Le bilan des carbonates et le maintien des récifs coralliens

Le bilan des carbonates et le maintien des récifs coralliens

En plus des divers rôles écosystémiques des récifs coralliens, ceux-ci ont une importance dans les processus biogéochimiques liés au cycle des carbonates. En effet, ils jouent un rôle majeur dans ce cycle en précipitant, via le processus de calcification, plus d’un tiers des carbonates apportés à l’océan (Milliman 1993). La calcification dans les récifs est principalement réalisée par les coraux scléractiniaires (appelés aussi coraux durs) (Hubbard et al. 1990). D’autres organismes tels que les algues corallines, les bivalves, les foraminifères ou encore les serpulidés réalisent également la calcification pour des contributions plus faibles (Hallock 1981, Martindale 1992, Rasser and Riegl 2002, Harney and Fletcher 2003). La calcification corallienne constitue la principale force de construction des récifs (force positive) ; elle est en moyenne de 4 kg m-2 an-1 (calcification nette, voir Kinsey 1985) mais peut atteindre des valeurs plus élevées dans certaines zones comme l’ont observé Perry et al. (2014) dans les Caraïbes avec une calcification nette de plus de 8 kg m-2 an-1 . Néanmoins, il existe un certain nombre de forces de destructions des récifs (Figure 2).

Une des forces de destruction des récifs est celle exercée par les vagues, tout particulièrement durant les tempêtes ou cyclones (Hubbard 1992, Harmelin-vivien 1994). En effet, un récif en bonne santé peut être totalement détruit après ces événements climatiques extrêmes (Woodley et al. 1981, Harmelin-Vivien and Laboute 1986, Gardner et al. 2005). Une dissolution chimique impacte également les récifs coralliens dans des zones où le pH est faible à proximité de zones de résurgences volcaniques par exemple (Hall-Spencer et al. 2008, Rodolfo-Metalpa et al. 2011) mais également via la reminéralisation des sédiments carbonatés récifaux due à l’activité bactérienne (Andersson et al. 2003, Andersson and Gledhill 2013). En plus de cette destruction mécanique ponctuelle et localisée et de la dissolution chimique considérée comme négligeable, une érosion due à des organismes vivants, appelée bioérosion, (Figure 2) impacte continuellement les récifs coralliens et est donc la principale force de destruction de ceux-ci (Scoffin et al. 1980, Harney and Fletcher 2003, Tribollet and Golubic 2011, Perry et al. 2014). Le maintien des récifs coralliens dépend alors d’un équilibre entre la calcification et l’ensemble des forces de destruction citées ci-dessus (Stearn and Scoffin 1977, Scoffin et al. 1980, Hutchings 1986, Hubbard et al. 1990, Glynn 1997, Tribollet and Golubic 2011, Perry et al. 2012, voir Figure 2). Ainsi, pour qu’un récif se maintienne, les forces de destruction ne doivent pas excéder celles de construction.

Les récifs coralliens semblent de plus en plus fragilisés par le changement climatique et les pressions anthropiques tels que la surpêche, le tourisme intensif, l’urbanisation, l’eutrophisation, l’acidification des océans ou encore l’augmentation de la température des Océans. Ainsi sous l’effet de facteurs du changement global la calcification et la croissance des coraux semblent diminuer et la mortalité corallienne croître (Brown 1987, Rogers 1990, Done 1992, Richmond 1993, Wilkinson 1993, Roberts 1995, Mumby et al. 2006, Hoegh-Guldberg et al. 2007, Hughes et al. 2007, Anthony et al. 2008, Mumby 2009b, Pandolfi et al. 2011, Huang 2012, Andersson and Gledhill 2013, Howes et al. 2015a). A ce jour, 20% des récifs ont d’ores et déjà disparu et 20% supplémentaires montrent des signes d’extinction imminente (Wilkinson 2008). En parallèle d’un affaiblissement des forces de construction des récifs il a été démontré à plusieurs reprises une stimulation de la bioérosion récifale, la principale force de destruction des récifs, sous l’effet de l’acidification, de l’eutrophisation ou encore de l’augmentation de la température de l’eau (Tribollet et al. 2009, Carreiro-Silva et al. 2012, Fang et al. 2013, Reyes-Nivia et al. 2013, Reyes Nivia et al. 2014, Wisshak et al. 2014) ce qui pourrait conduire à un bilan négatif des carbonates dans les récifs et donc à un déclin de ceux-ci. Bien que toutes les forces impliquées dans le bilan des carbonates des récifs soient impactées par le changement climatique et les pressions anthropiques, les processus de bioérosion restent à ce jour beaucoup moins étudiés que la calcification récifale.

