LE DARWINISME DANS LE PRAGMATISME INSTRUMENTALISTE DE JOHN DEWEY

DARWIN : NOTES BIOGRAPHIQUES

     Naturaliste anglais, Charles Robert DARWIN est né en 1809 à Shrewsbury – à l’ouest de Birmingham -, DARWIN est le cinquième enfant d’une riche famille. Son grand père Erasmus DARWIN est un médecin et un savant célèbre. A l’âge de seize ans, il est envoyé à l’université d’Edimbourg pour y faire des études de médecine. Mais, comme celles-ci ne le motivent guère, il préfère quitter Edimbourg pour l’université de Cambridge, son père lui propose de devenir pasteur et de suivre, pour ce faire, l’enseignement classique dispensé à Cambridge. Cependant, sa matière de prédilection est l’histoire naturelle : Au cours de son enfance il a pris goût aux collections – insectes, coquillages…..- et à l’observation des oiseaux. Ces pratiques le conduisent plus tard à fréquenter à Cambridge des sociétés locales d’histoire naturelles où il publie dans leurs bulletins de courts articles sur les animaux qu’il recueille. Il se lie d’amitié avec son professeur de botanique, le révérend John Stevens HENSLOW, grâce auquel il sera recruté pour participer à un voyage officiel d’exploration des côtes de l’Amérique du Sud, à bord d’un navire de la marine royale, le Beagle. Il est embarqué comme accompagnateur du capitaine pour une durée de cinq ans. Durant ce voyage, il étudie la géologie des îles et des continents abordés mais il va surtout collectionner les spécimens et les fossiles des espèces qu’il va rencontrer. En 1832, en Uruguay – Montevideo -, trouvant des fossiles de grands tatous, il constate que l’espèce a diminué de taille, c’est surtout dans les îles Galápagos, en 1835 que ses observations l’amènent à élaborer l’ébauche de sa théorie. Il remarque qu’une même espèce rencontrée sur plusieurs îles présente des différences notables. Le cas des pinsons est exemplaire, suivant le lieu, le bec est adapté à différentes sortes de nourriture. Son catalogue répertorie 3907 spécimens différents ramenés sur le bateau, à la fin du voyage. Dès son retour en 1836 en Angleterre, il tire de cette masse énorme d’observations des publications scientifiques en géologie et en zoologie qui vont paraître en 1840 et 1843. A la même époque, d’autres scientifiques remettent en cause les thèses officielles : le catastrophisme et le fixisme – Jean Baptiste Monet parle d’évolution des espèces par adaptation au milieu – le fameux cou de la girafe qui s’allonge -, Charles Lyell, géologue, émet l’hypothèse que la terre se transforme au fur et à mesure de l’érosion et des éruptions volcaniques – ce qui indiquerait que la terre a bien plus que six mille ans -. En 1837, DARWIN écrit un « carnet sur la transformation des espèces », les observations faîtes en Amérique du Sud le conduisent à se poser des questions qui vont l’amener à mettre en doute le dogme de la fixité et de la permanence des espèces. Il estime en fait qu’il n’y a aucun doute, loin d’être fixes, les espèces se modifient. Un an plus tard, MALTHUS, économiste anglais publie un essai sur la population, il y soutient la thèse selon laquelle la population augmentant perpétuellement, il existe une lutte pour la survie, seuls les individus présentant un avantage quelconque pourront survivre. DARWIN est fortement influencé par LYELL et MALTHUS : leur théorie enrichissent ses propres réflexions au point qu’il rédige en 1844 un essai concernant la sélection naturelle. Tout en continuant ses recherches sur l’évolution, il publie des ouvrages sur la géologie de l’Amérique du Sud (1851). En 1858, DARWIN apprend que Alfred WALLACE- naturaliste -prépare une théorie sur son sujet de prédilection : l’évolution. Le 1er juillet 1858, DARWIN et WALLACE présentent conjointement leurs travaux à la LINNEAN Society de Londres. A cause des vives réactions contre sa théorie, il faudra attendre encore un an –le 02 octobre 1859 – pour que L’origine des espèces soit publiée. Cependant, les principes de sa théorie ont été confirmés au fil du temps. En 1865, le moine Gregor MENDEL découvre, grâce à une expérimentation sur des petits pois, les lois de l’hérédité des caractères. Ceci a permis de démontrer que l’un des postulats de DARWIN était vrai : une évolution/mutation peut se transmettre à la descendance. Jusqu’à à la fin de sa vie en 1882, il continua à publier et à répondre aux attaques. Il fut tout de même reconnu pour la richesse de ses travaux et devint membre de la Royal Society of London ainsi que de l’académie des sciences en France en 1878. Les ouvrages suivants sont parmi les plus importants :
– On the origin of species by means of natural selection, or the preservation of favoured races in the struggle for life (1859) De l’origine des espèces par la sélection naturelle ou des lois de transformation des êtres organisés, 2 vol ; trad. Clémence ROYER, Flammarion, Paris, 1992
– The variation of animals and plants under domestication (1868) variation des animaux et des plantes sous l’action de la domestication, Paris, 1868
– The descent of man and selection in relation to sex (1871) La descendance de l’homme et la sélection sexuelle, Paris, 1872, ed complexe, 2 vol ; Bruxelles, 1981
– Expression of the emotions in man and animals (1872)
Expression des émotions chez l’homme et les animaux, Paris, 1874

