L’approche graphomotrice au sein d’un cabinet libéral 

Le dessin

Autour de 3 ans, l’enfant peut avoir une intention, la motricité volontaire apparaît.
On entre alors dans une période de différenciation des tracés avec une intention de dessin. Il acquiert la nouvelle capacité de freiner et de fragmenter sa production et ses possibilités de contrôle et d’anticipation se développent. Ce répertoire graphique qui s’élargit lui permet de faire des traits parallèles, des croix ou encore des spirales. « Il sait dorénavant réaliser des courbes dans les deux sens horaire et antihoraire. Il investit de mieux en mieux l’espace graphique, commence à utiliser les directions (ce qui sera important pour l’écriture) mais ne sait pas encore coordonner les mouvements d’inscription et de progression et a du mal à maîtriser la pression de l’instrument sur la feuille ». (Thoulon-Page & Montesquieu, 2018)
L’évolution du tracé vers le dessin va permettre la représentation au crayon, au pinceau, au pastel d’un objet, d’un paysage ou d’un personnage. Le dessin développe des habiletés gestuelles et des compétences perceptives, c’est une étape nécessaire mais il ne permet pas à lui seul l’apprentissage de l’écriture. Pour apprendre l’écriture, l’enfant va avoir besoin d’activités graphiques et corporelles. Le dessin est essentiel dans le développement psychique, il est témoin de l’essor et de la créativité de l’enfant. Les productions graphiques sont le reflet du monde interne et permettent au sujet d’être dans le processus de pouvoir parler de lui à travers la trace notamment à une période où la parole est insuffisante pour traduire ses états émotionnels. Selon Golse (2014), « Dessiner est une nécessité chez l’enfant ».
L’évolution du dessin va être décrite par Royer (1977) à travers le dessin du bonhomme. C’est à cette période, autour des 3 ans, qu’apparaît le bonhomme têtard qui correspond à un rond basique et deux traits verticaux pour les jambes. Il va se complexifier en un bonhomme détaillé autour de 4 ans avec l’apparition de deux traits horizontaux pour les bras. A partir de 5-6 ans, le tronc apparaît, on parle alors de bonhomme complet. A 6 ans, on observe davantage de détails qui nous donnent un bonhomme articulé complet. C’est à partir de 8 ans qu’on voit apparaître les articulations et le double contour des membres. Cela nous montre que le corps est en volume et qu’il repose sur une articulation entre différents segments corporels. Il est important d’avoir en tête qu’à partir de l’adolescence on peut voir un détachement par rapport au bonhomme avec un bonhomme mis de côté ou alors un bonhomme personnalisé en personnages de séries, de mangas.

