L’accès psychotique aigu

L’accès psychotique aigu

Généralités sur l’accès psychotique aigu

Historique

Le XIX siècle, par un grand travail de systématisation clinique était le siècle du délire chronique. L’histoire des délires aigus avait commencé dans les vingt ans précédant le début du XX siècle, en France, avec Magnan et Legrain.
« Magnan » isolait les «délires polymorphes des dégénérés» en 1893 (14, 15). Ensuite, « Legrain » introduisait la notion de «délires d’emblée avec hallucinations» en 1894. Ces délires s’opposent, par leur évolution intermittente voire leur accès unique, aux délires chroniques à évolution systématique.
Différents auteurs français ont décrit ces troubles aigus sous forme des appellations variées reflétant des variations sémiologiques, mais ayant une évolutivité semblable à celle décrite par Magnan :
– En 1895, »Chaslin » (16) a décrit la « confusion mentale Primitive » qui englobe en partie les délires dégénératifs aigus.
– « Westphal » en 1878, puis « Seglas » (17) en 1895 ont parlé de » paranoïa aigue ».
– Gilbert ballet en 1910, a développé les « psychoses hallucinatoires aigues ».
– Dupré et Logre (18), en 1914, ont décrit les « psychoses imaginatives » qu’ils assimilent aux « Bouffées Délirantes Aigues » (BDA).
-« Valence » (19), en 1927, a introduit la notion de » psychose interprétative aigue curable »;
– En 1972, « Halberstadt » (20) a parlé de la « psychose délirante dégénérative aigue ».
Après Bleuler, Kraepelin (après 1913) et Schneider situent ces entités dans le cadre de la schizophrénie en utilisant le terme de « schizophrénie aigue ».
C’est avec « Henri Ey » (21), à partir de 1945 (après la seconde guerre mondiale) que la bouffée délirante réapparaît au devant de la scène sémiologique. Il lui donne alors une unité psychopathologique, et une autonomie nosographique.
Cependant, à l’étranger, la description d’états psychotiques aigus non réductibles à la schizophrénie ou au trouble bipolaire a été faite sous des appellations différentes (22):
– Langfelt a décrit les « psychoses schizophréniformes » en 1939.
– Kasanin a crée le terme de « psychoses schizoaffectives » en 1933.
– Wimmer, a décrit de « psychoses psychogéniques » en 1928 s’inspirant de la « psychose réactionnelle » introduite par Jaspers en 1913.
– Leonhardt, dans les années soixante du 20ème siècle a développé les « psychoses cycloïdes ».
A la fin des années quatre vingt du siècle précédant, la bouffée délirante aigue de Magnan a été l’objet d’une tentative de formalisation en critères par Pull et Pichot (23) :
– Age de début: entre 20 et 40 ans.
– Début: toujours aigu, sans antécédent psychiatrique sauf épisode identique.
– Absence de chronocité: les phases actives disparaissent complètement en quelques semaines ou mois, avec des rechutes possibles sous la même forme, mais sans anomalie dans l’intervalle qui sépare deux épisodes.
– Caractéristiques symptomatiques: la symptomatologie est polymorphe; délire polymorphe non systématisé et/ou hallucinations de n’importe quel type; dépersonnalisation ou déréalisation avec ou sans confusion; humeur anormale (dépression ou euphorie); les symptômes varient de jour en jour et même d’heure en heure.
– Diagnostic différentiel: les troubles ne sont pas secondaires à une affection organique, à un alcoolisme ou à une toxicomanie.
L’organisation mondiale de la santé a publié, en 1979, la 9ème édition de la classification internationale des maladies (CIM-9) (24) où figuraient les psychoses délirantes aigues dans la catégorie (0298) « Autres psychoses non organiques » qui comprend:
? (298-3): les bouffées délirantes ainsi décrites états délirants provoqués apparemment par un bouleversement émotionnel;
? (298-4): les psychoses délirantes psychogènes qui ne se différencient des BDA que par une durée plus prolongée;
? (298-8): les psychoses réactionnelles autres et non précisées: les psychoses hystériques, et psychogènes.
La première mention des psychoses délirantes aigues dans la classification nosographique américaine apparaît dans le DSM-III (3° version du Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders, 1980) (25). On y trouve la place de la BDA dans différentes rubriques:
