Le secteur des dispositifs médicaux recouvre des produits très hétérogènes de par leur fonction, le risque potentiel qui leur est associé et leur coût. Plus de 2 millions de références sont actuellement commercialisées en France. Au niveau national, ce marché représente 30 milliards d’euros de chiffre d’affaire (1).
Le déploiement exponentiel des dispositifs médicaux sur le marché est notamment le reflet de progrès médicaux constants. En effet, nous avons assisté ces dernières années à des avancées technologiques telles que la chirurgie robotique et l’agrafage motorisé liées à une évolution des techniques opératoires. En 2012, le décret de la HAS relatif aux missions médico-économiques a mis en place l’évaluation de l’efficience pour les médicaments et dispositifs médicaux innovants (2). Concernant les dispositifs médicaux, l’obligation de produire une analyse médicoéconomique concerne seulement les produits ayant un impact budgétaire significatif et pour lesquels une amélioration majeure, importante ou modérée du service attendu est revendiquée par l’industriel (3).
Certains dispositifs particulièrement coûteux ou destinés à des pathologies rares sont inscrits sur une liste des prestations et produits remboursables et sont ainsi financés en sus des prestations d’hospitalisation.
En revanche, de nombreux dispositifs médicaux coûteux sont compris dans le tarif du GHS servant de base au remboursement des séjours hospitaliers, même si leur impact budgétaire peut s’avérer important. Il est classiquement rapporté que pour qu’un hôpital ne soit pas déficitaire pour la prise en charge d’un patient, les dépenses de produits pharmaceutiques utilisés pendant le séjour de ce patient ne doivent pas représenter plus de 15% du tarif du GHS. Ainsi, dans une optique de maîtrise des coûts hospitaliers, un établissement de santé se doit de réaliser des études médico-économiques pour évaluer la faisabilité économique d’une nouvelle technique chirurgicale ou de tout autre acte nécessitant l’utilisation de dispositifs médicaux coûteux. Ces études médico-économiques sont à ce jour peu développées pour les dispositifs médicaux comparativement aux médicaments car elles sont plus complexes à mettre en œuvre. Même si elles ne sont pas obligatoires pour l’ensemble des dispositifs médicaux, ces études tendent à être de plus en plus recherchées. Elles renforcent les négociations dans la détermination des prix avec l’industriel et jouent un rôle dans le processus de référencement des dispositifs médicaux en secteur hospitalier.
Rappels anatomiques et physiologiques du système respiratoire
Le système respiratoire a pour principale fonction l’oxygénation de l’organisme en fournissant parallèlement du dioxygène (O2) et en éliminant du dioxyde de carbone (CO2). Le poumon a également pour rôles d’assurer la régulation homéostatique du pH, de protéger l’organisme contre les pathogènes inhalés et contre les substances irritantes et de participer à la phonation (5).
Le système respiratoire peut être divisé en deux parties :
– Des voies aériennes supérieures : le nez, la bouche, le pharynx et le larynx. Elles ont pour rôle dans le système respiratoire, de filtrer, réchauffer et humidifier l’air ambiant inspiré.
– Des voies aériennes inférieures : la trachée, l’arbre bronchique, les poumons et les alvéoles pulmonaires.
La trachée donne naissance aux bronches souches, droite et gauche, qui pénètrent dans le poumon au niveau du hile pulmonaire. Ces bronches se subdivisent ensuite en bronches de deuxième génération ou bronches lobaires puis en bronches segmentaires et ainsi de suite jusqu’aux alvéoles pulmonaires. A partir de la 8ème génération, les bronches perdent leur cartilage : on parle de bronchioles. Les alvéoles apparaissent à partir de la 20ème génération dans la paroi des bronchioles. Elles ont une paroi mince, élastique et richement vascularisée permettant les échanges gazeux entre l’air et le sang. Elles représentent une surface d’environ 100 m2 . Une dilatation des alvéoles pulmonaires entraine une destruction de leur paroi élastique : on parle d’emphysème.
