L’alliage FeRh, présentation et état de l’art

Intérêt de FeRh : une transition magnétique remarquable 

En 1938, Fallot montrait l’existence d’un comportement magnétique inhabituel dans l’alliage ordonné Fe0,5Rh0,5 de structure dite CsCl ou B2 [1]; alors que l’aimantation à saturation des alliages ferromagnétiques décroît avec la température jusqu’à s’annuler à la température de Curie, l’alliage FeRh ne montrait pas d’aimantation à l’ambiante mais devenait ferromagnétique en chauffant au-delà de 60°C. Depuis le travail original de Fallot, plusieurs études ont montré que l’alliage Fe0,5Rh0,5, à l’état massif, présente une transition magnétique particulièrement remarquable d’un état antiferromagnétique (AFM) à basse température vers un état ferromagnétique (FM) à une température voisine de 350K [2], [3], [4]. Au-delà de cette température, l’alliage se comporte comme un ferromagnétique classique avec une température de Curie proche de 675K (température de transition de l’état ferromagnétique à l’état paramagnétique à haute température) [5], [6]. Ces différentes études ont également montré que la transition AFMFM était de premier ordre et s’accompagnait d’une expansion volumique de 1% de la maille cristalline de cet alliage [6], [7].

Plusieurs paramètres contrôlent la valeur de la température de transition, que nous noterons TT dans la suite. Une baisse de 0,8K/kOe de TT a ainsi été observée lorsqu’on augmente le champ magnétique appliqué dans l’alliage Fe0,5Rh0,5 massif [8], comme dans l’alliage en couches minces [9]. La transition magnétique dépend néanmoins fortement de la composition de l’alliage Fe1-xRhx, qui doit se situer dans la gamme 0,48<x<0,52 [10], [11]. Enfin, elle est également très sensible à la contrainte appliquée (une augmentation de TT a été observée dans des films minces de FeRh en compression [12], [13] et une diminution de sa valeur pour un système en tension [14]. Enfin la valeur de TT diminue avec l’épaisseur dans les couches minces [15], [16], [17].

Si les premières études se sont tout d’abord focalisées, pour les matériaux massifs, sur l’étude de la transition dont l’origine est toujours controversée, de gros efforts se sont portés sur l’élaboration de dispositifs incluant des couches minces de FeRh en vue de réaliser des progrès dans le domaine de l’écriture et de l’enregistrement magnétique. Par exemple, il a été récemment proposé d’utiliser des bicouches de FePt/FeRh couplées par interactions d’échange pour l’enregistrement magnétique thermiquement assisté (TAMR)[18], [19], [20]. La transition AFM-FM du FeRh est utilisée pour abaisser le champ coercitif de la couche à forte anisotropie de FePt. Ainsi au-dessus de TT, la couche de FeRh aide au retournement de l’aimantation de la couche de FePt. Les données sont ensuite stockées à une température inférieure à TT où le FeRh est dans son état antiferromagnétique, et la stabilité thermique de l’aimantation est déterminée essentiellement par la couche de FePt d’anisotropie élevée.

Diagramme de phase structural et magnétique de l’alliage FeRh 

Les phases magnétiques 

Trois phases magnétiques différentes sont réunies dans le diagramme de phase FeRh : une phase ferromagnétique, une phase paramagnétique et une phase antiferromagnétique (correspondant à la phase notée α‘’).

