Le bruit industriel : un fléau mondial

Le bruit industriel : un fléau mondial

Un grand nombre d’individus sont exposés à des niveaux de bruits dangereux pour leur système auditif. Si l’on s’en tient à la limite légale d’exposition au bruit de 90 dB(A) 8 heures par jour, le nombre de travailleurs et travailleuses à risque de perdre l’ audition au Québec est estimé à 400 000 (Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec 1998), soit environ un travailleur sur cinq, et ce nombre atteint 500 000 (Commission de la santé et de la sécurité au travail 1998) si l’on prend la limite de 85 dB(A) recommandée internationalement. Ce dernier nombre devient 30 millions à l’échelle de l’Amérique du nord (NIOSH 1998) et 120 millions à l’échelle planétaire (Organisation mondiale de la santé (OMS) 2001). En conséquence, la surdité est la maladie professionnelle la plus courante aux USA et au Canada:<< La perte de l’ouïe est l’invalidité cachée numéro 1 en Amérique du Nord >>traduction libre (World Health Organization 1991). La surdité est un problème coûteux. Au Québec, selon la CSST, le montant d’une indemnité individuelle pour surdité professionnelle peut varier de 500 à 26 000 $ (Commission de la santé et de la sécurité au travail 1998). Au total, de 1993 à 2002, il en aura coûté près de 95 millions $ pour l’indemnisation de toutes les surdités professionnelles au Québec (CSST DSGI- Service de la statistique 2003), tandis qu’il en coûte 39 millions $US annuellement aux USA (Nykaza and Frank 2003).

Aux États-Unis, l’institut OSHA indique qu’en 1992les coûts (directs, indirects et administratifs inclus) pour les maladies professionnelles s’élevaient à 26 milliards $US (OSHA 1992). Selon Earmarl Otology Network, un réseau médical américain, chaque procès pour réclamation coûte environ 75 000 $US. Les conséquences économiques ont tendance à s’aggraver si on prend comme indicateur le nombre de travailleurs effectuant des réclamations et recevant de 1′ argent pour la perte d’ouïe en milieu de travail : ce nombre a triplé entre 1991 et 1999 selon 1′ institut NIOSH .

La protection individuelle, seule solution économique à court terme

Face à ce fléau, il y a bien sûr la législation qui fixe les limites d’exposition à ne pas dépasser et préconise la réduction du bruit à la source comme mesure prioritaire. Dans de nombreux cas, cette réduction du bruit à la source est techniquement possible et il arrive même que cette réduction du bruit (lors de la conception initiale des machines, par exemple) soit moins coûteuse à terme que l’utilisation généralisée des protecteurs auditifs (Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec 1998). Cependant, ce constat doit être nuancé par la grande diversité des sources de bruit et la complexité des mécanismes physiques de génération de bruit souvent << contre intuitifs >> pour les concepteurs d’équipements industriels. Il n’existe en effet, dans la pratique, aucune solution << toute faite >> qui garantisse à tout coup une conception à faible niveau de bruit pour les machines et équipements industriels.

Pour présenter ce problème plus en détails, les différentes situations de réduction du bruit ont été regroupées dans ce qui suit en quatre catégories distinctes : celle où les techniques classiques de réduction du bruit sont applicables, celle où la reconception acoustique est nécessaire, celle où un changement fondamental de procédé est indispensable et enfin celle où seule la protection individuelle est envisageable. – Les techniques classiques de réduction du bruit consistent en des encoffrements, des découplages mécaniques, la minimisation des surfaces rayonnantes, etc. Ces techniques sont très bien documentées dans des guides (Commission de la santé et de la sécurité au travail 1998) et rapports techniques (Organisation internationale de normalisation 1995), sont souvent efficaces et permettent rapidement des réductions initiales du bruit assez conséquentes. Elles entraînent généralement un surcoût et amènent parfois des contraintes d’utilisation supplémentaires, mais ces inconvénients peuvent être contrebalancés par la valeur ajoutée que possède un tel équipement << discret >> (Tourret and Bockhoff 1995).

