L’approche géostatistique pour caractériser les contaminations

L’approche géostatistique pour caractériser les contaminations

L’intérêt de la géostatistique est aujourd’hui reconnu par les professionnels du secteur des sites et sols pollués [INERIS et al., 2005 ; UPDS, 2016]. La géostatistique a été développée dans les années 1950 par D. Krige [Krige, 1951], au cours de travaux sur des mines d’or en Afrique du Sud. Elle a ensuite été théorisée à partir des années 1960 par G. Matheron [Matheron, 1963, 1971, 1978]. Historiquement, son domaine d’application est la caractérisation de gisements miniers. Cependant, elle est appliquée à d’autres domaines des géosciences depuis les années 1970, notamment à des problèmes environnementaux [Delhomme, 1978]. Actuellement, la géostatistique est couramment utilisée dans d’autres domaines, par exemple pour la construction de méta-modèles remplaçant des codes de simulations numériques lorsque ceux-ci sont trop coûteux [Asher et al., 2015 ; Kleijnen, 2015].

Variables régionalisées et fonctions aléatoires 

La géostatistique s’appuie sur la théorie des variables régionalisées, qui caractérisent des phénomènes présentant des structures dans l’espace et/ou dans le temps. Par exemple, les altitudes, les concentrations en polluant ou les teneurs en minerai sont des variables régionalisées. La qualité de la représentation d’une variable régionalisée par un modèle déterministe dépend des connaissances que l’on a sur le phénomène étudié et des moyens qui peuvent être consacrés à son étude. Par ailleurs, une modélisation déterministe ne permet pas de prendre en compte l’incertitude résultant d’observations ponctuelles. Par conséquent, la modélisation géostatistique, qui est probabiliste, est utilisée. En tout point x d’un domaine D, la valeur de la variable régionalisée est considérée comme une réalisation particulière ω d’un mécanisme aléatoire : z(x) = Z(x,ω). Chaque fonction Z(.,ω) est une réalisation de la fonction aléatoire Z(x,ω), plus simplement notée Z(x) [Chilès et Delfiner, 2012]. À noter que lorsque D est un espace à une dimension, une fonction aléatoire est également appelée processus stochastique. Lorsque la dimension de D vaut au moins deux, on parle de champ aléatoire. Une fonction aléatoire Z est représentée par sa loi spatiale, dont la variance et la covariance sont exprimées ainsi :

Var[Z(x)] = E {Z(x) − E[Z(x)]}² (1.1)

Cov[Z(x1), Z(x2)] = E[{Z(x1) − E[Z(x1)]}{Z(x2) − E[Z(x2)]}] (1.2)

Le krigeage présente de nombreux avantages par rapport à d’autres méthodes d’interpolation : il s’agit d’un interpolateur sans biais et optimal qui est exact, aux erreurs de mesure près, et qui prend en compte la structure spatiale de la variable étudiée. Les variantes du krigeage permettent de traiter différents types de problèmes : des problèmes non stationnaires (krigeage universel, krigeage avec dérive externe), des problèmes multivariables (cokrigeage), des problèmes spatio temporels. La modularité du voisinage de krigeage (voisinage unique, voisinage glissant) permet par ailleurs de ne conserver qu’une partie des observations, les plus proches de la cible, pour réaliser une estimation. Enfin, il s’agit d’une représentation probabiliste et l’estimation est accompagnée d’une quantification des incertitudes. Cependant, la qualité de l’estimateur dépend de la modélisation de la structure spatiale du phénomène et des hypothèses sous-jacentes à cette modélisation. En particulier, l’estimateur de krigeage est peu précis si le nombre d’observations est trop faible ou si le phénomène étudié est fortement non stationnaire et gouverné par des processus complexes [Webster et Oliver, 2007 ; Wang et al., 2017]. Par ailleurs, les données requises pour réaliser une estimation géostatistique sont souvent complexes à obtenir et coûteuses, notamment dans le cas d’études de contaminations (forages, analyses en laboratoire, zones non accessibles à l’échantillonnage). Enfin, le krigeage ne prend pas en compte les processus physiques gouvernant le phénomène étudié, ce qui peut donner lieu à des estimations manquant de réalisme ou qui ne reproduisent pas correctement la variabilité du phénomène étudié à l’échelle macroscopique [Michael et al., 2010 ; Yong et al., 2019].

