L’autorégulation et l’autonomie professionnelle
Le virage compétence des programmes académiques
C’est dans le cadre de cette mouvance sociale que la faculté de pharmacie de l’Université de Montréal a transformé son programme de premier cycle universitaire en un programme axé sur les compétences. La santé de la population et la qualité des services sont les enjeux vitaux. Les compétences des professionnels de la santé peuvent, à elles seules, influencer l’atteinte des résultats thérapeutiques, la résolution des problèmes de santé, ou alors décider parfois de l’issue favorable ou non de ceux-ci. Dorénavant, les connaissances factuelles et procédurales, bien qu’essentielles et sans cesse en évolution, n’apparaissent plus suffisantes pour soigner et guérir selon les attentes sociales et professionnelles. La qualité des interactions patient-professionnel s’avère maintenant de première importance dans la résolution des problématiques de santé. Il ne s’agit plus pour le pharmacien d’être un expert dans le domaine du médicament, il s’agit alors pour celuici de savoir « agir et être » de manière coopérative et éthique au sein d’un ensemble fort complexe de situations et de contextes professionnels, sociaux et politiques. Pour les acteurs universitaires et cliniques, il ne suffit plus d’évaluer les connaissances factuelles, procédurales et disciplinaires, mais plutôt leur application, leur intégration, leur mobilisation dans une variété représentative de contextes professionnels significatifs et authentiques.
Dans cette réforme curriculaire, le développement et la maîtrise de neuf (9) compétences deviennent les pierres angulaires du programme de doctorat professionnel en pharmacie (Université de Montréal, 2004) sur lesquelles s’appuie l’accès à la pratique (Annexe 1, Tableau 66). Parmi ces compétences, six (6) d’entre elles, sont dites transversales dont notamment le professionnalisme. Trois (3) autres sont désignées comme spécifiques à la profession. Dans un tel programme, le développement des compétences devient le leitmotiv des acteurs académiques et cliniques et par le fait même l’enjeu principal de décision et de sélection.
La sélection des candidats : enjeux de décision
L’élaboration d’une procédure de sélection performante constitue tout un défi de taille notamment parce que les institutions universitaires disposent d’une responsabilité morale et d’une obligation éthique de choisir les candidats les mieux adaptés à leur profession, c’est-à-dire les candidats présentant les qualités et les capacités propices à une pratique professionnelle (Eva, Reiter, Rosenfeld, & Norman, 2004). L’objectif est de sélectionner les candidats aptes à accepter l’autonomie professionnelle et à poursuivre le développement cognitif et moral souhaité (Tableau 2) (Duncan-Hewitt, 2005). Un objectif plus facile à dire qu’à atteindre.
À ce titre, un premier constat vient remettre en question la sensibilité des processus de sélection des candidats des facultés de pharmacie. En effet, selon Latif & Berger (1997), près de la moitié des candidats admis en pharmacie ne présente pas le niveau de développement cognitif et moral attendu, c’est-à-dire celui de la responsabilisation (F3).
Cette immaturité morale des étudiants à l’admission constitue une problématique incontournable, impossible à éluder car elle s’avère contraignante pour le développement professionnel des étudiants en pharmacie. Sur ces bases, le développement cognitif et moral des étudiants tout au long des études en pharmacie s’avère préoccupant pour l’émergence et le développement du professionnalisme.
La prédiction et les variables non cognitives
Conscientes des limites des principaux indicateurs cognitifs des performances académiques, plusieurs institutions académiques se questionnent sur l’apport des variables non cognitives pour accroître l’optimalité et l’équité des décisions de sélection des candidats (Stern, Frohna, & Gruppen, 2005). Allen & Bond (2001) croient que les composantes non cognitives sont trop souvent négligées dans les processus de sélection.