Le besoin d’un protecteur auditif (intelligent)

Le développement d’un protecteur auditif capable de répondre adéquatement à chacun des problèmes évoqués ci-dessus a été la motivation de la recherche entreprise ; un tel produit devrait être confortable et « intelligent » de par le fait qu’il permette : (1) La mesure exacte de ses performances acoustiques, (2) L’adaptation de son efficacité en fonction des besoins du travailleur, à long terme, c’est à dire pour une exposition moyenne donnée ou, à très court terme, pour des niveaux de bruit fluctuants rapidement dans le temps et (3) Le filtrage « discriminant » de la parole ou des signaux d’alarme noyés dans le bruit, en tenant compte également de la condition auditive du travailleur (à la façon d’une prothèse auditive).

Problématiques associées au développement d’un bouchon d’oreille << intelligent >>

Problématique << Santé et sécurité au travail >> La problématique « Santé et sécurité au travail » est la mise au point d’un protecteur auditif pouvant être porté continuellement (car confortable et permettant la perception des signaux utiles) et dont les performances terrains sont mesurables.

Importance du port continu d’un protecteur auditif Il est essentiel qu’un protecteur auditif soit porté continuellement sans quoi son efficacité cumulée est grandement diminuée. Le graphique présenté sur la figure 1 illustre bien la rapidité avec laquelle l’efficacité de protection d’un protecteur diminue lorsque ce dernier est porté de façon intermittente. Ainsi un protecteur dont l’atténuation nominale est de 25 dB (courbe supérieure sur la figure 1) voit celle-ci réduite à une atténuation  équivalente de 17 dB environ lorsqu’il a été enlevé seulement 30 minutes durant une journée de 8 heures ! La comparaison de la décroissance de 1′ atténuation effective entre un protecteur performant (atténuation nominale de 25 dB) et un protecteur peu performant (atténuation nominale de 10 dB) fait également ressortir (ce qui peut paraître paradoxale de prime abord) que plus le protecteur est performant, plus il doit être porté de façon continue pour que le travailleur en retire les bénéfices escomptés.

Les raisons à l’ origine du port discontinu des bouchons sont tirées de deux enquêtes et présentées dans les tableaux 1 et 2. Le tableau 1 présente les causes citées par des travailleurs de ligne de production de milieux manufacturiers australiens pour ne pas porter leurs protecteurs auditifs lors de tâches variées, en groupe ou non: les trois principales raisons couramment invoquées pour ne pas porter un protecteur auditif sont l’inconfort des protecteurs existants, le besoin d’entendre et les difficultés éprouvées lorsque le niveau de bruit fluctue de façon importante. Le tableau 2 présente les améliorations souhaitées pour les protecteurs auditifs portés en milieu industriel par des travailleurs danois : un confort accru ainsi qu’une meilleure perception de la parole et du bruit des machines.

Elles correspondent bien aux causes recensées dans l’ étude australienne et les confirment donc. Pour remédier au problème du port continu, il est donc nécessaire de développer un protecteur auditif qui ne crée pas d’inconfort physique et qui n’altère pas la perception des signaux acoustiques utiles, tels que le bruit des machines, les signaux d’alarme et la parole. Ces deux aspects sont détaillés successivement dans ce qui suit.

-Premier aspect : confort du protecteur auditif: Pour remédier au problème du confort, une des approches possibles est de façonner un bouchon d’oreille personnalisé ( << sur-mesure >>) et réutilisable, utilisant des matériaux bien acceptés par l’ oreille (biocompatibles) et parfaitement adaptés à un port continu et confortable du protecteur. Les problèmes de faisabilité technique d’un tel bouchon seront exposés dans la première section (2.2.1) de la problématique technique.