Les poumons sont au nombre de deux et sont asymétriques. Ils reposent sur le diaphragme, muscle de l’inspiration, sont séparés l’un de l’autre par le médiastin et sont protégés par la structure musculosquelettique du thorax. Leur poids moyen est de 650 g pour le poumon droit et de 550 g pour le poumon gauche. Ils ont une capacité totale d’environ 5 litres d’air. La surface externe du poumon et l’intérieur de la cavité thoracique sont recouverts de fines membranes qui sont respectivement la plèvre viscérale et la plèvre pariétale. La plèvre viscérale s’invagine dans le poumon au niveau des scissures. Il existe un espace virtuel entre ces deux membranes appelé cavité pleurale. Elle contient le liquide pleural qui permet aux deux membranes de glisser l’une contre l’autre sans se collaber. De ce fait, les poumons sont maintenus contre la paroi thoracique de façon étroite ce qui permet d’assurer les mouvements respiratoires. Il règne dans cette cavité pleurale une pression négative constamment inférieure à la pression atmosphérique permettant le maintien du poumon contre la paroi thoracique. Lors d’un traumatisme, d’un geste chirurgical ou d’une infection, il y a pénétration d’air ou de liquide au niveau de la plèvre. Il y a alors perte de cette pression négative, les pressions intra pleurale et atmosphérique sont équilibrées, le poumon se rétracte et devient alors inefficace. On parle d’épanchement pleural ou pneumothorax, d’épanchement liquidien ou pleurésie.
Chirurgie du poumon
Historique
La chirurgie thoracique est née entre la fin du XIX et le début du XXème siècle mais elle ne se distingue pas encore des autres chirurgies. Elle ne s’intéresse à cette époque qu’aux problèmes infectieux comme la tuberculose, aux infections de la cavité pleurale ou aux dilatations persistantes des bronches. En 1895, le Dr William Macewen réalise la première pneumonectomie en plusieurs interventions, afin de traiter une tuberculose sévère (9). La résection pulmonaire n’est alors pas encore pratiquée dans le cadre de tumeurs pulmonaires (10). C’est le Dr Davis qui réalisa la première lobectomie en 1912 : même si l’acte chirurgical fut un succès en lui-même, le patient décéda 8 jours plus tard d’un emphysème (11). En 1933, le Dr Graham réussit la première pneumonectomie en une seule chirurgie pour un cancer pulmonaire (12). En 1940, la comparaison des travaux des chirurgiens Overholt et Ochsner a mis en évidence la supériorité de la lobectomie qui présente moins de morbidité opératoire par rapport à la pneumonectomie (13). La lobectomie est donc adoptée quelques années plus tard comme traitement de référence dans le traitement du cancer pulmonaire à la place de la pneumonectomie. Les premières agrafeuses chirurgicales apparaissent dans les années 1960. C’est à partir de 1990 que la thoracoscopie se développe avec une chirurgie mini-invasive qui est moins lourde pour le patient.
Les différentes techniques chirurgicales de résection du poumon
Thoracotomie
Initialement, les chirurgiens accédaient aux poumons en sectionnant les côtes. Le rétracteur de côtes a rapidement été inventé pour pallier ce geste invasif : c’est ainsi qu’est née la thoracotomie (15). On procède donc à l’ouverture du thorax par une incision plus ou moins large qui se fait en fonction de la nature de la chirurgie, de la localisation de la tumeur et des habitudes du chirurgien. Cette technique nécessite, de sectionner les muscles, d’écarter les côtes et d’étirer les nerfs intercostaux ce qui peut engendrer des douleurs post-opératoires importantes, une augmentation de la durée de séjour, des risques de complications accrus et des séquelles esthétiques. Le patient se trouve sous anesthésie générale et dispose d’une intubation sélective c’est-à-dire une intubation trachéale avec ventilation uni-pulmonaire controlatérale.
Thoracoscopie
A la différence des thoracotomies, cette technique permet des résections pulmonaires par le biais d’incisions minimales via des trocarts, sans ouverture du thorax. On introduit ainsi au travers de ces incisions le thoracoscope (au niveau de la pointe de la scapula) et le matériel nécessaire à l’opération (19). Cette technique est recommandée en première intention pour les tumeurs de stade IA dans le CBNPC (20).
Le patient est en position de thoracotomie pour que la conversion puisse se faire facilement le cas échéant. Cette technique a montré des avantages par rapport à la thoracotomie (22)(23). La récupération post-opératoire est meilleure avec une diminution du taux d’infection de la cicatrice et un meilleur esthétisme. Il est également rapporté une diminution de la douleur associée à une meilleure fonction respiratoire en post-opératoire et à un temps de drainage plus court permettant un raccourcissement de la durée d’hospitalisation (24). De fait, cette technique commence à s’étendre aux stades II et IIIA, à la chirurgie des métastases ainsi qu’aux pathologies pulmonaires bénignes (25). Certains chirurgiens ont commencé à diminuer le nombre d’incisions dans ce type de chirurgie dans le but d’être le moins invasifs possible et d’avoir une meilleure récupération post-opératoire. On tend donc à la chirurgie thoracoscopique vidéo-assistée uniportale qui regroupe la caméra et les instruments opératoires au niveau d’une seule et même incision.