Traitement usuel de la non-stationnarité

Pour de nombreuses applications, l’hypothèse de stationnarité d’ordre deux est discutable, qu’il s’agisse d’une non-stationnarité de la moyenne ou de la covariance, et les caractéristiques non stationnaires du phénomène étudié doivent être prises en compte pour obtenir une estimation de bonne qualité. Par exemple, Reed et al. [2004] soulignent le caractère non stationnaire de la distribution spatiale de panaches de contaminant. Différentes méthodes sont utilisées pour prendre en compte la non-stationnarité de la variable étudiée. Par exemple, si la non stationnarité est liée à une tendance spatiale, le krigeage universel ou le krigeage avec dérive externe permettent de se ramener à l’étude de résidus stationnaires [Chilès et Delfiner, 2012], en introduisant la dichotomie suivante : Z(x) = Y (x) + m(x), où Y (x) est un résidu stationnaire d’espérance nulle et m(x) une dérive déterministe. Cela permet de modéliser la non-stationnarité de la moyenne. Le cadre des fonctions aléatoires intrinsèques d’ordre k permet également de modéliser des phénomènes non stationnaires, par un ajustement indirect des structures [Chilès, 1977]. De nombreuses publications suggèrent l’utilisation de classes de modèles de covariances non stationnaires paramétriques, ou basés sur des convolutions, ou encore des déformations de l’espace de travail [Sampson et Guttorp, 1992 ; Rivest et Marcotte, 2012 ; Liang et Marcotte, 2016]. Une revue plus complète des méthodes de traitement des non-stationnarités est disponible dans la thèse de F. Fouedjio [Fouedjio, 2014]. Ces méthodes sont cependant propres à un type de non-stationnarité et leur application requiert une ou plusieurs hypothèses que la variable étudiée ne vérifie pas toujours.

Enfin, une autre méthode de modélisation des fonctions aléatoires non stationnaires consiste à travailler dans le cadre des équations aux dérivées partielles stochastiques : le champ aléatoire modélisé est considéré comme solution d’une équation aux dérivées partielles stochastique. La structure de covariance du champ aléatoire est contrôlée par les coefficients de l’équation et une approximation de la solution de l’équation est obtenue par éléments finis [Lindgren et al., 2011 ; Carrizo Vergara, 2018 ; Pereira, 2019]. Cette méthode a initialement été développée dans le cadre des fonctions aléatoires stationnaires d’ordre deux, mais elle est désormais utilisée dans le cadre des fonctions aléatoires non stationnaires. À nouveau, cette méthode ne s’applique qu’à certains types de fonctions aléatoires et de covariances.

Les simulations géostatistiques

Les méthodes présentées précédemment ont tendance à conduire à des résultats lissés et sont peu adaptées à l’estimation d’une grandeur non linéaire par rapport à la variable d’intérêt. Par exemple, l’estimation par krigeage d’une distance à parcourir sur un profil escarpé, connaissant les altitudes en quelques points, est systématiquement sous-estimée. Les simulations géostatistiques permettent de contourner ce problème, en générant des variables régionalisées qui respectent les premiers moments (moyenne et covariance) du phénomène étudié. Ces simulations sont par exemple utilisées pour simuler des concentrations en contaminants [Boudreault et al., 2016]. Il peut s’agir de simulations non conditionnelles ou de simulations conditionnelles, qui respectent alors les observations de la variable d’intérêt.

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Table des matières

Introduction
I Contexte et méthodes développées
1 Approches usuelles et état de l’art
1.1 L’approche géostatistique pour caractériser les contaminations
1.2 Le cas particulier du cadre spatio-temporel
1.3 La modélisation à base physique
1.4 Combinaison de simulations numériques et de la géostatistique
1.5 Synthèse du chapitre
2 Mise en œuvre des méthodes géostatistiques développées
2.1 Le krigeage avec dérive externe
2.2 Les covariances et variogrammes numériques
2.3 Synthèse du chapitre
II Applications à un cas synthétique
3 Construction d’un cas synthétique en zone non saturée
3.1 Les paramètres hydrodynamiques de la zone non saturée
3.2 Influence de la variabilité spatiale des paramètres du modèle de Mualem-van Genuchten sur la migration d’un panache de tritium
3.3 Utilisation des résultats précédents pour construire un cas synthétique
3.4 Synthèse du chapitre
4 Application des méthodes combinant la géostatistique et les simulations numériques
4.1 Scénarios d’échantillonnage des activités en tritium
4.2 Exploitation des simulations de panaches de tritium
4.3 Estimations de l’activité en tritium
4.4 Quantification des incertitudes
4.5 Un cas multivariable
4.6 Synthèse du chapitre
5 Estimations spatio-temporelles et prévisions
5.1 Position du problème et ensemble de particules
5.2 Mise en œuvre des méthodes spatio-temporelles
5.3 Prévisions
5.4 Krigeage spatial ou krigeage spatio-temporel ?
5.5 Recherche de la localisation de la source
5.6 Synthèse du chapitre
III Applications à deux jeux de données réels acquis autour de la centrale de Tchernobyl
Présentation des sites
6 Application à une expérience de traçage
6.1 Présentation de l’expérience et des données
6.2 Simulations d’écoulement et de transport avec MELODIE
6.3 Estimations de l’activité en 36Cl
6.4 Synthèse du chapitre
7 Application à un site d’enfouissement de déchets radioactifs
7.1 Présentation du site et des données
7.2 Simulations d’écoulement et de transport avec MELODIE
7.3 Combinaison du krigeage et de simulations d’écoulement et de transport : cadre spatial
7.4 Combinaison du krigeage et de simulations d’écoulement et de transport : cadre temporel
7.5 Synthèse du chapitre
Conclusion
Annexes

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