-Deuxième aspect : nécessité de percevoir les signaux utiles :L’oreille humaine est un instrument d’une extraordinaire sensibilité et l’audition un phénomène d’une grande complexité, aussi la mise au point d’une solution technique au problème de filtrage sélectif apparaît d’ores et déjà comme complexe et longue à mettre en oeuvre. Par ailleurs, les enjeux techniques soulevés par le << bruit fluctuant >> empêchent en pratique l’utilisation de simples systèmes passifs. La problématique se situe maintenant à un niveau scientifique qui sera abordé dans la deuxième section (2.3.2) de la problématique scientifique.

Cependant, une approche simple et pragmatique au problème de la perception des signaux utiles a récemment été normalisée par l’Union Européenne (EN458 1993; EN458 1996), c’est la recommandation EN458. Elle consiste simplement à s’assurer que l’oreille protégée est exposée à un niveau sonore dans lequel elle sera au mieux capable d’effectuer naturellement les différentes tâches mentionnées, notamment la reconnaissance de la parole dans le bruit. Cette recommandation (illustrée par le tableau 3) vise en particulierà éviter les situations de << surprotection >> (définies comme étant les cas pour lesquels le niveau de bruit résiduel est inférieur à 70 dB(A) ) pour lesquels le travailleur, trop bien protégé du bruit, se trouve complètement isolé de son environnement sonore et encourt alors d’autres risques (accidents). Ces risques associés à la surprotection sont d’ailleurs accrus si le travailleur en question est affecté d’une perte auditive neurosensorielle car la perception de la parole est alors considérablement dégradée (Berger 1980; Michael 2003).

Inadéquation entre les valeurs théoriques et les valeurs réelles << terrain >> L’atténuation d’un protecteur auditif est caractérisée en Amérique du nord (EPA 1979) par le NRR (Noise Reduction Rating, c’est à dire Indice de réduction du bruit). Bien qu’il existe d’autres façons de caractériser les performances acoustiques des protecteurs auditifs, notamment par l’utilisation des classes et tout récemment des grades au Canada (CSA 2002), c’est, de très loin, l’indicateur le plus couramment utilisé. Le NRR est le résultat d’un calcul (équation 1) basé sur la valeur moyenne (notée REAT pour Real Ear Attenuation at Threshold) et l’écart type (noté CYREAT) de l’atténuation d’un protecteur auditif mesurées par la méthode des seuils auditifs dans un contexte de laboratoire (par opposition au monde réel) sur un groupe restreint d’individus, 10 selon la norme en vigueur (ANSI 1974):
7 lOO+Ci 7 lOO+Ai-REATi+2ukEAT
N RR = 10 log10 L 10_10_ – 10 log10 L 10 10 (1.1)
i=l i=l
où Ai et Ci sont les valeurs des pondérations A etC pour les bandes d’octave de 125Hz (i=1) à 8000Hz (i=7); les fréquences de 3150 et 6300Hz utilisées en audiométrie tonale ont été omises, par souci de simplification.

La méthode de calcul et plus particulièrement la méthodologie de mesure ont été l’objet
* à juste titre – de nombreuses critiques (Berger 1993) et il ressort aujourd’hui que cet indicateur (pourtant largement utilisé en Amérique du nord) n’est pas représentatif des performances de << terrain >> des protecteurs auditifs. Le graphique présenté dans la figure 2 illustre bien la non-représentativité de ces valeurs de NRR : non seulement celles-ci sont -elles très différentes des valeurs obtenues dans la pratique ( << terrain >> ), mais en plus, 1′ ordre relatif n’est pas conservé ! Ainsi un protecteur théoriquement excellent (NRR de 27 dB pour le << EP-100 >>)peut ne procurer que 2 dB d’atténuation en pratique, tandis qu’un protecteur théoriquement inférieur (NRR de 19 dB pour le<< Sound-Ban >> ), protégera beaucoup mieux en pratique avec un NRR de 7 dB ! La conséquence directe de cette inadéquation a été, aux États-Unis, la politique de déclassement (derating) recommandée par l’association OSHA (OSHA 1998); elle consiste à systématiquement diminuer de 50% les valeurs du NRR des bouchons d’oreille afin qu’elles soient plus réalistes. Néanmoins, en pratique, il demeure impossible par la simple utilisation de la valeur du NRR d’un protecteur auditif de s’assurer que la pro-Comparaison entre les NRR publiés en Amérique du nord (valeurs en provenance des tests de laboratoire) et les valeurs réelles obtenues en milieu de travail selon 20 études indépendantes.

