L’augmentation du recours aux soins à domicile
Sur le Canton de Genève, les soins d’aide et de maintien à domicile sont régis par la Loi sur le réseau de soins et le maintien à domicile (LSDom, K 1 06 du 26 juin 2006), entrée en vigueur le 1er Février 2010. L’objectif de cette loi est de fournir un cadre légal qui permet de promouvoir le maintien à domicile des personnes grâce aux concours des proches aidants et/ou des services d’aide et de soins à domicile. Cette loi s’accompagne de son Règlement d’application (RSDom, K 1 06 01) qui définit ses mesures d’applications en nommant les professionnels et les institutions de premier recours chargés d’assurer le maintien à domicile des personnes dans le Canton de Genève. Au cours de l’an 2014, environ 268’715 personnes ont eu recours aux services de soins et d’aide à domicile en Suisse, les trois quarts des bénéficiaires des prestations d’aide et de soins domicile étaient âgées de 65 ans et plus (Flavia Lazzeri, 2015). Ces derniers ont bénéficié de 82% des heures de services qui ont été facturées (Flavia Lazzeri, 2015). Si l’on considère les taux de l’aide à domicile entre les années 2012 et 2014, on remarque qu’il y a une augmentation de la clientèle des services de soins et d’aide à domicile de l’ordre de 10991 clients supplémentaires (Flavia Lazzeri, 2013; Flavia Lazzeri, 2015).
Cela montre qu’il existe une augmentation des besoins d’aide et de soins dans les ménages privés suisses. D’autant plus qu’on sait qu’en Suisse la plupart des personnes âgées souhaitent finir leur vie chez elles et que avec l’avancée en âge les aînés sont de plus en plus confrontés à des limitations fonctionnelles (OFS, 2014). Aujourd’hui à Genève, environ 28,5% des personnes âgées ont des difficultés dans la poursuite de leur vie à domicile à cause des conséquences du vieillissement, elles reçoivent donc de l’aide de l’imad (Institution genevoise de maintien à domicile (imad), 2016). Au cours de l’année 2015, les personnes âgées de 65 ans et plus aux bénéfices des services de l’imad sont passées de 11’474 (en 2014) à 12’821 clients en 2015 (imad, 2016). L’imad à fournit cette même année 445’854 repas à domicile (soit 26’000 repas de plus qu’en 2013) à ses clients dont 28,5% de personnes âgées confrontées à des difficultés au quotidien pour préparer leurs repas (imad, 2016). Pour les personnes âgées, le domicile est à la fois un cadre familier, propice au développement du fait de la maîtrise de leur lieu de vie mais aussi un environnement exposant à des facteurs de prise de risques (dénutrition, chute…) pour leur santé (Droz Mendelzweig et al., 2014). La notion du risque fait appel au terme de la prévention.
Il existe 3 niveaux de prévention à savoir la prévention primaire, la prévention secondaire et la prévention tertiaire. Chez les personnes âgées qui vivent à domicile, la prévention primaire consiste en un dépistage précoce des facteurs de risque des plaies (âge, les antécédents médicaux et comorbidités …) à travers des activités de promotion de la santé. La prévention secondaire touche les personnes déjà atteintes de plaies, elle permet de dépister et de traiter les facteurs qui pourraient entraver la cicatrisation normale des plaies (dénutrition, hyperglycémie, hypoxie…) afin d’éviter une chronicisation des plaies et/ou les récidives. Enfin, la prévention tertiaire concerne les sujets âgées (très souvent polymorbides, fragiles et vulnérables) qui souffrent déjà de plaies chroniques très souvent récidivantes et entraînant une demande accrue en soins. Le but de la prévention tertiaire est de favoriser une qualité de vie optimale et une cicatrisation des plaies adéquate tout en gérant les facteurs de risques de troubles de la cicatrisation éventuels tel que la dénutrition (Büla et al., 2007).
Les plaies du pied diabétique
Selon l’International Diabetes Federation (IDF, 2011), le nombre de personnes (20-79 ans) atteints de diabète en Suisse en 2015 était d’environ 500’000 (IDF , 2011 cité par Cavan et al., 2015). Les facteurs qui influencent l’apparition et qui rendent chroniques les plaies du pied diabétique sont les polyneuropathies, les artériopathies et les infections (Boursier, Pernes, Fukui, & Priollet, 2006). – 18 – La prise en soin thérapeutique du pied du diabétique dépend du stade de l’artériopathie (Périard, Hayoz, & Mazzolai, 2009). Les gangrènes observées au niveau du pied diabétique sont en effet les conséquences de l’artériopathie périphérique. Malheureusement, elles ne sont souvent diagnostiquées qu’au moment où apparaissent les ulcérations profondes ou les nécroses (Boursier et al., 2006). L’apparition des ulcères et des infections est majorée en présence de la polyneuropathie (Darbellay et al., 2011). L’ulcère neuropathie débute le plus souvent au niveau de la face plantaire des 1er et 5e métatarsiens et au niveau postérieur du calcanéum. Il s’agit des points d’appuis, de pression et/ou de déformation du pied qui se présentent généralement sous une forme arrondie avec une hyperkératose péri-ulcéreuse et indolore (Pin, Philippe, & Peter-Riesch, 2003).
