L’appareil génital femelle
Anatomie et histologie utérine
L’appareil génital femelle se compose d’un vagin de grande taille, d’un utérus, d’un oviducte et de deux ovaires. La suite de cette étude portera essentiellement sur l’utérus puisque le pyomètre, sujet de cette étude, intéresse principalement cet organe. L’utérus de la chienne se compose d’un corps bref (2-3cm en moyenne, toutes races confondues) qui se poursuit crânialement par de deux longues cornes (9-10cm) grêles, uniformes et divergentes, incurvées dorsalement. Cet utérus est qualifié de bipartite, c’est-à-dire que les deux cornes sont unifiées sur une courte partie. (cf Fig.1 et 2) Le col représente la limite caudale de l’utérus. C’est un orifice permettant la communication entre le vagin et l’utérus, ou à l’inverse assurant l’étanchéité de la cavité utérine. Il mesure environ 1cm de long. (cf Fig.1 et 2) La stabilité de la position du corps de l’utérus dans la cavité pelvienne est assurée par les ligaments larges. Ceux-ci fixent fortement le vagin, et donc l’utérus, en région sous lombaire. Ces ligaments sont attachés dorsalement le long de la jonction des muscles psoas et transverse de l’abdomen.
Crânialement ils sont attachés au ligament suspenseur de l’ovaire à la jonction du tiers médial et distal de la dernière côte. Le ligament rond de l’utérus participe également à la fixation de l’utérus. Il est attaché à la partie crâniale de la corne utérine ipsilatérale et caudalement il est la continuation du ligament propre de l’ovaire. En revanche, les cornes utérines ont une position relativement lâche dans l’abdomen (28). L’irrigation artérielle utérine est assurée par les artères ovarienne et utérine, provenant de l’aorte. Les veines ovarienne et utérine, suivant le même trajet que les artères correspondantes excepté concernant leur terminaison, se chargent de l’irrigation veineuse. La veine ovarienne droite rejoint la veine cave caudale tandis que la veine ovarienne gauche pénètre dans la veine rénale gauche (28). Le plexus pelvien assure l’innervation sympathique et parasympathique de l’utérus. Ainsi les nerfs hypogastriques droit et gauche arrivent au plexus et sont responsables de l’innervation sympathique tandis l’innervation parasympathique est effectuée par les nerfs pelviens. Des fibres viscérales afférentes atteignent l’utérus via les nerfs pelviens et le plexus pelvien (28).
Histologie Comme l’intégralité de l’appareil génital, l’utérus est composé de trois couches. De l’intérieur vers l’extérieur on trouve la muqueuse, ou endomètre, puis la musculeuse également appelée myomètre, et enfin la séreuse ou adventice (43) (cf Fig. 3) L’endomètre se compose d’un épithélium pseudo-stratifié cylindrique comportant des cellules ciliées ainsi que des cellules sécrétoires, particulièrement actives lors de l’oestrus (43). Le myomètre, adhérent à la couche précédente, présente deux couches musculaires distinctes, une profonde et une superficielle. Ces deux couches sont individualisées par un espace conjonctif vascularisé, appelé couche vasculaire, d’une grande élasticité. La couche profonde, responsable de la musculature des cornes, est majoritairement composée de fibres lisses circulaires, ainsi que des fibres obliques et longitudinales. La couche superficielle, responsable quand à elle de la musculature du col, se compose de fibres longitudinales mais également de fibre obliques et circulaires. Cette couche est particulièrement développée au niveau du col (43). Enfin la séreuse entoure l’appareil génital par une tunique fibreuse que l’on considère comme le prolongement des ligaments larges (43).