? les « troubles schizophréniformes » (295-40) dont les critères diagnostiques correspondent à celles de la schizophrénie sauf la durée qui doit être supérieur à 2 semaines et inférieur à 6 mois, présentant la parenté la plus étroite avec la BDA;
? la « psychose réactionnelle brève » (298-80);
? la « psychose atypique » (298-90) et le » trouble schizo-affectif » (295-70).
Par ailleurs, le terme de psychose aigue ou BDA ne figurent plus dans les deux classifications psychiatriques internationales: la CIM-10 (10èmeversion de la classification internationale des maladies, 1992) (2) et le DSM –VI (4 version du Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders, 1996) (8).
Ces deux classifications abordent la question des psychoses délirantes sous des rubriques différentes.
La CIM-10 isole le groupe des troubles psychotiques et transitoires, tout en reconnaissant que «les données empiriques ne permettent pas de proposer une classification définitive des troubles psychotiques aigus». Trois critères sont retenus pour spécifier ces troubles:
? le caractère aigu de la survenue des troubles (en moins de 2 semaines),
? la présence ou non de syndromes typiques (manifestations psychotiques et émotionnelles polymorphes ou des symptômes schizophréniques),
? la présence ou non de facteur aigu de stress (c’est à dire un événement stressant survenu une ou deux semaines avant le début des troubles).
Cette catégorie, codée F23.x, est elle même subdivisée en six entités dont les principales sont:
– (F23.0) «Trouble psychotique aigu polymorphe, sans symptômes schizophréniques», caractérisé par le polymorphisme et l’instabilité du tableau clinique, auxquels s’ajoute fréquemment, un bouleversement émotionnel.
– (F23.1) «Trouble psychotique aigu polymorphe, avec symptômes schizophréniques»,retenu lorsque certains symptômes typiquement schizophréniques sont présents la plupart du temps, sans toutefois persister au delà d’un mois.
– (F23.2) «Trouble psychotique aigu d’allure schizophrénique», retenu en l’absence de des caractéristiques polymorphes et instables du premier tableau et lorsque des symptômes psychotiques sont relativement stables, sans toutefois persister plus d’un mois.
– (F23.3) «Autre Trouble psychotique aigu, essentiellement délirant», définit par la présence au premier plan d’idées délirantes ou d’hallucination relativement stables et pouvant persister jusqu’à trois mois.
Dans cette classification, la description en 6 entités distinctes n’est finalement pas d’un grand apport pour dégager des formes évolutives bien différenciées.
Le DSM-VI (8) retient, dans une catégorie intitulée » Schizophrénie et autres troubles psychotiques », deux troubles psychotiques aigus:
? Le » trouble psychotique bref », défini par trois critères:
? la présence de symptômes psychotiques (délire, hallucinations, discours ou comportement désorganisé),
? leur durée variant de 1jour à 1mois,
? des critères d’exclusion psychiatriques et organiques.
Un critère additionnel précise la présence ou non de facteurs déclenchants.
? Le « trouble schizophréniforme », défini par deux critères:
? la présence de symptôme schizophrénique (idées délirantes, hallucinations, discours ou comportement désorganisé, symptômes négatifs) et l’exclusion d’un trouble de l’humeur, d’un trouble schizoaffectif ou d’un trouble organique,
? une durée allant de 1à 6 mois.
La classification propose également de spécifier la présence ou l’absence de caractères de bon pronostic permettant ou non de prévoir une évolution favorable, autre que vers la schizophrénie.
Dans cette classification, ces troubles psychotiques sont essentiellement identifiés sur la base de leur durée. En faisant une distinction purement quantitative et temporelle, le DSM IV démontre des capacités pronostiques nulles.
En 2000, est paru le DSM IV révisé (DSM IV-TR) (26) qui ne comporte aucune différence, concernant la classification des psychoses aigues, par rapport à l’ancienne édition.

Description clinique

Les « APA » ou « BDA » se caractérisent par l’apparition soudaine d’un délire riche et polymorphe, procédant d’altérations de perception, d’intuitions subites, de distorsions de jugement et de débordements imaginaires, entraînant un bouleversement profond mais transitoire du fonctionnement psychique et des relations du sujet avec le monde extérieur.

Circonstances de découverte:

Les états psychotiques aigus surviennent surtout chez des sujets jeunes, à la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte, généralement entre 20 à 35ans (27) et chez lesquels on retrouve volontiers une hérédité psychopathologique chargée ou un caractère psychopathologique (28).
Le début est généralement brusque et subit. Il s’agit d’un délire d’emblée « il jaillit violemment avec l’instantanéité d’une inspiration »écrit Magnan (14). Ce « coup de tonnerre dans un ciel serein » a pu être précédé d’une phase prodromique marquée par une anxiété, une labilité thymique, des comportements insolites et des perturbations du sommeil qui ne récupèrent qu’à posteriori leur signification inaugurale. Dans tous les cas, l’entrée dans le délire marque une rupture entre un avant et un après.

L’expérience délirante

« Véritable signe d’alarme de la psychose, le délire indique la fissuration du moi »(Henri Ey) (29).
Le délire est polymorphe, c’est-à-dire polythématique et mettant en oeuvre tous les mécanismes délirants. Les thèmes et mécanismes peuvent se succéder au cours de l’épisode ou au cours d’une même journée.
Les thèmes sont polymorphes, multiples et variables, on y trouve aussi bien des idées de persécution que des idées de grandeur, des idées de transformation de soi ou du monde, ou des idées d’influence ou de possession.
Tous les mécanismes délirants peuvent y être retrouvés. Il existe, la plupart du temps, des hallucinations psychiques, parfois aussi des hallucinations psychosensoriels souvent auditives mais aussi cénesthésiques ou visuelles auxquelles s’ajoutent des interprétations délirantes, des phénomènes imaginatifs ou intuitifs.
L’automatisme mental est toujours présent, il s’agit d’une mécanisation et d’une perte d’intimité de la pensée: les idées, les intentions, les actes sont devinés, répétés, commentés ou imposés.
Le délire est mal systématisé, ce caractère « protéiforme » (Legrain) fait toute son originalité. Il est fortement vécu, entraînant un bouleversement incoercible de soi et du monde extérieur. Le sujet se sent transformé: transformation de son propre corps et de son esprit (dépersonnalisation), et transformation du monde ambiant voire de l’univers (déréalisation).

Le désordre thymique

La participation thymique est fréquente; l’humeur très labile subit les fluctuations du délire, passant ainsi d’une tristesse à l’exaltation, parfois en quelques minutes. L’angoisse est presque toujours présente (30, 31).

L’altération de la conscience

Le niveau de la conscience est habituellement normal mais peut être altéré de manière fluctuante qualitativement (32,33). Il n’y a pas de désorientation temporo- spatiale, mais plutôt une dispersion de l’attention, le sujet étant captivé par ses productions délirantes, il perçoit le monde extérieur d’une manière floue dans une atmosphère onirique et crépusculaire. Il s’agit donc d’un état de conscience parasite par l’efflorescence délirante (34).

Troubles du comportement

En fonction des représentations imaginaires, le passage se fait rapidement de l’agitation à la stupeur, de la loquacité au mutisme. Il y a donc un risque majeur de passage à l’acte agressif ou suicidaire, avec risque d’actions médico-légales (vols, fugues, conduites dangereuses, agression…).

L’état somatique

Les troubles du sommeil et en particulier l’insomnie sont d’une grande fréquence (28, 31, 33). L’examen somatique, indispensable, est le plus souvent normal (33,34). Ainsi un bilan biologique, pratiqué dès que possible, est en règle normal en dehors d’une déshydratation, fréquente si l’agitation est importante. Aucun examen complémentaire n’apporte de contribution à l’établissement du diagnostic (31).

L’état pré morbide

Les données anamnestiques, permettant parfois de mettre en avant certaines distorsions de la personnalité (30, 35), restent encore discutées. Par ailleurs, sont parfois mis en avant des facteurs réputés déclenchants ou favorisants et dont la présence a valeur de bon pronostic (36).
On peut citer:changements de mode de vie, expériences de pertes et de séparations, problèmes relationnels et affectifs ou prise de toxiques. Pour retenir la responsabilité de tels facteurs, il faut que la survenue de l’APA se produise à court terme par rapport à l’agent déclenchant (28, 37).

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODE
I- Matériels de l’étude
1- Type de l’étude
2- Population étudiée
3- Fiche d’exploitation
II- Méthode statistique
RESULTATS
I- Analyse descriptive
1- Prévalence de l’accès psychotique aigu dans le service universitaire psychiatrique
2- Caractéristiques sociodémographiques des patients
3- Antécédents psychiatriques et habitudes toxiques
4- Caractéristiques cliniques et thérapeutiques de l’accès psychotique aigu dans la population étudiée
5- Aspects évolutifs de l’accès psychotique aigu dans la population étudiée
II- Analyse bivariée
1- Corrélation entre la consommation de cannabis et les caractéristiques de la population étudiée
2- Corrélation entre les modalités évolutives de l’APA et les caractéristiques de la population étudiée
DISCUSSION
I- Généralités sur l’accès psychotique aigu
1- Historique
2- Description clinique
3- Diagnostic différentiel
4- Diagnostic étiologique
5- Evolution et critères pronostiques
6- Vulnérabilité à la schizophrénie
7- Thérapeutique
II- Discussion des résultats
1- Discussion des caractéristiques sociodémographiques
2- Discussion des antécédents psychiatriques et des habitudes toxiques des patients
3- Comparaison des caractéristiques épidémiologiques, cliniques, thérapeutiques et évolutives de l’accès psychotique aigu
4- Profil des patients consommateurs du cannabis
5- Etude des éléments sémiologiques prédictifs de l’évolution de l’APA
CONCLUSION
ANNEXES
RESUMES
BIBLIOGRAPHIE

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