POSTERITE DE DARWIN

       La théorie darwinienne va être reprise par des penseurs, des économistes, des philosophes … en vue de justifier leur vision de la société. C’est ainsi qu’au darwinisme d’origine va succéder le darwinisme social à la fin du XIXe siècle. Cette théorie est prônée par Herbert SPENCER – 1820 – 1903- qui va appliquer les idées de DARWIN au plan sociologique. Il affirme en effet que la concurrence, la lutte pour la vie affecte à l’intérieur de l’espèce humaine les différents groupes sociaux qui la composent – famille, ethnie … – de telle sorte que les hiérarchies se créent. Ces hiérarchies sont le résultat d’une sélection sociale qui permet aux meilleurs de l’emporter. De l’avis de SPENCER, les faibles constituent un handicap pour le groupe social étant entendu que tous les groupes sociaux sont en lutte avec les autres. Tout ce qui peut affaiblir le groupe est un désavantage, donc un signe d’infériorité face aux autres groupes rivaux .Dans le darwinisme social, l’aptitude est absolue. Ne perdons surtout pas de vue que le darwinisme social, a été disons politiquement prôné par le libéralisme de cette époque afin de justifier la non intervention de l’Etat dans le domaine économique, laquelle intervention est considérée comme une faille pour la société. Le darwinisme social a aussi nourri les idéologies racistes des nazis. Le nazisme Prônait par ADOLF HITLER s’est beaucoup inspiré de la théorie de la sélection Naturelle. HITLER fut en effet, un ardent prédicateur de la théorie de l’évolution de DARWIN. Dans son célèbre livre « Mein Kampf » il défend clairement l’idée de La survie du plus fort et l’extermination du plus faible. Ces idées racistes ont été à La base des massacres perpétrés par les nazis sur des groupes ethniques, notamment sur les populations juives dans des camps de concentration avec une Violence inouïe. Ces massacres ont coûté très cher à l’humanité ; la deuxième guerre demeure ainsi la plus grande tragédie de l’histoire de l’humanité. Par ailleurs, au début du XXe Siècle, la théorie de l’évolution va absorber la révolution génétique en donnant naissance au néodarwinisme actuel encore appelé théorie synthétique de l’évolution. Elle part de l’idée selon laquelle le hasard ne rend pas totalement compte des mécanismes du vivant. Les défenseurs de cette théorie entre autres Jacques Monod, François Jacob ….. Mettent à jour la question de la finalité. Pour eux, il n’y a pas que le hasard mais il y a aussi une nécessité, une finalité du vivant qui est de continuer à vivre. Chez DARWIN la question de la finalité est exclue, Dans la pensée néodarwiniste La finalité va être interrogée. La théorie neodarwinienne en génétique confirme les thèses de DARWIN sur la Causalité aléatoire de l’évolution. Il n’y a pas de prévisibilité du vivant, le vivant n’est pas déterminable à priori. En outre, cette théorie affirme que les caractères biologiques des mutations génétiques dues au hasard sont transmissibles génétiquement et sont à la fois héréditaires, alors que les modifications acquises par l’action du milieu ne sont pas biologiquement transmissibles. Par conséquent, pour les néodarwinistes, l’homme – Homo sapiens – ne peut changer génétiquement du fait de l’éducation et/ou des transformations économiques et sociales comme le pensent notamment les marxistes. Mais, l’être humain peut changer du fait des manipulations qui sont aujourd’hui techniquement possibles mais qui posent des problèmes qui relèvent de la bioéthique. On trouve également une autre approche moderne du darwinisme : la sociologie prônée par l’anglais Richard Dawkins. Les idées matérialistes de DARWIN remportent également un succès avec les théories économiques de KARL MARX. Ce n’est pas un hasard si ce dernier a cautionné la théorie de l’évolution : l’évolution des espèces est un phénomène naturel, l’évolution de la société vers l’idéal marxiste procède du même type de mécanisme. La lutte des classes est indispensable pour faire évoluer la société. Actuellement, un constat notoire s’impose : la théorie de l’évolution progresse au fur et à mesure des découvertes. Parfois, une découverte pose plus de question qu’elle n’apporte de réponses ! Le darwinisme est vivant et continue de faire parler de lui.