Les phases de l’écriture

Ajuriaguerra (1971) a développé trois stades dans le développement de l’écriture. Il rappelle que « l’évolution prend un rythme et des modalités qui varient selon la pression exercée sur l’enfant par l’idéal calligraphique ». L’idéal calligraphique étant « une exécution parfaite, dont les modèles du maître ou du cahier imprimé lui offrent l’image ».
Il est important de rappeler que chaque enfant ne grandit pas de la même manière et à la même vitesse. Il faut prendre l’évolution suivant un modèle de croissance sans figer l’enfant dans un stade. (Harwal & Detrie, 2021)
Selon Ajuriaguerra (1971), le premier stade est le stade pré-calligraphique de 5-6 ans à 8-9 ans. L’enfant apprend en copiant un modèle calligraphique, toute l’attention est portée sur la forme à reproduire. La prise du stylo est ferme, les mouvements des doigts sont encore peu mobilisés et la tête est proche de la feuille. Le mouvement moteur n’est pas encore efficient pour avoir régularité, fluidité et rapidité. On observe des liaisons difficiles, maladroites, des tracés lettre à lettre ou trait à trait avec un manque de maîtrise dû au manque de contrôle moteur. Durant cette phase, l’enfant est mobilisé par l’apprentissage des aspects techniques de l’écriture, c’est-à-dire des formes et des traits à reproduire.
Le second stade est le stade calligraphique de 8-9 ans à 12 ans. On observe une posture qui va se redresser ce qui va permettre de libérer l’avant-bras et d’alléger la tonicité du poignet qui va avancer de manière plus fluide et plus souple en étant toujours engagé dans l’acte graphomoteur. Le poignet n’est plus collé à la feuille, il se libère légèrement ce qui permet le contact de l’hypothénar sur la feuille. On assiste à une posture plus adaptée et redressée, des coordinations plus fines et des lettres qui sont reliées les unes aux autres. Il y a un début de maitrise du geste. Thoulon-Page & Montesquieu (2018) qualifient cette étape de « socle à partir duquel l’écriture pourra s’aménager et évoluer favorablement ».
Le troisième stade est le stade post calligraphique à partir de 12 ans. C’est à ce moment qu’on observe un perfectionnement, une rapidité du geste graphique et une personnalisation. L’enfant a intégré les règles calligraphiques en jeu. La personnalisation implique une séparation avec l’écriture infantile et une simplification des formes. C’est en lien avec l’exigence de vitesse demandée au collège. Il est alors important que l’orthographe et la gestualité graphomotrice soient bien intégrées pour que l ’enfant soit déchargé des capacités attentionnelles. L’écriture va être dite « automatisée » lorsque les lettres sont tracées régulièrement avec des liaisons maîtrisées et sans hésitations orthographiques.

Les composantes psychomotrices en jeu dans le développement de l’écriture

L’acte graphomoteur dépend de facteurs endogènes tels que le développement psychomoteur, le développement cognitif et la maturation neuromotrice. Des facteurs exogènes comprenant la tenue de l’outil scripteur, le mobilier mais aussi l’enveloppe émotionnelle et affective sont également en cause. En effet, le geste d’écriture n’est pas seulement réduit au geste de la main, tout le corps participe à l’acte d’écrire. Il implique des capacités perceptives, motrices et cognitives. C’est une activité soutenue par la maîtrise du langage. Elle a une double fonction qui est de conserver et de communiquer les informations.
Ajuriaguerra cité par Le Roux (2005) définit quatre conditions pour l’acquisition de l’écriture que sont le développement de la motricité, le développement mental, le développement du langage ainsi que le développement socio-affectif. Il y a donc des prérequis psychomoteurs importants à mettre en place sans lesquels des difficultés graphiques vont apparaître.

Les prérequis psychomoteurs

En ce qui concerne l’apprentissage de l’écriture, l’acte d’écrire met en jeu des capacités qu’on va chercher à développer. Les différents auteurs tels que Hebting, Calmy, Le Boulch et Dumont s’accordent pour dire que l’apprentissage de l’écriture comporte une préparation motrice et sensorielle. (Le Roux, 2005)
Selon Scialom et al. (2015), « les notions fondamentales que sont le schéma corporel, l’espace, le temps, la tonicité, les coordinations et dissociations sont parties intégrantes de la configuration praxique de l’écriture ». L’écriture n’est pas une fonction innée, c’est un apprentissage qui est sous-tendu par la maturation neuro-motrice et les stimulations de l’environnement. Avant de pouvoir écrire, l’enfant doit pouvoir connaître son corps car écrire convoque le corps, l’espace, la gestualité, le temps et engage l’ensemble du développement psychomoteur.

Le schéma corporel

Tout d’abord, la conscience du schéma corporel va influer dans l’écriture.
L’intégration du schéma corporel joue un rôle dans l’intégration de l’écriture. Selon Le Boulch cité par Thoulon-Page & Montesquieu (2018), c’est « l’intuition d’ensemble, ou la connaissance immédiate que nous avons de notre corps à l’état statique ou en mouvement, dans le rapport de ses différentes parties entre elles et surtout dans ses rapports avec l’espace et les objets qui nous environnent ». On va faire en sorte que le sujet prenne conscience des postures qui lui sont confortables pour écrire. L’enfant doit connaître les différentes parties de son corps pour pouvoir écrire car tout le corps est engagé dans l’acte d’écriture. Il y a une continuité entre la main qui écrit, le bras, l’épaule, le torse ainsi que la colonne vertébrale.

