs que dans les officines.
De nombreux brevets concernent des actifs et des ingrédients novateurs et efficaces, issus de la recherche active dans ce domaine. Les tests de tolérance et d’efficacité sont extrêmement suivis et les seuils d’acceptabilité de plus en plus sévères. Le choix, la qualité et la quantité des ingrédients utilisés sont fortement réglementés par les autorités de santé. L’officine investit massivement le marché des produits de parapharmacie via le développement de marques propres, aux prix compétitifs et à l’image « médicale ». Par ailleurs, la guerre des prix avec la grande distribution est déclarée avec la place croissante de certaines enseignes de pharmacies positionnées sur les prix bas ou les concepts « discount ». La modernisation de l’officine est en marche.
Autres secteurs
Les magasins bio
Une autre tendance, en écho direct de la cosmétique dans sa globalité, c’est le «bio ». Ce mouvement surfe sur la vague très porteuse du respect de soi, de l’environnement, de la nature et des autres. En France, le marché des cosmétiques naturels et « bio » croît de plus de 30% par an mais ne représente que 3% du marché global des cosmétiques. Les biocosmétiques concernent presque tous les types de produits et notamment les produits pour bébés. Certaines sociétés s’y sont récemment lancées tandis que d’autres ont parié sur le naturel et le bio, depuis de très nombreuses années. C’est le cas notamment du laboratoire Cattier®, pionnier dans ce domaine. De son côté, Weleda®, spécialiste de la phytocosmétique depuis plus de 80 ans, a investi le segment bébé il y a une quinzaine d’années. Conformément à sa charte qualité, les produits pour bébés Weleda® ne contiennent ni huile minérale, ni additif chimique, ni colorant, ni émulsifiant conventionnel ou parfum de synthèse. Le laboratoire Sanoflore® propose quant à lui, une gamme bébé bio qui comporte quatre références, composées de 70 à 94 % d’ingrédients bio. Les marques Weleda® et Sanoflore® sont également retrouvées en pharmacie et parapharmacie.
Il faut faire attention cependant aux formulations « bio » pour bébés. En effet, elles ne contiennent pas de conservateur ou des systèmes de conservation problématiques ou contestables (acide salicylique, alcool benzylique). La durée d’utilisation après ouverture devrait donc être très courte, ce qui n’est pas toujours le cas. Ces formules ne sont pas toujours présentées dans des conditionnements adéquats et sécurisants ; comme les flacons airless (VG Emballage). Ces derniers sont des systèmes d’emballage permettant de protéger la formule de l’air et de réduire le taux d’agents conservateurs. Les formulations sont aussi souvent riches en huiles essentielles, ce qui est déconseillé sur les peaux fines et sensibles et chez le jeune enfant. Or, les soins composés d’ingrédients 100% naturels revendiquent offrir sécurité et plaisir d’utilisation. Il est donc certain que ce mouvement va encore se développer, d’autant que les mamans cherchent toujours, on le comprend bien, le meilleur pour leurs bébés.