Elaboration rationnelle d’une idée

     L’élaboration rationnelle d’une idée marque le passage de l’explication suggérée à sa vérification logique, inductive au expérimentale. Il y a à ce stade de la recherche, un immense effort d’organisation qui procède par voie d’induction et par voie de déduction. L’induction va du confus à l’unité, la déduction elle, part de cette unité de l’idée vers les faits et conséquences possibles. Le réel se construit patiemment dans l’esprit par la confrontation des faits et des idées, par l’ajustement du raisonnement aux conditions de l’expérience. Il n’y a pas encore une élaboration de la preuve mais les ingrédients de la compréhension sont mis en place en vue de l’explication.

DARWINISME ET POLITIQUE

     Eminent pédagogue, l’américain DEWEY se définit aussi comme un ardent défenseur de la démocratie. Son credo démocratique est comme son  » credo pédagogique » calqué sur le modèle du débat scientifique tel que le suggère l’épistémologie de Karl POPPER à savoir l’affrontement des thèses ou de paradigmes dont la validité ne saurait être que provisoire, c’est-à-dire constamment en attente d’une falsification et d’une réfutation possible. Jean Pierre COMETTI écrit dans un article en parlant du pragmatisme que : « Le faillibilisme pragmatiste n’est pas seulement ce qui l’oppose aux dogmatismes en tous genres ; il est aussi ce qu’il possède de commun avec la recherche dans les sciences, et ce qui jette un pont, précisément, entre la philosophie, la science et la démocratie »33. Autrement dit, la démarche scientifique sert de paradigme à la philosophie politique de DEWEY, elle est tout comme la science – expérimentale. Les propos de Richard .J. BERNSTEIN corroborent en effet cette idée. Selon lui : « L’ouverture d’esprit à l’enquête scientifique, l’imagination qu’exige la pratique pour réussir, la disposition à soumettre des hypothèses à la vérification et à la critique de tous, le caractère constitutivement communautaire et coopératif de la recherche en science, tels sont les traits qui importent à DEWEY dans la méthode scientifique »34. C’est pourquoi, « s’il nous appartient de nous consacrer à la tâche de réaliser concrètement la « démocratie créative », alors ces vertus sont ce qu’il nous faut cultiver et nourrir dans la vie politique et morale de tous les jours »35. Le natif de Burlington croit fermement que l’école doit inculquer aux enfants ces vertus démocratiques. C’est dire que l’école ne peut se développer réellement que dans les sociétés démocratiques. Des sociétés dans lesquelles les notions de dictature, d’oppression et d’anarchie sont proscrites systématiquement au profit de celles de liberté, de consensus et d’harmonie qui sont les vertus incarnées par la démocratie. Comme nous l’avons souligné au début de notre travail, DEWEY est un adepte du darwinisme mais, il ne souscrit pas certes à tout ce que DARWIN a dit sur la théorie de l’évolution des espèces. Sa philosophie