L’adolescence, une période de construction identitaire et sociale
« L’adolescence est une période mouvementée en raison des nombreux changements et des diverses tâches développementales à réaliser » (Valleur et Matysiak, 2002). « C’est une période où les ressources individuelles sont mises en doute, entre autres, parce que les compétences sociales de l’adolescent le rendent plus vulnérable à certains contextes relationnels à un moment et où le besoin de s’identifier et d’appartenir à un groupe de pairs est primordial » (Mazet, 2004). Le processus de socialisation à cet âge peut donc entraîner d’importantes répercussions, positives ou négatives, sur le développement ultérieur de l’adolescent (Claes, 2003). Pour la grande majorité des jeunes, les changements survenus en période d’adolescence peuvent influer d’une part sur leur développement individuel et social et d’autre part sur leur comportement de consommation .
Le concept d’adolescence
« C’est un adolescent ! », « Je serai bientôt un adolescent ! », « Les crises de l’adolescence » : les termes d’adolescence et d’adolescent sont employés partout comme une évidence, une clé de compréhension de la jeunesse d’aujourd’hui. L’adolescence était toujours conçue comme un moment de « crise » dont les fondements étaient physiologiques (la maturation sexuelle) et psychologiques (Galland, 2010).
Ce débat social, se distinguant de plus en plus nettement, sur les plans sociologique et culturel, des âges qui l’encadrent : enfance et jeunesse plus avancée. L’enfant reste sous la dépendance presque complète des parents, qu’elle soit psychologique, affective ou matérielle. « Ce jeune adulte expérimente plusieurs formes de semi-indépendance, alliant une grande autonomie de la vie personnelle et des attributs incomplets de l’indépendance économique » (Galland, 2010).
Émergence du concept d’adolescence
L’adolescence est, selon Breton et Marcelli (2010), Cloutier et Drapeau (2008), Coslin (2002), un concept apparu dans la langue française entre les XIII et XIV siècles. Issu du verbe latin « adolescere », il signifie : « Ad : vers », « oléscère : grandir » et plus précisément de son participe présent (Cloutier et Drapeau, 2008). L’origine du terme « adolescence » est romaine : adelescens signifie « est entrain de grandir » et adultus « a fini de grandir » (Fosse Gomez, 1991). Cette tranche d’âge fut longtemps considérée comme une période creuse, un moment de latence et de transition entre l’enfance et les débuts de l’âge adulte. Les historiens ont longtemps considéré que ce n’est qu’avec l’émergence de la famille moderne qu’on a commencé à prendre en compte l’adolescence comme un âge de la vie et d’acquisition de la personnalité et d’individuation. Selon Davis Le Breton (2013), cette période de transition suppose une prise de distance à l’égard des parents, voire une sorte de séparation et c’est bien au cours de cette phase cruciale que se forme, comme disait Françoise Dolto, « l’image inconsciente de son corps ». En 1872, Le Littré définit l’adolescence comme « l’âge qui succède à l’enfance et qui commence avec les premiers signes de la puberté » et Le Grand Dictionnaire Larousse, en 1866, la situe entre 14 et 20 ans comme étant « circonscrite entre deux limites précises, la puberté et l’arrêt définitif de la croissance en hauteur qui continue après la manifestation des facultés génératrices » . Ces définitions montrent que la notion de l’adolescence est fortement associée à un événement physiologique qu’est la puberté, mais peut être également abordée sous différents champs disciplinaires.
Différentes acceptions de l’adolescence
Il apparaît dans la littérature que la définition de l’adolescence n’est pas consensuelle. Les définitions varient selon que l’on se positionne dans une perspective psychologique, sociologique ou biologique (Cloutier, 1982). Dans la documentation, différentes approches définissent le concept de l’adolescence, d’où la multitude de définitions.
L’adolescence : un temps de transition et de mutation
Selon Rice et Dolgin (2005) : « L’adolescence est une période de transition graduelle et incertaine en raison des nombreux changements physiques, biologiques, psychologiques et sociaux qui influencent le développement de la personne ». En psychologie, cette période correspond au passage de la phase de l’enfance à celle des adultes, se caractérisant par d’importantes transformations somatiques et par une poussée instinctuelle rapprochant l’enfant de l’adulte sur le plan physique (Coslin, 2003). L’enfant n’est plus un enfant, mais il n’est pas encore un adulte. C’est bien une phase de transition débutant avec la puberté et se poursuivant plus ou moins longtemps, selon l’époque et la culture (Coslin, 2006). D’un point de vue social, des changements diversifiés et intenses accompagnent cette période et bouleversent l’équilibre interne du sujet. Ces transitions engendrent souvent des transgressions et des ruptures avec les images parentales auparavant considérées comme structurantes pour le jeune adolescent et qui ne suffisent plus à son actuel développement. D’où le besoin d’appartenance et d’affiliation sociales.
À ce propos, Édith (2008) ajoute que « l’adolescence est une étape de vie qui se passe rarement sans remous : elle bouleverse les habitudes, les vécus et les représentations de soi instaurés depuis l’enfance, aussi bien chez les jeunes eux mêmes que chez les parents, l’entourage familial élargi et le réseau social. Ces bouleversements s’accompagnent parfois de souffrances, de troubles psychologiques voire psychiatriques ou de désordres sociaux ».
La définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) fait état des aspects biologiques, sociaux et psychologiques inhérents qui marquent l’être humain. En effet, selon l’OMS l’adolescence se définit comme : « la progression entre l’apparition de caractéristiques sexuelles secondaires (puberté) et la maturité sexuelle et génétique, le développement de mécanismes mentaux adultes et d’une identité d’adulte et la transition entre une entière dépendance socioéconomique et une relative indépendance ». De leur côté, les Nations unies (1987) définissent l’adolescence comme « a state or process of growing up » (un état ou un processus de croissance) et comme « a period of life from puberty to maturity » (une période de la vie allant de la puberté à la maturité) (Delaunay, 1994). Cette définition, tout comme celles qui précèdent, n’a pas précisément eu recours au critère de l’âge pour définir l’adolescence.
L’adolescence comme un parcours dynamique et un temps de crise
Selon cette optique, l’adolescence est appréhendée comme étant le reniement de l’enfance d’une part et la recherche du statut d’adulte d’autre part. Ce dilemme que vit l’adolescent provoque chez lui des « crises » et des conflits se situant tout au long du « processus psychique ». Ces conflits se manifestent à différents niveaux : indépendance vis-à-vis des parents, nouveau rapport au corps, changements de morphologie du fait de l’apparition des caractères sexuels secondaires, deuil des objets infantiles, tendances au repli narcissique ou alors des questionnements sur l’identité . Pellizzari (2010) a décrit cette phase de l’adolescence comme « le cœur même de la vie de l’homme », car elle constitue ce « détachement inaugural, qui donne origine à l’histoire et la rend représentable ». Il sépare ainsi l’enfance et l’adolescence comme étant deux périodes séparées par un « saut ». De son côté, Delaroche (2002) voit l’adolescence comme un temps de crise et un moment temporaire de substitutions rapides remettant en cause les équilibres physiques et psychologiques et les substitutions concernant tant le caractère, l’humeur et le comportement que les intérêts du jeune. Il décrit le passage à l’adolescence comme un mélange entre la découverte du monde des adultes et la nostalgie de l’enfance qu’il doit quitter.
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Table des matières
Introduction générale
Problématique
Questions de recherche
Intérêt de la recherche
Chapitre 1 : L’adolescence, une période de construction identitaire et sociale
Introduction
Section 1. Le concept d’adolescence
1. Émergence du concept d’adolescence
2. Différentes acceptions de l’adolescence
3. Les étapes de l’adolescence
4. L’adolescence à travers différentes disciplines
Section 2 : Processus et facteurs de socialisation de l’adolescent
1. La socialisation
Section 3 : La socialisation à la consommation
1. Définition de la consommation
2. La consommation des adolescents d’aujourd’hui
3. Le modèle de socialisation du jeune consommateur
Conclusion
Chapitre 2 : Contextes d’usage des objets connectés chez les adolescents
Introduction
Section 1. Les pratiques numériques des jeunes adolescents
Section 2. Les objets connectés
1. Définitions des objets connectés
2. Typologie des objets connectés
Section 4. Les adolescents et le Smartphone
1. L’objet smartphone : historique et caractéristiques
2. Adolescents et Smartphones
Conclusion
Chapitre 3 : La publicité en ligne et ses différentes formes
Introduction
Section 1 : La publicité
Section 2 : La publicité sur Internet
1. Les segments de marché de la publicité sur Internet
2. Les formats de la publicité en ligne
Section 3 : La publicité mobile
1. La publicité mobile : Origines et historiques
2. Définitions
3. L’attitude du consommateur adolescent à l’égard de la publicité mobile
Conclusion
Chapitre 4 : La personnalisation et le non-respect de la vie privée comme antécédents de l’intrusion publicitaire perçue
Introduction
Section 1 : La personnalisation
1. Définitions
2. Le concept de la personnalisation dans un contexte mobile
3. Les techniques de la personnalisation
Conclusion
Section 2 : La vie privée
1. Le Règlement Général sur la Protection des Données personnelles (RGPD)
2. Définition de la vie privée
3. Le respect de la vie privée et le degré de préoccupation de ce droit
Section 3 : L’intrusion publicitaire
1. Définitions
2. Les caractéristiques et les spécificités des publicités intrusives sur Internet
Conclusion
Chapitre 5 : La résistance du consommateur adolescent comme conséquence de l’intrusion publicitaire perçue sur Internet
Introduction
Section 1 : L’origine du concept de la résistance
Section 2 : Le cadre théorique du concept de la résistance
1. Les antécédents psychologiques de la résistance du jeune consommateur
2. Les modèles de base de la résistance du consommateur
3. Les travaux ayant traité la résistance à une cible spécifique
4. Les différentes manifestations de la résistance
5. Les types de la résistance
6. Axes de recherches sur la résistance à la publicité
7. Les conséquences de la résistance à la publicité
Conclusion
Chapitre 6 : Concepts environnant la relation du consommateur à la marque
Introduction
Section 1 : La notion de la relation à la marque
1. Origines du concept de la marque
2. Définition de la marque/ du « brand »
Section 2 : Les dimensions de la relation des consommateurs à la marque
1. La relation calculée
2. La relation affective
3. La confiance à la marque
4. L’attachement affectif à la marque
5. La fidélité à la marque
6. La relation sociale
Section 3 : La valorisation de l’individu au travers de sa consommation
1. La marque en réponse aux envies et appétences sociales de l’individu
2. Médiatisation publicitaire et sociale des marques
3. La marque comme symbole de la classe sociale
Conclusion générale