Le complexe Ravageurs-Agent de lutte biologique

Le riz (Oryza sativa L.) et le maïs (Zea mays sp) occupent respectivement le premier et le second rang des céréales les plus consommés à Madagascar. Si le riz constitue l’aliment de base de la quasi-totalité de la population le maïs, à part son rôle dans l’alimentation animale, tient une place importante en tant que vivrier surtout dans le Sud, le Sud Ouest, les Hauts Plateaux et le Moyen Ouest de Madagascar (MRSTD/ FOFIFA-CENRADERU, 1989).

Ces deux spéculations sont toutes exploitées partout à Madagascar avec un niveau de production insuffisante pour satisfaire la demande de la consommation nationale. Pour la région d’Alaotra, le rendement moyen est de 3 tonnes à l’hectare pour le riz, et 0,9 tonne à l’hectare pour le maïs (DRDR Ambatondrazaka, 2005). Pourtant, cette région constitue l’un des greniers à riz de Madagascar avec 80.000 tonnes de riz exportés chaque année vers Antananarivo (PRD AlaotraMangoro 2005). C’est également l’une des régions de Madagascar qui possède plus de 100.000 hectares de superficie rizicultivable. Pourtant, actuellement, seulement 10.000 hectares bénéficient effectivement d’une bonne maîtrise d’eau (C.DURAND & S. NAVE, 2007). Cette situation a favorisé le développement des cultures sur « tanety » depuis les années 80 afin d’y pratiquer des cultures pluviales.

Zone d’études

Située dans la partie Nord Est des Hautes Terres de Madagascar, la sous-région de Lac Alaotra (Région Alaotra Mangoro, D.R.D.R. Ambatondrazaka, Faritany Toamasina) forme une cuvette encastrée dans le vaste « Rift » du Mangoro. Ce dernier est lui-même délimité à l’Ouest par le grand escarpement disséqué (faille majeure) de l’Angavo, et à l’Est par la descente montagneuse très accidentée vers l’Océan Indien. Trois districts constituent cette sous-région : Ambatondrazaka, Amparafaravola, et Andilamena.

C’est une vaste région de 18.965 km² qui abrite le plus grand lac de Madagascar d’où elle tire son nom, le Lac Alaotra ayant une superficie de 24.000 hectares et d’une profondeur de 5 à 8 mètres. Ce lac est alimenté par d’immenses bassins versants de 7.000 kilomètres. La cuvette du Lac Alaotra se situe à 750 m d’altitude, environnée des reliefs culminant entre 750 mètres à 1500 mètres d’altitude. L’agriculture y est surtout dominée par la riziculture et la maïsiculture.

Le climat y est marqué par deux saisons bien distinctes : saison sèche fraîche (Avril à Août), et saison pluvieuse (Novembre à Mars). Les précipitations annuelles moyennes voisinent les 1.200 millimètres. La température moyenne se situe autour de 17°C en saison sèche et de 24°C en saison de pluies. La région peut être divisée en deux zones à caractéristiques pédologiques différentes (M. RAUNET, 1984) : les zones hautes périphériques à la cuvette (au sol de type ferralitique, pH de 4 à 6,5, capacité de rétention d’eau utile faible) inaptes à la riziculture irriguée, et les zones basses (aux sols hydromorphes de fertilité variable) offrant une bonne option pour la riziculture irriguée.

Le complexe Ravageurs-Agent de lutte biologique

Heteronychus sp BURMEISTER, 1847 

Systématique
Règne : Animal
Embranchement : Arthropodes
Classe : Insectes
Sous-classe : Pterygotes
Superordre : Coleopteroides
Ordre : Coleopteres
Sous-ordre : Polyphaga
Groupe : Coleopteres noirs (« Black beetle » en Anglais)
Superfamille : Scarabaeoidae
Famille : scarabaeidae
Sous-famille : Dynastinae (S. ENDRODI, 1985)
Genre : Heteronychus
Espèce : Heteronychus sp .

A Madagascar, le nom vernaculaire des Heteronychus sp varie selon la région : « Voana » dans la région du Lac Alaotra, « fano » sur les hauts plateaux, « behatoka» à l’est, « voangorimainty »…Les larves sont communément appelées « SAKIVY» pour plusieurs régions.

Bio-écologie
Heteronychus sp sont des insectes polyphages à mœurs crépusculaires. Ils vivent pour une grande partie de leur vie dans le sol : ce sont des insectes terricoles. Parmi les six espèces présentes à Madagascar, trois sont ubiquistes et colonisent presque toutes les zones de cultures pluviales (riz, maïs, arachide) où elles causent beaucoup de dégâts (RAZAFINDRAKOTO C., comm. pers.). Ce sont Heteronychus plebejus, H. arator, et H. bituberculatus (PLI, 1990). C’est Heteronychus plebejus qui constitue le principal fléau pour les cultures pluviales dans la région de Lac Alaotra. Les adultes rongent les plants de graminées au niveau du collet, mais peuvent aussi s’attaquer à d’autres cultures importantes telles l’arachide, le tabac, le haricot, et la pomme de terre. Les larves vivent principalement de matières organiques dans le sol.

