Le contrôle de systèmes complexes

Que se passe-t-il lorsqu’un enfant apprend, pour la première fois, à faire du vélo ? Un adulte l’installe sur la selle, c’est l’initialisation. À ce moment, l’enfant n’a aucune connaissance en physique. Masse, inertie, forces de frottements, poussée, portance, accélération gravitationnelle, ou encore énergie cinétique, sont autant de concepts qui lui sont inconnus. Il est bien incapable de calculer, au sens mathématique du terme, quelles forces appliquer sur les pédales et le guidon afin de mener son vélo là où il l’entend. Malgré tout, l’enfant va essayer quelques mouvements, quelques actions qui vont avoir des effets sur le comportement du vélo. Petit à petit, et probablement au prix d’une chute ou deux, l’enfant va parvenir à contrôler son vélo. Il a appris comment utiliser les points de contrôle à sa disposition pour avancer, freiner, tourner, etc. L’enfant maîtrise maintenant son vélo, il peut pleinement profiter de la liberté qu’offre ce moyen de transport. Et pourtant il ne connaît toujours rien aux théories de la dynamique et de la mécanique du solide. Les processus  physiques en jeu au sein de sa bicyclette lui demeurent étrangers. Il contrôle un système sans en avoir construit un modèle analytique décrivant son comportement. Tout vient de l’expérience. L’enfant reconnaît des situations qu’il a déjà rencontrées, et sait quelles sont les actions à faire (ou à ne pas faire !) pour garder le contrôle du vélo. Voilà qui résume, de manière imagée, le point de vue adopté par cette thèse au sujet du contrôle de systèmes complexes.

Le contrôle de systèmes complexes

Le contrôle est une notion très générique qui s’exprime de bien des manières. Cette section consiste en une présentation générale du contrôle de systèmes, de son histoire et des principaux concepts manipulés.

Historique

Depuis toujours, les humains cherchent à agir sur l’environnement afin d’améliorer leur condition. Trouver quelles sont les actions à entreprendre pour arriver à ses fins est l’essence même du contrôle. On parle plus précisément de contrôle de systèmes lorsque ces actions sont effectuées sur les entrées d’un système particulier. Avant d’être une science théorisée, le contrôle relevait purement de l’ingénierie car il est fortement ancré dans les problèmes pratiques.

La clepsydre de Ctésibios
Un des exemples les plus connus nous est donné par le problème de la mesure du temps dans l’Antiquité. La clepsydre égyptienne est en effet un des premiers systèmes sur lequel fut appliqué un raisonnement de contrôle afin d’en améliorer le fonctionnement. Une clepsydre égyptienne consiste en un réservoir, rempli d’eau, dont la base est trouée. L’eau s’écoule progressivement par ce trou et est réceptionnée dans un deuxième récipient. Celui-ci est gradué, de sorte que le niveau d’eau indique une mesure du temps passé. Cependant le volume d’eau du premier seau diminuant petit à petit, la pression exercée devient de moins en moins importante. Cela cause une variation du débit entre les deux récipients qui entraîne une approximation de plus en plus importante des mesures. C’est pour remédier à ce problème que le grec Ctésibios d’Alexandrie proposa, au IIIe siècle avant J-C, d’ajouter un troisième seau (Ronan 1983). Celui-ci est placé entre les deux récipients originaux, et son niveau d’eau est maintenu constant à l’aide d’un mécanisme de rejet du surplus d’eau (figure 1.1). Ainsi le débit entrant du vase gradué ne varie plus et les mesures sont plus précises. Révolutionnaire à l’époque, le même principe est encore utilisé aujourd’hui, par exemple dans les carburateurs de voiture. Cet exemple de système de contrôle automatique illustre la volonté d’alimenter de manière adéquate un système afin que celui-ci donne le résultat attendu. Dans le cas de la clepsydre de Ctésibios, il s’agit d’une forme particulière du contrôle, la régulation, qui consiste à s’assurer de la stabilité de l’activité d’un système. Mais le contrôle consiste aussi (et surtout) à être capable de faire varier la sortie d’un système selon les souhaits de l’utilisateur.

