Le champ théorique de l’urbanité
Particularités théoriques de ce concept
Commençons par préciser la difficulté de définition que pose le terme d’urbanité. En effet, on le trouve très souvent employé dans des ouvrages ou articles sans faire l’objet d’une définition de la part de l’auteur alors même que ce terme peut être qualifié de polysémique. On sent une difficulté importante, pour les chercheurs et les aménageurs à lui conférer une définition et ce dans toutes les spécialités auxquelles l’urbanité se réfère.
Ceci peut s’expliquer par l’aspect très abstrait, très conceptuel de ce terme que l’on “sent” assez facilement mais qu’il est difficile de traduire par des mots. Les notions ressentiment, représentations collectives et individuelles y jouent un rôle à ne pas négliger mais dont l’appréciation est très difficile à cerner. L’analyse théorique qui suit ne peut donc être ni complète ni exhaustive vis-à-vis de ce que recouvre la notion d’urbanité puique l’on analysera uniquement les concepts ayant fait l’objet d’une définition par les auteurs. Je n’essayerai pas de décoder les sens attribués à l’urbanité dans les écrits où cela paraît.
D’autre part, de nombreuses lectures relèvent du discours basé principalement sur la succession des idéologies dominantes en la matière depuis les années 60. Ces discours idéologiques ne relèvent pas forcément d’une production scientifique et ne sont pas pertinents dans un travail de recherche.
Cadre général théorique de l’urbanité
L’urbanité s’inscrit dans un cadre relativement large des questionnements concernant l’espace urbain, en tant que lieu d’expression des caractéristiques de la ville d’aujourd’hui. Cela se place dans les débats qui se posent sur la ville et l’urbain et toutes les différences que cela englobe. L’urbanité permet aussi de qualifier, de caractériser une certaine expression urbaine.
L’urbanité caractérise l’urbain mais plus particulièrement la ville, lieu physique de pratiques des acteurs de la ville.
Selon Françoise Choay, l’urbain constitue l’aspect systémique qui englobe” la ville. Ces deux termes ne paraissent pas antagonistes mais complémentaires. L’urbanité se trouve plus clairement exprimée dans la ville, plus diverse et surtout plus dense que l’urbain. C’est la raison pour laquelle on rapproche souvent urbanité, centralité et ville historique. C’est en ces lieux que l’on ‘sent” plus clairement l’urbanité mais y est-elle pour autant plus réelle?
Cependant, exploiter l’urbanité, exploiter la ville (au sens positif du terme) suppose que l’on souhaite le faire totalement, de façon maximale, autant à “l’échelle” de la ville qu’à “l’échelle” de l’urbain (au sens spatial et temporel de l’idée que les gens se font de ces deux notions). Exploiter la ville passe aussi par exploiter le système auquel elle est apparentée. L’urbanité est donc le fruit de la ville mais aussi de l’urbain : même si on la “sent” quelquepart, en un endroit donné, elle est la conséquence d’un environnement beaucoup plus complexe. On peut même se poser la question suivante : que serait l’urbanité sans la ruralité?
L’urbanité se place donc dans le cadre plus général des questionnements sur “ce qu’est la ville” mais également ce qu’est le système auquel la ville appartient ou duquel elle dépend.
L’urbanité comme corrélation physique entre densité et diversité
Cette théorie est le fruit du travail de Jacques Lévy et Michel Lussault auquel o abouti entre autre la construction des modèles d’Amsterdam et de Johannesburg .
L’urbanité serait, selon ces auteurs, le fruit de la correlation entre diversité et densité en milieu urbain, c’est-à-dire que plus la densité et la diversité sont fortes et leurs interactions importantes, plus l’urbanité est grande donc plus le caractère urbain de l’espace est affirmé.
L’urbanité peut alors être considérée comme ‘l’indicateur de l’état spécifique de l’organisation des objets de société au sein d’une situation urbaine donnée’ .On peut alors imaginer un gradient d’urbanité en fonction de facteurs spatiaux et temporels permettant des comparaisons spatiales et temporelles.
