L’absence d’enseignements artistiques et culturels
Célestin
Freinet (1896-1966) – « L’école de demain sera centrée sur l’enfant ou ne sera pas » Instituteur français, il entreprend une réelle innovation en matière éducative grâce à la création de toute une série d’outils et de techniques : l’introduction de l’imprimerie à l’école, le journal de classe, la correspondance inter-scolaire, le texte libre, les cercles de parole, le plan de travail individuel, etc. ; nombre d’outils qui sont aujourd’hui présents dans les classes traditionnelles. A travers sa pédagogie, Freinet défend une méthode naturelle reposant sur l’expérience et favorisant alors le développement harmonieux de l’individu. En effet, il cherche à privilégier l’activité de l’enfant et non la prestation du maître. Il valorise ainsi la démarche par tâtonnement expérimental : face à un problème à résoudre, l’enfant va émettre des hypothèses qu’il va tester, vérifier. Si l’effet recherché est obtenu, l’enfant intègre la réponse qu’il pourra réinvestir et transférer à d’autres situations. Si l’effet recherché n’est pas obtenu, l’enfant rejette son hypothèse pour en élaborer une nouvelle qui donnera lieu à de nouveaux essais jusqu’à l’aboutissement. Par cette démarche, l’enfant construit ses propres savoirs ; l’erreur étant alors considérée comme un moyen d’accès à la connaissance. L’éducateur, quant à lui, est là pour aider l’enfant à faire ses expériences en lui fournissant l’espace, le matériel et en l’incitant à adopter une attitude de recherche.
Maria Montessori (1870-1952) – « Aide-moi à faire tout seul » Première femme médecin en Italie, Maria Montessori s’intéresse très vite aux malades les plus défavorisés : des enfants que l’on qualifiait à l’époque de « débiles » ou « d’arriérés ». Elle tente alors de leur apprendre quelques connaissances. Mais devant la difficulté, elle met au point des outils adaptés pour les aider ; elle obtient des résultats miraculeux et décide de généraliser sa méthode. Elle crée ainsi du matériel sensoriel dont les enfants usent librement et par lequel ils construisent leurs savoirs. Elle est en effet la seule à avoir mis l’accent sur le développement des sens : par le maniement d’un matériel pédagogique adapté, l’enfant apprend par l’intermédiaire de ses sens à ordonner, à classifier et à comprendre le monde qui l’entoure. Elle défendra également l’importance du milieu qui doit être stimulant et répondre aux besoins naturels de l’enfant ; des besoins qui résultent directement de périodes sensibles (nous développerons cette notion ultérieurement).
Enfin, le rôle de l’enseignant, qu’elle préfère nommer « éducateur », est bien différent d’un enseignant d’une école traditionnelle. En effet, son rôle n’est pas d’exposer les connaissances ou de mettre en place un exercice visant le développement d’une compétence particulière, mais d’assister l’élève dans l’élaboration de celle-ci afin de répondre à cette fameuse devise : « aide-moi à faire tout seul ». L’éducateur est donc là pour accompagner, guider l’enfant dans ses démarches tout en respectant son développement naturel.
John Dewey (1859-1952) – « Learning by doing » Ce philosophe américain crée son école-laboratoire en 1896 à Chicago. Avec l’aide de médecins, de psychologues, il expérimente ses théories pédagogiques dans l’optique de réformer l’éducation. Selon lui, l’école doit répondre à la curiosité naturelle de l’enfant et l’apprentissage doit découler d’activités qui l’intéressent. Il émet également l’idée que l’élève apprend en agissant, non en écoutant ; c’est pourquoi les travaux manuels doivent remplacer les exercices imposés. Il préconise également la mise en place de projets afin de donner du sens à l’action et refuse ainsi le cloisonnement des disciplines. Selon lui, le projet amène de l’intérêt et mobilise davantage l’enfant qui est alors motivé. Enfin, John Dewey est très soucieux de la dimension sociale de l’école qui devient alors une société en miniature. Les élèves collaborent et s’entraident. La discipline à laquelle ils doivent se plier n’est pas perçue comme une règle imposée du dehors mais comme un moyen de faciliter le travail collectif.
Ovide Decroly (1871-1932) – « L’école pour la vie, par la vie »
Ce pédagogue belge, médecin de formation, axera sa pédagogie sur les intérêts de l’enfant. En effet, il affirme que « l’intérêt est le levier par excellence du développement de l’enfant »5. Les connaissances à acquérir sont organisées par thèmes et dispensées au sein d’ateliers qui laissent une grande place aux jeux éducatifs et à la pratique. En respectant ainsi les centres d’intérêt, on entretient la motivation des élèves. Comme Maria Montessori, Ovide Decroly est partisan d’un enseignement individualisé afin de respecter le développement naturel de chaque enfant. Enfin, un des buts de l’éducation pour ce pédagogue est l’adaptation de l’enfant à la vie sociale : la classe est alors un microcosme démocratique où les élèves apprennent et prennent conscience de leurs droits, de leurs obligations et de leurs devoirs.
