Le contexte de la pêche au Sénégal

Les pêcheries mondiales génèrent des moyens de subsistance pour plus de 100 millions de personnes et représentent une source vitale pour la fourniture en protéines animales [1]. Le marché international des produits halieutiques a représenté plus de 148 milliards US $ en 2014 ce qui fait de la pêche une importante source de devises pour les pays en développement [2]. L’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) estime le nombre total de pêcheurs dans le monde en 2012 à près de 40 millions, dont 77 % en Asie et 14 % en Afrique [1]. A ces chiffres, s’ajoute le nombre des emplois indirects dans les secteurs liés à la pêche, en particulier l’industrie agroalimentaire et le commerce.

Au Sénégal, l’activité de pêche contribue à hauteur de 1,7 % au PIB national, génère près de 200 milliards de FCFA de recette par an et produit environ 600 000 emplois directs et indirects soit 17% de la population active [3]–[5]. L’emploi dans le secteur artisanal représente environ 70 % de l’emploi global du secteur halieutique et l’effectif des marins pêcheurs artisanaux représente 10 % de cet emploi global, soit environ 61 000 personnes [3]. Le reste est composé d’autres types d’emplois dans des secteurs tels que la manutention au niveau des plages de débarquement (porteurs), la distribution des produits (mareyeurs et micro-mareyeurs) et la transformation artisanale qui emploie essentiellement des femmes.

La pêche contribue par ailleurs fortement à la sécurité alimentaire au Sénégal. Ainsi, avec une consommation per capita de plus de 25 kg, les produits halieutiques fournissent plus de 75% des apports en protéines animales des populations sénégalaises aussi bien urbaines que rurales. De plus selon la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) [6] cette consommation est majoritairement satisfaite par le recours aux petits pélagiques (plus de 70 %). Cette importance socioéconomique de la pêche est liée à plusieurs facteurs dont l’abondance de la ressource et le dynamisme du secteur halieutique. En effet, le Sénégal se trouve dans une zone de forte productivité biologique favorisée par la présence d’un upwelling saisonnier [7]–[10]. Par ailleurs, les politiques de pêche ont favorisé depuis les années 1950 un développement de la pêche artisanale avec la motorisation des pirogues et les subventions accordées sur les intrants des unités de pêche [4], [11], [12].

Au Sénégal plus de 80 % des débarquements sont assurés par la pêche artisanale. Cette dernière assure en priorité l’approvisionnement des marchés locaux, régionaux et du secteur de la transformation artisanale [13]–[15]. Les débarquements de la pêche artisanale assurent aussi une bonne partie de l’approvisionnement de l’industrie de transformation de la pêche.

LE CONTEXTE DE LA PECHE AU SENEGAL

De par sa position géographique privilégiée et les conditions météorologiques particulières, le Sénégal possède parmi les eaux maritimes les plus productives en ressources halieutiques [29]. Cette productivité associée au dynamisme des acteurs qui exploitent la ressource font du Sénégal l’un des plus grands producteurs de produits halieutiques en Afrique de l’ouest. Dans ce chapitre, nous présenterons les conditions physiques et environnementales qui conditionnent la productivité des eaux maritimes sénégalaises, les communautés de pêcheurs et les grands centres de débarquements.

Présentation de la zone d’étude 

Le Sénégal est un pays intertropical de l’Afrique de l’Ouest. Il bénéficie sur toute sa partie Ouest, d’une côte longue de 700 km et d’une Zone économique exclusive (ZEE) de 180 895 Km² [6]. Cette côte est ouverte aux masses d’eau de l’Océan Atlantique d’une part et caractérisée d’autre part par l’existence de trois zones deltaïques (Fleuves Sénégal, Sine Saloum et Casamance). La partie littorale est caractérisée par de grandes agglomérations urbaines et une multitude de villages autour des différents points de débarquements.

Traditionnellement, cinq (5) grandes zones géographiques de pêche (figure 1.1) sont distinguées :
• La Grande Côte de Saint-Louis à Yoff
• Le Cap-Vert
• La Petite-Côte
• Le Sine-Saloum
• La Casamance .

