Le behaviorisme :une conception mécanique de l’apprentissage
D’abord, le behaviorisme étudie principalement l’ influence de l’environnement sur l’apprentissage des comportements, environnement qui, dans cette conception, détermine et explique les comportements humains (Tardif, 1997; Gaonac’h, 1987).
Dans cette conception mécaniste de l’apprentissage, l’apprenant est passif puisqu’il ne fait que réagir aux stimuli de son environnement (Vienneau, 2005). Cependant, à la suite d’autres chercheurs, il me semble très peu probable que des répétitions ou la création d’automatismes puissent permettre l’apprentissage de quelque chose d’aussi complexe qu’une langue (Gaonac’h, 1987; Krashen et Terrell, 1983). En salle de classe, on peut facilement remarquer que les apprenants d’une langue seconde ne font pas que répéter, mais qu’ ils essaient d ‘adapter les structures apprises pour créer de nouveaux messages qu’ils souhaitent livrer. À cet égard, il n’est pas rare que mes étudiants réussissent, peut-être à l’aide du contexte et de leurs connaissances antérieures non mécaniques, à comprendre les propos d’un invité dans la classe, et même à répondre à ses questions. Ainsi il ne s’agit plus de simple répétition de phrases apprises par cœur. Des linguistes, parmi lesquels Chomsky, ont d’ailleurs critiqué le behaviorisme en le qualifiant d’«incapable de rendre compte de la créativité du sujet parlant et de l’apprentissage du langage chez l’enfant »(Dubois et coll., 1999 : 64 ).
Le cognitivisme : une conception plus complexe de l’apprentissage
Contrairement au behaviorisme qui se préoccupe seulement des comportements observables, le cognitivisme porte sur la structure cognitive qui regroupe l’ensemble des connaissances emmagasinées et organisées dans la mémoire à long terme (Vienneau, 2005; Kaufman, 2004). Du cognitivisme sont nés deux courants majeurs : la psychologie cognitive et le constructivisme.
La psychologie cognitive :les activités mentales au cœur de l’apprentissage
La psychologie cognitive étudie les processus de traitement de l’ information en comparant le fonctionnement du cerveau humain à celui d’un ordinateur, analogie proposée par Atkinson et Shiffrin, auteurs du« modèle fondateur de la psychologie cognitive » (Gaonac’h, 1987). Selon ce modèle, l’information visuelle entre d’abord dans la mémoire à court terme, est ensuite transformée en matériel verbal et est finalement emmagasinée dans la mémoire à long terme. La psychologie cognitive s’intéresse donc aux activités mentales que l’individu met en œuvre pour emmagasiner, transformer et utiliser l’information Elle définit l’apprentissage comme une série d’étapes dédiées à un aspect particulier du processus de traitement de l’information (Goupil et Lusignan, 1993). La psychologie cognitives s’avère donc liée à ma préoccupation de recherche puisque, comme nous le verrons plus tard, les stratégies d’apprentissage sont impliquées dans les étapes du processus de traitement de l’information. L’autre courant cognitiviste, le constructivisme, est aussi lié à ma préoccupation
Le bon apprenant en langue seconde
Naiman et coll. ont proposé un modèle basé sur le bon apprenant en langue seconde : The Good Language-Learner Model (1978; Skehan, 1989) dans lequel ils soulignent le rôle déterminant de trois ensembles de facteurs (propres à l’enseignement, à l’apprenant et au contexte) sur deux autres ensembles (l’apprentissage et le résultat).
Constitué de cinq sections, le diagramme qui illustre ce modèle décrit chacun des ensembles de facteurs impliqués et le sens des influences .
Ce modèle est intéressant pour cette étude puisqu’il met en évidence le rôle du contexte et de l’enseignement dans l’apprentissage d’une langue seconde, mais surtout, il fait ressortir l’unicité de l’apprenant, l’une des trois valeurs du cognitivisme. En effet, tous le s apprenants sont différents suivant la motivation, l’âge, la personnalité, l’attitude, le style cognitif D’ailleurs, le rôle de ces caractéristiques individuelles dans le développement d’une langue seconde a été souligné par de nombreuses recherches (Hamers, 2005; Gardner, 1983 ; Lambert et Tucker, 1972, entre autres).