Biographie de Maria Montessori
Maria Montessori est née le 31 août 1870 en Italie et est issue d’une famille bourgeoise catholique. Très vite, elle montre un certain engouement pour la science et la recherche. Elle obtient un diplôme technique d’ingénieur en 1886. Ses parents s’opposent aux ambitions académiques de leur fille ; pourtant, elle poursuit vaillamment sa quête du monde scientifique. Dix ans plus tard, elle devient la première femme médecin d’Italie malgré les réticences affirmées de ses parents et des professionnels qui l’entourent. En effet, une telle réussite pour une femme était très mal perçue à cette époque. Une fois diplômée de médecine, elle entreprend des études de biologie, philosophie et psychologie. Puis, nommée assistante à la clinique psychiatrique de Rome, elle s’occupe d’enfants arriérés alors considérés comme des handicapés mentaux. Très vite, elle comprend que les problèmes de ces enfants ne sont pas uniquement médicaux mais également d’ordre éducatif et environnemental. Elle commence alors ses premières conférences sur l’éducation des enfants handicapés en 1897 puis elle se lance dans la recherche. En 1899, elle crée une école d’orthophrénie où sont accueillis peu à peu tous les enfants déficients de Rome qui étaient jusque-là « parqués dans des salles sans activité ni objet autour d’eux »11. C’est dans cette école que la doctoresse expérimentera les principes qui fondent sa pédagogie telle qu’on la connaît aujourd’hui. En 1901, elle poursuit ses recherches dans la compréhension des mécanismes d’apprentissage tout en s’inspirant des travaux des médecins français Jean Itard (1774-1838) et Edouard Seguin (1812-1880). Jean Itard a été rendu célèbre par ses travaux sur la surdité et sur l’éducation de l’enfant sauvage de l’Aveyron, Victor.
Malgré les soins prodigués par ce médecin, le peu de progrès fait par l’enfant, élevé hors de toute culture et de toute socialisation, avait amené Jean Itard à penser que le développement des enfants passe par des stades (que Maria Montessori appellera par la suite les « périodes sensibles »). Il démontrera leur importance en émettant l’idée qu’il est capital de ne pas laisser passer ces stades faute de quoi certaines acquisitions ne se font plus. Édouard Seguin, élève de Jean Itard, prolongera les recherches de son maître sur l’enfant sauvage et mettra au point des méthodes et du matériel d’enseignement pour les enfants déficients. C’est sur la base des travaux des deux médecins français que Maria Montessori élabore des méthodes d’enseignement pour les enfants déficients, notamment en lecture et en écriture. Ses méthodes se révèlent très efficaces et éveillent en elle son intérêt pour le développement des enfants en bonne santé : « j’étais de jour en jour plus convaincue que nos méthodes appliquées à des enfants normaux développeraient leur personnalité d’une façon surprenante »12.
Elle crée alors la première « Casa dei bambini », la maison des enfants, à Rome en 1907. Elle y accueille des enfants dits normaux, âgés de deux à cinq ans, issus des quartiers pauvres et non scolarisés. Maria Montessori fait fabriquer des petits meubles à la dimension des enfants. Elle confectionne personnellement le matériel pédagogique, analogue à celui qu’elle a utilisé avec les enfants déficients. Les résultats sont stupéfiants : les enfants sont libres, heureux, ouverts et capables d’écrire à quatre ans. Elle met alors en place un véritable système pédagogique qu’elle nommera « la pédagogie scientifique ».
En 1934, elle fuit l’Italie fasciste de Mussolini qui condamne les principes montessoriens et fait fermer toutes les écoles Montessori. Elle trouve refuge en Inde où elle restera six ans et formera nombre d’éducateurs à sa pédagogie scientifique. Elle décède le 6 mai 1952 mais le mouvement montessorien évolue malgré sa disparition. Aujourd’hui encore, sa pédagogie est considérée « comme une lueur d’espoir pour un monde nouveau »13. En effet Maria Montessori, grâce à l’éducation des enfants, espérait pouvoir contribuer à l’établissement de la paix dans le monde. On compte aujourd’hui 22 000 écoles Montessori dont une cinquantaine en France.14
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Table des matières
Introduction
Qu’entend-t-on par « pédagogies alternatives » ?
Qu’entend-t-on par « école traditionnelle » ?
Première partie : la pédagogie Montessori
I : Biographie de Maria Montessori
II : La pédagogie de Maria Montessori
II.1 – Les fondements de sa pédagogie
II.2 – Les enjeux de sa pédagogie
III : La pédagogie Montessori en pratique
Deuxième partie : les limites de la pédagogie Montessori
I : Des principes et des limites
I.1 – Le libre choix ; oui mais …
I.2 – Un enseignement sans contrainte ni obligation ; oui mais …
I.3 – Au danger de l’ordre imposé
II : Les limites de la pédagogie Montessori au regard des objectifs de l’Education Nationale
II.1 – L’absence d’enseignements artistiques et culturels
II.2 – La question du langage
III : Autre limite
III.1 – Un matériel coûteux et abondant 1
Troisième partie : les transferts possibles dans les écoles traditionnelles
I : La pédagogie Montessori en cohérence avec les exigences de l’Education Nationale
I.1 – Le matériel
I.2 – Le libre choix ou la possibilité de respecter le rythme de l’enfant
I.3 – Un rôle différent pour l’adulte
II : Comment contrer les limites ?
II.1 – L’absence d’enseignements artistiques et culturels
II.2 – La question du langage
III : Mise en application
Conclusion
Bibliographie / Webographie
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