L’espace

La dimension spatiale joue un rôle dans l’écriture. Tout d’abord, l’écriture est régie par des règles spatiales. En effet, on nous demande d’écrire avec un sens de progression de gauche à droite et du haut vers le bas. Les mots doivent être espacés et il faut retourner à la ligne. L’enfant doit respecter la forme des lettres avec un rapport de taille et un sens de rotation spécifique. Il faut reconnaître et structurer l’espace de la feuille pour ne pas dépasser en écrivant ce qui fait écho à l’intégration des limites corporelles mais aussi des limites émotionnelles pour pouvoir différencier son espace de celui d’autrui. C’est un jeu d’intégration de ses propres repères corporels. (Scialom et al., 2015a)
L’enfant explore son corps et l’espace en bougeant, il acquiert alors une meilleure structuration spatiale dans l’écriture. En effet, lorsqu’il doit passer sous une barre, à l’intérieur d’un tunnel ou encore au-dessus d’un obstacle, il développe son rapport à l’espace. (Pavy & Monnier, 2019)
Au niveau perceptif, l’enfant doit visualiser une image globale fidèle afin de copier correctement les lettres. Pour ne pas confondre les lettres, l’enfant doit discriminer les éléments qui les composent, la proportion ainsi que l’orientation. En phase de production, l’enfant s’appuie sur des repères spatiaux tels que les directions, les trajectoires, les distances ainsi que les proportions pour mémoriser les tracés. (Thoulon-Page & Montesquieu, 2018)

Le temps

Le temps et le rythme font partie prenante de la configuration de l’écriture. Ecrire correspond à tracer des formes dans l’espace mais en respectant une rythmicité. La continuité, la succession, l’interruption avec les blancs, les respirations et les virgules amènent du rythme à l’écriture. Il y a des pauses dans l’écriture, on n’écrit pas en continu sans jamais lever le stylo. La réalité du temps doit être bien perçue par l’enfant pour qu’il acquière un rythme d’écriture adapté. (Thoulon-Page & Montesquieu, 2018)
Il y a également une dimension affective dans le temps. Le vécu de l’enfant par rapport à la durée de la tâche écrite varie en fonction du plaisir ou du déplaisir d’écrire. Le rythme scolaire est également à prendre en compte avec le respect des programmes scolaires par les enseignants. (Scialom et al., 2015a)

La motricité globale

La motricité globale va permettre une prise de conscience du corps dans sa globalité aidant l’enfant à comprendre l’organisation spatiale de l’écriture. Cela va l’aider dans l’identification et l’organisation des articulations qui interviennent d ans l’acte d’écrire. Au départ de l’apprentissage, la totalité du corps est concernée par l’acte d’écrire. On n’écrit pas seulement avec sa main mais avec tout son corps, les coordinations générales vont également être en jeu. En effet, l’écriture est un enchaînement de mouvements : « Pour écrire, il faut pouvoir trouver son axe et ses appuis, coordonner l’ensemble des chaînes musculaires et des articulations afin de mobiliser son corps de manière harmonieuse ». (Harwal & Detrie, 2021)

