Les progrès agricoles et développement économique au XXe siècle
En réalité, le premier débat sur la question agricole dans un pays en voie de développement, a lieu dans l’URSS des années 1920, deux idées étaient divulguées. La seconde préconisait un développement équilibré agriculture/industrie, avec une ponction modérée, mais son point de vue n’a pas été retenu. Par des prix faibles versés au monde rural, secteur privé à l’époque (on est avant la grande collectivisation de Staline en 1929), la première voulait au contraire favoriser un transfert forcé du surplus agricole vers l’industrie socialisée. « Les termes de l’échange agriculture/industrie devaient rester défavorables, avec des prix industriels en hausse. Le refus des paysans de vendre mènera tout droit à la collectivisation stalinienne. Cependant celle-ci échouera à développer l’agriculture soviétique, faute de motivation. Cet échec agricole constituera un handicap majeur pour le développement économique du pays après la guerre. Le secteur ne produit pas assez, les revenus et les débouchés sont faibles, les liens avec l’industrie ne peuvent jouer pleinement. » L’Asie offre un tableau totalement différent, où l’on constate tous les effets positifs d’un développement agricole réussi sur la croissance industrielle. Le Japon de l’ère Meiji10, le Japon d’après la Deuxième Guerre mondiale, la Corée du Sud et Taiwan, offrent des exemples qui se situent dans la lignée de la révolution industrielle britannique. De plus, des réformes agraires radicales ont permis de répartir les terres plus équitablement et de stimuler l’intérêt des paysans à produire. Ils n’ont pas été exploités par des prix trop défavorables, même si ceux-ci, fixés par l’État, sont restés inférieurs aux prix que le marché aurait établis, de façon à opérer le transfert. Les gouvernements ont en outre investi massivement dans les infrastructures rurales, mis en place des services aux producteurs, développé les systèmes de financement et appliqué un système d’impôts tendant à encourager l’accroissement de la production agricole. L’Amérique latine se situe entre l’Afrique et l’Asie, avec des problèmes fonciers structurels, l’inégale répartition des terres, source d’inflation chronique pendant longtemps, et toujours de grande inégalité sociale. Les hyperinflations sud-américaines des années soixante soixante-dix sont liées à la faiblesse et à la rigidité de l’offre agricole, dues à l’inefficacité des grandes propriétés. Une inflation par la demande, aggravée par des pratiques budgétaires et monétaires laxistes (inflation monétaire). La structure des latifundios, héritée de l’Espagne, qui elle-même l’avait héritée de Rome, n’a été cassée que dans quelques pays comme le Mexique, elle continue à obérer le développement agricole du sous-continent, et par là même freine son développement économique, même si la situation est extrêmement variée, avec aussi nombre de grandes exploitations modernes et efficaces.
La fonction de production à une seule variable
« Cette fonction est de forme logistique. Dans une première phase, le produit total augmente plus vite que le volume du facteur (rendements croissants : le produit supplémentaire dû à une unité supplémentaire du facteur où le produit marginal est croissant). A partir d’un point d’inflexion, le produit total augmente moins vite que la quantité du facteur (rendements décroissants: le produit marginal diminue). Au point de tangence menée de l’origine, le produit moyen est égal au produit marginal et devient décroisant. Il arrive au moment où toute augmentation de la quantité du facteur n’a aucune réponse de la production. C’est un effet d’encombrement ou de saturation. Le produit marginal est nul. »
Les mesures de la productivité partielle des facteurs
« Les mesures PPF sont des ratios entre la production et un unique facteur de production. L’indice de la PPF le plus couramment utilisé pour l’économie globale est l’indice de la productivité du travail (P/W), c’est-à-dire la production (P) par travailleur (W). La production peut être mesurée en termes d’un produit unique, ou en termes d’un agrégat de produits; dans le deuxième cas, il faut utiliser les prix pour constituer des agrégats de produits. Pour permettre les comparaisons dans le temps, ces prix doivent être des prix réels ou constants. » Pour l’agriculture, l’indice de la PPF le plus couramment utilisé est la production par unité de terre (rendement). Cet indice est utilisé couramment depuis des siècles; il permet de faire des comparaisons entre localités et entre époques. Les comparaisons entre localités doivent tenir compte des différences de sol et de climat. On utilise couramment la variation des rendements dans une localité donnée comme indicateur d’une amélioration de l’efficience économique. Le principal inconvénient des mesures de la PPF est qu’elles peuvent subir l’influence de variations de facteurs autres que ceux qui sont inclus dans l’indice. Par exemple, une augmentation de la fumure accroît les rendements. Pour inférer qu’un accroissement des rendements est dû à une amélioration génétique ou à une réduction des coûts transactionnels, il faut donc neutraliser l’effet de l’utilisation des autres facteurs (par des méthodes statistiques ou expérimentales). Malgré cet inconvénient, les indices de rendement sont des indicateurs très utiles de la variation de la productivité car il en existe généralement pour chaque culture, et qu’ils permettent donc de faire des comparaisons entre cultures.