Cependant, dans la littérature, peu d’études empiriques s’attardent à cette problématique sous un angle autre que l’observation des conduites (Van Mook, van Luijk, O’Sullivan, Wass, Schuwirth, & van der Vleuten, 2009d; van Mook, Gorter, O’Sullivan, Wass, Schuwirth, & van der Vleuten, 2009e). Possiblement parce que les variables non cognitives demeurent difficiles à expliciter et que l’authenticité puis la fidélité de leurs mesures sont souvent remises en question compte tenu de la nature habituellement auto déclarée de celles-ci.
Par conséquent, la démonstration empirique de la valeur prédictive des composantes non cognitives demeure nécessaire (Allen & Bond, 2001; Stern, Frohna, & Gruppen, 2005). Il nous apparaît pertinent qu’une étude comme l’étude PERSONA puisse investiguer la capacité des variables non cognitives à prédire le professionnalisme. Par contre, des enjeux de mesure et de décision se dressent lorsque nous considérons intégrer des variables non cognitives à une démarche de sélection (Bore, Munro & Powis, 2009), soit :
! Le choix des variables prédictives
! La méthode de mesure des variables prédictives, et
! L’interprétation des résultats
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INTRODUCTION
Section A – La problématique de recherche
I. La prédiction du professionnalisme : enjeux d’impact
1.1 Le virage compétence des programmes académiques
1.2 La sélection des candidats : enjeux de décision
1.3 La prédiction : enjeux de mesure et de décision
1.4 La prédiction et les variables non cognitives
1.5 Le choix d’un critère
1.6 Les conduites comme manifestation du professionnalisme
Section B – Les variables de l’étude : cadres théoriques et enjeux de mesure
II. Le professionnalisme
2.1 Le professionnalisme, une dynamique à comprendre
2.1.1 L’idéalisme professionne
2.1.2 Le contrat social
2.1.3 L’autorégulation et l’autonomie professionnelle
2.2 Le professionnalisme, une compétence à définir
2.2.1 Le professionnalisme individuel
2.2.2 Le professionnalisme interpersonnel
2.2.3 Le professionnalisme socia
2.2.4 Le professionnalisme, une compétence
2.3 Le développement du professionnalisme : l’heure des bilans
2.3.1 Le curriculum et la culture académique
2.3.2 Le contexte expérientiel et la culture professionnelle
2.4 Le professionnalisme, une compétence à évaluer
2.4.1 L’importance de la validité
2.4.2 La validité et le contexte de prédiction du professionnalisme
2.4.3 La fidélité ou les multiples visages de la variance
2.4.4 Les enjeux de mesure et la fidélité
2.5 Les critères de professionnalisme
2.5.1 Une perspective systémique de la compétence de professionnalisme
2.5.2 Les critères de professionnalisme
III. Les variables non cognitives : personnalité, valeurs et autodétermination
3.1 Les hypothèses prédictives
3.2 Les facteurs de la personnalité
3.2.1 Une taxonomie de la personnalité
3.2.2 Les enjeux de mesure et la personnalité
3.3 Les valeurs et les systèmes de valeurs
3.4 L’autodétermination
3.5 Synthèse des variables de l’étude
3.6 Les questions de recherche
Section C- La méthodologie de l’étude
IV. Les modèles de mesure
4.1 Les variables latentes
4.2 Les modèles de la famille de Rasch
4.3 La méthode des strates
4.4 La modélisation par classes latentes
4.5 Synthèse des procédures méthodologiques
Section D- Les articles de recherche
V. Le modèle dichotomique de Rasch pour l’interprétation d’un test de la personnalité
5.1 Introduction
5.2 Méthodologie
5.3 Résultats
5.4 Conclusion
VI. Mesurer les valeurs en contexte académique: la validation d’une version modifiée du
sondage des valeurs de Schwartz
6.1 Introduction
6.2 Méthode
6.3 Résultats
6.4 Conclusion
VII. Les modèles polytomiques de Rasch pour mesurer l’autodétermination : la validation d’une échelle de mesure (MIME-SP)
VIII. Prédire le professionnalisme : une exploration du modèle de régression par classes latentes
IX. Conclusion et perspectives
Annexes
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