“A ce couplage s’ajoute des réalités immatérielles liées à la société et à ses valeurs, idéologies, représentations ainsi que des réalités morphologiques de dispositions des objets urbains”.
Selon ces données, les auteurs différencient plusieurs géotypes selon les degrés d’urbanité qui va du géotype central jusqu’au non urbain. Ces auteurs accordent beaucoup d’importance à la correlation entre centralité et urbanité faisant du lieu où l’urbanité est la plus grande, le lieu où la centralité s’exprime le plus. Le gradient diminuerait donc du centre vers la périphérie. A partir de ce postulat a été construit par Jacques Lévy les deux modèles antagonistes de villes : le modèle d’Amsterdam, où s’exprime la relation forte entre densité et urbanité (ville compacte) et le modèle de Johannesburg (ville diffuse). Selon ce modèle, la ville compacte est la seule à permettre et vouloir l’urbanité par le fait de favoriser le maximum de diversité dans le minimum d’étendue. Le modèle de Johannesburg, au contraire, mise davantage son développement sur l’accessibilité à un grand nombre d’objets et de services. Ces deux modèles constituent deux façons de régler les difficultés liées à la distance et on se rend compte que le modèle réglant ces difficultés par la compactibilité est plus performant en terme de développement de l’urbanité. Cependant, ces deux modèles se côtoient souvent dans une même ville, et si le premier trouve sa place dans la légitimité qu’il lui est de plus en plus accordée, le deuxième est le modèle majoritaire dans le monde actuellement.
|
Table des matières
Introduction
Partie I Analyse bibliographique, visions théoriques relatives à l’urbanité
I. Le champ théorique de l’urbanité
A. Particularités théoriques de ce concept
B. Cadre général théorique de l’urbanité
C. L’urbanité comme corrélation physique entre densité et diversité
D. La vision très sociale de l’urbanité
E. Constructivisme, réalisme et urbanité
F. Cadre théorique de la recherche
Il. L’urbanité et la ville
A. Urbanité, convivialité et civilité
B. Coprésence, interactions et urbanité
C. Le rapport individu-société dans la compréhension de l’urbanité
D. Urbanité et lien social
E. Usages, aménagement et urbanité
F. Temps et urbanité
III. Urbanité et aménagement : validation de la problématique et des hypothèses de recherche
A. Les difficultés “d’aménager l’urbanité”
B. L’appropriation de l’espace comme processus favorisant l’urbanité
En resume de la première partie
Partie II Méthode de travail de terrain
I. Mise en oeuvre de la méthode
H. Cadre général de la méthode
A. L’objet d’appréciation:
B. Postulats de départ:
III. La grille d’analyse : outil général de la méthode
A. Choix des critères
B. Définitions des critères
C. Pondération et hiérarchisation des critères
IV. La méthode d’analyse de terrain
A. Méthode de l’observation directe
B. Méthode des récits de vie
V. La méthode d’analyse des projets
A. Analyse des documents
B. Les apports des récits de vie sur l’analyse des projets
VI. Confrontation des deux niveaux d’analyse : le projet et le terrain
En résumé de la deuxieme partie
partie III Validation empirique de la méthode choisie: présentation et résultats
I. Le terrain d’expérimentation
A. Le quartier de Maurepas
B. L’espace public étudié: le jardin du bonheur et la place Bernanos
II. Les projets et discours : quelle urbanité imaginée?
A. Le projet Jardin du Bonheur
B. le projet de la place Bernanos
C. Le projet global d’aménagement de l’espace public à Maurepas : quelle urbanité recherchée?
III. L’espace public, quelle urbanité réelle?
A. Application de la méthode
B. Résultat de l’enquête de terrain du Jardin du Bonheur
C. Résultat de l’enquête de terrain de la Place Bernanos
D. Les récits de vie
E. le bilan sur l’urbanité du terrain
IV. Mise en parallèle des résultats
En résumé de la troisième partie
Conclusion generale
BIBLIOGRAPHIE
Annnexe
Télécharger le rapport complet