Le cancer
Généralités
À l’échelle mondiale, le cancer représente la deuxième cause de mortalité, après les maladies cardiovasculaires. Il est la première cause de mortalité chez l’homme et la deuxième chez la femme. En 2012, 14,1 millions de cas ont été recensés dans le monde, et on estime que ce chiffre atteindra 24 millions en 2035. Les cancers les plus fréquents sont les cancers du poumon, du sein, du colon et de la prostate. Le cancer résulte d’une multiplication incontrôlée de cellules non fonctionnelles dans un organe ou une partie du corps. Les cellules cancéreuses sont issues de cellules « normales » dont l’ADN a subi une ou plusieurs mutations. Il en résulte un phénotype cellulaire qui stimule la prolifération des cellules et inhibe les signaux limitant leur croissance. Les cellules cancéreuses ne sont pas sujettes à l’apoptose et peuvent conduire à des métastases une fois qu’elles ont migré dans le corps par voie sanguine et/ou lymphatique.
Dans les années 1970, deux familles importantes de gènes ont été découvertes : les oncogènes et les gènes suppresseurs de tumeurs. Les oncogènes, issus de mutations de gènes normaux appelés protooncogènes, sont responsables de la division incontrôlée de cellules. Les gènes suppresseurs de tumeurs sont, quant à eux, des gènes normaux qui contrôlent la division cellulaire, la réparation de l’ADN et envoient des signaux de mort cellulaire. Dans le cas du cancer, les gènes suppresseurs de tumeurs sont inhibés et les oncogènes sont activés, ce qui entraîne une prolifération cellulaire incontrôlée.
Il existe quatre grandes catégories de cancers :
– Les cancers solides : les tumeurs solides se développent dans tout type de tissus, 90 % des cancers humains sont des cancers solides.
– Les cancers liquides (ou sanguins).
– Les cancers métastatiques.
– Les cancers secondaires (effet secondaire d’un traitement anti-cancéreux antérieur).
Les traitements actuels du cancer et leurs effets secondaires
Selon l’état d’avancement du cancer, le type de cancer et du fait de sa variabilité d’un patient à un autre, il existe plusieurs types de traitements :
La chirurgie
La chirurgie peut être utilisée comme moyen de prévention, de diagnostic et de traitement du cancer. Dans le cas de la chirurgie préventive, il s’agit de retirer un tissu susceptible de devenir cancéreux et ce, même en absence de tout signe avant-coureur au moment de l’intervention. Elle est réalisée pour les personnes présentant des facteurs de risques élevés. La chirurgie est pratiquée par exemple pour les femmes qui ont des antécédents familiaux de cancer du sein et qui ont hérité d’une modification génétique au niveau d’un gène suppresseur de tumeurs (au niveau de BRCA1 ou BRCA2 par exemple). Chez ces patientes, on peut préconiser une ablation préventive du sein. Lorsqu’elle est utilisée comme outil de diagnostic, la chirurgie permet la réalisation de biopsies et l’analyse des cellules afin de déterminer leur nature cancéreuse ou non et, le cas échéant, le type de cancer dont il s’agit. La chirurgie peut aussi permettre d’évaluer le stade d’avancement d’un cancer. Dans ce cas ce sont les nodules lymphatiques ainsi que les organes à proximité de la tumeur qui sont examinés, ce qui permet d’orienter une décision dans le traitement à appliquer. Lorsqu’un cancer solide n’a pas métastasé, il peut être classiquement éradiqué par la chirurgie, en association parfois avec d’autres traitements comme la chimiothérapie ou la radiothérapie. Lorsque le cancer ne peut être retiré totalement, d’autres traitements sont utilisés en complément de la chirurgie.
La chirurgie n’est efficace que lorsque le cancer est présent dans une seule partie du corps. S’il est métastasé, il faut alors envisager des traitements à plus large spectre.