La vente en ligne
De nombreuses marques de produits cosmétiques sont en vente sur le web. Pas de locaux, peu de personnels, ce secteur de distribution commence à tirer son épingle du jeu, surtout chez les jeunes. Choisir ses produits chez soi et les recevoir directement à son domicile font le bonheur de nombreuses mamans de la « nouvelle génération ». C’est le cas d’Etat Pur®, nouvelle marque française en vente sur le web, ainsi que dans un seul concept-store (Paris 6ème). La recette d’Etat Pur® : un aspect pharmaceutique avec peu d’ingrédients dans ses formules et un packaging sobre, sur un site internet attractif, avec une présence dans les réseaux sociaux. Ces produits ont la grande particularité d’avoir des formules biomimétiques, c’est-à-dire conçues sur le modèle biologique de la peau, pour une tolérance et un respect maximum (Mum to be party). Le dynamisme de la vente en ligne de produits de parapharmacies suscite les convoitises des acteurs du secteur. Confrontés à un recul durable des ventes de médicaments remboursables, les pharmaciens doivent impérativement trouver de nouveaux relais de croissance en développant des marchés moins exposés aux mesures de régulation économique. Le développement de la vente en ligne combinant parapharmacie et automédication constitue à l’avenir l’un des moteurs de la croissance du réseau officinal. Les autres acteurs de la parapharmacie ne sont pas en reste : E.Leclerc®, par exemple, a pénétré ce circuit en 2013.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I LE PRODUIT DESTINE A L’ENFANT ET SA REGLEMENTATION
1. ETAT DES LIEUX ET CONSOMMATION DES PRODUITS DESTINES A L’ENFANT
1.1 Secteurs de distribution
1.1.1 Grandes et moyennes surfaces
1.1.2 Pharmacies et Parapharmacies
1.1.3 Autres secteurs
1.1.3.1 Les magasins bio
1.1.3.2 La vente en ligne
1.2 Chiffres et consommation
1.2.1 Part de marché des cosmétiques pour bébés en GMS
1.2.2 Part de marché des cosmétiques pour bébés en pharmacie
2. DIFFERENTS TYPES DE PRODUITS DESTINES A L’ENFANT
2.1 Produits d’hygiène
2.1.1 Produits rincés
2.1.2 Produits non rincés
2.1.3 Cas des lingettes
2.2 Produits de soins quotidiens
2.2.1 L’hydratation du corps et du visage
2.2.2 Le change
2.3 Produits de soins spécifiques
2.3.1 Les soins pour peaux très sèches à tendance atopique
2.3.2 Les soins de l’érythème fessier
2.3.3 Les soins des croûtes de lait
2.3.4 L’huile de massage
3. REGLEMENTATION DES PRODUITS DERMO-COSMETIQUES
3.1 Le Règlement Cosmétique européen
3.1.1 Définition du produit cosmétique
3.1.2 Législation du produit cosmétique
3.1.2.1 Le Dossier d’Information sur le Produit
3.1.2.2 La notification à la Commission Européenne
3.1.2.3 L’étiquetage du produit cosmétique
3.1.2.4 La durée d’utilisation du produit cosmétique
3.1.2.5 Les annexes du Règlement Cosmétique
3.1.3 Évaluation de la sécurité
3.1.4 Réglementation des produits destinés à l’enfant de moins de trois ans
3.1.4.1 État des lieux de la réglementation
3.1.4.2 Recommandations pour l’évaluation de la sécurité des produits cosmétiques
3.1.4.3 Évaluation spécifique de la sécurité des ingrédients et produits finis
3.2 Recommandations visant la communication des produits cosmétiques
3.2.1 Protection du consommateur
3.2.1.1 Recommandations de l’Autorité de la Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP)
3.2.1.2 La charte européenne Publicité et Communication commerciale
3.2.1.3 Allégations des produits cosmétiques
3.2.2 Surveillance du marché des produits cosmétiques
3.3 La cosmétovigilance
3.3.1 Rôles du service de cosmétovigilance
3.3.2 Les effets indésirables
3.3.2.1 Les effets indésirables sans caractère de gravité
3.3.2.2 Les effets indésirables graves
3.3.3 Procédures d’informations