Le facteur travail
« La productivité du travail s’évalue habituellement par rapport aux heures travaillées. En effet, un simple dénombrement des personnes occupées n’est pas suffisant, puisqu’il ne tient pas compte adéquatement de phénomènes comme le travail à temps partiel, les variations des heures supplémentaires et les absences. Une telle mesure soulève cependant un certain nombre de questions statistiques. En effet, ce ne sont pas tous les pays qui disposent des enquêtes nécessaires pour obtenir ce type d’information. Des substituts plus facilement accessibles sont parfois employés, tels les heures rémunérées (plutôt que travaillées) et le nombre de travailleurs exprimé en équivalents temps complet. La nature des enquêtes effectuées pour estimer le nombre d’heures travaillées peut aussi poser des problèmes de comparabilité entre pays. »
Les théories de la croissance de l’agriculture
Les économistes et les historiens envisagent sous des perspectives différentes le processus de croissance de l’agriculture. Les principales écoles sont les suivantes:
• La théorie malthusienne ou des ressources: étant donné que les ressources en terres et en eau sont limitées, le rendement du travail ne peut que diminuer à mesure que la quantité de travail par unité de ressources augmente.
• La thèse du progrès institutionnel: le facteur important est la réduction des coûts transactionnels et l’amélioration de l’efficience économique liée aux systèmes juridiques, aux droits de propriété et aux autres institutions.
• La thèse du capital humain: importance de l’amélioration des compétences des agriculteurs en matière de gestion et de production et de celles des fournisseurs de services agricoles.
• La thèse des pratiques exemplaires (diffusion des technologies): insiste principalement sur la capacité organisée (vulgarisation agricole) de chercher les technologies adaptées et de permettre aux agriculteurs d’adopter rapidement celles qui leur sont offertes.
• La thèse de l’invention adaptative: l’essentiel est de renforcer les capacités de développement technologique au moyen de recherche d’adaptation, c’est-à-dire en modifiant et améliorant les technologies existantes pour les adapter aux conditions locales.
En dehors de la théorie malthusienne, ces diverses thèses ne sont pas mutuellement exclusives. La théorie malthusienne envisage la croissance économique dans un contexte statique, en postulant que les institutions et les ressources humaines restent inchangées et qu’il n’y a ni invention ni diffusion de nouvelles technologies. « La théorie malthusienne appelle l’attention sur la croissance de la population (et de la population active) et sur celle des ressources utilisables en terres et en eau. Quand les ressources en terres et en eau sont abondantes, le ratio entre la population (ou la population active) et les ressources ne diminue pas nécessairement quand la population augmente car il est possible de mettre en culture de nouvelles terres. Mais comme les ressources en terres (et en eau) sont limitées, le ratio population/ressources finit nécessairement par augmenter, d’où une baisse inéluctable de la production par habitant. La théorie malthusienne amène à adopter une politique axée sur le ralentissement de la croissance démographique. Elle ne reconnaît pas explicitement le fait que la croissance démographique est alternativement un fardeau et un atout. L’avantage démographique permet aux pays d’accroître l’investissement et l’épargne en augmentant la force de travail. Cet effet tient à ce que la population active ne croît pas au même rythme que la population totale. Quand la croissance démographique s’accélère, comme ce fut le cas dans presque tous les pays en développement pendant les années 40 et 50, la population augmente plus vite que la population active pendant