Le cadrage général de l’économie du logement et des politiques du logement

La spécificité économique du logement

Les trois dimensions économiques du logement

Une approche économique du logement se doit de distinguer les trois principales dimensions de ce dernier : il est à la fois un bien, un service et un actif réel. Ces dimensions font l’objet de marchés différents, elles sont néanmoins interconnectées.

Le logement en tant que bien est une entité physique, un appartement ou une maison qu’il est possible d’identifier et qui est ou peut être habité par un ménage. Autrement dit, le logement en tant que bien est une construction située sur un terrain. Ainsi, les demandeurs de logement comme bien sont les acquéreurs de logements neufs, et les producteurs sont les promoteurs immobiliers et/ou les entreprises, et les facteurs de production sont le terrain, les matériaux de construction, la main d’œuvre etc. Le prix du logement est alors le prix d’un bien immobilier neuf, et le marché sur lequel les échanges se réalisent est le marché de logements neufs.

L’aspect matériel n’est toutefois pas dissocié d’un autre aspect du logement : celui de consommation. Autrement dit, la structure physique génère un flux de service logement dont bénéficient les occupants. Le logement en tant que service est le fait que la structure physique offre à ses occupants un certain niveau de confort les protégeant du froid, des intempéries, leur permettant de satisfaire les besoins vitaux. Les demandeurs de service logement sont les ménages, et les offreurs sont les propriétaires de biens immobiliers. Ainsi, le prix du service logement est le prix que paient les occupants d’un logement pour pouvoir l’occuper, c’est-à-dire le loyer. Toutefois, le terme de loyer ne fait pas uniquement référence au secteur locatif où le loyer est effectif et observable. Les propriétaires occupants, d’une certaine manière, louent le logement à eux mêmes, c’est-à-dire qu’ils versent et encaissent simultanément la valeur de marché du loyer de leur logement. Dans la réalité, ce versement n’a pas lieu, ce qui n’exclut pas la possibilité d’évaluer le loyer « fictif » ou « imputé » des propriétaires occupants. Ainsi, le marché du logement comme service n’est observable qu’en partie, c’est-à-dire dans le secteur locatif. Les ménages qui acquièrent un logement dans l’objectif de l’occuper sont également demandeurs de service logement, mais dans ce cas, cette demande est indissociable de l’autre dimension de logement : celle du patrimoine ou actif réel.

En effet, le logement étant un bien durable dont l’usage peut apporter un revenu à son propriétaire, il constitue un actif réel. Dans ce cas, le produit qui est offert et demandé sur le marché, est le droit de propriété du bien immobilier. Les offreurs sont les détenteurs de ce droit qui peuvent être des propriétaires occupants, des propriétaires bailleurs, des ménages ou des personnes morales. Le revenu encaissé par le propriétaire dépend du service logement qu’offre l’actif tandis que l’échange sur ce marché peut être dissocié de l’occupation du logement : un bien immobilier peut être vendu par le propriétaire bailleur sans effet sur l’occupant du logement, c’est-à-dire le locataire. Le prix du logement comme actif est donc le montant de la transaction dans le cas de cession de droit de propriété. Il en découle qu’il est possible d’observer la valeur de cet actif dans le cas de vente d’un bien loué par un tiers.

L’investissement dans le logement comme actif est exposé à un certain risque au même titre que les autres actifs financiers ou non financiers. Premièrement, le revenu que le propriétaire espère obtenir de la détention d’un logement n’est pas assuré dans la mesure où il est possible qu’aucun locataire ne soit intéressé par ce bien, ou que, suite à des difficultés financières, le locataire ne soit pas en mesure de payer son loyer, ou encore que le loyer n’évolue pas comme le propriétaire l’avait anticipé. D’autre part, l’investisseur peut subir des pertes lors de la revente du bien immobilier en raison de l’évolution des conditions du marché ou des caractéristiques du logement, voire celles de son environnement. A titre d’exemple, un appartement situé dans une commune où les pouvoirs publics ont décidé de construire une centrale nucléaire peut se trouver peu attractif lors d’une revente, ce qui obligera le vendeur à fixer un prix différent de celui qu’il avait anticipé. Dans ce cas, le vendeur subira une perte due à la dévalorisation du logement mais aussi à l’immobilisation du capital et son coût d’opportunité.

Les trois dimensions du logement sont dissociables dans certaines conditions, comme par exemple dans le cas d’une acquisition dans le but d’une mise en location (où le logement est un actif pur du point de vue de l’acquéreur), ou encore dans le cas d’une location par un ménage (dans ce cas, le ménage est demandeur du service logement). Dans le cas d’une acquisition d’un logement neuf à des fins d’occupation, le ménage opère un choix sur les trois aspects du logement. De ce fait, l’analyse économique du choix de statut d’occupation et du choix du logement doit prendre en compte un grand nombre de critères de décision.