Les 9 colonnes de gauche sont des produits de type<< bouchon d’oreille >>,tandis que les 7 colonnes de droites sont des produits de type<< serre-tête >>.(Source: Berger 2000. Adapté avec l’aimable permission de l’auteur) tection d’un travailleur sera adéquate. Cette incertitude serait levée par l’utilisation d’un protecteur auditif aux performances acoustiques rigoureusement mesurables pour chaque travailleur. La problématique technique associée à un tel système de mesure sera présentée dans la troisième section (2.2.3) de la problématique technique et la problématique scientifique dans la troisième section (2.3.3) de la problématique scientifique.

Problématique technique
Un bouchon d’oreille adapté à la morphologie individuelle et biocompatible Les besoins identifiés au paragraphe 2.1 en terme de santé et sécurité au travail poussent au développement d’un protecteur auditif qui soit sur mesure, confortable et biocompatible. Or, la réalité du marché est que les pressions économiques ont jusqu’à présent toujours poussé les manufacturiers à développer des << produits de masse >> aux formes génériques ( << taille unique >> ), économiques et jetables (Frost and Sullivan 2002). La compagnie canadienne SONOMAX a mis au point (Mclntosh and Saulce 2004) un protecteur auditif de type bouchon d’oreille qui puisse à la fois répondre aux besoins des travailleurs (produit personnalisé) et aux contraintes du marché (produit de masse). Ce bouchon est composé d’un noyau de forme générique recouvert d’une fine membrane de silicone entre lesquels il est possible d’injecter un silicone thermodurcissable afin d’ajuster très précisément le bouchon à la forme du conduit auditif du travailleur (figure 3). Il est ainsi possible, après quelques minutes de durcissement, d’obtenir un bouchon d’oreille parfaitement ajusté à l’oreille et composé d’un matériau souple, résistant et biocompatible (élastomère de silicone de qualité médicale).

Adaptation du bouchon à l’exposition du travailleur Appliquer la recommandation EN458 revient à trouver une façon de modifier L’ atténuation apportée par chaque protecteur auditif en fonction des besoins exacts du travailleur qui le portera. Le moyen mis en oeuvre est illustré à la figure 4 et consiste en une série de petits filtres acoustiques passifs interchangeables pouvant être placés dans le canal de mesure au sein du bouchon. Ces filtres peuvent être de simples éléments purement résistifs (Damper) dont les valeurs s’échelonne entre 330 et 4700 Ohms (cgs) ou bien un obturateur en plastique. La sélection d’un de ces filtres se fait, à l’aide d’un logiciel ad hoc, en tenant compte de l’exposition du travailleur (par bandes d’octaves ou en valeur globale équivalente, telle que le TWA << Time Weighted Average >>ou le niveau équivalent Leq) et de l’efficacité de protection mesurée (à l’aide du système présenté dans la section 2.2.3) sur le bouchon non encore filtré. Le système de mesure acoustique (figure 3) se compose d’une source de bruit à large bande (couvrant tout le spectre audible) et d’une sonde microphonique comprenant un microphone externe de référence et un microphone interne de mesure communiquant avec le conduit auditif occlus grâce à un petit canal de traversant le bouchon d’oreille.

