Objectif
La plupart des gènes biosynthétiques codant pour les enzymes responsables de la production des différents AA ne sont pas connus avec certitude. L’analyse transcriptomique, qui permet l’étude de l’expression des gènes, couplée à une analyse métabolomique, axée sur la quantité d’alcaloïdes présents, est devenue un outil populaire pour la découverte de nouveaux gènes codant pour les enzymes impliqués dans la biosynthèse des alcaloïdes [46] . Une telle approche a grandement contribué à l’élucidation de plusieurs voies métaboliques spécialisées de diverses plantes médicinales et nutritionnelles [47-50]. Un exemple est celui de Cathanranthus rose us dans lequel des transcrits de gènes et des métabolites associés aux alcaloïdes de type terpénoïdes-indoles ont été identifiés [51]. De la même manière, une meilleure compréhension a été obtenue de la voie de biosynthèse conduisant à la production des alcaloïdes anticancéreux camptothécine et anthraquinones [52].
L’objectif de mon projet de recherche était d’augmenter les connaissances sur l’implication des gènes biosynthétiques proposés dans la production des AA en comparant les niveaux d’expression de ces gènes avec la quantité d’AA présents dans des plantes d’une espèce d’Amaryllidacée. De plus, cette étude a été faite pour différentes parties à divers stades de développement de la plante permettant d’observer les différences dans l’expression des gènes et l’accumulation des AA parmi les différentes parties aux divers stades. Cela a aussi permis d’étudier les effets de la croissance et du développement de la plante sur la production des AA dans les différentes parties.
Hypothèse
En regardant la voie de biosynthèse des AA , il semble que toute augmentation de l’expression des gènes biosynthétiques indiqués conduira, dans la plupart des cas, à une plus grande production des enzymes correspondantes. Cela, en revanche, conduira très probablement à des quantités élevées des composés précurseurs et intermédiaires qui devraient produire une plus grande quantité d’ AA. Donc, l’hypothèseétait qu’ il y aura des corrélations positives entre l’expression des gènes et la quantité d’alcaloïdes présente. Autrement dit, plus l’expression des gènes sera élevée, plus la quantité d’alcaloïdes présente sera grande aussi.
Méthodologie
Échantillons de plante
Pour mener ce projet de recherche, l’espèce d’Amaryllidacée Narcissus papyraceus a été choisie à cause de sa facilité à croître à l’ intérieur, comparé à d’autres espèces d’Amaryllidacées, permettant d’ étudier, dans un environnement contrôlé, les effets de la croissance et du développement sur la production et l’accumulation des AA.
Avec six stades de développement identifiés et jusqu’à cinq parties (bulbe, racines, feuilles, tige et fleurs) présentes à plusieurs de ces stades, 24 échantillons de N. papyraceus ont été obtenus (Figure 1.4). Chaque échantillon se consiste d’un triplicata.
Plus précisément, parmi 24 bulbes de N. papyraceus, 3 ont été utilisés pour le 1 er stade et parmi les 21 bulbes plantés, 3-4 plantes ont été sélectionnées pour chaque stade. L’ analyse de différentes parties à divers stades a fourni de l’ information qui pourra être utile par rapport à l’ extraction de la plus grande quantité d’ alcaloïdes des plantes en sachant à quel moment de la vie de la plante et dans quelle partie de la plante les AA s’accumulent le plus.
Il a déjà été rapporté pour trois espèces différentes de Narcissus que certains échantillons des plantes accumulent plus d’alcaloïdes que d’ autres. Par exemple, Viladomat et al. ont trouvé que le bulbe de Narcissus assoanus accumulait la plus grande quantité d’alcaloïdes [53], alors que Kreh a observé que la concentration de galanthamine était relativement élevée dans les bulbes de N. pseudonarcissus L. cultivar Carlton [54].
Plus récemment, Shawky et al. ont étudié différentes parties de N. papyraceus aux stades de pré-floraison, la floraison et post-floraison. Les alcaloïdes se sont révélés plus abondants dans les échantillons de bulbes aux stades de pré- et post-floraison, de racines et tiges au stade de la floraison, et d’ écaille au stade de pré-floraison [55]. Des différences dans l’expression de certains gènes de biosynthèse des AA parmi divers échantillons d’une espèce ont également été rapportées. Par exemple, dans une étude menée sur PAL dans une autre espèce d’Amaryllidacée, la Lycoris radia ta , Jiang et al. ont identifié deux isoformes de PAL qui différaient dans leur expression dans différentes parties de la fleur au stade de la floraison; l’expression de LrP AL2 était toujours beaucoup plus élevée que celle de LrPALl [56]. Singh et Desgagné-Penix ont aussi noté, dans leur étude récente de N. pseudonarcissus cultivar King Alfred, différents profils d’expression de deux isoformes de PAL dans cinq parties de la plante au stade de la floraison [57]. De telles différences dans l’expression des gènes peuvent, probablement, expliquer les différents profils d’accumulation d’alcaloïdes observés dans une plante à différents stades.
