La zoochorie et la restauration

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La zoochorie et la restauration

Un certain nombre de programmes ont été mis au point pour restaurer les divers habitats prairiaux, bien que l’efficacité de ces mesures varie considérablement. Par exemple, les prairies humides, riches en espèces dans les plaines d’inondation, sont au centre de la politique européenne de conservation de la nature (Conseil Européen 1992) (Mann, Tischew, 2010). Cependant, depuis les années 1970, de vastes zones de prairies dans les plaines inondables ont été améliorées, labourées et utilisées pour la culture intensive. Ces tendances ont été observées dans de nombreuses régions d’Europe (Allemagne). Depuis les années 1970, une série de restauration a eu lieu au niveau de l’Europe avec l’enlèvement d’arbustes et d’arbres, de la tonte, de la réintroduction du pâturage extensif, le transfert de foin riche en espèces, etc (Mann, Tischew, 2010). Les programmes s’orientent autour de 3 notions : le potentiel de dispersion, le potentiel de germination et enfin l’action d’ajouter ou de retirer une espèce animale.

Potentiel de dispersion

Il y a un fort potentiel de dispersion des graines à longue distance par endozoochorie pour un large spectre d’espèces végétales, provenant de diverses familles de plantes. Cette dispersion est facilitée par les troupeaux. La réintroduction de pâturage traditionnel par les troupeaux migrateurs améliore la dispersion des graines entre les milieux ouverts fragmentés. Les troupeaux permettent aux espèces végétales de combler les lacunes dans l’espace et le temps. De nombreuses études évoquent ce point.
Une étude effectuée en Belgique et aux Pays-Bas a permis de mettre en évidence le potentiel de dispersion des moutons dans les prairies calcaires hollandaises (Kuiters, Huiskes, 2010). Le but de cette étude était de déterminer le potentiel des moutons à agir en tant qu’agents de dispersion des plantes via endozoochorie. Pour cela, des échantillons de fumier provenant de moutons ont été prélevés à partir de cinq sites. Le potentiel de germination et l’identité des graines dans les échantillons de fumier ont été déterminés à partir de la germination des plantules dans des conditions de serre. Les caractéristiques des graines viables dans le fumier ont été comparées à celles présentes dans le pool d’espèces locales. Les résultats de cette étude sont les suivants :
• 72 espèces végétales provenant de 23 familles de plantes ont des graines viables .
• Les familles de plantes rencontrées le plus fréquemment sont : Gramineae et Compositae .
• L’espèce de plantes la plus abondante et la plus souvent enregistrée est l’Urtica dioica (80% du nombre total de graines) .
• La densité moyenne des graines était de 0,8g-1 matière sèche. Les graines ayant une faible masse et un indice élevé de longévité étaient surreprésentées dans les excréments.
Les moutons sont donc potentiellement des disséminateurs importants d’espèces végétales dans les prairies calcaires hollandaises, bien que les plus petites graines aient été relativement abondantes. Avant de lancer des programmes de restauration à grande échelle dans les champs abandonnés, des études préliminaires sur le terrain sont fortement recommandées (Kuiters, Huiskes, 2010).

Potentiel de germination

La connaissance de la dispersion des graines peut être utilisée pour maintenir et restaurer la biodiversité dans des paysages fragmentés. En Espagne et en Belgique, des études ont été menées sur la relation entre la zoochorie et la richesse d’un milieu pour de futures restaurations. La première portait sur les effets de l’application du fumier sur la richesse spécifique et en particulier sur la réintroduction d’espèces perdues après un abandon (Traba et al., 2003). A l’aide de quadras témoins et de quadras avec des semis d’excréments, suivis pendant 3 ans, 115 espèces différentes ont été récoltées sur les quadras témoins et 105 dont 15 rares sur les quadras semés. De plus, une expérience en serre a été réalisée pour déterminer les graines viables. Pour finir, la richesse spécifique entre les échantillons ensemencés et témoins a été comparée via une analyse de variance. Une augmentation significative de la richesse spécifique à petite échelle a pu être observée. Cette augmentation est principalement due au traitement appliqué. La richesse et la composition floristiques diminuent avec le temps. Ce traitement est alors utile pour la restauration de la richesse en espèces dans les pâturages abandonnés, bien que des mesures supplémentaires soient nécessaires (Traba et al., 2003).
En Belgique, l’étude portait sur les effets du dépôt de fumier sur le nombre de semis dans une communauté végétale, 3 mois et 1 an après celui-ci, mais aussi sur la différence d’abondance entre les espèces monocotylédones et les espèces dicotylédones et entre les prairies gazonnées et les prairies non perturbées (D’Hondt et al., 2012). En fait, il s’agissait d’analyser les conséquences du dépôt de fumier sur les caractéristiques de la communauté végétale locale (couverture, richesse spécifique, diversité). L’expérience a été réalisée sur une zone de 61 ha pâturée en moyenne par 5 bovins Highland écossais et 19 poneys Shetland. Dès le début de l’expérience, une partie de ce site a été exclue du pâturage des grands herbivores. Des graines viables de monocotylédones étaient abondamment présentes dans les excréments après 3 mois. Cependant, cet effet n’était plus significatif après 1 an. Un plus petit nombre de dicotylédones était dispersé dans le fumier, mais leur couverture et leur richesse en espèces étaient plus élevées après un an (D’Hondt et al., 2012).
L’augmentation de la germination des graines et de l’établissement des semis après le dépôt de fumier affectera la composition et la structure de la communauté végétale locale en augmentant la richesse des espèces. Le nombre d’espèces monocotylédones et dicotylédones est plus élevé dans les parcelles perturbées que dans les parcelles non perturbées. Étant donné que le développement a fragmenté les paysages et que cette situation ne devrait pas changer, la dispersion des semences pourrait être améliorée en déplaçant le foin ou le bétail vers les sites endommagés.