un certain nombre d’années tout simplement parce que les bébés ne deviennent pas des travailleurs avant un certain âge. Il en résulte un fardeau parce que la consommation augmente sans contrepartie. Inversement, quand la croissance démographique décélère, comme cela a été le cas dans la plupart des pays en développement depuis les années 50 ou 60, cela crée un atout pour l’économie parce que la population active augmente plus vite que la population. La plupart des pays en développement ont connu à des époques différentes depuis 1950 une telle alternance fardeau-atout. Cet atout démographique est important, même si l’on admet la perspective malthusienne. Dans une variante du modèle malthusien, la croissance de la population ou de la densité démographique peut stimuler l’investissement dans le progrès institutionnel et technologique, apportant ainsi un correctif automatique à l’attribut «rendement décroissant» du modèle. La théorie du progrès institutionnel est axée sur les inefficiences liées aux coûts transactionnels et à l’imperfection des marchés. Les investissements dans l’infrastructure réduisent les frais de transport et autres, et peuvent également réduire les coûts transactionnels. L’investissement dans les institutions (institutions de crédit et systèmes juridiques) a joué un rôle important dans l’économie agricole. L’amélioration des institutions et des infrastructures est un facteur de croissance de la production alimentaire par habitant même dans un contexte malthusien, c’est-à-dire en l’absence de progrès des technologies qui sont effectivement à la disposition des agriculteurs. La théorie du capital humain souligne que les compétences en matière de gestion des exploitations et de production agricole (le capital humain représenté par les agriculteurs) peuvent être améliorées grâce à des programmes de formation et de vulgarisation agricoles. L’investissement dans le capital humain agricole peut donc générer une croissance de la production alimentaire par habitant. »
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1 : APPROCHE THEORIQUE
CHAPITRE I : HISTORIQUE
I-1- La mise en valeur de l’agriculture
I-2- L’agriculture et l’industrialisation
I-2-1- Les produits
I-2-2- Les marchés
I-2-3- Les devises
I-2-4- Les facteurs de production
I-3- L’évolution de la productivité agricole
I-3-1- La révolution agricole et révolution industrielle au XVIIIe siècle
I-3-2- Les progrès agricoles et développement économique au XXe siècle
I-3-3- Les autres facteurs intervenants dans l’évolution de la productivité agricole
CHAPITRE II : LES CONCEPTS ET DEFINITIONS RELATIFS À LA PRODUCTIVITE
II-1- La notion de production
II-1-1- La définition de la production
II-1-2- La capacité de production
II-1-3- La fonction de production
II-1-3-1- La fonction de production à une seule variable
II-1-3-2- La fonction de production à plusieurs variable
II-1-4- La production effective, production distribuée
II-1-5- La production intérieure
II-1-6- La production nationale
II-1-7- La production marchande
II-1-8- La production non marchande
II-1-9- Les facteurs de production
II-2- La productivité
II-2-1- Définitions
II-2-2- Quelques formules liées au concept de productivité
II-2-3- Le Gain de productivité
II-2-4- Les concepts liés à la productivité
II-2-4-1- La productivité en valeur, la productivité physique
II-2-4-2- La productivité globale des facteurs
II-2-4-3- La productivité marginale
II-2-4-4- Le cycle de productivité
II-2-5- Quelques exemples de calcul et de mesure de la productivité
II-2-5-1- La productivité du travail
II-2-5-1-1- La productivité du travail par tête
II-2-5-1-2- La productivité horaire du travail
II-2-5-2- La productivité du capital
II-2-5-3- Les mesures de la productivité
II-2-5-3-1- Les mesures de la productivité partielle des Facteurs
