Le développement de l’hébergement low-cost à Genève
Contexte
Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, le tourisme s’est développé de façon exponentielle et n’a cessé de croître. Des changements dans les habitudes de consommation, la généralisation des congés payés ainsi que d’autres facteurs ont révolutionné le tourisme et l’ont rendu accessible à une grande partie de la population des pays occidentaux. À partir des années 1960, nous assistons au début de l’hédonisme de masse avec un développement fulgurant des stations balnéaires sur les côtes méditerranéennes et une envie massive des consommateurs de partir bronzer à la plage (Sciences humaines, 2019). La libéralisation des tarifs dans le secteur aérien a elle aussi donné un nouvel élan au tourisme mondial avec une concurrence accrue entre les compagnies et des prix devenus dans certains cas très attractifs. (Biplan, 2004, p.56-70).
En Europe, une autre révolution a secoué le marché en 1995. Le premier vol commercial de la compagnie low-cost Easyjet qui relia l’aéroport de Luton à celui de Glasgow, le modèle commercial de cette société a bouleversé le marché européen avec des prix défiant toute concurrence qui n’avaient jamais été proposés auparavant. Dans un contexte plus local, la compagnie fit son entrée en 1998 sur le marché suisse avant de devenir quelques années plus tard la première en termes de part de marché à l’aéroport de Genève Cointrin avec 45 % des vols en 2018. (Le Temps, 2015) (La Liberté, 2019). Il est intéressant de constater que c’est une compagnie à bas coûts qui domine largement ses concurrents dans une ville qui n’est pas réputée bon marché, le point négatif pour le tourisme genevois est que ces lignes sont principalement utilisées pour un tourisme « outbound » alors qu’un potentiel existe peut-être afin d’attirer une nouvelle clientèle. Le département de la sécurité et de l’économie, en charge du tourisme à Genève, suggère dans l’un de ses rapports de profiter de ces lignes qui drainent peu de tourisme « inbound » pour faire venir de nouveaux clients (Folly & Nikolic, 2018).
Récemment, d’autres acteurs low-cost ont fait leur apparition sur le marché des transports (Bélingard, 2014), par bus cette fois-ci, après une libéralisation du marché effectuée dans des pays européens comme la France et l’Allemagne. La nouvelle législation permet au transporteur de faire du cabotage, c’est-à-dire transporter des passagers d’une ville à une autre à l’intérieur d’un même pays, cela était anciennement interdit. Grâce à cette loi, le nombre de lignes internationales a considérablement augmenté et une nouvelle offre a vu le jour pour les voyageurs ; ceux-ci peuvent aujourd’hui se déplacer en car à des prix généralement inférieurs au train. Plusieurs de ces nouvelles lignes passent par Genève et Martin Yersin peut-être que cette nouvelle offre sur le marché des transports augmentera l’attractivité de Genève pour certains touristes. Concernant la fréquentation touristique, les nuitées enregistrées pour l’année 2018 sont en progression de 5,8%. Il s’agît de la deuxième année consécutive durant laquelle la barrière symbolique des trois millions de nuitées a été dépassée et cela constitue un nouveau record après celui obtenu l’année précédente (Office cantonal de la statistique (OCSTAT), 2019a).
Des données plus précises sur le tourisme à Genève ainsi que son ampleur seront détaillées dans le sous-chapitre États généraux du tourisme genevois (p.4). Cependant, le canton de Genève est fortement dépendant du tourisme d’affaires qui, à lui seul, correspond à plus de 75% des arrivées touristiques enregistrées dans le canton (TDG, 2012). Il est aussi intéressant de constater qu’entre 2007 et 2017, l’organisation de congrès a engendré des retombées économiques de 630 millions de francs à Genève. L’organisation de ces congrès a également généré des recettes fiscales, celles-ci se sont élevées à plus de 40 millions de francs (Bilan, 2018). En tant que ville internationale, grâce à ses nombreux sièges d’organisations mondiales et conférences, Genève a toujours été une ville ouverte sur le monde et ses plus de 190 nationalités représentées en font une des villes les plus cosmopolites du monde (Genève Internationale, 2019).
Le renforcement des liaisons, qu’elles soient aériennes, routières ou ferroviaires devrait permettre un rayonnement plus large de Genève en tant que place touristique, une offre adaptée aux nouveaux besoins des consommateurs également. Genève a même reçu, en 2014, 2015 et 2017, le « Europe’s Leading City Break Destination », un prix qui récompense la meilleure destination loisirs pour un city-break en Europe (Tribune de Genève (TDG), 2017b). Cela renforce le prestige de la ville en Suisse ainsi qu’à l’étranger et des communiqués de presse en six langues différentes ont été réalisés afin de promouvoir cette distinction. Toutefois, il faut noter que ce sont des professionnels du tourisme qui participent au vote et non pas des voyageurs lambda, leur perception est peut-être différente.
La problématique liée au logement à Genève
Une particularité genevoise à ne pas négliger est la crise du logement qui frappe la ville. Le taux de vacance des logements est le deuxième plus bas de Suisse, juste après Zoug avec 0.53% de logements non-occupés, les biens disponibles y sont plutôt rares (RTS, 2018). Martin Yersin Dans ce contexte de crise du logement, une loi a été mise en place afin de lutter contre les abus de tous types dans le domaine immobilier, il s’agît de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (LDTR) entrée en vigueur en 1996. Cette loi avait pour but de lutter contre la spéculation immobilière en imposant toute une série de nouvelles règles mais elle a rendu plus contraignantes les nouvelles transformations ou rénovations de bâtiments existants (Etat de Genève, 1996).