Étude transcriptomique
Le transcriptome est l’ensemble de toutes les molécules d’ARN dans une cellule ou une population de cellules [58]. Il peut se référer à tous les ARN, ou seulement aux ARN messagers, selon l’expérience effectuée. Puisque le génome de N papyraceus n’ était pas disponible dans les bases de données publiques, il a fallu procéder à l’assemblage de novo du transcriptome, c’ est-à-dire créer un transcriptome sans l’aide d’un génome de référence.
Pour ce faire, les ARN messagers extraits du bulbe au stade 1 de N papyraceus ont, d’abord, été séquencés à l’aide de la méthode de séquençage à haut débit Illumina HiSeq 2000. Par la suite, l’assemblage de novo du transcriptome a été réalisé à l’aide du logiciel informatique Trinity. Éventuellement, avec l’ utilisation d’ outils bio-informatiques, tels que Trinotate et BLAST, les séquences correspondant à tous les gènes biosynthétiques proposés des AA, dans le transcriptome assemblé, étaient identifiées.
Ces séquences des gènes ont permis, entre autres, de concevoir des amorces spécifiques à ces gènes pour permettre d’étudier leur expression dans les différents échantillons de N papyraceus par une méthode de la réaction en chaîne par polymérase (PCR) (Figure 1.5)
Étude métabolomique
Pour l’étude du métabolome spécifique aux AA, ces alcaloïdes ont été extraits des divers échantillons de N papyraceus par uneméthode d’ extraction acido-basique optimisée par notre laboratoire. Les extraits ont été analysés par la chromatographie en phase liquide à haute performance (HPLC) et un détecteur de barrette de photodiode afin d’obtenir de l’information sur les alcaloïdes présents dans les échantillons de N papyraceus (Figure 1.5). La technique de la HPLC permet de séparer divers composés présents dans un échantillon selon leur taille et leur polarité. Un détecteur de barrette de photodiode fournit des informations spectrophotométriques sur les composés détectés et permet de calculer leur concentration.
La technique de la HPLC repose sur des pompes pour faire passer un échantillon liquide et un solvant liquide, sous haute pression, à travers une colonne remplie de matériau adsorbant solide [60, 61]. Le matériau adsorbant est appelé phase stationnaire et est constitué de particules solides, telle que la silice, dont la taille varie de 2 à 50 ~m .
Lorsque l’échantillon est injecté dans la colonne du système de la HPLC, les différents composés de l’échantillon adhèrent à divers degrés à la phase stationnaire parce que chaque composé de l’échantillon interagit légèrement différemment avec la phase stationnaire. Le solvant liquide est appelé phase mobile. Il est passé à travers la colonne afin d’éluer les composés adsorbés à la phase stationnaire. Les composés qUi sont relativement faiblement liés à la phase stationnaire sont facilement élués par la phase mobile et sont les premiers composés à être détectés par le détecteur. Plus un composé est fortement lié à la phase stationnaire, plus il faut de temps pour qu’il soit élué et détecté par le détecteur.
La méthode de la HPLC la plus couramment utilisée est la HPLC en phase inverse [60, 61]. Dans cette méthode, la phase stationnaire est non polaire, et la phase mobile est modérément polaire se constituant d’eau et d’un solvant organique (généralement de l’acétonitrile ou du méthanol). Dans la présente étude de l’analyse des AA par HPLC, la phase mobile consistait d’un mélange d’une solution aqueuse d’acétate d’ammonium à 1 % et d’acétonitrile. La composition de la phase mobile est souvent modifiée au cours du processus d’élution en ce que le pourcentage d’eau dans la phase mobile diminue avec le temps, tandis que le pourcentage du solvant moins polaire augmente simultanément.
Cela signifie que la phase mobile devient progressivement plus non-polaire. Ceci est appelé élution par gradient. Son avantage, par opposition à l’élution isocratique dans laquelle la composition de la phase mobile reste constante, est que les composés qui normalement seront élués plus tardivement (c’est-à-dire les composés plus non polaires)s’élueront plus rapidement, donnant des pics plus étroits et plus haut sur le chromatogramme pour la plupart de ces composés. En d’autres termes, les pics seront plus aigus. Dans le cas présent, le rapport de la solution d’acétate d’ammonium à l’acétonitrile variait de 90:10 pendant Il minutes, à 69:31 pendant 4 minutes, à 30:70 pendant 1 minute et finalement à 10:90 pendant 5 minutes. C’était un protocole optimisé pour permettre une séparation efficace des alcaloïdes dans les différents échantillons de plantes en fonction de leur polarité. Le rapport initial de 90: 1 0 a permis d’éluer les composés polaires.