Cette technique réduirait le taux de complications, la durée de séjour et potentiellement la douleur du patient en diminuant le nombre de nerfs intercostaux lésés. Pour le moment, cette technique n’est pas encore utilisée pour le cancer du poumon car la qualité oncologique de la résection pulmonaire n’a pas été démontrée (26).
La chirurgie robotique
L’assistance robotique permet la réalisation de mouvements précis et fins grâce à une vision en trois dimensions (versus deux dimensions pour la vidéo-thoracoscopie standard). Le confort du chirurgien opérateur est amélioré car celui-ci a l’avantage d’opérer assis et sans habillage stérile. Les bras robotiques disposent de 7 degrés de liberté permettant la correction des tremblements et la réalisation de l’ensemble des mouvements dans un espace restreint à l’environnement proche du site opératoire. Il y a par conséquent une limitation dans le mouvement des trocarts dans l’espace intercostal diminuant les douleurs post-opératoires (27). La technique est cependant logistiquement lourde et implique la présence constante d’un chirurgien assistant supplémentaire habillé stérilement pour manipuler certains instruments non encore utilisables par les bras robotiques comme certaines agrafeuses. Cette technique impose une formation du corps médical et paramédical pour la partie technique à proprement parler : l’instrumentation du robot chirurgical, l’habillage particulier des bras robotiques, le déplacement de la machine mais également pour les protocoles d’urgence à mettre en place. En effet, dans le cas de plaie vasculaire majeure, le chirurgien opérateur est loin du patient et n’est pas habillé stérilement, nécessitant l’intervention de personnels formés.
Un autre inconvénient avec le robot, est qu’il manque au chirurgien « un retour de force » lors de la dissection qui peut être responsable de complications (28). De plus, la chirurgie robotique représente un investissement important pour un établissement, qui nécessite une utilisation partagée entre plusieurs spécialités chirurgicales ce qui rend l’accès plus difficile. Il y a donc un frein non négligeable à la progression des opérateurs et de leurs équipes à cette technique (29).
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Table des matières
Table des matières
LISTE DES ABREVIATIONS
INTRODUCTION
PARTIE 1 : GENERALITES
I. Rappels anatomiques et physiologiques du système respiratoire
II. Chirurgie du poumon
A. Historique
B. Les différentes techniques chirurgicales de résection du poumon
1. Thoracotomie
2. Thoracoscopie
3. La chirurgie robotique
III. Indications de la chirurgie du poumon (segmentectomies / lobectomies)
IV. Prise en charge d’un patient en chirurgie thoracique : place de l’agrafage dans la
chirurgie mini-invasive d’exérèse pulmonaire
A. Bilan préopératoire
B. Intervention chirurgicale : lobectomie/segmentectomie par thoracoscopie vidéoassistée
1. Installation
2. Exérèse pulmonaire
3. Extraction de la pièce opératoire
4. Curage ganglionnaire
5. Mise en place du drain thoracique
6. Vérification et suture
7. Salle de réveil
C. Suivi post-opératoire
1. Immédiat
2. Drainage thoracique
3. Gestion de la douleur en post-opératoire
4. Récupération Améliorée Après Chirurgie
5. Prise en charge globale
6. Suivi post-opératoire différé
V. Cancer bronchique
A. Epidémiologie
B. Stades
C. Place de la chirurgie thoracique dans le traitement du cancer bronchique
1. Stade I et II
2. Stade III
3. Stade IV
4. Synthèse
VI. Dispositifs médicaux et vigilances
A. Les dispositifs médicaux : définition et classification
B. La matériovigilance
C. Les acteurs de la matériovigilance
1. L’ANSM
2. Le CLMV
3. Les fabricants
D. Circuits de signalement des matériovigilances dans un établissement de santé
1. Alertes ascendantes
2. Alertes descendantes
E. Organisation de la matériovigilance au sein de l’AP-HM
VII. Aspect médico-économique
PARTIE 2 : ETUDES ET RESULTATS
I. Contexte
II. Etude du stock immobilisé
A. Objectif
B. Matériel et Méthode
C. Résultats
D. Discussion
III. Comparaison du coût par intervention pour deux gammes de dispositifs médicaux
d’agrafage
A. Objectifs
B. Matériel et Méthode
1. Type d’étude et sélection des patients
2. Recueil de données
3. Etude médico-économique
4. Analyse statistique
C. Résultats
1. Description de la population étudiée
2. Résultats péri-opératoires
3. Analyse de minimisation des coûts
4. Complications chirurgicales
D. Discussion
IV. Etude des déclarations de matériovigilance concernant les dispositifs médicaux
d’agrafage
A. Objectif
B. Matériel et Méthode
C. Résultats
D. Discussion
SYNTHESE ET CONCLUSION
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES ET GRAPHIQUES
LISTE DES ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
SERMENT DE GALIEN
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