En considérant le domaine du tourisme, il est très difficile de transformer un ancien bâtiment locatif en une auberge ou un hôtel par exemple car ce bâtiment serait soustrait au marché du résidentiel locatif. Cette crise du logement a eu un effet collatéral qui touche le monde du tourisme, de nombreux genevois qui ne trouvent pas de logements et qui sont bénéficiaires de l’Hospice Général – l’institution en charge de l’aide sociale à Genève – sont logés dans différents hôtels bon-marché du canton en attendant de se voir attribuer un logement à leur nom. Certaines chambres destinées aux touristes sont soustraites du marché hôtelier afin que des genevois y soient placés et quelques hôtels se sont carrément « spécialisés » dans l’accueil de ces personnes en n’accueillant tout simplement plus aucun touriste (TDG, 2016). Cependant, 2018 a été une année record pour le canton de Genève en terme de constructions avec 2693 logements mis sur le marché alors que la moyenne des 20 dernières années était de seulement 1522, le nombre de constructions a presque doublé. À noter que la barre de plus de 2500 logements construits en une année n’avait plus été dépassée depuis 1996. De plus, le nombre de logement actuellement en construction est également largement au-dessus de la moyenne des 20 dernières années (OCSTAT, 2019b), ce qui permet peut-être un peu plus d’optimisme par rapport au développement immobilier du canton. Cette nouvelle dynamique permettra peut-être un relâchement de la pression sur le marché immobilier genevois.
États généraux du tourisme genevois
Le tourisme fait donc partie intégrante du paysage genevois et participe à la diversité de son économie. L’aéroport international de Cointrin est une infrastructure très importante afin d’attirer de nouveaux clients et le nombre de passagers qui ont transité par cette plateforme a atteint un nouveau record en 2018 avec 17’677’045 de passagers accueillis, soit une légère hausse de 1,9%. (Genève Aéroport, 2019). Avec plus de 141 destinations accessibles en vol direct, 58 compagnies aériennes, Genève est bien desservie avec des vols qui rejoignent principalement l’Europe. La première destination extra-européenne est Dubai avec 311’713 passagers accueillis sur cette ligne en 2017, loin derrière Londres, première destination en termes de fréquentation avec 2’444’716 (Genève Aéroport, 2017). Martin Yersin Genève est également très bien desservie par le réseau de bus low-cost allemand Flixbus avec 94 villes accessibles en ligne directe (FlixBus, 2019). Avec des billets disponibles à partir de quatre euros, ou cinq francs, c’est un nouveau type de clientèle qui sera peut-être encouragé à voyager plus souvent bien que les temps de trajets soient relativement plus élevés qu’en avion ou en bus. Cependant, certaines destinations ne sont ni reliées par le trafic aérien, ni par le rail à Genève et ces nouvelles dessertes rendent la ville plus attractives car elle devient accessible en transports publics. Le réseau OuiBus, récemment devenu Blablabus, fonctionne exactement sur le même modèle que son concurrent allemand et il dessert quant à lui 91 destinations au départ de Genève (OuiBus, 2019).
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Table des matières
RÉSUMÉ
AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENTS
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
1.CONTEXTE
1.1 LA PROBLÉMATIQUE LIÉE AU LOGEMENT À GENÈVE
1.2 ÉTATS GÉNÉRAUX DU TOURISME GENEVOIS
2.REVUE DE LA LITTÉRATURE
2.1 UNE NOUVELLE FAÇON DE CONSOMMER
2.2 LA TENDANCE DES CITY-BREAK
2.3 L’HÉBERGEMENT
2.3.1 Les plateformes collaboratives
2.3.2 Le développement hôtelier
2.3.3 Divers moyens de commercialisation
2.3.4 De nouveaux types d’hébergements
2.4 LA DIVERSIFICATION TOURISTIQUE
3.MÉTHODOLOGIE
4.ÉTUDE DE CAS : L’HÉBERGEMENT LOW-COST À GENÈVE
4.1 LE MARCHÉ DE L’HÉBERGEMENT TOURISTIQUE À GENÈVE
4.2 LA DEMANDE TOURISTIQUE
4.2.1 La demande touristique à Genève d’après le TMS
4.2.2 Le cas bâlois
4.2.3 Le cas zurichois
4.2.4 Genève / Bâle, un positionnement et une offre différentes
4.2.5 L’influence du positionnement et de l’image de Genève sur la demande touristique
4.2.6 La demande touristique ne dormant pas à Genève
4.3 LES FACTEURS INFLUENÇANT LE DÉVELOPPEMENT D’HÉBERGEMENT LOW-COST À GENÈVE
4.3.1 Le temps de développement et la question économique
4.3.2 Les coûts
4.3.3 Une volonté politique
4.3.4 Les difficultés en tant qu’acteurs indépendants
4.3.5 Le cadre législatif
5.RECOMMANDATIONS
5.1 PISTE D’AMÉLIORATION N° 1 – MISE À DISPOSITION DE TERRAINS EN DDP
5.2 PISTE D’AMÉLIORATION N° 2 – DES CONSTRUCTIONS MODULAIRES
5.3 PISTE D’AMÉLIORATION N° 3 – UNE PLATEFORME DE CHAMBRES DÉGRIFFÉES
5.4 PISTE D’AMÉLIORATION N° 4 – CONVERTIR DES BUREAUX
5.5 PISTE D’AMÉLIORATION N° 5 – COMMUNIQUER UNE IMAGE DIFFÉRENTE
CONCLUSION
RÉFÉRENCES
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