De la révolution industrielle à nos jours
C’est au XIXe siècle, lors de la révolution industrielle, que l’utilisation massive de machines donna aux systèmes de contrôle automatique une importance cruciale. Réguler température, pression, et autres niveaux ne pouvait effectivement pas se faire manuellement sur des systèmes tels que les machines à vapeur. Toutefois, les contrôleurs de l’époque manquaient encore de recul théorique et étaient majoritairement élaborés à partir de l’expérience et de l’intuition des ingénieurs. Quelques percées mathématiques eurent tout de même lieu et conduisirent plus tard à la théorie du contrôle. Par exemple, le mathématicien et astronome George Biddell Airy utilisa en 1840 des équations différentielles pour caractériser l’instabilité d’un système de contrôle de télescope. La publication en 1868 d’un article de James Clerk Maxwell sur les régulateurs à boules (un système mécanique de régulation de la vitesse de rotation des machines à vapeur) est aujourd’hui considérée comme le début de la théorie du contrôle. Jusqu’au début du XXe siècle, la notion de système était absente. Les concepts d’entrée et de sortie firent leur apparition à cette époque avec l’arrivée de la théorie des systèmes. Ce siècle fut marqué par les deux guerres mondiales ainsi que par l’essor des télécommunications. Les guerres appuyèrent les recherches sur le guidage d’engins et sur la visée de missiles. Les contrôleurs de type PID, une technique toujours d’actualité (présentée dans le chapitre suivant), furent, notamment, utilisés pour la première fois en 1911 pour le contrôle de la direction de navires, avant d’être analysés théoriquement en 1922 (Minorsky 1922). Les technologies de communication à distance firent quant à elles naître des problématiques d’amplification du signal et donnèrent lieu à la notion de rétroaction négative, découverte par Harold Stephen Black en 1927. Elles entraînèrent également l’application des travaux de mathématiciens du siècle précédent, comme Augustin-Louis Cauchy ou Joseph Fourier, ouvrant la voie du contrôle par domaine fréquentiel. Les travaux publiés jusqu’à cette époque constituent ce que l’on appelle aujourd’hui la théorie classique du contrôle. Suffisante dans beaucoup de cas, cette théorie est néanmoins en difficulté face aux systèmes non-linéaires et possédant plusieurs entrées et sorties. L’intérêt se porta alors sur le contrôle optimal, qui vise à réduire une certaine mesure de coût de fonctionnement d’un système, et sur l’utilisation d’équations différentielles pour analyser les systèmes et leur contrôle. C’est à ce moment que la discipline du contrôle rencontra celle de l’informatique, alors en plein développement. La faculté de cette dernière à calculer les solutions d’équations complexes a favorisé la mise en équation des systèmes de contrôle, ainsi que la modélisation mathématique des systèmes contrôlés. Cette tendance se poursuit depuis les années 70 et est progressivement complétée par l’utilisation de techniques issues de l’intelligence artificielle, en particulier les algorithmes d’apprentissage.

Définitions et concepts fondamentaux

Le contrôle de systèmes est au carrefour de plusieurs disciplines : automatique, mathématique et aujourd’hui informatique, et s’étend à de nombreux domaines d’application (biologie, physique, chimie, etc) apportant chacun leur vision du problème, leurs exigences et leurs contraintes. L’étude des systèmes et de leur contrôle met tout de même à jours des traits communs, faisant apparaître des concepts propres au contrôle, présentés dans cette section.

La notion de système

La notion de contrôle ne saurait se départir de celle de système. Cette dernière prend différentes formes selon la discipline concernée. Mathématiques, informatique, physique ou encore automatique considèrent un « système » sous différents angles. Deux aspects complémentaires peuvent être mis en avant. Un système peut être décrit selon son aspect structurel. Il est alors présenté comme un ensemble d’éléments constitutifs, leurs relations et par une frontière déterminant l’interface entre le système et son environnement. Mais un système peut également être abordé selon son aspect fonctionnel. On s’intéresse alors aux flux d’information. L’accent est mis sur les entrées et les sorties (du système ou de ses composants) et sur le processus de transformation qui lie les premières aux secondes. Le contrôle privilégie généralement ce deuxième point de vue. Les sorties sont les variables observables à l’aide de capteurs tandis que les entrées sont les variables directement modifiables à l’aide d’effecteurs. Un système ne possédant qu’une entrée et qu’une sortie est dit SISO (Simple-Input and Simple-Output), il est qualifié de MIMO lorsqu’il en possède plusieurs (Multiple-Input and Multiple-Output).

Enfin, les systèmes non-linéaires sont les systèmes dont l’évolution dépend de manière non-linéaire de son état comme des actions sur les entrées. La non-linéarité fait partie des critères définissant les systèmes complexes. La complexité découle également de la difficulté, voire de l’impossibilité, d’identifier tous les mécanismes en jeu dans le système, et donc de prévoir son comportement. Certains des éléments et des relations du système, ou de son environnement, peuvent être incertains ou inaccessibles. Cela peut apparaître lorsqu’un très grand nombre d’éléments sont en jeu, que le graphe des relations n’est pas trivial (c’est-à-dire qu’il présente des cycles et que certains liens sont privilégiés), ou que certaines variables sont trop dynamiques ou physiquement non mesurables. En outre, ce type de systèmes présente fréquemment plusieurs niveaux : les éléments interagissant localement sont eux-mêmes des systèmes plus ou moins complexes, compliquant considérablement l’étude du système global.

