L’aménagement-Urbanisme, essai de définition
Elaborer un corpus de représentations graphiques en aménagement-urbanisme nécessite de s’arrêter au préalable sur la définition, les portées et les moyens d’actions de cette discipline, si l’on peut parler de discipline. L’aménagement du territoire et l’urbanisme sont des champs récents apparus à la fin du XIXe siècle pour l’urbanisme, et au cours du XXe siècle pour l’aménagement, en réponse aux problèmes de développement que rencontraient les villes comme les territoires. Pour Françoise Choay , «l’expansion de la société industrielle donne naissance à une discipline qui se distingue des arts urbains antérieurs par son caractère réflexif et critique et par sa prétention scientifique» serait à l’origine des théories et pratiques définissant l’urbanisme, mais cette définition peut également être associée à l’aménagement du territoire. En effet, il est possible de considérer que l’expansion de la société industrielle et sa répartition déséquilibrée sur le territoire est également à l’origine de la mise en place de politiques d’aménagement du territoire. Eugène Claudius-Petit (1907-1989), ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme de 1948 à 1952,définit pour la première fois en France l’aménagement du territoire «En gros, l’aménagement du territoire, c’est la recherche, dans le cadre géographique de la France, d’une meilleure répartition des hommes, en fonction des ressources naturelles et des activités économiques» .
définitions de l’aménagement-urbanisme
l’aménagement
Le dictionnaire Larousse définit l’aménagement comme «l’action de disposer avec ordre». Cette définition succincte est reprise par Pierre Merlin comme point de départ pour le développement de sa définition. Il traduira en effet «disposer avec ordre» par le fait que l’aménagement est une discipline de l’espace qui peut s’exercer de l’échelle «de la planète» à l’échelle micro-locale. Il ajoute ensuite que l’aménagement, toujours considéré comme action, est une discipline du temps au sein de laquelle passé, présent et avenir ont autant d’importance. Dans le même ouvrage , l’aménagement est décrit comme un «ensemble d’actions concertées visant à disposer avec ordre les habitants, les activités, les constructions, les équipements et les moyens de communication sur l’étendu d’un territoire.», et il ajoute «l’aménagement est une action volontaire, impulsée par les pouvoirs publics (gouvernement ou élus selon l’échelle du territoire concerné) qui suppose une planification spatiale et une mobilisation des acteurs (population, entreprises, élus, locaux, administrations)». Cette définition, nous permet déjà de suggérer que l’exercice de l’aménagement fait appel à des techniques relevant de la représentation graphique pour la «planification spatiale» et de la communication pour la «mobilisation des acteurs». La présentation du Master Recherche Aménagement dispensé à l’Université de Tours propose également une définition de l’aménagement: «l’aménagement est un champ de pratiques et une science de la conception. Par conception est désignée l’activité qui consiste à élaborer un projet pour résoudre une situation problématique. Toute formation en aménagement et urbanisme se doit donc d’embrasser cette double dimension des sciences du projet, à la fois sciences de l’analyse des processus de conception et sciences permettant la création de processus qui n’existent pas encore.» .
Ce texte s’oppose à la définition de Pierre Merlin, celui-ci considère en effet que l’aménagement (du territoire) est une action et une pratique et non une science. Cette science est dite «de conception», or, il peut être entendu que ce terme renvoie à l’action de construire par l’esprit ou par l’imagination «un projet pour résoudre une situation problématique». Peut-on, dès lors, associer conception et projet et est-il sous-entendu que cette action fait appel à la dimension graphique ?
l’urbanisme
Le Que sais-je ? consacré à l’urbanisme écrit par Pierre Merlin, a pour introduction «un essai de définition de l’urbanisme». Son auteur fait d’abord référence au Grand Dictionnaire Encyclopédique Larousse qui définit l’urbanisme comme «l’art d’aménager et d’organiser les agglomérations humaines et, de façon plus précise, l’art de disposer l’espace urbain ou rural (bâtiments d’habitation, d’activités, de loisirs, réseaux de circulations et d’échanges) pour obtenir son meilleur fonctionnement et améliorer les rapports sociaux». Pratiquer l’urbanisme relèverait donc de l’aménagement.
L’urbanisme, comme champ d’actions et de pratiques, se définit également par l’apport de ses théoriciens. Ainsi, Françoise Choay dans Urbanisme, utopies et réalités définit l’urbanisme en classant ceux qu’elles considèrent comme les théoriciens de la discipline et en distinguant donc leur vision de l’urbanisme selon leur appartenance à un courant ou modèle dominant. Elle oppose alors les modèles progressistes et culturalistes . Le premier courant se caractérise par «une croyance absolue de ses auteurs dans l’avenir et le progrès et dans les capacités de l’homme à adopter un comportement rationnel», les seconds «à l’inverse du modèle progressiste se tourne résolument vers le passé», condamne la ville moderne et sa banalité et glorifie la diversité et l’irrégularité de la ville traditionnelle. Françoise Choay distribue ainsi les auteurs selon les théories qu’ils développent dans l’un des deux courants, tout en nuançant son propos et en exposant les limites de cette dualité. La pratique de l’urbanisme serait donc fortement marquée par ces deux modèles, et les réactions qu’ils auraient entraîné par la suite (urbanisme naturaliste, new-urbanism,…).