Il devient alors possible de mesurer de façon précise la différence de niveau de pression acoustique entre ces deux microphones lorsque le protecteur a été placé par le travailleur luimême(<< Subject-fit >>)et d’obtenir ainsi une valeur objective et réaliste de l’efficacité de protection du bouchon d’oreille. À partir de cette mesure, présentée  en détail dans la problématique scientifique (section 2.3.3), un nouvel indicateur a été proposé par les auteurs (Voix et Laville 2002), leP-PAR (Predicted Persona[ Attenuation Rating, soit Indice d’atténuation personnelle estimée). LeP-PAR est assimilable à un NRR qui serait le fruit d’une mesure objective (et non d’une évaluation subjective), sur un travailleur en particulier (et non sur un échantillon de population) et dans des conditions réalistes de port du protecteur auditif (et non dans des conditions de laboratoire).

Problématique scientifique La problématique scientifique touche trois disciplines scientifiques distinctes qui correspondent aux trois sections de cette partie : premièrement, la modélisation de systèmes physiques pour l’identification des paramètres déterminant du nouveau bouchon ainsi obtenu, deuxièmement, le traitement de signal pour le filtrage sélectif du bouchon et, troisièmement, l’instrumentation et la mesure acoustique pour la détermination de 1′ atténuation effective du bouchon.

Identification des paramètres clefs déterminants les performances d’un protecteur auditif intra-auriculaire

Les protecteurs auditifs supra auriculaire ont depuis longtemps été modélisés sous forme de système mécano-acoustique (Wilkie 1952; Benox Report 1953; Zwislocki 1955; Zwis-locki 1955). Plus récemment, les protecteurs auditifs intra auriculaires ont été modélisés plus finement, notamment par la prise en compte des caractéristiques de fuite acoustique (Shaw 1982) et du couplage mécanique avec le conduit auditif (Schroeter and Els 1980; Hahn 1985). Cependant, toutes ces modélisations considèrent le bouchon d’oreille comme une simple masse (modèle de corps rigide) mise en mouvement à l’ intérieur du conduit auditif (modèle de raideur et d’amortissement), conduisant à un système classique masse (m) -ressort (k8 )- amortisseur (c8 ).

Ces modèles considèrent que le matériau utilisé pour le protecteur est suffisamment rigide, dense ou visqueux pour que la conduction acoustique au travers de ce dernier soit négligeable (Zwislocki 1955). Ce qui était à l’ époque vrai pour l ‘ensemble des bouchons disponibles (Benox Report 1953), composés soit de plastiques relativement rigides, soit de mousses très fortement amorties, n’est plus nécessairement vrai dans le cas d’un boucho d’oreille composé d’un élastomère de silicone relativement élastique et peu amorti. La nouveauté de l’utilisation de ce produit est probablement la principale explication du fait qu’aucun modèle mettant en évidence un tel phénomène de propagation du son à travers le matériau du bouchon d’oreille n’a pu être trouvé dans la littérature. La modélisation envisagée s’appuie sur une formulation continue du passage de l’ air à un milieu caractérisé par une masse volumique Pp et par une célérité des ondes cp; elle est abordée en étroite relation avec des mesures expérimentales; elle doit permettre de répondre aux questions suivantes :

– Comment prendre en compte les effets dus au couplage mécanique et acoustique avec le conduit auditif?

Systèmes de filtrage sélectifs adaptés au bruit en milieu industriel L’approche, simple et pragmatique des objectifs de protections en terme de niveau de bruit résiduel (Recommandation EN458 présentée dans la section 2.1.1) est limitée, d’une part, parce qu’elle ne tient compte que des niveaux globaux d’exposition et ne se soucie pas du contenu spectral du bruit résiduel et, d’autre part, parce que les moyens techniques envisagés (présentés dans la section 2.2.2) font appel à des filtres acoustiques passifs dont les caractéristiques fréquentielles sont fixes dans le temps (non adaptatives). Tel que détaillé dans la section 2.1.1, le filtrage envisagé devrait être capable de discrimination entre le bruit indésirable et les signaux utiles (parole, signaux d’alarme), de reproduire fidèlement le contenu spectral du bruit mais, également, d’ajuster automatiquement le degré de protection selon l’ exposition du travailleur au bruit, tout en tenant compte de ses seuils auditifs.