II-2-5-3-2- Les mesure de la productivité totale des Facteurs
II-2-5-3-3- Les autres indicateurs pour mesurer la productivité
II-2-6- Les moyens d’amélioration de la productivité
II-2-6-1- Le progrès technique
II-2-6-2- L’organisation du travail
II-2-6-3- La formation et la motivation des travailleurs
II-2-6-4- Le rôle de l’investissement dans l’accroissement de la productivité
II-3- Les problèmes liés aux concepts
II-3-1- Le lien entre la productivité et l’emploi
II-3-2- Les principaux problèmes de mesure de la productivité
II-3-2-1- La valeur ajoutée
II-3-2-2- Le facteur travail
II-3-2-3- Le facteur capital
II-3-3- Les problèmes liés à l’accroissement de la productivité
II-3-3-1- Le goulot d’étranglement
II-3-3-2- Le paradoxe de Solow
II-3-3-3- La dégradation de l’environnement
II-3-3-3-1- Le changement climatique
II-3-3-3-2- La désertification et dégradation progressives du sol
II-3-3-3-3- Les catastrophes naturelles
II-4- Les conséquences socio-économiques de la productivité
II-4-1- Le lien entre la productivité et le niveau de vie
II-4-2- Le lien entre la productivité et la compétitivité
CHAPITRE III : QUELQUES THEORIES AFFERENTES À LA PRODUCTIVITE AGRICOLE
III-1- Introduction : La productivité agricole
III-2- Les théories de la croissance de l’agriculture
III-3- La théorie du surplus
PARTIE II : LES PROBLEMES ET SOLUTIONS LIES A LA PRODUCTIVITE AGRICOLE
CHAPITRE I : LA PRODUCTIVITE DES PRINCIPAUX PRODUITS AGRICOLES MALGACHES
I-1- Les céréales
I-1-1- Le riz
I-1-1-1- Description
I-1-1-2- L’importance du riz dans l’économie malgache
I-1-2- Le maïs
I-1-2-1- Le système de production
I-1-2-2- Les produits
I-2- Les tubercules
I-2-1- La pomme de terre
I-2-2- Le manioc
I-3- Les produits industriels
I-3-1- La canne à sucre
I-3-1-1- Les produits dérivés de la canne à sucre
I-3-1-2- Les rendements
I-3-2- Le coton
I-3-2-1- Les rendements
I-3-2-2- Les produits
I-4- Les produits d’exportation
I-4-1- Le litchis
I-4-2- La vanille
I-4-3- Le café
CHAPITRE II : ANALYSES FFOM
II-1- Analyses par filière
II-1-1- Les céréales
II-1-1-1- Le riz
II-1-1-1-1- Les forces
II-1-1-1-2- Les faiblesses
II-1-1-1-3- Les opportunités
II-1-1-1-4- Les menaces
II-1-1-2- Le maïs
II-1-1-2-1- Les forces
II-1-1-2-2- Les faiblesses
II-1-1-2-3- Les opportunités
II-1-1-2-4- Les menaces
II-1-2- Les tubercules
II-1-2-1- Le manioc
II-1-2-1-1- Les forces
II-1-2-1-2- Les faiblesses
II-1-2-1-3- Les opportunités
II-1-2-1-4- Les menaces
II-1-2-2- La pomme de terre
II-1-2-2-1- Les forces
II-1-2-2-2- Les faiblesses
II-1-2-2-3- Les opportunités
II-1-2-2-4- Les menaces
II-1-3- Les produits industriels
II-1-3-1- La canne à sucre
II-1-3-1-1- Les forces
II-1-3-1-2- Les faiblesses
II-1-3-1-3- Les opportunités
II-1-3-1-4- Les menaces
II-1-3-2- Le coton
II-1-3-2-1- Les forces
II-1-3-1-2- Les faiblesses
II-1-3-1-3- Les opportunités
II-1-3-1-4- Les menaces
II-1-4- Les cultures d’exportation
II-1-4-1- Le litchis
II-1-4-1-1- Les forces
II-1-4-1-2- Les faiblesses
II-1-4-1-3- Les opportunités
II-1-4-1-4- Les menaces
II-1-4-2- La vanille
II-1-4-2-1- Les forces
II-1-4-2-2- Les faiblesses
II-1-4-2-3- Les opportunités
II-1-4-2-4- Les menaces
II-1-4-3- Le café
II-1-4-3-1- Les forces
II-1-4-3-2- Les faiblesses
II-1-4-3-3- Les opportunités
II-1-4-3-4- Les menaces
II-2- Soulèvement des principaux problèmes
II-2-1-Sur le plan international
II-2-2- Pour le cas malgache
CHAPITRE III : RECOMMANDATIONS
III-1- La vulgarisation agricole
III-2- La maîtrise de l’eau
III-2-1- les stratégies
III-2-2- Le plan d’actions
III-3- La mécanisation agricole
III-4- L’instauration d’un régime foncier adapté
III-5- Le renforcement de la sécurité rurale
III-6- La prise en compte des dimensions environnementales
III-7- Le financement du monde rural
III-8- La mise en place des normes et qualités
CONCLUSION
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