Ajouts/ retrait d’une espèce animal

Le pâturage des grands herbivores s’avère efficace pour convertir d’anciennes terres en prairies riches en espèces. Néanmoins, plusieurs facteurs importants doivent être pris en considération. En Allemagne, des expériences sur les prairies humides dans les plaines inondables ont été effectuées (Mann, Tischew, 2010). Deux questions ont pu être posées lors de cette étude :
• Est-il nécessaire d’accélérer le développement de la végétation en transférant des espèces et comment l’ensemencement des mélanges commerciaux de semences affecte-t-il la colonisation des espèces cibles ?
• Y a-t-il des preuves que le pâturage soutienne la colonisation des espèces cibles sur les anciennes terres arables ?
Pour cela, la plupart des terres en jachère a été clôturée en même temps que de vieux pâturages ou des prairies déjà aménagées et laissées à la récupération naturelle. Les agriculteurs locaux ont appliqué un régime de pâturage toute l’année sans alimentation supplémentaire et avec une faible densité de peuplement de 3 à 6 animaux pour 10 ha. Sur les anciennes terres, le pâturage des grands herbivores sans alimentation supplémentaire est possible et conduit à un développement successif de communautés de prairies typiques à faible statut nutritionnel. L’intégration des vieux pâturages dans le système de pâturage favorise la colonisation des espèces indigènes dans les prairies. Le transfert de foin riche en espèces accélère le taux de colonisation de plusieurs espèces de prairies (Mann, Tischew, 2010).
L’évaluation des conséquences de la dispersion interne des graines par les grands herbivores en liberté, l’enregistrement des densités de graines viables dans des échantillons de bovins, de moutons et de poneys ainsi que la surveillance de la colonisation des excréments sur le terrain ont pu être analysés aux Pays-Bas (Mouissi et al., 2005). Les trois espèces d’herbivores (bovin, mouton et poney) dispersent de grandes quantités d’espèces diverses provenant d’une variété de familles de plantes, de monocotylédones et de dicotylédones. La densité des graines viables dans les excréments d’herbivores et la colonisation des crottins sont positivement corrélées avec les valeurs d’indicateur d’azote d’Ellenberg et l’approvisionnement en graines, mais pas avec la masse ou la forme des graines. Pour les sites de restauration de cet habitat, le pâturage, intégré avec les communautés végétales ciblées sur des sols pauvres en nutriments, est recommandé (Mouissi et al., 2005).