La motricité fine

La motricité fine est en jeu dans l’écriture avec la mise en mouvement des doigts, la dextérité manuelle et la dextérité digitale. Pour le geste d’écriture, il va être indispensable que l’enfant apprenne à coordonner les gestes fins et développe une plus grande habileté au niveau des doigts. Cela lui permet de gagner en précision sur son tracé et améliore la tenue du stylo. (Harwal & Detrie, 2021) Dans l’écriture, c’est surtout la dextérité digitale qui est en jeu. C’est la capacité de faire habilement des mouvements contrôlés dans la manipulation de petits objets comme par exemple ramasser des lentilles. Elle permet les mouvements de flexion / extension des doigts impliqués dans l’inscription digitale. Ces mouvements digitaux vont se coordonner avec des mouvements de translation possibles grâce au déplacement du membre supérieur dans l’horizontalité. Pour cela, le bras doit être dissocié de l’axe qui doit être suffisamment redressé. Un tonus adapté permettra une motricité fine libérée.
L’écriture requiert également des capacités de gnosies digitales. En effet, la bonne connaissance du nom des doigts et la différenciation sensorielle de ceux-ci vont être importants notamment pour la position des doigts sur le stylo mais aussi pour le retour proprioceptif que renvoie l’acte d’écrire. Le déliement digital va permettre d’affiner les capacités gnosiques et donc la prise de l’outil scripteur

Le tonus

La dimension tonique a un rôle essentiel dans l’écriture car le tonus soutient la posture et le mouvement. Le niveau tonique doit être économique dans l’acte d’écrire pour éviter des efforts trop importants. Assurément, si l’enfant engage un tonus trop important au niveau axial, des épaules par exemple, il aura un tonus plus faible en périphérie, au niveau des mains et des doigts. La régulation tonique a également une influence sur l’écriture. Nous développerons le tonus et la régulation tonique de façon plus détaillée en deuxième partie de ce mémoire.

