Le concept de syndrome de réponse inflammatoire systémique

L’inflammation systémique

Les réponses inflammatoires systémiques septique et aseptique

Le concept de syndrome de réponse inflammatoire systémique 

L’inflammation est un processus de réponse stéréotypé de l’organisme à une agression externe ou interne. On peut distinguer les situations d’inflammation aigüe et celles d’inflammation chronique, par exemple dans les situations de néoplasie ou d’athérosclérose. Bien que la base physiopathologique soit commune à ces deux types d’inflammation, leurs étiologies, leur intensité ou les voies de signalisation en jeu sont souvent différentes. L’inflammation aigüe localisée est liée à la libération locale de médiateurs inflammatoires (histamine, bradykinines, médiateurs lipidiques …) conduisant à un œdème avec infiltration leucocytaire secondaire, réalisant le classique tableau « rougeur-chaleurdouleur ». Au-delà de cette inflammation localisée qui est fréquemment rencontrée dans les situations d’infection locale ou de traumatismes légers, certaines situations pathologiques vont conduire à des tableaux d’inflammation aigüe « généralisée » avec atteinte de plusieurs organes. Un syndrome clinique attestant d’une réponse inflammatoire systémique a ainsi été décrit dès 1992 : il s’agit du Syndrome de Réponse Inflammatoire Systémique (Systemic Inflammatory Response Syndrome (SIRS)) [1]. Celui-ci associe plusieurs éléments dont la présence d’au moins deux d’entre eux définit un SIRS :
– Température corporelle > 38,3 °C ou < 36 °C
– Fréquence cardiaque > 90/min
– Fréquence respiratoire > 20/min ou hyperventilation avec PaCO2 < 32 mmHg en air ambiant
– Leucocytose > 12.000/mm3 ou < 4.000/mm3 ou > 10 % de cellules immatures .

Sur le plan clinique, de très nombreuses situations peuvent conduire au tableau de SIRS : infection microbienne, polytraumatisme, pancréatite aigüe, circulation extra-corporelle, ischémie de membre, arrêt cardiaque récupéré, choc hémorragique, etc. Sur le plan nosologique, il est classique de distinguer le SIRS septique du SIRS aseptique dont les triggers et voies de signalisation mises en jeu à la phase initiale sont sensiblement différents.

Inflammation systémique infectieuse : le sepsis

La toute première définition du SIRS vient d’une conférence de consensus cherchant à mieux définir les critères de sepsis [1]. Jusqu’à récemment, le sepsis était un SIRS d’origine infectieuse: le sepsis sévère associait sepsis et hypotension artérielle répondant au remplissage vasculaire (et/ou associé à la dysfonction d’au moins un organe) et le choc septique correspondait à un sepsis avec une inadéquation entre le besoin tissulaire et l’apport effectif en oxygène [1]. Depuis 2016, ces définitions ont été modifiées afin de simplifier l’identification et permettre une prise en charge plus précoce. Ainsi, la définition du sepsis est maintenant l’association d’une infection avec un score SOFA (Sequential Organ Failure Assessment ) supérieur ou égal à 2 points (ou une augmentation du score supérieure ou égale à 2 points s’il existait une dysfonction d’organe avant l’infection) [2]. Le concept de sepsis sévère a disparu et le choc septique est maintenant défini par les trois éléments suivants :

– Présence d’un sepsis (infection + SOFA score ≥ 2) ;
– Hypotension artérielle persistante nécessitant des vasopresseurs pour maintenir une pression artérielle moyenne (PAM) ≥ 65 mm Hg ;
– Taux sérique de lactate > 2 mmol/L malgré une expansion volumique « adéquate».

Le sepsis est un problème de santé publique avec une incidence en constante augmentation qui représente maintenant 10 à 20 % des admissions en réanimation [3,4]. Il reste une cause majeure de morbi-mortalité avec, selon les études, un taux de mortalité oscillant de 20 à 50% pour le choc septique [4–6]. Enfin, l’impact économique du sepsis est lourd avec un coût hospitalier oscillant de 23 000 à 34000 euros par patient septique admis en réanimation dans un pays occidental [7]. Malgré une meilleure connaissance de sa physiopathologie, des traitements dits « spécifiques » font toujours défaut, ce qui a conduit l’Organisation Mondiale de la Santé à déclarer en 2017 le sepsis comme devant être une priorité sanitaire mondiale [8].