Les pistes de solution associées sont :
1. Le rehaussement de la parole bruitée et l’ amélioration de son intelligibilité à l’aide de techniques issues du milieu de la prothèse auditive ainsi que des télécommunications numériques.
2. La détection numérique, le débruitage ou la re-synthèse des signaux d’alarme afi que ceux-ci soient perceptibles en tout temps.
3. L’égalisation fréquentielle du bruit résiduel afin de s’assurer que son contenu spectral et perceptuel est identique à celui d’origine.
4. L’ajustement automatique du filtrage effectué en fonction de l’ environnement sonore du travailleur.

Modélisation de l’ atténuation uniforme du bouchon filtré obtenue par l’ association du bouchon seul et du filtre << miroir >> Une première approche intéressante serait de concevoir un filtre << miroir >> dont la réponse fréquentielle compense parfaitement la réponse du bouchon non filtré afin d’obtenir une atténuation résultante qui soit identique pour toutes les fréquences utiles. Un tel filtre (dont les caractéristiques fréquentielles théoriques sont présentées à la figure 6) conduirait à un bouchon filtré dont l’ atténuation serait uniforme et qui permettrait ainsi de conserver le contenu spectral des signaux d’origine.

De tels bouchons<< à atténuation uniforme >> existent sur le marché depuis une quinzaine d’années, tels que les << Musicians Earplugs >> de Ethymotic Research (Killion 1989), les << Ready-Fit High Fidelity Earplugs >> de Aearo/Ear (Killion, Steward et al. 1992) ou encore les bouchons << Natural Sound Technology >> de Bilsom (Hiselius and Nilsson 2002) et il a par ailleurs déjà été prouvé que même si ce système n’a pas recours au rehaussement actif de la parole ou des signaux d’alarme, il permet une meilleur intelligibilité de la parole et des signaux d’alarme noyés dans le bruit (Letowski, Vaughan et al. 1998; Hiselius 2000). Cette solution a l’avantage d’être économique (l’élément clef du filtrage étant une simple membrane plastique), mais elle est limitée en performance et l’atténuation n’est véritablement << uniforme >> que lorsque moyennée pour un grand nombre d’individu et uniquement aux quelques fréquences considérées (valeurs centrales des bandes d’octaves de 125 à 8000 Hz).

En outre, même si des travaux récents ( Verbsky 2002) semblent mettre en évidence une amélioration de la perception sonore pour des sujets normaux, sans égard au contenu spectral, il est probable qu’un phénomène de masquage fréquentiel existe et crée une solution non optimale. Par ailleurs, cette même étude a également démontré qu’un tel filtre «uniforme »n’est pas bien adapté pour des sujets ayant déjà des pertes auditives . Cette première approche du filtre<< miroir >>est non adaptative (de même que l’était l’approche avec des éléments purement résistifs présentés dans la section 2.2.2), ce qui limite son intérêt pratique car les niveaux de bruit fluctuent au cours de la période de travail; la probabilité est donc grande que le travailleur soit surexposé par moment et surprotégé à d’autres, avec tous les risques que cela implique. Par ailleurs, la prise en compte des conditions auditives du travailleur n’est, à toutes fins pratiques, pas possible avec ces filtres à réponse fréquentielles fixes, ce qui limite donc l’intérêt pratique de telles approches.

Une deuxième approche beaucoup plus complexe, mais au potentiel très prometteur, consiste à utiliser des systèmes de filtrage adaptatif (dont les caractéristiques fréquentielles sont adaptées de façon continue), cela permettrait d’ajuster instantanément le filtrage effectué en fonction de l’environnement sonore du travailleur (en particulier pour des bruits fluctuants). Par ailleurs, ces systèmes adaptatifs permettraient aussi l’utilisation d’algorithmes de rehaussement de parole, de rehaussement des signaux d’alarme et de contrôle actif du bruit. La réalisation de tels filtres numériques hautement miniaturisés est aujourd’hui courante dans le domaine de la prothèse auditive et il deviendrait même envisageable de fusionner ces fonctionnalités de protection auditive (protecteur auditif) à celle d’aide auditive (prothèse auditive), voire même d’interface de communication (captation tympanique de la parole permettant la communication radio ou téléphonique duplex, la commande vocale de machines, etc.).