L’hétérogénéité du logement et ses implications sur la structure du marché

Les facteurs de différenciation des logements sont nombreux. Les logements se différencient par leur surface, nombre de pièces, type de chauffage, confort etc., c’est-à-dire par leurs caractéristiques intrinsèques. Toutefois, sur la base de ces caractéristiques, il est possible que plusieurs logements soient identiques, comme par exemple, des appartements situés dans le même immeuble et ayant été construits sur le même plan, ou encore des maisons de quartiers résidentiels construites par le même promoteur et suivant le même plan. En revanche, il existe un autre facteur de différenciation qui rend le logement parfaitement hétérogène : la localisation. Cet aspect du logement a des implications conséquentes sur le positionnement du logement dans le contexte analytique. Tout d’abord, la localisation a un impact sur le service offert par un logement dans la mesure où elle est relative : un logement est situé dans l’espace, donc nécessairement par rapport à d’autres logements, des aménités et un environnement. Ainsi, de ce point de vue, tous les logements sont différents : entre deux logements, construits sur un même plan dans le même immeuble, et donc bénéficiant des mêmes aménités, il y aura nécessairement des différences au moins sur deux critères qui sont l’étage et le voisinage.

Le logement comme service est ainsi fourni par la combinaison de caractéristiques physiques (surface, nombre de pièces, confort, ancienneté etc.), et des caractéristiques de localisation (proximité des aménités, environnement socio économique, voisinage etc.). Les biens immobiliers sont donc parfaitement hétérogènes puisque chaque bien représente une combinaison unique de caractéristiques. Toutefois, du point de vue des agents, certaines de ces caractéristiques peuvent être substituables, ce qui explique que, dans la recherche de logement, un ménage peut s’intéresser à plusieurs biens avant d’en choisir un. Néanmoins, la substituabilité entre les caractéristiques n’a aucun caractère régulier car elle dépend uniquement de la sensibilité des agents vis-à-vis de chacune des caractéristiques. Par exemple, un ménage composé de deux personnes âgées aura a priori une sensibilité très faible vis-à-vis de la proximité d’une école (car cette proximité ne correspond pas à un besoin), mais choisira quand même un logement proche d’une école si celui-ci ne nécessite pas de travaux (qui peuvent être une contrainte trop forte pour des personnes âgées) plutôt qu’un autre logement situé à proximité immédiate des commerces mais nécessitant des travaux. Ainsi, c’est la combinaison des caractéristiques et l’articulation entre elles qui détermine en partie le choix des agents.

Le raisonnement est identique sous l’ange de vue du logement comme produit. Rappelons que le logement en tant que produit est une construction (qui correspond à la composante bâtie du logement) située sur une parcelle de terrain (qui correspond à la composante foncière du logement). Ainsi, le logement comme produit contient également une dimension spatiale ce qui le place dans la même logique que celle du service logement. Le logement comme actif est également hétérogène. Dans la mesure où il est associé à un service, la valeur de l’actif qui dépend du revenu qu’il génère, et ce revenu dépend du service que le logement fournit. Les décisions d’investissement immobilier sont plus complexes quand il s’agit d’un investissement pour occupation personnelle que celles concernant les actifs financiers traditionnels qui découlent d’un arbitrage entre la consommation et l’épargne dans un premier temps, puis de choix de portefeuille à la deuxième étape de la décision. Concrètement, dans le cas du logement, la valeur de l’actif correspond à la somme actualisée des loyers futurs (un investisseur-bailleur estime le loyer qu’il pourra percevoir et le propriétaire occupant évalue l’économie de loyer qu’il pourra réaliser par rapport à la situation où il est locataire). Toutefois, la réflexion d’un investisseur potentiel ne s’arrête pas au calcul économique car la propriété du logement permet par ailleurs de constituer un patrimoine. Elle est également un vecteur d’ascension sociale dans certaines conditions et peut être liée à un choix sans lien direct avec le logement en lui-même (par exemple, un individu qui décide d’être agriculteur est de fait contraint d’acquérir une propriété immobilière afférente à l’exploitation agricole car l’offre de location est inexistante pour ce type de bien). Ainsi, analyser le logement dans le cadre de la théorie des choix de portefeuille peut aboutir à des résultats ambigus et peu interprétables. Outre le caractère non homogène du logement, la nature localisée du logement lui attribue une dimension socio-économique et démographique. Le logement se trouve nécessairement dans un environnement, et cet environnement peut avoir un impact sur la condition des occupants. Le logement devient ainsi un vecteur de sociabilisation, une source d’interactions non économiques. Ces aspects le placent parmi les outils de rééquilibrage face aux problèmes de mixité, de ségrégation et de marginalisation qui apparaissent comme des phénomènes dérivés du mécanisme d’allocation des logements selon les ressources des occupants. En étant défini dans l’espace, le logement devient également un élément pris en considération dans les questions d’urbanisme et de développement territorial. Les implications de cet aspect du logement dépassent le cadre des comportements individuels et le placent dans un cadre macroéconomique et politique. Ainsi, le choix politique de viabiliser et vendre de nouveaux terrains peut avoir un impact sur la dynamique économique de la zone, au même titre que le choix de ne pas rénover les infrastructures se répercute sur la condition des ménages habitant dans un quartier. A titre d’exemple, dans les anciennes zones industrielles où l’habitat était associé à l’activité économique (comme le bassin minier dans le Nord de la France par exemple), le logement constitue l’un des éléments clés de la réorientation du territoire.