Ensuite, les ratios de 69:31 et 30:70 ont permis de bien séparer les composés légèrement non-polaires incluant les AA. Finalement, les composés non-polaires sont sortis grâce au ratio de 10:90 de la phase mobile.
Résumé de l’article
Les alcaloïdes synthétisés par les plantes d’Amaryllidacée ont des effets biologiques multiples, ce qui explique leur utilisation dans les industries pharmaceutiques et agricoles.
Malheureusement, la production à grande échelle des alcaloïdes d’Amaryllidacée (AA) est difficile en raison du manque d’information sur leur biosynthèse. Ainsi, nous nous sommes concentrés à augmenter nos connaissances sur l’implication des gènes biosynthétiques des AA proposés et confirmés dans la production des AA, et sur l’observation des différences spatiales et temporelles concernant la biosynthèse des AA dans la plante. Pour ce faire, d’abord, le transcriptome de Narcissus papyraceus a été généré par le séquençage de l’ARN. La présence de tous les gènes biosynthétiques des AA a été confirmée dans le transcriptome de N papyraceus. Une banque d’ADN complémentaire a ensuite été créée à partir de différentes parties à différents stades de développement de N papyraceus.
L’expression des gènes biosynthétiques des AA a été analysée dans chaque échantillon de N papyraceus par RT -qPCR. Pour les gènes biosynthétiques proposés des AA, les amorces ont été conçues à partir de séquences de transcrits de gènes homologues aux gènes proposés. Pour la plupart des gènes biosynthétiques des AA, les niveaux d’expression variaient considérablement entre les différentes parties de la plante aux différents stades de développement. Pour étudier la teneur en alcaloïdes, chaque échantillon de N papyraceus a été analysé par la HPLC. Les feuilles et les fleurs avaient la plus grande abondance de composés hétérocycliques, alors que les bulbes, les plus bas.
En outre, la lycorine était l’AA prédominant. Les résultats de l’expression des gènes ont été comparés avec les profils des composés hétérocycliques obtenus par la HPLC pour chaque échantillon de la plante. Une corrélation positive a généralement été observée entre les niveaux d’expression génique et la quantité d’AA accumulés dans la plante. Cependant, en raison d’un transport probable d’enzymes et d’alcaloïdes dans la plante, unecorrélation négative a été observée dans certains cas.
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Table des matières
REMERCIEMENTS
RESUME
LISTE DES FIGURES ET TABLEAU
LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES
CHAPITRE 1
INTRODUCTION
1.1 Les métabolites
1.2 Les alcaloïdes
1.3 La famille des Amaryllidacées
1.4 Les alcaloïdes d’Amaryllidacée
1.5 Les propriétés pharmacologiques des alcaloïdes d’Amaryllidacée
1.5.1 Effets neurologiques
1.5.2 Propriétés anticancéreuses
1. 5. 3 P roprl.e ‘ te’s ant « l mlcro bl’ ennes
1.6 Problématique
1. 7 Voie biosynthétique proposée des AA
1.8 Objectif
1.9 Hypothèse
1.10 Méthodologie
1.10.1 Échantillons de plante
1.10.2 Étude transcriptomique
1.10.3 Étude métabolomique
CHAPITRE II
DEVELOPMENTAL AMARYLLIDACEAE REGULATION ALKALOID OF THE EXPRESSION BIOSYNTHETIC GENES OF IN NARCISSUS PAPYRA CEUS
Résumé de l’ article
Abstract
Introduction
Materials and methods
RNA extraction, next-generation Illumina sequencing and de novo transcriptome assembly
Chemicals
Plant material
cDNA synthesis
Primer design
Reverse transcription PCR for primer testing
Gel electrophoresis
Sequencing of amplicons
Reverse transcription quantitative real-time PCR
Alkaloid extraction
HPLC
Accession numbers
Results and discussion
RNA sequencing of Narcissus papyraceus bulbs
Confirmation of candidate genes
Plant growth
Gene expression analysis with RT-qPCR
Alkaloid profiling
Comparison of gene expression and compound content profiles
Acknowledgements
References
Tables
Figure legends
Figures
Supplementary data
CHAPITRE III
CONCLUSION
3.1 Étude du transcriptome
3.2 AA détectés
3.3 Expression des gènes et comparaison avec les profils a1caloïdiques
3.4 Sommaire des applications pharmacologiques des AA
3.5 Génie génétique et ingénierie métabolique
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE A
ARTICLE DE REVUE
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