Méthode de mesure objective de l’atténuation effective d’un protecteur auditif intra auriculaire La méthode de mesure envisagée dans la section 2.2.3 est du type << semi objective >>, puisqu’elle repose sur des mesures microphoniques sur un bouchon placé dans 1′ oreille du travailleur. Elle doit être en mesure de relier la mesure du NR (Noise Reduction), c’est-àdire la différence de niveau de pression acoustique entre les microphones externe (pression Pref) et interne (pression Pmeas) à l’atténuation REAT ( << Real Ear Attenuation at Threshold >>) qui serait rapportée par le travailleur s’il était testé par la méthode des seuils audiométriques. La méthode développée par les auteurs (Voix et Laville 2002) s’appuie sur la notion de << compensation >> qui est la somme des 5 termes correctifs, présentés dans l’équation 2, reliant le NR au REAT. Cette méthode ne tient pas compte de la transmission osseuse, puisque ce chemin de transmission, offrant typiquement une atténuation de 40 à 60 dB selon les fréquences, peut en tout temps être négligé pour le bouchon développé en section 1.2.2.1. 5.

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Table des matières

ABSTRACT
REMERCIEMENTS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
LISTE DES ABRÉVIATIONS ET SIGLES
INTRODUCTION
ARTICLE 1 PROBLÉMATIQUES ASSOCIÉES AU DÉVELOPPEMENT D’UN BOUCHON D’OREILLE<< INTELLIGENT>> 
1.1 Introduction 
1.1.1 Le bruit industriel : un fléau mondial
1.1.2 La protection individuelle, seule solution économique à court terme
1.1.3 Les problèmes des protections individuelles disponibles sur le marché
1.1.4 Le besoin d’un protecteur auditif<< intelligent>>
1.2 Problématiques associées au développement d’un bouchon d’oreille << intelligent >>
1.2.1 Problématique << Santé et sécurité au travail >>
1.2.1.1 Importance du port continu d’un protecteur auditif
1.2.1.2 Inadéquation entre les valeurs théoriques et les valeurs réelles<< terrain>> d’atténuation
1.2.2 Problématique technique
1.2.2.1 Un bouchon d’oreille adapté à la morphologie individuelle et biocompatible
1.2.2.2 Adaptation du bouchon à l’exposition du travailleur
1.2.2.3 Un système et une méthode de mesure des performances acoustiques
1.2.3 Problématique scientifique
1.2.3.1 Identification des paramètres clefs déterminants les performances d’un protecteur auditif intra-auriculaire
1.2.3.2 Systèmes de filtrage sélectifs adaptés au bruit en milieu industriel
1.2.3.3 Méthode de mesure objective de l’atténuation effective d’un protecteur auditif intra auriculaire
1.3 État du développement 
1.3.1 Synthèse des développements prévus
1.3.2 État d’avancement
1.4 Conclusion 
ARTICLE 2 THE OBJECTIVE MEASUREMENT OF INDIVIDUAL EARPLUG FIELD PERFORMANCE
2.1 Introduction
2.2 The Deviee Used: An Instrumented Expandable Custom Earplug
2.3 Formulation of the proposed objective measurement of individual
earplug field performance
2.3.1 Relationship between Noise Reduction (NR), Insertion Loss (IL) and Real Ear Attenuation at Threshold (REAT)
2.3.2 Measurement of Noise Reduction and its associated corrections
2.3.2.1 Measurement of the field Noise Reduction
2.3.2.2 Measurement of the Noise Reduction field correction
2.3.2.3 Measurement of Noise Reduction laboratory correction
2.3.3 Estimation of the equivalent binaural NR
2.3.4 Compensation Calculation