La bioérosion récifale et l’importance du processus de microbioérosion

Neumann (1966) a été le premier à définir la bioérosion comme l’érosion et l’élimination de substrats carbonatés par action directe d’organismes vivants. La bioérosion est réalisée par trois types d’organismes (voir les review de Glynn 1997 et Tribollet et Golubic 2011) :

❖ les brouteurs, ou agents externes de la bioérosion, avec par exemple les poissons du genre Scarus sp. (poissons perroquets), les oursins ou encore certains mollusques comme les chitons (Figure 3).
❖ les macrobioérodeurs (ou macroperforants), agents internes de la bioérosion, comme certaines éponges marines du genre Cliona sp., bivalves du genre Lithophaga sp. ou polychètes (Figure 3).
❖ les microbioérodeurs (ou microperforants ou euendolithes, voir définition par Golubic et al. 1981), autres agents de la bioérosion interne, qui comprennent des cyanobactéries, des microalgues chlorophycées et rhodophycées, et des filaments mycéliens (Figure 3).

Les brouteurs abrasent mécaniquement la surface des substrats pour se nourrir des algues qui s’y développent en surface (appelées épilithes, Figure 4) et à l’intérieur (appelées endolithes qui comprennent les microbioérodeurs, Figure 4). Les macro- et microbioérodeurs se développent à l’intérieur des substrats par des moyens mécaniques et/ou chimiques (Lazar and Loya 1991, Bruggemann et al. 1994, Pari et al. 1998, Tribollet and Golubic 2005, Zundelevich et al. 2007, Garcia-Pichel et al. 2010).

La plupart des études concernant la bioérosion récifale a concerné les organismes brouteurs et les macrobioérodeurs car la microbioérosion peut facilement être considérée comme négligeable du fait sans doute de la taille microscopique des microperforants (diamètre allant de 1 à 20-30 µm) et de leur mode de vie cryptique les rendant difficiles à étudier (Figure 4). Pourtant, plusieurs études ont montré l’importance des microperforants dans le processus de bioérosion récifale. Les microperforants se fixent à la surface des substrats puis se développent sous forme principalement de filaments et peuvent coloniser chaque micromètre carré de substrat carbonaté exposé à la lumière présent dans les récifs coralliens (Tribollet 2008a). Tous les types de substrats carbonatés sont d’ailleurs concernés par la microbioérosion, que ce soit les grains de sable (Perry 1998) ou les squelettes d’organismes vivants ou morts comme les coraux, les algues corallines mais aussi les coquilles de mollusques (Le Campion-Alsumard et al. 1995a, Le Campion Alsumard et al. 1995b, Mao Che et al. 1996, Tribollet and Payri 2001, Fine et al. 2005, Radtke and Golubic 2005, ReyesNivia et al. 2014). La colonisation des substrats carbonatés par les microperforants résulte de leur activité métabolique (photosynthèse-respiration) au niveau de la cellule apicale des filaments perforants formant ainsi un front de dissolution (Figure 5, Le Campion-Alsumard 1979, GarciaPichel 2006). Les mécanismes qui entrent en jeu dans ce processus de dissolution restent néanmoins peu connus. Ce processus de dissolution des carbonates par les microbioérodeurs est appelé dissolution biogénique (Tribollet et al. (2009).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