politique est aux antipodes du principe de la sélection naturelle et de la loi de la survivance du plus apte de DARWIN. Sur ce point, leurs thèses sont fondamentalement opposées. Charles DARWIN voit dans la biodiversité des espèces une permanente compétition, une lutte sans merci pour la survie ou les plus faibles sont littéralement écrasés par les plus forts qui auront la capacité de se conserver et de se ménager ainsi une place au soleil ; tandis que John DEWEY préconise le débat démocratique dans la société, où les opinions sont mises à l’épreuve publique et où on règle pacifiquement les conflits. En somme si nous comparons les thèses de DARWIN et de DEWEY du point de vue social, nous remarquons une nette contradiction. Chez DARWIN, les maîtres mots sont : lutte, compétition, affrontement. Alors que chez DEWEY nous avons la coopération, le consensus et la symbiose. Cette comparaison nous autorise à croire que la vision deweyenne du monde vivant est plus optimiste que celle de DARWIN qui ressemble a bien des égards à celle du théoricien politique, Thomas HOBBES qui soutient que l’homme, à l’état de nature est un loup pour son prochain. Précisons tout de même que la théorie de DARWIN s’applique principalement sur les espèces végétales et animales. Elle a été reprise et interprétée par des courants de pensée – que nous avons cité précédemment – notamment par le darwinisme social qui applique les idées de DARWIN à l’univers social de l’homme. C’est donc à cette version sociale du darwinisme qui n’attire guère DEWEY que nous pouvons justement opposer sa philosophie politique.Une philosophie politique qui a pour principe la pratique de la démocratie. Nous pouvons estimer que les idées politiques de l’américain DEWEY sont toujours d’actualité. Elles sont toujours valables car nous sommes à une époque où la tendance est à la globalisation, mondialisation à la coopération économique, scientifique et culturelle. Le monde est devenu un village planétaire. Evoquer la théorie démocratique de DEWEY pour faire naître dans le cœur des hommes un vrai désir d’union et de partage nous semble particulièrement opportun de nos jours. Le mot d’ordre est donné : Repenser les systèmes politiques dans le contexte actuel pour réussir cet idéal démocratique.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I. DARWIN ET LE DARWINISME
INTRODUCTION
I-1. DARWIN : NOTES BIOGRAPHIQUES
I-2. LE DARWINISME : LA THEORIE DE L’EVOLUTION
I-3. POSTERITE DE DARWIN
CONCLUSION
Chapitre II. LE PRAGMATISME DE JOHN DEWEY
INTRODUCTION
II-1. L’INSTRUMENTALISME DE JOHN DEWEY
II-2. DARWINISME ET INSTRUMENTALISME
II-3. CONTROVERSES ET RESERVES
CONCLUSION
Chapitre III.RAPPORTS ENTRE LE DARWINISME ET LA PENSEE PEDAGOGIQUE ET POLITIQUE DE DEWEY
INTRODUCTION
III-1. DARWINISME ET PEDAGOGIE
III-2. DARWINISME ET POLITIQUE
III-3. POSTERITE DE JOHN DEWEY
CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE

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