La radiothérapie
La radiothérapie consiste à irradier les cellules cancéreuses à l’aide de rayons ionisants. Elle est utilisée pour traiter environ 50 % des patients atteints de cancer. Il s’agit d’un traitement localisé, avec peu d’effets secondaires sur les cellules saines. Il existe deux types de radiothérapie : la radiothérapie externe et la curiethérapie. Dans le cas de la radiothérapie externe, les rayons sont émis en faisceau par une source située à proximité du patient et traversent la peau pour atteindre la tumeur. Dans le cas de la curiethérapie, la source radioactive est implantée dans le corps du patient. Même si la radiothérapie traite des parties ciblées du corps, des effets délétères peuvent se manifester conduisant au développement d’un cancer secondaire (bien que le risque soit faible) à cause de l’altération des tissus sains.
La chimiothérapie
La chimiothérapie (utilisation de médicaments « chimiques » pour soigner le cancer) permet de cibler des cellules cancéreuses quelle que soit leur localisation dans le corps. Elle peut être utilisée pour soigner le cancer, le contrôler, ou en tant que soin palliatif pour soulager la douleur et améliorer la qualité de vie du patient. Le choix du médicament et de la dose à utiliser dépendent du type de cancer, de son état d’avancement, de l’âge et de la santé globale du patient ainsi que de ses antécédents cancéreux. Les anticancéreux sont classés en cinq grands groupes selon leur mode d’action, leur structure chimique et leurs interactions avec les autres médicaments. On distingue ainsi les agents alkylants, les antimétabolites, les antibiotiques anti-tumoraux, les inhibiteurs de topoisomérase et les inhibiteurs mitotiques.
Étant donné que ces traitements manquent encore de spécificité et que, par conséquent, ils touchent aussi les cellules saines, ils engendrent souvent des effets secondaires lourds qui peuvent persister des années, voire de façon permanente. Les effets secondaires les plus courants sont la fatigue, la perte de cheveux, l’anémie, les nausées et les vomissements pour n’en citer que quelques uns. Certains traitements peuvent en outre induire un nouveau cancer qui peut apparaître plusieurs années après la fin de la cure.
La nanomédecine
Définition
La nanomédecine se définit comme l’application des nanotechnologies à la santé et à la médecine. Elle repose sur l’utilisation de matériaux « vecteurs » de taille nanométrique pour faciliter le diagnostic de maladies, leur traitement et leur suivi. Les premiers résultats découlant du développement de la nanomédecine sont apparus dans les années 1960 à l’ETH de Zurich et c’est en 2000 que le terme est apparu dans les publications. À ce jour, il existe plusieurs définitions de la nanomédecine. L’une d’entre elles, donnée par l’US National Nanotech Initiative est l’application de matériaux de taille nanométrique en médecine tirant avantage des propriétés uniques des nanomatériaux. En 2013, plus de 100 nanomédicaments sont sur le marché et 147 sont en phase d’essais cliniques.
La nanomédecine a été développée afin d’améliorer les caractéristiques physico-chimiques des principes actifs « classiques » qui présentent un certain nombre de limitations. Ces derniers sont en effet souvent hydrophobes et ne sont pas stables dans les conditions physiologiques. Il est donc nécessaire d’en administrer une dose importante pour obtenir un effet thérapeutique. Les nanovecteurs permettent d’augmenter la solubilité des médicaments hydrophobes en milieu physiologique, améliorant ainsi leur profil pharmacocinétique et leur biodistribution. Les propriétés de ciblage tissulaire et cellulaire que présentent les nano-vecteurs permettent d’augmenter l’efficacité thérapeutique des médicaments embarqués et réduisent leur toxicité vis-à-vis des tissus sains. Pour être efficaces, les nano-vecteurs doivent présenter une toxicité réduite et être stables en milieu physiologique. Ils doivent également être capables d’échapper aux phagocytes mononucléaires, et aux macrophages dans les tissus et les organes, afin d’augmenter le temps de circulation sanguine de l’agent thérapeutique transporté et son efficacité. La surface des nano-vecteurs doit être adaptée chimiquement, de sorte à ce qu’elle soit biocompatible et inerte d’un point de vue biologique. Leur surface peut être également aménagée pour conjuguer des ligands permettant de cibler des cellules spécifiques.