CHAPITRE I-INTRODUCTION GENERALE
1.1 Les récifs coralliens
1.2 Le bilan des carbonates et le maintien des récifs coralliens
1.3 La bioérosion récifale et l’importance du processus de microbioérosion
1.4 Les communautés microperforantes et la microbioérosion
1.5 Influence des paramètres biotiques et abiotiques sur la microbioérosion
1.6 Les objectifs de la thèse
1.7 Organisation du manuscrit
CHAPITRE II-MATERIEL ET METHODES
2.1 Le site d’étude
2.1.1 Le contexte de la Nouvelle-Calédonie
2.1.2 Le climat Néo-Calédonien
2.1.3 L’île aux Canards et son récif
2.1.3.1 La localisation de la zone d’étude et son contexte
2.1.3.2 Hydrologie du site
2.2 Plan de l’expérience
2.2.1 Fabrication des blocs expérimentaux
2.2.1.1 Prélèvement d’une colonie corallienne vivante
2.2.1.2 Découpe de la colonie corallienne
2.2.1.3 Nettoyage des blocs
2.2.2 Installation des blocs sur des grilles à l’île aux Canards
2.2.3 Exposition et collecte des blocs
2.3 Préparation et analyse des blocs de corail
2.3.2 Détermination du couvert épilithique et du broutage sur les blocs
2.3.3 Découpe des blocs en trois sous-échantillons
2.3.4 Traitement des premiers sous-échantillons
2.3.4.1 Imprégnation en résine
2.3.4.2 Découpe et polissage des lames minces
2.3.4.3 Coloration des lames minces
2.3.5 Analyse des sous-échantillons
2.3.5.1 La pression de broutage
2.3.5.2 Identification des microperforants
2.3.5.2.1 Cyanophycées
2.3.5.2.2 Chlorophycées
2.3.5.2.3 Filaments mycéliens
2.3.5.3 Abondance relative des microperforants
2.3.5.4 Profondeurs de pénétration des filaments microperforants
2.3.6 Traitement des sous-échantillons 2
2.3.6.1 Elimination des algues épilithiques non calcifiantes et des filaments microperforants
2.3.6.2 Préparation des échantillons pour les observations
2.3.7 Analyse des sous-échantillons 2
2.3.7.1 Observation des blocs au Microscope Electronique à Balayage
2.3.7.2 Traitement des photos prise au MEB et calcul de la surface bioérodée
2.3.8 Calcul de la dissolution biogénique
2.4 Suivi environnemental
2.4.1 Suivi mensuel par sonde multiparamétrique : Température, Salinité, Turbidité, Fluorescence
2.4.2 Suivi mensuel par prélèvements d’eau : Chlorophylle a, Nutriments, Système des carbonates, Métaux lourds
2.4.2.1 Chlorophylle a
2.4.2.2 Nutriments : Nitrites, Nitrates, Phosphates
2.4.2.3 Système des carbonates
2.4.2.4 Métaux lourds
2.4.3 Suivi continu : Température, Salinité, Turbidité, Fluorescence
2.4.4 Traitement des données environnementales
2.5 Analyses statistiques
2.5.1 Tests réalisés
2.5.1.1 Comparaison de moyennes
2.5.1.2 Comparaison de pentes
2.5.1.3 Corrélations
2.5.2 Modèle
2.5.3 Analyses multivariées
2.5.3.1 non-Metric multiDimentional Scaling
2.5.3.2 Analyse en Composantes Principales
CHAPITRE III-LES TROIS ETAPES DE LA DISSOLUTION BIOGENIQUE AU COURS D’UNE ANNEE
Résumé
3.1 Introduction
3.2 Material and Methods
3.2.1 Site and experimental design description
3.2.2 Sample analyses
3.2.3 Statistical analysis
3.3 Results
3.3.1 Euendolithic species
3.3.2 Successions of communities: abundance and distribution of euendoliths
3.3.3 Surface area bioeroded and depth of penetration (P80)
3.3.4 Biogenic dissolution rates
3.3.5 Grazing pressure
3.4 Discussion
CHAPITRE IV-CONCLUSION GENERALE

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *