L’agroécologie comme pilier vers une agriculture durable
La Martinique, son climat et sa topographie
La Martinique est ile une d’origine volcanique située dans l’archipel des petites Antilles entre l’ile de Sainte Lucie au Sud et de la Dominique au Nord (Figure 1). D’une superficie de 1128 kilomètres carrés, elle s’étend sur environ 80 kilomètres de longueur et 25 kilomètres de large. On retrouve au Nord un massif montagneux, dominé par les pitons du Carbet et la Montagne Pelée (1397m), au Sud il s’agit principalement de reliefs moyens (ne dépassant pas 505m pour la montagne du Vauclin) et au centre se dégage la plaine du Lamentin. Concernant ses caractéristiques climatiques, elle se situe en zone tropicale humide et on y distingue deux saisons. La saison humide, de mai à décembre marquée par de fortes précipitations et un risque cyclonique élevé. La saison sèche, de janvier à avril avec de fort taux d’ensoleillement et une sècheresse plus ou moins marquée. Il n’y a pas de périodes défavorables aux insectes, qui peuvent se développer toute l’année en générations continues et chevauchantes. Les données topographiques et climatiques induisent une forte variabilité de sols et des écosystèmes, définissant ainsi quatre régions géo-climatiques : le Nord Caraïbe, le Nord Atlantique, le Centre et le Sud. Ce type de climat favorise grandement le développement de ravageurs, maladies et plantes adventices pouvant nuire fortement aux productions végétale martiniquaise.
L’agriculture Martiniquaise en quelques chiffres
L’agriculture Martiniquaise couvre 21% du territoire avec 23822 ha de SAU (Surface Agricole Utile), ainsi les espaces naturels sont majoritaires et représentent 61% de la superficie totale de la Martinique. En 2014, elle emploie 6559 UTA (Unité de Travail Annuel), dont 3610 (soit 55%) rien que dans le secteur Banane (DAAF Martinique). Ces chiffres correspondent à l’emploi réel de 9769 personnes soit 5,4% de la population active. On retrouve 2994 exploitations agricoles dont la majorité sont des exploitations de petite taille, soit moins de 5 ha pour 66% d’entre elles (Agreste, 2016). La principale filière agricole de la Martinique est la filière banane avec 190 000 tonnes exportées annuellement et une SAU de 28%. En seconde position on retrouve la filière Canne à Sucre occupant 9% de la SAU, destinée en partie à la fabrication de rhums. Ainsi, à elles seules, les filières Bananes et Cannes à Sucre occupent 37% de la SAU (soit 59% des surfaces cultivées) avec respectivement des superficies de 5982 et 4004 en 2014.
On retrouve ensuite, les cultures fruitières et légumières, principalement des concombres, des tomates et des laitues pour le secteur légumes et des goyaves, des citrons, des melons et des oranges pour le secteur fruit (hors banane). Aucune céréale n’est produite en Martinique. Pour l’élevage bovin, les prairies contribuent localement à la demande. L’agriculture locale ne répond que très partiellement à la demande des consommateurs locaux car 77% des produits alimentaires sont importés. Ainsi, pour les fruits et les légumes (hors conserves et surgelés), la demande n’est assurée qu’à 34 et 41% respectivement. Afin d’offrir davantage de produits aux consommateurs et dans un souci de retrouver des variétés anciennes aux caractéristiques gustatives intéressantes des efforts dans la diversification des productions sont observés notamment concernant les PPAM (Plantes à Parfums, Aromatiques et Médicinales), les plantes condimentaires, les agrumes et autres fruits (Agreste, 2016).
Le CAEC, structure d’accueil Le CAEC (Campus Agro-Environnementale de la Caraïbe) situé sur la commune du Lamentin au quartier Petit Morne, regroupe des équipes du CIRAD, de l’IRD, de l’IRSTEA et de l’UA. Le Cirad de Martinique conduit depuis plus de 50 ans des recherches dans de nombreux domaines tels que l’agronomie, la phytopathologie, la pédologie, l’entomologie, l’environnement et les pratiques agricoles… Les objectifs de cette structure (associée également aux autres équipes du CAEC) sont de répondre aux problématiques locales rencontrées par l’ensemble du monde agricole martiniquais en proposant des solutions localement applicables et plus respectueuses de l’environnement. Les thématiques de recherche actuelles sont donc par exemple, la conception de systèmes de cultures innovants, à faibles impacts environnementaux (problèmes par exemple, liés à l’exploitation de terres polluées par les pesticides et de leur gestion future, ou de la mise en place de solution altératives aux produits phytosanitaires vis-à-vis de ravageurs de cultures présents ou nouvellement arrivés). L’intégration des innovations agronomiques auprès des agriculteurs ou bien l’innovation variétale (avec la mise en place d’un programme d’amélioration variétale chez les agrumes en vue de l’obtention de plants tolérants au HLB (Huanglongbing) et autres pathogènes localement présent).
Problématique de l’étude L’essai initialement prévu par le CIRAD sur une des parcelles expérimentales concernait l’étude de l’effet « répulsif » des goyaviers vis-à-vis du psylles Diaphorina citri, vecteur du HLB, se nourrissant de la sève des agrumes (Lime de Tahiti ou Citrus latifolia dans ce cas). Cependant, l’absence totale de psylles, aussi bien sur les parcelles contre plantée avec des goyaviers que celles sans goyaviers (voir partie matériel), a contraint le CIRAD à mettre en place une autre étude. C’est dans ce contexte que s’est mis en place le sujet de la suivante étude. Il s’agira de suivre la dynamique des populations des ravageurs (focalisée sur les pucerons, car ravageurs principaux à l’heure actuelle) et de leurs ennemis naturels dans des vergers d’agrumes (voir partie matériel – parcelles pour le détail) de la Martinique en fonction de la couverture végétale. Un inventaire de l’entomofaune des agrumes (et des goyaviers des parcelles agrumes-goyaviers) devra être réalisé sur ces vergers.
La problématique à laquelle devra répondre cette étude est donc de savoir s’il y a la possibilité de mener des vergers d’agrumes en Martinique avec des pratiques agroécologique (mise en place d’une stratégie de lutte biologique par conservation, implantation de plantes de couverture ou enherbement naturel) afin de mieux réguler les populations de ravageurs, tout en évitant au maximum l’utilisation de produits phytosanitaires. Cette étude devrait donc permettre de mieux connaitre les dynamiques des populations de ravageurs et de leurs ennemis naturels des agrumes (et des goyaviers) dans des vergers menés avec des méthodes agroécologiques, d’obtenir un inventaire de l’entomofaune des agrumes et d’amorcer la compréhension du rôle de la couverture végétale pour ces vergers d’agrumes. Ces résultats pourront par la suite permettre de montrer et proposer aux agriculteurs locaux des nouvelles méthodes de gestion des bioagresseurs par le biais d’une gestion agroécologique des parcelles d’agrume.
L’agroécologie comme pilier vers une agriculture durable
L’impact des produits phytosanitaires sur la santé humaine et les écosystèmes Depuis la synthèse du DDT en 1874 par Othmar Zeidler, et la découverte de ses propriétés insecticides en 1939 par Paul Hermann Muller, il est considéré ainsi comme le premier produit phytosanitaire de synthèse. Depuis, une quantité innombrable de produits de ce genre ont vu le jour. Ainsi, dès la fin de la deuxième Guerre Mondiale l’utilisation massive de produits phytosanitaire en tout genre a considérablement changé l’agriculture et amélioré l’état sanitaire de la population mondiale. Depuis le milieu du 20 siècle, d’importantes quantités de produits phytosanitaires ont été répandu dans l’environnement afin de lutter contre les ravageurs de cultures et des vecteurs de maladies (maladies humaines, animales et végétales). Trop souvent utilisés de façon non raisonnée, ces produits ont fini par causer un problème de contamination de la biosphère à court, moyen et long terme, car certaines de ces molécules mettront parfois plusieurs centaines d’années à disparaitre complétement de ces milieux (Newman et Unger, 2003).).