2.3.5 Predicted Persona! Attenuation Rating
2.3.6 Performance Tests
2.3.6.1 Acoustic Seal Test
2.3.6.2 Rating Test
2.3.6.3 Protection Outcome Test
2.4 Experimental Validation of the Proposed Approach
2.4.1 Validation of the measurement deviee
2.4.1.1 Experimental setup
2.4.1.2 Experimental results
2.4.2 Validation of the prediction method
2.4.2.1 Detailed computation on the two datasets
2.4.2.2 Predicted vs. Reported Attenuation
2.4.3 Comparison with existing field measurement techniques
2.5 Uncertainty associated with the proposed measurement approach
2.5.1 Classification and Representation of uncertainty components for the PPAR
2.5.1.1 Uncertainty components associated with the corrected Noise Reduction: UNR
2.5.1.2 Uncertainty components associated with the Compensation factor: UcOMP
2.5.2 Evaluation of PPAR uncertainty components
2.5.2.1 Evaluation of the corrected Noise Reduction uncertainty component: UNR
2.5.2.2 Evaluation of the compensation uncertainty component ucoMP
2.5.3  Combination of PPAR uncertainty components
2.5.3.1 Discussion on the uncertainty associated with the proposed approach UAPP
2.5.3.2 Discussion on the overall PPAR uncertainty
2.5.4 Calculation of expanded uncertainty and coverage factor
2.5.4.1 General calculation
2.5.4.2 Specifie calculation
2.5.5 Intra-subject earplug « real-world » field performance variability
2.5.5.1 Measurement Variability
2.5.5.2 Fitting Variability
2.5.5.3 Retention Variability
2.5.5.4 Aging Variability
2.6 Use of the proposed approach for other types of earplugs
2.6.1 Experimental Setup
2.6.2 Experimental Insertion Loss IL vs. Noise Reduction NR*
2.7 Conclusions
2.a Estimation of the Trans fer Function H3 ( w) .
2.b Numerical Tables . . . . . . . . . .
2.b.a Numerical Tables from section 2.3.2 . .
2.b.b Numerical Tables from section 2.4.2 ..
2.c Statistical Graphs from section 2.4.2.1.5
2.d  Statistical graphs from Section 2.4.2.2 .
ARTICLE 3 PREDICTION OF THE ATTENUATION OF A FILTERED CUSTOM
3.1 Introduction
3.2 An empirical damper contribution model
3.2.1 Justification, concept and hypothesis of the proposed model
3.2.2 Formulation of the filtered earplug attenuation prediction
3.2.3 Measurement of the averaged damper attenuation contribution
3.2.3.1 ATT Damper
3.2.3.2 Measurement Methodology
3.2.4 Analysis of the data collected
3.2.4.1 Evaluation of the validity of Hl and H2 hypothesis
3.2.4.2 On Acoustical Test Fixture (ATF)
3.2.5 On Human Subjects
3.3 Damper attenuation contribution
3.3.1 Uncertainty associated with the filtered earplug attenuation prediction
3.3.2 Evaluation of the uncertainty associated with the proposed approach
3.3.2.1 Uncertainty associated with the damper acoustical resistance variability
3.3.2.2 IL measurement on several earplug configurations
3.3.2.3 Relationship between acoustical resistance and attenuation
3.3.3 Variability of the damper attenuation
3.4 Analysis of the uncertainty sources 
3.4.1 Experimental Validation of the Prediction Model
3.4.2 Experimental process
3.4.3 Experimental Data Reported
3.5 Validation criteria
3.6 Conclusion
3.a Tables from section 3.2.3
3.b Tables from section 3.2.3.2, « per test trial » analysis
3.c Tables from section 3.2.3.2, « per subject average » analysis
3.d Tables from section 3.3.1
3.e Tables for section 3.4.2
CONCLUSION

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