Les fonctions cognitives et exécutives

Dans l’apprentissage de l’écriture les facteurs cognitifs vont être en jeu. Les fonctions exécutives sont des processus cognitifs élaborés qui permettent raisonnement, planification et stratégie. Ils interviennent dans des tâches qui permettent réflexion et adaptation.
L’écriture est une activité cognitive qui fait intervenir des processus perceptivo-moteurs, des processus moteurs, cognitifs et linguistiques.
Écrire implique sens, ancrage dans la fonction sémiotique avec un code et une normalisation commune. Dans l’acte d’écrire, on cherche à donner une signification aux mots en dehors de son propre système de référence, un sens qui est partageable, c’est la fonction sémiotique. Ecrire c’est réfléchir, penser, élaborer, transmettre. Écrire un mot nécessite que l’enfant puisse se le représenter auparavant dans sa tête. Il doit pouvoir se représenter de quelle manière il va le tracer et à quel sens et quel son il est rattaché, ce qui nécessite un développement cognitif suffisamment mature. Il y a donc une influence de ces facteurs cognitifs mobilisés pour permettre d’élaborer un signe commun.
Les facteurs cognitifs qui vont être en jeu dans l’écriture vont permettre de développer l’intégration et l’automatisation de l’écriture. Harwal & Detrie (2021) ont décrit 5 fonctions exécutives en jeu dans l’écriture. Tout d’abord, nous allons retrouver l’attention qui doit être suffisamment développée pour que le sujet puisse rester statique, assis, attentif et concentré sur la tâche. De ce fait, on préconise dans les tâches pré-graphiques ou dans le tout début de l’apprentissage de l’écriture que l’enfant puisse commencer à écrire debout sur tableau pour qu’il ne soit pas pris par un effort attentionnel de devoir rester assis, statique.
L’enfant a besoin sur le plan cognitif d’être suffisamment mature pour pouvoir rester concentré sur une tâche.
L’attention est également impliquée dans la discrimination visuelle ainsi que le balayage visuel, directement en lien avec l’écriture. La discrimination visuelle permet à l’enfant de distinguer les lettres. Elle entre dans la catégorie des fonctions visuo-cognitives.
« Elle est associée à la mémorisation, au repérage spatial, aux capacités de raisonnement, d’analyse, de logique, d’observation ». (Harwal & Detrie, 2021) Plusieurs jeux entraînent la discrimination visuelle comme le Dobble (Asmodee), le Cherche et Trouve ou encore les puzzles. Jouer permet à l’enfant de rester dans le plaisir qui est une base pour un apprentissage de qualité.
Le balayage visuel, quant à lui, est nécessaire dans l’acquisition du sens graphique du code commun qui va de la gauche vers la droite et de haut en bas. Pour entraîner le balayage visuel, on peut proposer à l’enfant, s’il a accès à la lecture, d’accompagner la lecture avec son doigt. On peut également le faire nous-même lorsqu’on lit une histoire, si l’enfant n’a pas accès à la lecture. Les jeux permettant de travailler le balayage visuel sont le Lynx (Educa) ou le Où est Charlie ? (Ravensburger).
Il faut pouvoir aussi avoir sur le plan mnésique suffisamment de capacités au niveau de la mémoire pour se souvenir de la forme qui est à copier, se souvenir de l’orientation du mot qui est à transcrire, des règles grammaticales, orthographiques qui sont en jeu dans l’écriture. Les jeux qui font travailler la mémoire sont par exemple les Jeux de M emory et les Sardines (Djeco).
Au niveau des fonctions exécutives il y a aussi l’inhibition qui va être concernée dans l’écriture. Elle correspond à la capacité de freiner un comportement verbal ou psychique qui n’est pas adapté ou encore de ne pas être distrait. Dans l’acte d’écrire, on n’écrit pas dans un flux continu, au même rythme que sa pensée. On écrit en étant dans un jeu d’alternance entre continuité et interruption, retour à la ligne, silence, pause, levée du crayon. L’inhibition est nécessaire pour segmenter, séquencer ses actions, faire une pause, s’arrêter, reprendre et ne pas écrire en continu. Cela vient faire écho aux capacités de pouvoir différer, attendre, patienter, accepter la frustration pour pouvoir soutenir cette capacité d’inhibition, d’alternance qui nous permet d’être à la fois dans un mouvement mais aussi dans une posture. Tout mouvement débute et se finalise par une posture. Dans l’écriture il s’agit de ce changement de rythme entre posture, temps d’arrêt et temps de mouvement qui permet de déployer et de dérouler le geste graphique.
L’approche corporelle permet de soutenir ce jeu d’ alternance. On peut proposer au patient un parcours moteur mais dès qu’il entend le tambour, il doit s’arrêter. Tous les jeux d’interruption qu’on retrouve sont par exemple 1-2-3 soleil, Jacques a dit ou encore Ni oui, ni non (Megableu).
La fonction de planification est également impliquée dans l’écriture. C’est « l’action de planifier qui correspond à organiser selon un plan et des méthodes déterminées ; à l’avance son temps, ses activités selon un certain plan ; à l’avance quelque chose, l’avoir dans son plan » (Larousse). La planification permet d’estimer le temps que la tâche va prendre, de faire un brouillon et un plan avant de rédiger mais aussi de prévoir le matériel nécessaire à la tâche. Elle implique de maîtriser la notion de temps. Pour entraîne r cette fonction, les jeux Smart games (Rush hour, Code couleur, Château logique) sont intéressants. Il y a également le Puissance 4 (Hasbro), le Mastermind (Hasbro) et le Sudoku.
La dernière fonction exécutive décrite par Harwal & Detrie (2021) est la flexibilité mentale. Celle-ci permet à l’enfant de s’adapter à une nouvelle situation, de prendre en compte les propositions d’ajustement de l’entourage ou encore de changer de stratégie pour résoudre un problème. On travaille cette compétence à chaque instant dans le quotidien car on passe successivement d’une tâche ou d’une consigne à l’autre.
L’enfant doit alors avoir suffisamment de maturité au niveau des fonctions exécutives pour arriver vers l’automatisation du geste graphomoteur qui va permettre d’introduire la double tâche. L’apprentissage de l’écriture est conditionné par cette sphère cognitive qui permet de décharger au niveau attentionnel. Il est aussi en lien avec des compétences langagières.