L’ensemble de ces aspects affectent directement la structure du marché du logement et complexifient les choix des agents sur ce marché.

Les limites de la concurrence sur le marché du logement

La théorie économique considère cinq conditions de la concurrence pure et parfaite : homogénéité du bien échangé, atomicité des intervenants, absence de barrières à l’entrée et à la sortie du marché, libre circulation des facteurs de production et transparence de l’information. Lorsque ces conditions sont remplies, le marché est efficace, l’équilibre effectif est Pareto-optimal et toute intervention publique est inutile. Dans certaines configurations du marché, l’équilibre concurrentiel est toutefois sous optimal. Dans ce cas, le deuxième théorème d’économie du bien-être préconise une réallocation des dotations initiales plutôt qu’une intervention directe sur le marché. Une telle intervention peut être justifiée, d’un point de vue économique, uniquement lorsqu’une ou plusieurs conditions de la concurrence pure et parfaite ne sont pas remplies, ce qui rend cette question importante dans le cadre du présent travail. La condition d’homogénéité du bien n’est pas remplie sur le marché du logement. In fine, le logement peut être considéré comme parfaitement hétérogène car chaque logement représente une combinaison unique de caractéristiques. Dans ces conditions, il est possible de considérer que chaque logement fait objet d’un marché, et il y a autant de marchés que de biens immobiliers.

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Table des matières

Introduction générale
1 Le cadrage général de l’économie du logement et des politiques du logement
Introduction
1.1 La spécificité économique du logement
1.1.1 Les trois dimensions économiques du logement
1.1.2 L’hétérogénéité du logement et ses implications sur la structure du marché
1.1.3 Les limites de la concurrence sur le marché du logement
1.2 Le marché du logement français
1.2.1 Parc de logements
1.2.2 La dépense de logement : sa place dans les dépenses des ménages et dans l’économie française
1.2.3 Caractéristiques du marché du logement français
1.3 Politiques de logement en France et leur analyse économique
1.3.1 Diversité et durabilité de l’intervention publique sur le marché du logement
1.3.2 Evaluation des politiques du logement : la complexité des enjeux et des approches
Conclusion
2 Le fonctionnement du marché du logement en absence d’intervention publique
Introduction
2.1 Comportement des ménages et demande de logement
2.1.1 Les déterminants de la demande de logement
2.1.2 Les choix des ménages en matière de service logement
2.2 Offre de service logement
2.2.1 Une vue d’ensemble
2.2.2 La rigidité de l’offre de logement
2.3 Estimation de la fonction de demande de logement des ménages français
2.3.1 Source et données statistiques
2.3.2 Hétérogénéité des préférences des ménages en matière de service logement
2.3.3 Résultats de l’estimation
2.3.4 La sensibilité des résultats au changement d’échantillon
Conclusion
3 Les allocations logement : cadre institutionnel, fonctionnement, effets
Introduction
3.1 Contexte légal et institutionnel
3.1.1 Différents types d’aide au logement
3.1.2 Le financement et la gestion des aides au logement
3.1.3 Méthode de calcul du montant des aides
3.2 La simulation des montants des aides personnelles au logement et version analytique synthétique du barème
3.2.1 Lien entre l’allocation logement et le loyer
3.2.2 Lien entre l’allocation logement et le revenu
3.2.3 Rapport entre l’aide et la structure et la taille du ménage
3.2.4 Estimation de la forme fonctionnelle de l’aide
3.3 Les effets économiques des allocations logement
3.3.1 L’effet des allocations sur la dépense de logement des ménages
3.3.2 Analyse empirique du comportement des bénéficiaires d’allocation logement
3.3.3 L’effet inflationniste des allocations logement
Conclusion
4 Le fonctionnement du secteur locatif social et ses effets économiques sur les occupants
Introduction
4.1 La place du secteur locatif social dans le marché du logement français
4.1.1 Caractéristiques des logements du parc social
4.1.2 Les loyers dans le secteur social
4.1.3 Les locataires du secteur social
4.2 Cadre légal et institutionnel
4.2.1 Financement du parc locatif social et fonds publics
4.2.2 Gestion du parc locatif social
4.2.3 Système d’attribution de logements sociaux
Conclusion générale

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