L’activité de pêche artisanale est concentrée généralement sur la bande côtière à proximité des villages des pêcheurs. Cependant, il existe une pêche d’estuaire non négligeable dans certaines zones telles que le Sine-Saloum et la Casamance.

L’hydrologie de la zone est caractérisée par deux saisons bien distinctes :
• La saison chaude ou hivernage (de mai à novembre) : durant cette période la productivité est relativement faible du fait de la remontée des eaux chaudes du Golfe de Guinée,
• La saison froide à partir de novembre, caractérisée par la remontée des eaux froides (upwelling) déclenchée par les vents alizés. Ces masses d’eaux froides sont très riches en sels nutritifs et favorisent un développement de production primaire et ensuite de la biomasse animale.

L’ampleur de ces phénomènes saisonniers conditionne en grande partie l’abondance des espèces exploitées par la pêche artisanale maritime et par la pêche industrielle [8], [30].

La richesse spécifique des eaux sénégalaises est classée en cinq grands groupes [29] :
• Les stocks pélagiques côtiers qui évoluent en pleine eau ou en surface sur l’ensemble du plateau continental ;
• Les stocks pélagiques hauturiers qui sont présents en dehors du plateau continental ;
• Les stocks démersaux profonds entre 100 à 200 mètres de profondeur ;
• Les stocks démersaux côtiers ;
• Les stocks estuariens.

Parmi ces groupes d’espèces, la pêche artisanale exploite majoritairement les pélagiques et les démersaux côtiers, ainsi que les stocks estuariens.

L’environnement côtier du Sénégal 

Le Sénégal est un pays subsaharien doté d’une superficie terrestre d’environ 200000 km² et d’un espace maritime vaste de 180 895 Km². Ouverte sur l’Océan Atlantique, la côte maritime sénégalaise est principalement orientée nord-sud, elle s’étend de 16°00 N, 20°00 W, 16°30 W, 12°15 N. Avec une ouverture sur l’Océan Atlantique centre-est, le Sénégal bénéficie d’un littoral marqué par la presqu’île du Cap-Vert qui forme l’extrémité occidentale du continent à la pointe des Almadies, avec des îles (Gorée, Ngor), des îlots (les Madeleines) et une ample baie (Hann). Située entre 14°30 N et 15°00 N, la presqu’île du Cap-Vert divise la côte en trois grandes zones aux caractéristiques géomorphologiques distinctes qui sont, du nord au sud [31]:
• La Grande Côte qui est une zone dunaire avec un hinterland occupé par une frange côtière à forte activité agricole (les Niayes). Cette zone, fortement marquée par le delta du fleuve Sénégal, se prolonge vers le nord par la côte sud mauritanienne qui présente le même biotope. Dans cette zone, le littoral est principalement sableux avec un relief peu marqué, caractérisé essentiellement par des massifs dunaires ;
• La presqu’île du Cap-Vert, d’orientation est-ouest, est une zone à côte escarpée bordée de falaises, d’îles et de quelques plages sableuses ;
• La Petite Côte et la Casamance forment une zone basse au sud, d’abord sableuse jusqu’à Joal, puis parsemée d’embouchures de fleuves (les fleuves Sine-Saloum, Gambie et Casamance et les rivières du sud) occupées par la mangrove.