Le langage

Comme abord dans l’évolution de l’écriture, l’enfant va apprendre à rattacher le tracé non plus à des formes mais à un son, au langage. Dans l’écriture c’est une reproduction de mots, de textes qui engage des codes, des règles spécifiques rattachées au langage. La dominante de l’écriture est une dominante sémiotique. Ecrire nécessite un langage suffisamment développé. L’écriture est un langage écrit dans lequel on assemble des mots pour former des phrases. Tant que le langage n’est pas maîtrisé, la traduction en écrit reste difficile. Il va parfois falloir commencer par un suivi orthophonique avant de mettre en place un suivi en graphomotricité. On ne va pas demander à un enfant qui a encore du mal à parler de pouvoir écrire correctement. On va alors axer la prise en charge sur l’aisance du geste, de la trace, de pré-graphisme. (Harwal & Detrie, 2021)

LES ASPECTS TONIQUES ET EMOTIONNELS EN JEU DANS L’ECRITURE

Les aspects toniques en jeu dans l’écriture

Le tonus est le pilier de la psychomotricité et la source de la construction de la personnalité. Il se base sur un support anatomique, sur le fonctionnement physiologique ainsi que sur la compréhension psychologique. « Le mot tonus vient du grec tonos qui signifie tension. Le tonus d’un muscle est la réaction du muscle à son propre étirement. […].
C’est un état de tension active, permanente, involontaire et variable dans son intensité en fonction des diverses actions syncinésiques ou réflexes qui l’augmentent ou l’inhibent ». (Scialom et al., 2015a) Le tonus doit être suffisamment adapté dans l’acte d’écrire pour favoriser une écriture fluide et sans douleur, il permet également de soutenir la posture. Reich et Wallon situent le tonus au carrefour de la physiologie et de la psychologie.
Ils considèrent que le tonus est à la source de la construction de la personnalité. Selon Reich, la naissance est un traumatisme originel et le sujet va être confronté au cours de son développement à divers traumatismes successifs. A chaque traumatisme, le sujet établit des mécanismes de défense de deux types : caractériel (par le comportement) et musculaire (en lien avec le tonus musculaire). Pour lui, le caractère et les muscules sont inséparables. Il conceptualise le fait qu’à chaque tension musculaire, il y a une énergie et une expérience traumatique infantile associée à des représentations. En expérimentant différentes situations, si le sujet ne peut pas délivrer les tensions musculaires, elles s’accumulent. Cette modélisation de la construction du sujet sous la forme tonique et caractérielle ouvre la voie à la relaxation et à la médiation corporelle. Le thérapeute s’adresse à la fois aux tensions corporelles mais également aux éléments de la personnalité du patient. C’est ce que l’on va rechercher dans le travail de régulation tonico-émotionnelle pour accompagner les difficultés liées à l’écriture.

Le dialogue tonique

Avec l’aide des connaissances théoriques acquises durant ma formation ainsi que de Potel (2010) et Scialom et al. (2015), je vais développer le concept de dialogue tonique. Ajuriaguerra en 1962 parle du dialogue tonique comme étant un véritable outil thérapeutique pour les psychomotriciens. On va porter notre attention sur les variations des états toniques chez les patients par notre formation spécifique théorico-clinique et notre pratique corporelle, qui permettent de mettre en jeu notre corps, notamment au niveau des variations toniques. C’est à travers les postures, les mouvements, la respiration et l’expression émotionnelle que, en tant que psychomotricien, on va repérer les états de tension (hypotonie, hypertonie et ajustement correct) pendant la rencontre avec le patient.
Cette écoute du tonus et des capacités de régulation tonique est au cœur de l’éducation psychomotrice et de la thérapie psychomotrice. Le psychomotricien est impliqué corporellement, toniquement auprès de son patient. Ce dialogue permet un échange entre deux tonicités et amène progressivement le patient à la symbolisation de ses ressentis. On va pouvoir proposer des mises en jeu du tonus postural avec des activités comme le portage, des variations toniques avec la relaxation mais aussi des jeux d’action comme les parcours ou les activités manuelles.
Selon Wallon (1942) cité par Scialom et al. (2015), l’ajustement tonique entre les deux partenaires va se faire selon quatre modalités : porter, palper, parler et penser.
Le porter correspond au lien tonique. C’est par le portage et les soins que le lien tonique se fait. La mère ajuste sa posture et ses mouvements dans le portage pour calmer son enfant.
Le palper renvoie au lien sensoriel. Tous les moments où la maman touche son enfant que ce soit pour le laver, l’habiller ou le masser, elle créé les premiers liens d’attachement tactile.
Le parler fait référence au lien affectif. Il correspond à la façon dont le parent parle à son bébé en donnant du sens, ce qui renforce les autres liens. Le parent essaye de verbaliser de la façon la plus juste possible les besoins du bébé tels que la faim, la douleur ou le besoin de proximité.