Modifications structurales
Les diverses imprégnations hormonales survenant au cours du cycle sexuel entrainent un remaniement des différentes strates utérines, en particulier de l’endomètre. Ainsi, du pro-oestrus au début du Dioestrus, l’appareil génital est sous imprégnation oestrogénique. Cette hormone est responsable des caractères sexuels primaires et secondaires, du développement génital et mammaire, et enfin de la régularité des cycles. L’endomètre et le myomètre se développent, la vascularisation s’intensifie assurant une augmentation du nombre de leucocytes dans l’utérus, les cornes utérines s’allongent et tournent sur elles-mêmes, les oviductes s’hypertrophient, et la contractilité utérine augmente. En pro-oestrus, le ratio endomètre/myomètre est élevé en raison de l’oedème et de l’hyperplasie de l’endomètre. Le poids de l’utérus augmente ainsi fortement. Les oestrogènes favorisent également l’ouverture du col de l’utérus et entrainent un oedème vulvaire (11). Au cours de l’oestrus, l’imprégnation progestéronique de l’appareil génital débute. Le rôle de cette hormone est de permettre et protéger une éventuelle gestation. Dans ce but, elle entraine d’importants mais nécessaires remaniements structuraux de l’appareil génital femelle. En effet, la taille de l’utérus augmente, la contractilité utérine diminue, le nombre de récepteurs à l’ocytocine diminue, la population leucocytaire diminue aussi et avec elle la qualité de la défense immunitaire. Cette immunodépression permet la survie du foetus, en évitant qu’il soit reconnu comme du non-soi. La structure de l’endomètre évolue également.
Ainsi, les glandes de l’endomètre sécrètent un liquide nutritif pour le foetus et la muqueuse utérine adopte une structure particulière dentelée pour favoriser la nidation. La mise en place de cette structure dentelée se fait en réalité sous une double imprégnation : progestéronique et oestrogénique. Enfin, les glandes utérines connaissent un développement important, qui durera jusqu’en métoestrus (19). En effet, lors du métoestrus, toujours sous imprégnation progestéronique, une légère augmentation du ratio endomètre/myomètre est notée. Les glandes utérines subissent une involution rapide, plus rapide que celle de la lumière de ces même glandes, résultant en un aspect kystique des ces glandes (19). Ainsi, la structure de l’appareil génital femelle dépend en grande partie des imprégnations hormonales successives. Nous verrons au cours de cette étude comment cette évolution cyclique de la structure utérine peut favoriser les infections et en particulier le pyomètre.
Moyens de défense de l’utérus contre les infections
Les défenses utérines contre les infections sont de deux types : mécaniques et immunologiques. En effet, la contractilité du myomètre permet l’évacuation des germes présents dans l’utérus. De plus la capacité du col de l’utérus à se fermer représente une protection vis à vis des germes ascendants, associée à l’effet bactéricide et mécanique du bouchon cervical. L’épithélium se desquame régulièrement, éliminant ainsi une certaine quantité de bactéries (9). Le système immunitaire intervient aussi, à la fois par des voies non spécifiques comme la phagocytose et par des voies spécifiques tels que les immunoglobulines A et G. En effet, l’immunoglobuline A empêche la fixation des bactéries sur l’endomètre tandis que l’immunoglobuline G possède une action bactéricide (9). L’activité de ces défenses dépend de l’imprégnation hormonale et varie ainsi au cours du cycle : elles sont très actives en période d’oestrus mais en revanche très peu efficaces en métoestrus et dioestrus, expliquant que les infections utérines surviennent majoritairement durant ces périodes (9). La gestation protège également l’utérus. Ainsi, aucune infection ne peut se développer sur toute la zone de contact entre le placenta et l’endomètre. Toutefois tous ces moyens de défenses sont parfois dépassés, permettant le développement d’affections utérines telles que le pyomètre.