Mais l’urbanisme n’est pas seulement l’entreprise de théoriciens, il demeure avant tout une pratique, donc une action sur le terrain, qui ne se traduira pas seulement par une transformation de l’espace mais aussi par un ensemble d’action relevant des jeux d’acteurs, de la communication, de l’économie,…
peut-on parler d’aménagement-urbanisme ?
La définition de l’aménagement donnée dans la fiche de présentation du diplôme de Master Recherche Aménagement laissait sous-entendre que la formation dispensée était un enseignement «en aménagement-urbanisme». Dans un écrit récent , Denis Martouzet, Professeur en Aménagement à l’Université de Tours donnait une définition de l’aménagement-urbanisme, celui-ci «est un champ de connaissances (empiriques et théoriques, incluant savoirs et savoir-faire) portant sur l’espace, ses composants et leurs transformations éventuelles. L’aménagement-urbanisme se donne comme moyen la transformation de l’espace et/ou des éléments le composant en vue d’une amélioration (spatiale ou plus large) souhaitée par rapport à un état initial jugé améliorable. L’aménagement-urbanisme, comme réflexion, savoir, savoir faire se concrétise sur le terrain dans l’action. […] L’aménagement-urbanisme est un champ de recherche, d’étude et d’action non clos spatialement, temporellement, en termes d’acteurs et en termes de disciplines.[…]» .
Les deux définitions considèrent que l’aménagement et l’urbanisme sont une seule et même discipline. Le statut du sens donnée à ce «champ de connaissances» par Denis Martouzet en reprenant les éléments clés des définitions de Françoise Choay et Pierre Merlin : «savoir-faire, espace, transformations, action, temporalité» permet donc d’associer ces deux termes en d’en faire un unique champ disciplinaire. D’ailleurs, cette définition se concrétise d’une part dans l’action même de l’urbaniste, qui peut être considéré, comme l’indique le Larousse, en tant que «spécialiste de la conception, de l’établissement et de l’application des plans d’urbanisme et d’aménagement du territoire», et d’autre part dans la formation de ces urbanistes. Ainsi, combien de Master, dispensés dans les universités francophones, aujourd’hui portent aujourd’hui la mention aménagement-urbanisme ? Quelques dizaines sans aucun doute … Il est donc avéré que l’aménagement-urbanisme peut constituer un seul et unique champ disciplinaire. Mais la particularité de celui-ci est d’être interdisciplinaire, en effet il concerne plusieurs disciplines, l’aménagement tout comme l’urbanisme sont associées, dans leur enseignement comme dans leur pratique, à l’économie, la sociologie, la géographie, le droit, l’histoire, l’écologie, les sciences de la vie et de la terre, l’architecture…
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Table des matières
INTRODUCTION
Partie 1 Construction et définition de l’objet de recherche un corpus d’images fondatrices et de références de l’aménagement-urbanisme
I L’aménagement-Urbanisme, essai de définition
1 définitions de l’aménagement-urbanisme
a l’aménagement
b l’urbanisme
c peut-on parler d’aménagement-urbanisme ?
2 ce qui est nécessaire pour définir la discipline
a nature, création et diffusion des savoirs de l’aménagement-urbanisme
b les supports de la diffusion des savoirs en aménagement-urbanisme
II images et représentations graphiques
1 une image est une représentation et une représentation est une image
2 les valeurs de l’image
a l’urbaniste, un graphiste
b l’acquisition de connaissances est induite par l’image
c l’image est un vecteur d’un savoir à part entière
III Les notions de fondateur et de référence
1 travail sur la notion de fondateur
a mythe fondateur et fondateurs
b brève étude étymologique
2 texte fondateur
a définition d’un texte fondateur
b textes fondateurs de l’aménagement-urbanisme
3 références et modèles
a référence
b modèles
4 exemples de filiation d’images
IV UN CORPUS comme recueil de connaissances imagées et fondatrices DE L’AMENAGEMENT-URBANISME
1 qu’est-ce qu’un corpus ? apports d’autres disciplines
a en médecine
b en littérature
c en histoire de l’art, et pour l’art en général
2 objectifs d’un corpus d’images en aménagement-urbanisme
Partie 2 Vers la realisation du corpus d’images fondatrices en aménagement-urbanisme questions méthodologiques et apport de la technique
I constructions méthodologiques
1 de l’importance de la prise en compte des acteurs
2 de l’importance d’un gradiant
3 de l’importance de la définition de l’aménagement-urbanisme
II constructions techniques
1 le corpus d’images fondatrices, une base de données en ligne
2 interactions entre les différents acteurs et la base de données-corpus
3 site internet, base de données relationnelle et corpus d’images fondatrices, un ensemble indissociable au service de la diffusion des savoirs en urbanisme
4 questions juridiques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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