La régulation tonique et émotionnelle

La régulation tonique

La régulation tonique va avoir un rôle important à jouer dans l’apprentissage de l’écriture. On va s’intéresser particulièrement à la prise de conscience de l’alternance entre état de tension et état de détente musculaire permettant de favoriser la régulation tonique qui est une base pour le maintien de la posture et des mouvements nécessaires à l’écriture. « La régulation tonique influence aussi la vitesse d’écriture. Un principe perceptivo moteur est de favoriser le relâchement musculaire, ce qui entraîne l’accroissement de la vitesse d’exécution du geste ». (Scialom et al., 2015a)
Nous avons vu que les tensions pouvaient entraver l’écriture, on va donc chercher à réguler le tonus pour permettre la détente du geste graphique. Pour cela, on peut faire un travail de détente musculaire en utilisant la respiration ainsi que les contractions/relâchements pour soutenir la prise de conscience segmentaire. La régulation tonique fait partie de la spécificité du psychomotricien, on va chercher à permettre à l’enfant d’avoir une possibilité de contraction et de détente qui s’adapte en fonction du contexte.
On peut mettre en lien le travail de détente musculaire avec la trace en faisant un travail de détente du geste graphique. On va proposer ce travail de la trace sur un grand format, debout, assis ou au sol. L’accent va être mis sur la liberté, le plaisir de la trace pour chercher la détente du mouvement. En arrière fond on accompagne vers l’amélioration de la posture et du geste de préhension. On peut commencer par faire des traces avec les deux mains au tableau, ou encore avec de l’encre sur une grande feuille de manière aléatoire. On accompagne également vers la possibilité d’associer la trace, le dessin vers la narration et le symbolisme. Donc cela fait partie des techniques de détente du geste graphique sans chercher l’accent sur une forme graphique mais sur la gestualité, l’engagement du corps dans l’espace de la feuille sur la régulation tonique.
Avoir une bonne conscience de son corps va être nécessaire afin de réguler son tonus. Pour cela, on va pouvoir travailler sur le poids du corps en ressentant chaque partie de son corps et leur poids au repos et en action.
On peut également travailler sur la respiration, la détente et la relaxation. Ces médiations régulent le tonus tout en permettant une meilleure conscience de son corps et de sa respiration.
On va aussi réguler le tonus par la sensorialité et le toucher. On peut réaliser des massages ou automassages qui vont permettre de libérer les tensions en plus de prendre conscience de la structure corporelle.

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Table des matières
REMERCIEMENTS 
AVANT-PROPOS 
SOMMAIRE 
INTRODUCTION
I. L’ECRITURE 
1. De la trace au graphisme
2. Les composantes psychomotrices en jeu dans le développement de l’écriture
II. LES ASPECTS TONIQUES ET EMOTIONNELS EN JEU DANS L’ECRITURE 
1. Les aspects toniques en jeu dans l’écriture
2. Les aspects émotionnels en jeu dans l’écriture
3. La régulation tonique et émotionnelle
III. L’APPROCHE GRAPHOMOTRICE AU SEIN D’UN CABINET LIBERAL 
1. La spécificité du psychomotricien
2. Rencontre avec Paul
DISCUSSION 
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES

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