Un nano-vecteur doit donc répondre à certaines caractéristiques :
– Il doit être biocompatible et/ou biodégradable, il ne doit pas induire d’effets secondaires liés à son administration
– Il doit présenter des propriétés de furtivité afin d’échapper au système immunitaire et ainsi éviter sa capture par des cellules du système réticulo-endothélial (macrophages)
– Il doit faciliter le transport de la molécule thérapeutique jusqu’à sa cible et la protéger dans les conditions physiologiques
– Il doit libérer la molécule au niveau de sa cible de manière efficace .
Différents types de nano-vecteurs sont actuellement développés pour améliorer le traitement de différentes pathologies, dont le cancer. Un nano-vecteur doit être conçu en prenant en compte les compartiments et barrières physiologiques qu’il aura à franchir.
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Table des matières
INTRODUCTION
Chapitre 1 : Le cancer et la nanomédecine
I. Le cancer
1) Généralités
2) Les traitements actuels du cancer et leurs effets secondaires
a) La chirurgie
b) La radiothérapie
c) La chimiothérapie
II. La nanomédecine
1) Définition
2) Paramètres physiologiques à prendre en compte dans la conception des nano-vecteurs
a) Le système réticuloendothélial
b) Le système rénal
c) La barrière hémato-encéphalique
3) Ciblage passif des tissus tumoraux
4) Ciblage actif pour le traitement du cancer
5) Les nano-vecteurs actuellement développés
a) Les nanoparticules de polymères
b) Les liposomes
c) Les dendrimères
d) Les micelles de polymères
e) Les micelles à cœur lipidique
6) Nano-vecteurs activables par un stimulus
a) Les stimuli internes
b) Les stimuli externes
III. Conclusion et objectifs de la thèse
Chapitre 2 : Ciblage passif des tumeurs avec les micelles polydiacétyléniques
I. Les micelles polydiacétyléniques
1) Micelles PDA-NTA
2) Micelles PDA-PEG
3) Biodistribution des micelles
II. Préparation de micelles PDA-PEG2000 covalemment liées à un principe actif
1) Pourquoi lier de façon covalente un médicament à un nano-vecteur ?
2) Stratégies envisagées pour lier un médicament de façon covalente aux micelles PDAPEG2000
a) Conception et synthèse d’un amphiphile DA-alcène-PEG2000
b) 1ère stratégie de fonctionnalisation : click avec une tétrazine
c) 2ème stratégie : fonctionnalisation par réaction thiol-ène
III. Une alternative aux PEG : les micelles zwitterioniques
1) Les micelles zwitterioniques
2) Préparation de micelles zwitterioniques comme plateforme de ciblage passif
a) Les sulfobétaïnes
b) Ciblage passif de tissus tumoraux avec des micelles zwitterioniques
c) Micelles zwitterioniques portant un alcyne
IV. Conclusion
Chapitre 3 : Micelles activables par un stimulus
I. Préparation de micelles photoactivables
1) La lumière comme stimulus
2) Travaux antérieurs de l’équipe : préparation de micelles présentant une cytotoxicité déclenchée par la lumière UV
a) Synthèse des amphiphiles
b) Dégradation photochimique des micelles
c) Internalisation cellulaire et cytotoxicité
3) Adaptation de nos micelles aux besoins in vivo
a) Les nanoparticules à conversion ascendante
b) Micelles photosensibles chargées avec des UCNP
II. Préparation de micelles sensibles au pH
1) Bibliographie
2) Synthèse de l’amphiphile sensible en milieu acide
a) Synthèse de la partie hydrophile
b) Synthèse de la partie lipophile
III. Conclusion
Chapitre 4 : Ciblage actif des cellules cancéreuses avec les micelles PDA-PEG2000
CONCLUSION