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Table des matières

Introduction
Objectif de la thèse
L’intérêt du contrôle de moteurs
Un projet multidisciplinaire
Organisation du document
1 Contexte de la thèse
1.1 Le contrôle de systèmes complexes
1.1.1 Historique
1.1.1.1 La clepsydre de Ctésibios
1.1.1.2 De la révolution industrielle à nos jours
1.1.2 Définitions et concepts fondamentaux
1.1.2.1 La notion de système
1.1.2.2 La notion de contrôle
1.2 Le contrôle de moteurs à combustion
1.2.1 L’unité de contrôle moteur
1.2.2 La mise au point d’un ECU
1.3 Objectifs de la thèse
1.4 Conclusion
2 Contrôle de systèmes complexes et apprentissage artificiel
2.1 Les classiques du contrôle de systèmes
2.1.1 Contrôleurs PID
2.1.1.1 Méthode de Ziegler-Nichols
2.1.1.2 Limites des PID
2.1.1.3 Bilan des PID
2.1.2 Contrôle adaptatif
2.1.2.1 Contrôle avec modèle de référence
2.1.2.2 Contrôle avec identification de système
2.1.2.3 Commande prédictive
2.1.2.4 Contrôle dual
2.1.2.5 Contrôle par apprentissage itératif
2.1.2.6 Bilan du contrôle adaptatif
2.1.3 Bilan des approches classiques de contrôle
2.2 L’apprentissage artificiel
2.2.1 Apprentissage supervisé
2.2.1.1 Méthode des k plus proches voisins
2.2.1.2 Inférence d’arbres de décision
2.2.1.3 Machines à vecteurs de support
2.2.1.4 Algorithmes génétiques
2.2.1.5 Réseaux de neurones artificiels
2.2.1.6 Apprentissage de réseaux baysésiens
2.2.1.7 Méta-apprentissage
2.2.1.8 Bilan de l’apprentissage supervisé
2.2.2 Apprentissage non supervisé
2.2.2.1 Apprentissage semi-supervisé
2.2.2.2 Algorithme des k-moyennes
2.2.2.3 Analyse en composantes
2.2.2.4 Cartes de Kohonen
2.2.2.5 Réseaux de Hopfield
2.2.2.6 Machines de Boltzmann
2.2.2.7 Bilan de l’apprentissage non supervisé
2.2.3 Apprentissage par renforcement
2.2.3.1 Q-learning
2.2.3.2 SARSA
2.2.3.3 Systèmes de classeurs
2.2.3.4 Raisonnement par cas
2.2.3.5 Bilan de l’apprentissage par renforcement
2.2.4 Bilan de l’apprentissage artificiel
2.3 Le contrôle intelligent
2.3.1 Des techniques d’IA utiles pour le contrôle
2.3.1.1 Systèmes experts
2.3.1.2 Logique floue
2.3.2 Un exemple de PID intelligent
2.3.3 Un exemple de MRAC intelligent
2.3.4 Un exemple de MIAC intelligent
2.3.5 Un exemple de commande prédictive intelligente
2.3.6 Un exemple de contrôle dual intelligent
2.3.7 Autres exemples
2.3.7.1 Contrôle distribué à base de systèmes de classeurs
2.3.7.2 Contrôle distribué hybride
2.3.8 Bilan du contrôle intelligent
2.4 Les applications au contrôle de moteurs
2.4.1 Méthodes de contrôle
2.4.1.1 Modèle de Jankovic
2.4.1.2 Contrôle prédictif appliqué aux moteurs
2.4.2 Auto-calibration
2.4.3 Bilan du contrôle de moteurs
2.5 Conclusion
3 Systèmes multi-agents et coopération
3.1 Les systèmes multi-agents
3.1.1 Qu’est-ce qu’un agent ?
3.1.1.1 Différents types d’agents
3.1.1.2 Architecture d’un agent
3.1.2 Qu’est-ce qu’un système multi-agent ?
3.1.2.1 Propriétés des SMA
3.1.2.2 L’environnement
3.1.2.3 Composition d’un SMA
3.1.3 Des applications de SMA
3.1.3.1 SMA et contrôle de systèmes
3.1.3.2 SMA et apprentissage
3.1.4 Bilan des SMA
3.2 L’auto-organisation dans les SMA
3.2.1 La notion d’organisation
3.2.1.1 Modèles organisationnels
3.2.1.2 Bilan
3.2.2 Comportement local et fonction globale : auto-organisation et émergence
3.2.2.1 L’émergence
3.2.2.2 L’auto-organisation
3.2.3 Résoudre des problèmes grâce à l’auto-organisation
3.2.4 Mécanismes d’auto-organisation
3.2.4.1 Stigmergie
3.2.4.2 Holons
3.2.4.3 Autres mécanismes
3.2.5 Bilan de l’auto-organisation
Conclusion

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