3.3.4 Imputabilité des effets indésirables liés aux produits cosmétiques
PARTIE II DE LA PEAU DE L’ENFANT A CELLE DE L’ADULTE : DIFFERENCES PHYSIOLOGIQUES
1. PHYSIOLOGIE DE LA PEAU ADULTE
1.1 La couche cornée
1.2 L’épiderme
1.2.1 Les kératinocytes
1.2.2 Les mélanocytes
1.2.3 Les cellules de Langerhans
1.2.4 Les cellules de Merkel
1.3 La jonction dermo-épidermique
1.4 Le derme
1.4.1 Les fibroblastes
1.4.2 Les lymphocytes
1.4.3 La matrice extracellulaire
1.4.3.1 La substance fondamentale
1.4.3.2 Les composants fibreux
1.4.3.3 Les glycoprotéines de structure
1.5 L’hypoderme
1.5.1 Structure de l’hypoderme
1.5.2 Différentes fonctions de l’hypoderme
1.6 Les annexes cutanées
1.6.1 Les différentes glandes
1.6.1.1 Les glandes sudoripares
1.6.1.2 Les glandes sébacées
1.6.2 Les follicules pilo-sébacés
1.6.3 Les muscles cutanés
1.7 Les fonctions et propriétés de la peau
1.7.1 Propriétés mécaniques de la peau
1.7.2 Perméabilité et imperméabilité de l’épiderme
1.7.3 Le film hydrolipidique
1.7.3.1 Composition du film hydrolipidique
1.7.3.2 Facteur naturel d’hydratation
1.7.3.3 Rôles du film hydrolipidique
1.7.4 Peau et équilibre en eau
1.7.4.1 Captation de l’eau
1.7.4.2 Perte insensible en eau
1.7.5 Barrière anti-microbienne
1.7.6 Rôle esthétique
2. CARACTERISTIQUES DE LA PEAU DU BEBE
2.1 Les principales différences structurelles et fonctionnelles avec la peau de l’adulte
2.2 Le ratio masse / surface corporelle
2.3 L’immaturité fonctionnelle de la barrière cutanée
2.4 Les sécrétions sébacées et sudorales
2.5 La flore cutanée
2.6 La prise en charge des soins de la peau du jeune enfant
3. PENETRATION CUTANEE
3.1 Absorption transcutanée
3.1.1 Mécanisme
3.1.2 Aspects particuliers
3.1.3 Facteurs modifiant l’absorption cutanée
3.1.3.1 Liés à l’état de la peau
3.1.3.2 Liés aux propriétés de la molécule
3.1.3.3 Liés à la formulation
3.2 Actions des topiques en cosmétologie
3.2.1 Une action superficielle ou systémique ?
3.2.2 Cas de l’hydratation cutanée
3.2.2.1 L’hydratation par agent kératolytique
3.2.2.2 L’hydratation par agent émollient
3.2.2.3 L’hydratation par corps gras
3.3 Effets secondaires suite à la pénétration cutanée
3.3.1 Toxicité générale
3.3.2 Toxicité locale
PARTIE III DEVELOPPEMENT D’UN PRODUIT DERMO-COSMETIQUE HYDRATANT DESTINE A L’ENFANT
1. CONCEPTION ET MISE AU POINT DU PRODUIT
1.1 Phase de recherche et de créativité
1.2 Établissement du besoin de la marque
1.3 Réunions de faisabilité
1.4 Élaboration du cahier des charges
2. FORMULATION PRECISE ET PARTICULIERE
2.1 Les origines des ingrédients
2.1.1 Ingrédients d’origine minérale
2.1.2 Ingrédients d’origine végétale
2.1.3 Ingrédients d’origine animale
2.1.4 Produits de synthèse
2.2 Les actifs utilisés et leurs fonctions
2.2.1 Les actifs hydratants
2.2.2 Les actifs nourrissants
2.2.3 Les actifs apaisants
2.2.4 Les antiseptiques
2.3 Les différents excipients employés
2.3.1 Les excipients en phase hydrophile
2.3.1.1 L’eau
2.3.1.2 Les humectants
2.3.1.3 Les solvants
2.3.1.4 Les sucres et dérivés des sucres
2.3.1.5 Les épaississants et gélifiants
2.3.2 Les excipients en phase lipophile
2.3.2.1 Les hydrocarbures
2.3.2.2 Les silicones
2.3.2.3 Les glycérides
2.3.2.4 Les cires
2.3.2.5 Les acides gras et alcools gras
2.3.2.6 Les esters gras synthétiques
2.3.3 Les tensioactifs émulsionnants
2.3.3.1 Définition
2.3.3.2 Classification des tensioactifs
2.4 Les additifs
2.4.1 Les parfums
2.4.2 Les colorants
2.4.2.1 Dénomination
2.4.2.2 Législation
2.4.2.3 Classifications
2.4.2.4 Incorporation des colorants
2.4.3 Les conservateurs
2.4.3.1 Micro-organismes et but des conservateurs
2.4.3.2 Conservateurs autorisés
2.4.3.3 Critères de choix des conservateurs
2.4.3.4 Cas des parabènes
2.4.3.5 Intérêts et précautions des produits sans conservateur
3. MISE AU POINT DE L’EMULSION
CONCLUSION