Ces excès proviennent d’une connaissance limitée des risques de ces produits sur l’environnement, d’un manque d’effort et de réflexion sur la mise en place de solutions alternatives moins polluantes (Newman et Unger, 2003). Les pesticides, toxiques pour les organismes visés, peuvent malencontreusement être néfastes pour des organismes non cibles. Ces produits phytosanitaires, pour la plupart rémanent sur de longues périodes (de quelques semaines à plusieurs décennies) sont ainsi conservés et transportés dans l’environnement via différentes composantes (eau, air, sol) conduisant alors à des pollutions à proximités des zones traitées ou à des distances considérables des territoires traités (Newman et Unger, 2003). Dès lors, on observe des effets négatifs sur les populations d’organismes vivant (Carson R., 1962) dans ces milieux traités (ou non) que ce soit par des doses létales ou des doses sublétales entrainant des troubles chroniques (effets tératogènes, mutagènes, cancérigènes, reprotoxiques, neurologiques…).
L’homme constitue l’une des cibles involontaires des pesticides.
Les applicateurs des produits phytosanitaires sont les premiers touchés, par des doses potentiellement élevées. Cependant, les consommateurs sont également concernés par le fait qu’ils consomment des produits alimentaires susceptibles d’avoir été en contact avec ces produits. Les risques liés à ces deux principaux modes de contaminations sont dès lors différents en termes de risque pour la santé. Pour les premiers, il s’agit de risques liés à des expositions potentiellement élevées entrainant alors des effets négatifs dits aigus et précoces. Et pour les seconds, des risques liés à des expositions très faibles mais répétées entrainant alors des effets négatifs chroniques. Les effets aigus et précoces sont donc liés à des doses relativement élevées entrainant des effets délétères sur la santé humaine dans les heures ou jours qui suivent l’exposition. Les symptômes de ces contaminations dépendent des matières actives entrées en contact avec les applicateurs et manipulateurs de ces produits. Selon Spiewak (Spiewak, 2000) il s’agit principalement de problèmes d’irritations et d’inflammations oculaires et cutanés, des problèmes affectant le systèmes nerveux, respiratoire, digestif ou circulatoire. Cependant, certains de ces produits, même à l’état de traces, constituent une menace pour la santé humaine dès lors que les expositions s’inscrivent dans la durée. Hormis
|
Table des matières
Remerciements
Liste des Figures et des Tableaux
Liste des Annexes
Liste des Abréviations
Glossaire
Introduction1
I) Contextualisation de l’étude
I.1) La Martinique, son climat et sa topographie
I.2) L’agriculture Martiniquaise en quelques chiffres
I.3) Le CAEC, structure d’accueil
I.4) Problématique de l’étude
II) L’agroécologie comme pilier vers une agriculture durable
II.1) L’impact des produits phytosanitaires sur la santé humaine et les écosystèmes
II.2) L’agroécologie une approche plus respectueuse de l’environnement
II.3) Les différentes solutions de lutte biologique contre les insectes ravageurs
II.4) La lutte biologique par conservation, une technique à promouvoir en MartiniqueIII)
III.Les ravageurs des vergers d’agrumes en Martinique
III.1) Les pucerons
III.2) Les cochenilles
III.3) Les psylles
III.4) Les aleurodes
IV) Les auxiliaires et ennemis naturels réalisant la lutte biologique dans les vergers d’agrumes en Martinique
IV.1) Les coccinelles et autres prédateurs
IV.2) Les parasitoïdes
V) Matériels et Méthodes
V.1) Matériels
V.2) Méthodes
VI) Résultats
VI.1) Evolution des populations des pucerons sur les agrumes
VI.2) Populations de Coccinellidae des différentes parcelles
VI.3) Les différents bioagresseurs des agrumes et des goyaviers
VI.4) Les différents auxiliaires présents autres que les Coccinellidae
VI.5) Fauchages des insectes des plantes de couvertures
VI.6) Plantes de couverture et en bordure de parcelles hébergeant des pucerons
VII) Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Résumé
Télécharger le rapport complet