L’importance du contexte naturel pour l’apprentissage : les hypothèses de Krnshen (1981, 1982) et de Krnshen et Terrell (1983)
Krashen (1981) fait une distinction nette entre acquisition et apprentissage en avançant l’hypothèse que l’acquisition d’une langue s’effectue de façon implicite dans un contexte naturel, authentique (de vie courante), alors que son apprentissage se fait dans un milieu formel, soit en salle de classe. De plus, l’apprentissage ne mènerait pas nécessairement à l’acquisition, qui est subconsciente. Pour qu’il y ait acquisition d’une langue seconde, selon l’hypothèse de l’input (Krashen 1982), il faut d’abord qu’il y ait eu une exposition à la langue cible et que l’input, c’est-à-dire toute expression dans la langue cible que l’apprenant peut entendre, ait été compréhensible par ce dernier (Ostiguy, 2007).
Pour expliquer l’acquisition des langues secondes, Krashen et Terrell (1983) ont avancé trois autres hypothèses en plus de celles de l’input et de la distinction entre acquisition et apprentissage : l’hypothèse de l’ordre naturel, l’hypothèse du moniteur et l’hypothèse du filtre affectif. L’hypothèse de l’ordre naturel suppose que le langage est acquis dans un ordre prévisible : certaines structures seraient acquises avant d’autres. L’hypothèse du moniteur mentionne que l’apprentissage conscient de la langue joue un rôle mineur dans l’acquisition, soit celui de correcteur. En effet, quand un adulte produit un énoncé en langue seconde, ille fait d’abord en fonction de ce qu’il a acquis de cette langue. C’est seulement après cela que l’adulte corrige ou ajuste son énoncé en fonction de ce qu’il a appris. L’hypothèse du filtre affectif tient compte des facteurs liés à l’attitude ou à la motivation (Krashen et Terrell, 1983), en ce sens que ces derniers auraient une influence sur l’apprentissage de la langue.
Les stratégies d’apprentissage: un facteur essentiel
Les recherches initiales sur les stratégies d’apprentissage en langue seconde avaient pour but d’en apprendre sur le bon apprenant (Dôrnye 2005). Le profil du bon apprenant, d’abord décrit par Stern (1975) avant le modèle de Naiman et coll. (1978) rapporté ci-dessus, en fut le point de départ (Cyr, 1992). Stern formule la définition du bon apprenant en se basant sur ses observations et dresse une liste des traits que tout apprenant devrait posséder pour réussir en langue seconde.
Dans les années 1980, la psychologie cognitive apporte un nouvel éclairage sur les stratégies d’apprentissage. Les travaux d’O’Malley, Chamot et coll. (1990) exposent l’aspect cognitif des stratégies et en offrent une classification en trois catégories, métacognitive, cognitive et socioaffective, basée sur la psychologie cognitive et les sciences de l’éducation Cet apport de la psychologie cognitive à la didactique des langues secondes a permis d’étudier les processus mentaux liés à l’action d’apprendre (Cyr, 1996). Pour Chamot (2005 : 112), les stratégies d’apprentissage sont des «procedures that facilitate a learning task ». Outre la classification que leurs recherches ont permis d’établir, l’une des conclusions les plus éclairantes est que les apprenants les plus faibles utilisent un nombre réduit de stratégies en comparaison avec les plus performants. Les chercheurs suggèrent donc l’enseignement des stratégies aux apprenants plus faibles (Chamot, 2005; Chen, 2007).
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I :PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE
1.1. Observations d ‘étudiants chinois apprenant le français langue seconde
1.2. Les facteurs individuels intervant dans l’ apprentissage d’une langue seconde
1.3. Les stratégies d’apprentissage
1.4. Les facteurs contextuels
1.5. Question de recherche
CHAPITRE II :CADRE DE RÉFÉRENCE
2.1. Apprendre : une question d’automatismes ou de traitement d ‘ information
2.2. Apprendre une langue seconde :une multitude de facteurs impliqués
2.3. Les stratégies d ‘apprentissage :un facteur essentiel
2.4. Buts et objectifs
2.5. Questions spécifiques de recherche
CHAPITRE III :MÉTHODOIDGIE
3.1. Le type de recherche
3.2. Les participants
3.3. L’entrevue semi-dirigée
3.4. Le journal de bord
3.5. Le traitement anticipé et l’analyse des données
3.6. L’arbre de codification
3.7. L’entrevue pré-test
3.8. Éthique de la recherche
CHAPITRE4 :PRÉSENTATION ET ANALYSE DES DONNÉES
Caractéristiques des participants
Résultats d’analyse des données
4.1. Les stratégies d’apprentissage
4.2. Les facteurs contextuels
4.3. Relation entre la langue de l’entrevue et les résultats
4.4. Mise en perspective et critique des travaux d’Oxford
4.5. Limites et forces de l’étude
CONCLUSION
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