Les déformations observées au niveau des pieds des patients diabétiques entraînent des modifications de l’assise du pied à l’origine des problèmes d’arthrose, de fractures et de plaies au niveau de la face plantaire du pied on parle de mal perforant plantaire (Gastaldi, Ruiz, & Borens, 2013). Sur la Figure 7 ci-dessous à gauche apparaît un mal perforant plantaire et à droite une nécrose/gangrène des orteils dès suite d’un artériopathie périphérique chez un patient diabétique.
Les problèmes de dénutrition chez la personne âgée « La dénutrition est la conséquence d’une insuffisance d’apports en nutriments par rapport aux besoins. » (Raynaud-Simon & Lesourd, 2000, p. 2183). En Suisse, 20 à 30 % des personnes hospitalisées présentent des carences alimentaires. Chez les personnes âgées, le pourcentage des personnes atteints de carences alimentaires serait encore bien plus élevé à domicile (Keller et al., 2012). A domicile, environ 4 à 10 % des personnes âgées souffrent de dénutrition (Yerly, Nguyen, Kristof, Bosshard Taroni, & Büla, 2015). La dénutrition est associée à la recrudescence des comorbidités, des dysfonctionnements fonctionnels et augmente la mortalité chez les ainés (Yerly et al., 2015). Selon Raynaud-Simon et coll. (2000), la dénutrition entraîne des retards de cicatrisation des plaies en allongeant les délais de cicatrisation et en exposant les plaies à un haut risque d’infections. En effet, les carences en micronutriments (oligo-éléments et vitamines) observées au niveau des personnes dénutries entrainent chez elles une diminution de l’immunité cellulaire. Plus les carences alimentaires seront élevées plus les cellules immunitaires de l’organisme vont être incapables de défendre le corps contre les microbes (Raynaud-Simon & Lesourd, 2000). Cela voudrait dire qu’en présence de carences alimentaires, les cellules immunitaires chargées de l’assainissement et de la protection de la peau ne seront pas en mesure de jouer correctement leurs rôles au niveau de la zone de peau où se trouve la plaie exposant ainsi les personnes ayant des plaies chroniques aux risques d’infections (Battu & Brischoux, 2012).
La dénutrition de la personne âgée est souvent orchestrée par la présence et/ou la combinaison des 3 facteurs suivants: les facteurs intrinsèques (les cancers ainsi que leurs traitements entrainent souvent des inappétences…), les facteurs extrinsèques (consommation d’alcool, prothèses dentaires inadaptées…) et enfin les facteurs situationnels (limitations fonctionnelles à domicile dans les AVQ et AIVQ…) (Yerly et al., 2015). Afin de lutter contre la dénutrition des sujets âgés à Genève, l’imad a mis en place un itinéraire clinique spécifique qui permet de faire une évaluation globale de l’état nutritionnel de leurs clients ainsi que d’organiser pour chacun d’entre eux un suivi adapté (Busnel et al., 2015). L’itinéraire clinique spécifique à la prévention de la dénutrition des personnes âgées à domicile se compose de 3 axes.
Le premier consiste au renforcement du partenariat avec les structures hospitalières et scolaires impliquées dans la recherche et dans la pratique afin de mettre sur pieds différentes déclinaisons des suivis spécifiques pour les patients à domicile.
Le second concerne la sensibilisation et la formation des soignants qui interviennent à domicile sur la dénutrition du sujet âgé ainsi que sur l’importance du travail en interdisciplinarité et du partenariat avec le client à domicile, afin de prévenir la dénutrition à domicile. Pour finir, le dernier axe concerne la poursuite du monitoring de l’état nutritionnel du client à partir de l’évaluation faite au départ puis au cours de la prise en soin par les services de l’imad à travers les outils suivants : le Résident Assessment Instrument Home-Care (RAI-HC), le Mini Nutritional Assessment (MNA) et l’évaluation clinique de la personne (perte pondérale, BMI…) (Busnel et al., 2015).
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Table des matières
1. Introduction
1.1. Evolution démographique de la population âgée
1.2. Le vieillissement de la population et les enjeux de santé
1.2.1. L’augmentation des maladies et affections chroniques
1.2.2. Les limitations fonctionnelles
1.2.3. L’augmentation du recours aux soins à domicile
1.3. Les affections de la peau et les plaies dans le vieillissement
1.3.1. Les escarres
1.3.2. Les plaies du pied diabétique
1.3.3. Les ulcères des jambes
1.4. Les facteurs de cicatrisation dans le vieillissement
1.5. Les problèmes de dénutrition chez la personne âgée
2. Cadre théorique
2.1. Théorie des Auto-soins d’Orem
2.1.1. Les métaconcepts
2.1.2. La personne
2.1.3. Le soin
2.1.4. La santé
2.1.5. L’environnement
3. Problématique
4. Question de Recherche
5. Méthode
5.1. Sources d’information et stratégie de recherche documentaire
5.2. Diagramme de flux
6. Résultats
6.1. Tableaux récapitulatifs des articles
6.2. Synthèse de l’analyse critique des articles retenus
6.2.1. Blass et al. (2012)
6.2.2. Bauer et al. (2013)
6.2.3. Collins et al. (2004)
6.2.4. Desneves et al. (2005)
6.2.5. Synthèse en regard de la question de recherche
7. Discussion
7.1. Apports et limites du travail
7.2. Recommandations
8. Conclusion
9. Références
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