Phase ferromagnétique : Rappelons qu’un corps ferromagnétique (FM) se caractérise par un alignement magnétique permanent de ses moments qui s’orientent parallèlement les uns aux autres par une interaction mutuelle appelée couplage ferromagnétique (intégrale d’échange J>0). Les matériaux ferromagnétiques présentent donc une aimantation spontanée M en l’absence de champ magnétique externe H. Ils possèdent une température de Curie TC au dessus de laquelle ils deviennent paramagnétiques (l’aimantation spontanée disparaît à cause de l’agitation thermique). En dessous de cette température, les interactions dominent l’agitation thermique et une aimantation spontanée apparaît en l’absence de champ appliqué, aimantation qui atteint sa valeur maximale à température nulle et correspondant au parallélisme de tous les moments individuels. Malgré l’existence d’une aimantation spontanée en dessous de TC, un échantillon de matériau ferromagnétique n’est pas toujours spontanément aimanté: si son moment magnétique est nul, on dit alors que le matériau est désaimanté. Ceci résulte du fait que l’intérieur du matériau est divisé en domaines magnétiques, appelés domaines de Weiss : chaque domaine, qui comporte un grand nombre d’atomes, est spontanément aimanté. La direction des moments magnétiques, c’est-à-dire de l’aimantation spontanée locale, varie aléatoirement d’un domaine à l’autre de sorte que le moment magnétique total de l’échantillon est nul. Cependant en appliquant un champ, on modifie la répartition des domaines et il en résulte la variation de l’aimantation (courbe de première aimantation) ; ainsi, au niveau macroscopique, un ferromagnétique est une substance qui acquiert généralement une forte aimantation sous l’action d’un champ.

Clairement, la température de Curie diminue avec la teneur en rhodium, la température la plus haute correspondant à celle du fer pur (770°C). La température de Curie pour l’alliage de composition équiatomique dans la phase ferromagnétique est d’environ 367°C. Les alliages Fe1-xRhx sont donc ferromagnétiques dans la gamme de composition couverte par les phases structurales α et α’, et pour une température inférieure à TC.

Phase paramagnétique : Dans un grand nombre de cas, le magnétisme des substances paramagnétiques provient des moments magnétiques permanents portés par tout ou partie des atomes. Ces moments n’interagissent pratiquement pas entre eux et peuvent s’orienter librement dans n’importe quelle direction : on parle alors de paramagnétisme des atomes libres. Sous l’action d’un champ magnétique, la valeur moyenne de l’orientation des moments est modifiée et une aimantation induite, parallèle au champ, apparaît. Cette aimantation est d’autant plus faible que la température est élevée, c’est-à-dire que l’agitation thermique est importante.

Les alliages ferromagnétiques décrits précédemment transitent vers un état paramagnétique au-dessus de leur température de Curie, soit au-delà de la courbe TC. Pour le fer pur, la transition s’effectue dans la phase structurale . Pour des teneurs plus fortes en rhodium (0,05<x<0,25), elle s’effectue dans la phase γ ou dans la phase α‘ (pour 0,30<x<0,52).

Phase antiferromagnétique : dans un corps antiferromagnétique (AFM), les atomes portent un moment magnétique permanent fortement lié aux autres par un couplage antiferromagnétique (intégrale d’échange J<0) caractérisé par un arrangement antiparallèle. Ces interactions s’opposent à l’action d’un champ appliqué qui tendrait à rendre les moments parallèles. Le moment résultant est nul. Les matériaux antiferromagnétiques possèdent une température au-dessus de laquelle ils deviennent paramagnétiques, appelée température de Néel (TN).

Les phases structurales

Les phases structurales de l’alliage Fe1-xRhx (phases α, α’, γ) appartiennent toutes au système cubique, avec différents réseaux de Bravais : le réseau primitif (noté P), le réseau centré (noté I) et le réseau à faces centrées (noté F). Le réseau primitif possède ici les mêmes sites que le réseau centré, et n’est primitif que parce qu’un type d’atome occupe le site (0,0,0) du réseau cubique centré tandis que l’autre type occupe le site (½ ,½,½) . Cette structure particulière est une structure dite ordonnée, notée B2 ou également CsCl en référence au composé type de cette structure.

Phase α :
La phase α présente une structure cubique centrée (cc). Elle s’étend sur une gamme de composition entre 0 et 10 % at. Rh à l’ambiante. Les atomes de rhodium se substituent aux atomes de fer de façon aléatoire sur les sites du réseau cc. On dit que l’alliage est désordonné. Le paramètre de maille de la phase α évolue pour l’alliage Fe1-xRhx de a=2,886 Å pour x=0 (Fe pur) à a=2,899 Å pour x=0,1.

Phases α’ et α’’ :
La transition ordre-désordre qui transforme la phase désordonnée α en une phase ordonnée α’ de structure B2 est indiquée sur le diagramme de phase température ambiante, cette transition se produit lorsque la teneur en rhodium excède 10%.