Heteronychus sp sont des insectes univoltins holométaboles. Leur développement passe par quatre stades : stade embryonnaire (œufs), stade larvaire, stade nymphal, et stade imaginal (adulte). La durée moyenne de leur développement est de 130 jours. Cependant, cette durée varie suivant l’espèce en question. Chaque espèce a sa propre spécificité du point de vue biotope et moment de début de ponte (RAJAONARISON J. H. J et RAKOTOARISOA D., 1994). Les caractéristiques des pontes varient en fonction du régime alimentaire et les cultures hôtes de l’insecte . Toutefois, la durée de la ponte reste la même (5 à 6 mois). Lors de la ponte, les œufs (40 à 60 par femelle) sont déposés par les femelles au niveau du système racinaire du riz ou du maïs.

Leurs larves sont des ‘scarabéiformes’ : corps charnus et arqué, tête brune toujours inclinée vers le bas. Elles passent par trois stades de développement L1, L2, et L3, dont le stade L3 est le plus long et le plus favorable au développement du Metarhizium anisopliae. Elles vivent dans les couches superficielles du sol à une profondeur variable, allant de 20 à 50cm, en fonction surtout de l’humidité du sol, Heteronychus sp se développent sans diapause. Comme chez tous les vers blancs, les températures trop basses peuvent causer leur mort. L’intervalle de température optimale pour leur développement est de 20°C à 25°C. Ces lar ves ne peuvent pas survivre durant plusieurs mois à une température au dessus de 30°C. En cas d’ excès d’eau, elles peuvent descendre jusqu’à une profondeur de 50 cm de profondeur dans le sol (E.A. HEINRICHS & al. 1994). En cas de longue période de submersion, elles succombent puisqu’elles ne peuvent pas se nourrir à cette profondeur en plus de l’asphyxie. Dans le cas contraire, si elles survivent, leur attaque serait très sévère.

Dans la région de Lac Alaotra, le biotope d’Heteronychus plebejus est très proche de celui d’H. arator : dans les sols de « baiboho » et des « tanety ». Tandis que H. bituberculatus se trouve surtout sur rizière à mauvaise maîtrise de l’eau ou Rizière à irrigation aléatoire et les « zetra » (Cyperus madagascariensis), c’est-à-dire dans les zones de marais.

Présence aux champs et dégâts 

Dans la région du Lac Alaotra, les dégâts dûs à Heteronychus sp sur les cultures pluviales ont pris de l’importance à partir de l’année 1987 (PLI, 1990 ; RAZAFINDRAKOTO C et al, 2007). Les dégâts sont surtout dûs aux adultes autochtones plutôt que les migrants, tout particulièrement ceux d’H. plebejus. L’émergence des adultes coïncide parfaitement au cycle des cultures pluviales. En outre, contrairement aux autres insectes dévastateurs de cultures, Heteronychus sp ne font pas de migration. Leur déplacement se fait surtout d’une parcelle à une autre sur une surface restreinte (RAZAFINDRAKOTO C, comm. pers.).

Les pertes peuvent toucher en moyenne 5 à 10 % de la récolte, voire la totalité de la production au champ (DELUCCHI, 1994) en cas d’une infestation sévère. En fait, celles-ci sont fonction de la densité de la population présente dans la parcelle, mais également de la caractéristique génétique de la variété cultivée (d’après L. SÉGUY, recherche en cours au Lac Alaotra, Comm. pers). Les études en laboratoire ont montré un seuil de nuisibilité d’Heteronychus sp égal à 5 couples aux 16m² soit 0,625 individus au m² et un seuil de tolérance économique égal à 2 couples aux 16 m² soit 0,25 individu au m².

Les plants peuvent être attaqués dès le stade plantule jusqu’au 60ème jour de la végétation (RAKOTOARISOA H. L., 2007). Les attaques peuvent être localisées ou généralisées sur toute la parcelle. Dès fois, elles peuvent décimer toute la culture en place.

Les symptômes sont les mêmes chez les plants attaqués : coloration jaune des plants qui flétrissent, se dessèchent et les plants meurent. Ils s’arrachent facilement à la main. Lors des attaques, les adultes rongent au niveau du collet. Ce qui laisse des traces visibles lors de l’arrachage des plants attaqués.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 PRÉSENTATION GÉNÉRALE
1.1 Zone d’études
1.2 Le complexe Ravageurs-Agent de lutte biologique
1.2.1 Heteronychus sp BURMEISTER, 1847
1.2.2 Les champignons entomopathogènes et leur mode d’action en général
1.2.3 Metarhizium anisopliae (Metschnikoff) Sorokin, 1883
2 MATÉRIELS ET MÉTHODES
2.1 Les parcelles à Metarhizium anisopliae en Station (Milieu contrôlé)
2.1.1 Dispositif expérimental
2.1.2 Traitements dans les parcelles entomopathogènes
2.1.3 Conduite de cultures
2.1.4 Observations en Station
2.2 Les parcelles à Metarhizium anisopliae en milieu paysan
2.2.1 Localités
2.2.2 Observations en milieu paysan
2.3 Analyse des résultats
3 RÉSULTATS, INTERPRÉTATIONS ET DISCUSSIONS
3.1 Rappel des résultats antérieurs en station
3.1.1 Evolution de l’effectif d’Heteronychus sp récoltés
3.1.2 Evolution des dégâts dans les parcelles en station
3.2 Résultats d’observation 2008-2009
3.2.1 Resultats en station
3.2.2 Résultats en milieu paysan, campagne 2008-2009
3.2.3 Impact des dégâts sur le rendement
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Annexe

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