Facteurs hormonaux iatrogènes
Le recours aux hormones en thérapeutique est devenu courant, en particulier dans le domaine de la reproduction. Leurs indications sont multiples dans ce secteur : induire un avortement, contrer une lactation de pseudo-gestation, provoquer ou annuler l’oestrus… Elles sont souvent très efficaces pour l’action voulue, mais il existe toutefois pour chacune d’elles des effets secondaires plus ou moins importants. Ces effets indésirables concernent principalement les progestatifs de synthèse utilisés pour prévenir l’oestrus. Ils provoquent en effet un développement des glandes utérines, produisant un liquide nutritif qui s’accumule dans la cavité utérine. Ce milieu liquide est très favorable à une prolifération bactérienne et donc une infection utérine. On estime à 12% le nombre de pyomètres ou métrites faisant suite à une administration de progestatifs en pro-oestrus (11). Ces statistiques augmentent encore lorsque le traitement hormonal est administré plus de 3 jours après le début du pro-oestrus (11).
Les molécules mises en cause pour ces effets en médecine vétérinaire sont principalement l’Acétate de Mégestrol, l’Acétate de Médroxyprogestérone, l’Acétate de Delmadinone et la Proligestrone. Les esters d’oestradiol peuvent également être utilisés afin d’interrompre une gestation. Dans ce but, l’administration doit être effectuée dans les deux premières semaines de gestation. A la dose nécessaire, les oestrogènes peuvent provoquer une hyperplasie-glandulokystique ou une métrorrhagie, évoluant très souvent en pyomètre quelques semaines après l’administration comme cela a déjà été évoqué précédemment. On estime que 15 à 25% des interruptions de gestation réalisées à l’aide d’oestrogènes présentent des complications de ce type.
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Table des matières
TABLE DES ILLUSTRATIONS
INTRODUCTION
I.L’appareil génital femelle : Anatomo-histologie, modifications hormonales et structurales au cours du cycle sexuel
1.Anatomie et histologie utérine
1.1. Anatomie
1.2. Histologie
2.Le cycle sexuel de la chienne : description et durée des différents stades
3.Modifications hormonales et structurales survenant au cours du cycle sexuel.
3.1. Modifications hormonales
3.2. Modifications structurales
II.Moyens de défense de l’utérus contre les infections
1.Le pyomètre : Données générales
Définition, épidémiologie, importance
2.Facteurs favorisant l’apparition d’un pyomètre
2.1. Facteurs anatomiques
2.2. Facteurs hormonaux, iatrogènes ou physiologiques
2.2.1. Facteurs hormonaux physiologiques
2.2.2. Facteurs hormonaux iatrogènes
2.3. Facteurs épidémiologiques
3.Pathogénie du pyomètre
4.Description clinique
5.Diagnostiquer un pyomètre et ses complications
5.1. Critères épidémio-cliniques
5.2. Frottis vaginal
5.3. Imagerie médicale
5.3.1. Radiographie
5.3.2. Echographie
5.4. Paramètres sanguins
5.5. Diagnostiquer les complications du pyomètre
5.5.1. Les déséquilibres acido-basique et électrolytique
5.5.2. Les atteintes rénales
5.5.3. L’atteinte hépatique
5.5.4. Les troubles de la coagulation
5.5.5. L’atteinte de la moelle osseuse
5.5.6. L’atteinte cardiaque
6.Pronostic
7.Traiter un pyomètre
7.1. Mise en place de mesures de réanimation
7.1.1. Fluidothérapie
7.1.2. Antibiothérapie
7.2. Retrait du matériel purulent
7.2.1. Traitement chirurgical : l’ovariohystérectomie
7.2.2. Traitement médical
7.2.2.1. Les molécules
– Les anti-progestatifs
– Les molécules à action anti-prolactine
– Les Prostaglandines F2α
7.2.2.2. Les protocoles
– Association cloprosténol-aglépristone
– Association cabergoline-aglépristone
III. Le pyomètre : Quelle décision thérapeutique ?
1.Le pyomètre chez la chienne : une urgence dans tous les cas ?
2.Le pyomètre, une urgence chirurgicale ou médicale ?
2.1. Considérations non-médicales
2.1.1. La destination de la chienne
2.1.2. L’implication financière de chaque méthode thérapeutique
2.2. Considérations médicales
2.2.1. Paramètres déterminants
2.2.2. Paramètres indicateurs
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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