Le choc septique se caractérise par la présence d’une défaillance d’organe. Toutes les fonctions vitales peuvent être atteintes dans ce contexte :

– L’atteinte myocardique : au-delà de la dysfonction endothéliale et vasculaire (cf. infra), il existe fréquemment une atteinte myocardique impliquée dans la majoration de la défaillance hémodynamique. Cette dysfonction concerne environ 50% des patients, dans sa forme la plus grave elle peut prendre la forme d’un choc cardiogénique septique avec altération de la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) [9]. Les données sur les liens entre dysfonction diastolique ou ventriculaire droite sont contradictoires bien qu’il semble qu’une altération de ces deux fonctions soit associée à la morbi-mortalité en réanimation [10]. La noradrénaline fait partie du traitement symptomatique du choc septique mais la correction rapide de la vasoplégie peut parfois, en majorant brutalement la postcharge, décompenser une cardiopathie septique avec apparition d’un altération de la FEVG induite par cette postcharge [11]. La physiopathologie de cette défaillance n’est pas totalement élucidée et implique probablement plusieurs mécanismes aspécifiques: œdème myocardique, altération de la microcirculation du réseau coronarien, libération de radicaux libres cardiomyocytaires, lésion directes induites par les endotoxines, dysfonction mitochondriale, anomalies des flux calciques .

– L’atteinte pulmonaire : le Syndrome de Détresse Respiratoire Aigüe (SDRA, caractérisé par un rapport PaO2/FiO2 ≤ 300 mmHg) est une complication bien décrite du sepsis qui est sa principale étiologie [12]. Sa survenue au cours du choc septique augmente le risque de mortalité de 25 à 60% [12,13]. Dans un travail mené chez 703 patients septiques, l’existence d’un variant génotypique du gène codant l’angiopoïetine 2 (un marqueur de perméabilité endothéliale) et les niveaux circulants d’angiopoïetine 2 étaient tous les deux associés à la survenue d’un SDRA [14]. Ces données suggèrent un effet direct de la dysfonction endothéliale dans la survenue du SDRA septique. L’activation de la cascade de la coagulation, elle aussi induite par une dysfonction endothéliale systémique, est à l’origine d’une atteinte pulmonaire avec l’apparition de micro-thrombi pulmonaires et l’activation de l’endothélium pulmonaire qui devient ainsi perméable [15]. Enfin, l’action toxique directe des cytokines et des endotoxines sur l’endothélium pulmonaire est une autre cause bien admise de survenue d’un SDRA au cours du sepsis [16]. Si les stratégies de ventilation protectrice ont montré leur efficacité dans la réduction de la mortalité liée au SDRA, il n’existe aucun traitement pharmacologique préventif ou curatif ciblé sur ces lésions.

– L’atteinte rénale : l’Acute Kidney Injury septique des anglo-saxons correspond à une atteinte multifactorielle de la fonction rénale. Il est aujourd’hui catégorisé suivant la classification Kidney Disease Improving Global Outcomes (KDIGO) en fonction des chiffres de créatinine et de diurèse. Son incidence oscille de 22 à 53% selon les études récentes [17–19]. Chez le patient septique, l’Acute Kidney Injury est associé à une augmentation de la durée de séjour et à une surmortalité [19]. Il peut se développer y compris si le débit cardiaque et la macro-circulation sont maintenus, suggérant des atteintes liées au sepsis, indépendantes de la perfusion rénale. Une dysfonction de l’endothélium rénal avec la perte de l’adéquation entre tonus des artérioles glomérulaires afférentes et efférentes pourrait aboutir à une diminution de la pression de filtration glomérulaire indépendamment du débit cardiaque [19,20]. De plus, l’épuration des cytokines et endotoxines est suspectée d’être une pourvoyeuse de lésions tubulaires par effet toxique direct [21]. De nombreuses questions restent en suspens concernant la prise en charge de l’Acute Kidney Injury septique : quel biomarqueur pour le détecter précocement ? Quand initier l’épuration extra-rénale ? Quel soluté d’expansion volémique privilégier pour limiter son incidence ?

– L’atteinte neurologique : l’atteinte du système nerveux central concerne environ 70% des patients septiques et peut aller de la simple confusion au tableau de coma [22]. Bien que sa physiopathologie soit insuffisamment comprise, ses étiologies semblent multiples : bas débit cérébral lié à l’état de choc, stress induit par les espèces réactives de l’oxygène au niveau neuronal, altération des neurotransmissions cholinergique et dopaminergique [16]. Certains auteurs suggèrent, à partir de données pré-cliniques, que l’altération endothéliale de la barrière hémato-encéphalique, responsable d’une hyperperméabilité vasculaire, pourrait induire un œdème cérébral significatif d’autant plus symptomatique que survenant dans un organe situé dans une cavité inextensible [23]. Le fait que la perte de l’auto-régulation cérébrale, témoin de l’altération vasculaire locale, soit associée au delirium chez le patient septique semble être en faveur de cette hypothèse sur le lien entre dysfonction endothéliale et défaillance neurologique septique .