Potentiel de germination

Les chercheurs se sont intéressés au potentiel de germination d’une graine qui est passée par les intestins d’un animal. Pour étudier l’impact de l’endozoochorie sur la germination des graines, il est nécessaire d’étudier le taux de germination des graines après passage dans l’animal ainsi que le délai de germination. Pour cela l’étude de graines de contrôle (n’ayant pas transité par voies intestinales) et de graines test (récupéré dans les défécations) germées in vitro et ex vitro est faite pour déterminer l’effet de l’endozoochorie. Il est remarqué que les graines ayant suivi un processus de digestion germent plus facilement et ont un taux plus faible de mortalité que les autres.
Deux études dans la forêt tropicale de Guyane ont mis en avant l’impact du transit intestinal sur la germination des graines. Différentes espèces animales ont été suivies, mais ce sont plus particulièrement les singes hurleurs roux (alouatta seniculus) qui ont été étudiés (Julliot et Huignard, 1992). Des tests de germination ont été effectués, à partir de graines récupérées dans les fèces et de graines témoins non ingérées qui ont été plantées dans des pots en lisière de forêt. Afin d’éviter l’action de prédateurs et de réduire l’ensoleillement ou l’apport extérieur de graines, ces pots ont été placés à 1 mètre du sol et sous une ombrière. Grâce à la mesure du taux et du délai de germination sur les 2 types de graines, il a été démontré que la germination est majoritairement facilitée par le transit digestif. De plus, les singes hurleurs roux défèquent sur une zone restreinte (dortoirs), ce qui favorise l’agrégation de graines permettant une restauration plus efficace. Leur impact sur la régénération d’une forêt est essentiel, car 95,6% des espèces végétales exploitées pour leurs fruits mûrs sont disséminées par eux, ce qui représente 1/3 des espèces zoochores de la canopée et de la sous-canopée (Julliot et Huignard, 1992). Une autre étude dans la forêt tropicale du Congo, met en avant l’importance des bonobos dans la dissémination de graines et leur germination (Beaune et al., 2013). Il a été observé que les graines, qui sont passées par les voies intestinales de cette espèce, germant plus rapidement, ont un taux élevé de succès et un plus grand taux de survie post-dispersion que les graines recrachées ou non consommées. La présence des bonobos est vitale car ils affectent 40% des espèces d’arbres et 65% des arbres individuels. Il faut donc les prendre en compte dans les projets de restauration. Il est ainsi mis en évidence que l’endozoochorie permet de maintenir le pouvoir germinatif d’une graine plus longtemps que pour les graines de la même espèce non ingérées. Par ailleurs, pour chaque type de fruit zoochore, il existe un groupe plus ou moins diversifié d’animaux frugivores (Beaune et al., 2013).

Les milieux prairiaux

La restauration des milieux ouverts via la zoochorie dépend de nombreux facteurs : qualité/caractéristique du sol, de la nappe phréatique, des conditions hydrologique, météorologique, … mais les contraintes existantes sont importantes. En effet, le niveau de fertilité du sol, la limitation des propagules, l’absence d’espèces clefs et les régimes de fauche ou de pâturage inappropriés sont des freins à cette pratique.
Le problème majeur dans la restauration des milieux prairiaux réside dans le fait que certaines espèces clefs ont non seulement une capacité de dispersion limitée, mais également que leurs graines peuvent avoir des exigences de germination très restrictives, non satisfaites par l’environnement dans le site de restauration. Par exemple, pour les tourbières, le Carex stricta ne se disperse pas, et germe difficilement, alors que son établissement est essentiel pour la restauration, car l’espèce forme des touffes qui déterminent la structure de la zone humide (Middleton et al. 2006).
C’est le manque de dispersion des graines ainsi qu’un environnement de régénération inapproprié qui peuvent nuire au succès de la restauration. La zoochorie est un facteur important de la restauration. Cependant, il n’est pas le seul et s’il l’était, serait-ce viable ?
De nombreuses espèces végétales des prairies ne constituent pas la banque de semences dans le sol et ne peuvent pas survivre à long terme pour permettre une bonne régénération. Après la disparition d’un milieu, il n’est pas facile pour ces espèces de réintégrer le site (Kuiters et Huiskes, 2010). De plus, chez les populations de végétaux menacés, la consanguinité et la dérive génétique sont courantes, de sorte qu’en général, la variabilité génétique est plus élevée dans les grandes populations (Middleton et al. 2006). A contrario, certaines espèces demeurent dans les banques de graines pendant plusieurs décennies après le retrait des pâturages (Middleton et al. 2006). Les graines de certaines espèces ont une longue durée de vie et des épisodes fréquents de dispersion ne sont alors pas toujours nécessaires pour maintenir la biodiversité (Middleton et al. 2006).
La restauration prairial est limitée par le potentiel de dispersion des graines dans la mesure où la fragmentation peut entraver la capacité des graines à se disperser entre les zones naturelles et donc se mélanger. En outre, les populations fragmentées peuvent avoir un approvisionnement réduit en graines parce qu’elles souffrent d’effets de bord, menant à un succès reproducteur plus faible ou à un appauvrissement génétique en raison d’une réduction des échanges de graines et de pollen entre les populations. De plus, la dispersion des graines endozoochores peut constituer une menace potentielle pour les communautés riches en espèces en aidant à la propagation de rudérales envahissantes telles que U. dioica. Il y a donc une menace possible en raison de l’invasion de mauvaises herbes, d’herbacés ou d’espèces exotiques. (Kuiters et Huiskes, 2010)

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Table des matières

Remerciements
Sommaire
Qu’est-ce que la restauration ?
Qu’est-ce que la zoochorie ?
Importance de la zoochorie
La zoochorie et la restauration
Importance de la zoochorie
La zoochorie et la restauration
Les milieux prairiaux
Les milieux forestiers
Conclusion
Lexique
Bibliographie

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