La structure B2 s’étend jusqu’à une teneur en rhodium de 52%. Le paramètre de maille de la phase α’ augmente progressivement avec la teneur en rhodium. Dans la gamme de composition 0,48<x<0,52, la phase α’ est antiferromagnétique en dessous de la température TT (environ 350K) et est alors notée phase α’’. Au-dessus de TT, la phase redevient ferromagnétique. Pour une composition donnée, la différence d’ordre magnétique engendre une dilatation de la maille de α‘’ vers α’ avec une expansion volumique d’environ 1% (et inversement une contraction de la maille de α’ vers α’’).

Phase γ 
La phase γ possède une structure cfc. Elle est présente pour les alliages de forte teneur en rhodium ainsi qu’à haute température. Les atomes de fer et de rhodium se répartissent sur les sites du réseau cfc de façon aléatoire avec un taux d’occupation en Rh de x pour chaque site (x=teneur en rhodium). Le paramètre de maille est de a=3,78 Å pour x=0,8 et de a=3,80 Å pour x=1 (pur Rh).

Paramètre de maille
Shirane et al. [21] ont tracé l’évolution du paramètre de maille du FeRh en fonction de la concentration en Rh . Les valeurs ont été déterminées par diffraction des rayons X (Kα du fer).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I : L’alliage FeRh, présentation et état de l’art
I.1 Intérêt de FeRh : une transition magnétique remarquable
I.2 Diagramme de phase structural et magnétique de l’alliage FeRh
I.2.1 Les phases magnétiques
I.2.2 Les phases structurales
I.3 Propriétés magnétiques de l’alliage FeRh
I.3.1 Moments magnétiques dans FeRh
I.3.2 Comportement sous l’action d’un champ magnétique
I.3.3 Evolution de la température de transition AFM-FM
CHAPITRE II : Croissance par voie physique
II.1 Les techniques de dépôts
II.1.1 Les synthèses par voies physiques
II.1.2 Principe de fonctionnement de la pulvérisation cathodique
II.2 Description du bâti PLASSYS
II.2.1 Principales caractéristiques du bâti
II.2.2 Le porte substrat
II.3 Mécanismes et modes de croissance
II.3.1 Les différents mécanismes et la croissance
II.3.2 Nucléation et coalescence
II.3.3 Mouillage
II.4 Croissance épitaxiale
II.4.1 Déformation élastique
II.4.2 Relaxation plastique
CHAPITRE III : Caractérisations structurales et magnétiques : les outils de l’étude
III.1 Diffraction
III.1.1 RX
III.1.2 Réflectivité
III.1.3 Particularités de la diffraction des électrons
III.2 MET
III.2.1 Présentation générale
III.2.2 Les différentes techniques de microscopie
III.3 MAGNETISME DES COUCHES MINCES
III.4 MAGNETOMETRIE PAR ECHANTILLON VIBRANT VSM
CHAPITRE IV : Films minces FeRh épitaxiés sur MgO (001)
A. Des conditions de dépôt à la transition AFM-FM
IV.A.1 Les dépôts : optimisation des conditions de croissance
IV.A.2 Propriétés structurales : analyse par DRX
B. Films FeRh présentant la transition AFM-FM : ordre chimique et microstructure
IV.B.1 Evaluation de l’ordre chimique
IV.B.2 Microstructure : évidence de la présence de grains
C. Mise en évidence de la transition magnétique AFM-FM
IV.C.1 Mise en évidence de la transition magnétique AFM-FM
IV.C.2 Etude de la transition par holographie électronique off-axis
CHAPITRE V : Structure et morphologie de nanoparticules de FeRh
V.1 Croissance de nanoparticules : généralités
V.1.1 Processus de la croissance
V.1.2 Morphologie d’équilibre
V.2 Analyse de nanoparticules de FeRh élaborées par co-dépôt
V.2.1 Choix de la température de dépôt
V.2.2 Structure et morphologie des nanoparticules
V.3 Optimisation des conditions de dépôt
V.4 Elaboration des nanoparticules de manière séquentielle
V.5 Analyse des morphologies d’équilibre des nanoparticules ordonnées
CONCLUSIONS

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