– L’atteinte hépatique: le foie, qui synthétise une grande partie des protéines de la réponse inflammatoire aigüe (fibrinogène, C-reactive protein, cytokines…), est un organe central dans la réaction de l’organisme à l’infection [25]. Plusieurs éléments rendent l’évaluation de l’incidence de la défaillance hépatique septique difficile : absence d’une définition clairement établie, organe longtemps asymptomatique jusqu’à une défaillance terminale, nombreux facteurs pouvant biaiser l’interprétation des paramètres biologiques hépatiques (baisse du TP et coagulopathie, perturbations des transaminases et syndrome de lyse, hyperbilirubinémie fréquemment induite par les bêtalactamines, etc.). Selon la définition retenue, son incidence semble osciller de 1 à 34% [16,26]. Dans un travail s’intéressant à l’incidence de l’hépatite hypoxique à l’admission en réanimation (transaminases > 5N sans autre cause retrouvée), les auteurs ont retrouvé une incidence de 4% d’hépatite dont 30% étaient liées à un sepsis [27]. Le foie est un organe relativement résistant à l’hypoxie ce qui explique probablement sa moindre défaillance lors du sepsis. Du fait des limites liées à sa définition et à de nombreux facteurs confondants, il existe peu de données sur l’impact de la défaillance hépatique sur la morbi-mortalité au cours du choc septique bien que l’importance de la cytolyse semble associée à la mortalité en réanimation .

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
I- L’inflammation systémique
1. Les réponses inflammatoires systémiques septique et aseptique
1. Le concept de syndrome de réponse inflammatoire systémique
2. Inflammation systémique infectieuse : le sepsis
3. Inflammation systémique aseptique : l’exemple de la chirurgie cardiaque sous circulation extracorporelle
2. Initiation et physiopathologie de la réponse inflammatoire systémique
1. Reconnaissance de l’agression
2. Réponse pro-inflammatoire
i. Activation leucocytaire
ii. Synthèse cytokinique
iii. Espèces réactives de l’oxygène
3. Activation du complément
4. Activation de la coagulation
5. Immunosuppression et réponse anti-inflammatoire
6. Rôle des cellules circulantes non-leucocytaires dans la réponse inflammatoire systémique aigüe
3. Physiopathologie de la dysfonction vasculaire lors d’une réponse inflammatoire systémique
1. Rappels de physiologie endothéliale
i. L’endothélium
ii. Les jonctions intercellulaires
iii. Le glycocalyx
iv. Les cellules musculaires lisses
2. Effets de l’inflammation systémique sur l’endothélium
i. Adhésion leucocytaire
ii. Dérégulation de la physiologie du NO
iii. Dégradation du glycocalyx
iv. Lésions directes des cellules endothéliales
3. Impact clinique de la dysfonction endothéliale lors de l’inflammation systémique aigüe
i. Vasoplégie et dysfonction vasculaire
ii. Liens entre dysfonction endothéliale induite par le SIRS et morbi-mortalité chez l’Homme
iii. Dysfonction endothéliale liée au SIRS : quelle thérapeutique ?
II- Le stress du réticulum endoplasmique
1. Physiologie du réticulum endoplasmique dans la maturation protéique
2. Mécanismes moléculaires du stress du réticulum endoplasmique
1. Stress du réticulum endoplasmique et Unfolded Protein Response
2. Voies de signalisation de l’Unfolded Protein Response
i. La voie Inositol-Requiring Protein-1 alpha
ii. La voie Protein Kinase RNA (PKR)-like ER Kinase
iii. La voie Activating Transcription Factor 6
iv. Fonctions communes des voies de l’UPR
3. Stress du réticulum endoplasmique et dysfonction endothéliale
3. Stress du réticulum endoplasmique et pathologies inflammatoire aigües
1. Dans des modèles animaux
2. Chez l’Homme
4. Stress du réticulum endoplasmique et protéine tyrosine phosphatase 1B
1. La protéine tyrosine phosphatase 1B
i. Phylogénie et localisation cellulaire
ii. Régulation de l’activité
2. Protéine tyrosine phosphatase 1B et pathologies
i. Pathologies métaboliques
ii. Pathologies cardiovasculaires et inflammatoires
3. Liens entre protéine tyrosine phosphatase 1B et stress du réticulum endoplasmique
OBJECTIF DE LA THESE
RÉSULTATS
I- Cinétique et expression des voies de l’Unfolded Protein Response au cours du SIRS septique
II- Cinétique et expression des voies de l’Unfolded Protein Response au cours du SIRS aseptique (chirurgie cardiaque sous CEC)
DISCUSSION GENERALE ET SYNTHESE
CONCLUSION

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