Le plateau continental a une superficie de l’ordre de 28 700 km2 et est limité par l’isobathe des 200 m [31]. Il est réparti sur 4700 km² de fonds de 0 à 10 m, 14200 km² de 10 à 50 m et 9800 km² de fonds de 50 à 200 m [9]. La largeur du plateau est très variable selon qu’on soit au Nord ou au Sud. De SaintLouis à la presqu’île du Cap-Vert, il se réduit de 27 milles à 5 milles nautiques. Au sud de la presqu’île du Cap-Vert, le plateau continental s’élargit progressivement pour atteindre 87 milles nautiques au niveau de la Casamance. Globalement, le plateau continental sénégalais est peu accidenté, avec toutefois, quelques canyons sous-marins dont le plus important sur la côte nord est la fosse de Kayar. Il existe également deux falaises sous-marines au sud de la presqu’île du Cap-Vert à 45 et 70 m de profondeur.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Chapitre 1: Le contexte de la pêche au Sénégal
Introduction
Présentation de la zone d’étude
L’environnement côtier du Sénégal
Les conditions hydrologiques et l’upwelling
La pêche au Sénégal
Pêche artisanale au Sénégal
1.6.1 Définition de la pêche artisanale
1.6.2 Les communautés de pêcheurs artisans
1.6.3 Les centres de débarquement
Conclusion
Chapitre 2: La pêcherie de sardinelles et sa dynamique
Introduction
Nature, sources et méthodologies de traitement des données
2.2.1 Les bases de données utilisées
2.2.2 Traitements préliminaires des données
2.2.3 Données économiques sur la pêcherie de sardinelles
La dynamique de la pêcherie de sardinelles
2.3.1 La ressource halieutique
2.3.2 La flottille de pêche aux petits pélagiques
2.3.3 L’exploitation de la pêcherie de sardinelles
2.3.4 Les marchés et les circuits de distributions
2.3.5 Les changements du marché national et international
2.3.6 Création d’emplois dans le secteur de la pêche
Les changements dans la pêcherie depuis un demi-siècle
2.4.1 Introduction du moteur
2.4.2 Introduction de la senne tournante
2.4.3 Les changements dans la politique sectorielle de la pêche au Sénégal
Conclusion
Chapitre 3: Modélisation bioéconomique
Introduction : Le modèle, un outil au service de la science
La modélisation bioéconomique et son utilité
Objectifs et rôle des modèles bioéconomiques
Structure des modèles bioéconomiques
Typologie des modèles bioéconomiques
3.5.1 Le modèle de Gordon-Schaefer et ses variantes
3.5.2 Les modèles bioéconomiques analytiques
3.5.3 Vers des modèles bioéconomiques plus réalistes et complexes
Limite des modèles bioéconomiques
Conclusion sur les modèles bioéconomiques
Chapitre 4: Un modèle bioéconomique spatialisé de l’exploitation des sardinelles au Sénégal
Introduction
Dynamique de la ressource
4.2.1 Evolution des cohortes dans le temps
4.2.2 Spatialisation de la ressource biologique
4.2.3 Recrutement
Les captures
Dynamique de flottille
4.4.1 Détermination de la capacité de pêche
4.4.2 Répartition spatiale des flottilles
4.4.3 Détermination de la flotte active
Composantes économiques du modèle
4.5.1 Revenu
4.5.2 Les coûts d’exploitation
4.5.3 Profit et marge privés
4.5.4 Rente économique
4.5.5 Valeur ajoutée
4.5.6 Revenus nets de l’Etat et subventions
4.5.7 Emploi
Variables de contrôle du modèle
4.6.1 Licences et redevances de pêche
4.6.2 Fermetures spatio-temporelles
4.6.3 Coûts fixes et variables, subventions et exemptions de taxes
4.6.4 Limites de captures
Autres paramètres de simulation
Variables de sortie du modèle
Une simulation sans prise en compte de la relation stock-recrutement
4.9.1 Dynamique de la ressource
4.9.2 Dynamique de l’activité
4.9.3 Captures
4.9.4 Résultats économiques
4.9.5 Revenus
4.9.6 Coût
4.9.7 Profit
4.9.8 Revenus du travail
4.9.9 Les revenus de l’Etat
4.9.10 Valeur ajoutée nette, nette de subventions
4.9.11 La rente économique annuelle courante
4.9.12 Rente économique, valeur ajoutée et autres indicateurs actualisés
4.9.13 Les optimums
Reconsidération des hypothèses initiales
4.10.1 Dynamique endogène de la capacité de pêche
4.10.2 Croissance de l’efficacité technique
4.10.3 Prise en compte de l’incertitude environnementale
4.10.4 Existence d’une relation stock recrutement
Conclusion
CONCLUSION GENERALE

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