La ville événementielle comme modèle pour Le Havre ?

La ville événementielle comme modèle pour Le Havre ?

Un anniversaire exceptionnel et attendu

L’histoire du Havre est riche et chaotique. En 1517, François Ier ordonne la fondation du Port du « Havre de Grâce » sur l’estuaire de la Seine. Il fonde également en même temps la ville qui prendra le nom du Havre. Le Port sert les intérêts maritimes du Royaume de France et se développe pendant les décennies suivantes, faisant de la ville une plaque tournante du commerce. La Seconde Guerre mondiale change le cours de l’Histoire et surtout le visage du Havre puisque la quasi totalité de son centre ville historique est détruit par les bombardements. La reconstruction se fait dans l’urgence et elle est confiée à Auguste Perret qui réalise un quartier à l’architecture moderniste. Dans les années 1980, Le Havre est confronté aux changements des modalités économiques notamment pour son activité portuaire. Dans une économie mondialisée et dominée par des géants industriels, le nombre d’emplois a rapidement diminué. Avec une population plutôt pauvre et un taux de chômage important, Le Havre peine à se redynamiser. Elle souffre d’une image triste et grise associée au béton très présent dans les constructions du centre ville.
Mais la ville a des qualités à faire valoir, notamment sur le plan artistique et culturel. Berceau de l’impressionnisme, elle inspire par sa lumière et son atmosphère, non seulement des peintres comme Monet mais aussi des écrivains. Son architecture ne se limite pas au béton de Perret puisque le Volcan, Scène Nationale, se trouve dans un bâtiment de l’architecte brésilien Oscar Niemeyer et que les Bains des Docks sont une réalisation de Jean Nouvel. Côté politique culturelle, Le Havre a connu un âge d’or dans les années 1960 – 1970. Dès 1956, la municipalité communiste se saisit du sujet et leur action « se lit dans l’augmentation du budget culturel qui passe de 1,15 % à 2,8 % du budget global entre 1961 et 1964». La première Maison de la Culture est inaugurée en 1961 dans l’actuel Musée Malraux. Aujourd’hui, si la ville n’est pas vraiment citée en exemple pour ses actions en faveur de la culture, il n’empêche que la vie culturelle est riche et les équipements culturels sont variés : une Scène Nationale, un Centre Choréographique National, un pôle dédié au musiques actuelles au Tétris, un cinéma d’art et d’essai appelé le Sirius, des salles de concert…
Les 500 ans de la ville sont conçus comme une occasion de « valoriser le territoire havrais comme espace ouvert sur le monde et comme lieu de créativité et de modernité dans les domaines culturels et artistiques, économiques, maritimes, scientifiques ». Un remède contre la mauvaise réputation dont est affublée Le Havre, surtout pour les gens qui ne s’y sont jamais rendu.
Le Havre est une des rares villes françaises à avoir une date d’anniversaire précise et connue. De ce fait, l’attente est forte du côté des habitants et des acteurs du territoire. Pour Thomas Malgras, directeur du Groupement d’Intérêt Public (GIP) Le Havre 2017.

Un événement ambitieux, de grande échelle

Les responsables politiques se sont emparés de cet anniversaire avec la volonté d’en faire un événement marquant et ouvert. Thomas Malgras parle de « commande politique » orientée de façon à ce que les célébrations ne soient pas seulement pour les Havrais : leur ambition est plus large. Dans l’accord-cadre rédigé par le GIP, un des premiers objectifs affichés consiste à « imaginer une manifestation d’envergure nationale ou internationale dont le rayonnement sera évalué par la couverture médiatique, le niveau de fréquentation touristique, la provenance des publics et la renommée des artistes engagés ». Les autres aspirations du Groupement concernent la construction d’un événement local fort, impliquant les habitants et structurant pour l’avenir de la ville. L’investissement de l’espace public pour une transformation de la ville est aussi cité, ainsi que la promotion des atouts du Havre.
Financé par les acteurs publics membres du GIP (Ville, Communauté d’Agglomération, Grand Port Maritime Havrais, Chambre de Commerce et d’industrie, Université du Havre, Département Seine-Maritime, Région Normandie).
Un été au Havre 2017 représente près de vingt millions d’euros. Les fonds publics seront complétés par du mécénat et des recettes propres, évalués par l’agence Artevia, producteur délégué de l’événement. L’ambition du projet est conséquente, notamment par rapport à la taille de la ville. L’objectif est d’attirer visiteurs, touristes et couverture médiatique au niveau national voire européen. Dans cette optique, l’excellence artistique est un critère indispensable, selon Jean Blaise le directeur artistique et Edouard Philippe, le maire du Havre . Les artistes participants à la programmation ont été choisis notamment pour leur notoriété, au niveau international pour certains (Chiharu Shiota, Cai Guo Qiang, Julien Berthier…). Le choix du directeur artistique reflète également cette ambition. Selon Thomas Malgras : « pour une manifestation de cette taille là, des directeurs artistiques en France il y en a 3 ou 4, pas plus ». Jean Blaise a fait ses preuves sur le territoire nantais avec des événements comme les Allumées, le Voyage à Nantes et son expertise est largement reconnue au niveau national, surtout concernant l’art dans l’espace public, l’art dans la ville . Il est d’ailleurs invité aux Assises de la culture au Havre en 2011. Il rencontre Edouard Philippe qui présentait à cette occasion son programme culturel et ce premier contact fructifie puisque c’est à Jean Blaise que sera confiée l’étude de préfiguration pour Le Havre 2017 puis la programmation de l’événement rebaptisé Un été au Havre 2017.
Le GIP a également lancé un appel d’offre pour la production et l’organisation de ces 500 ans, puisque les compétences nécessaires embrassent un large spectre. Le groupement qui a remporté le marché public est mené par Artevia, agence parisienne d’ingénierie culturelle qui s’est associé à huit autres structures pour qu’elles apportent chacune leur expertise dans un domaine précis : Claudine Colin Communication pour la communication, Réciproque pour le développement digital, MARC pour la médiation et l’accessibilité, Sarmance pour le développement des publics et le tourisme, L’Après Musée pour les produits dérivés, KissKissBankBank pour le financement participatif, APSV pour l’insertion et InTERREface pour le développement durable. Pour un projet de cette ampleur, et même si l’implication de chacun est variable, les acteurs sollicités sont nombreux.

Ville festive, ville événementielle

Un été au Havre 2017 s’inscrit en plein dans la tendance soulignée et étudiée par de nombreux universitaires ; la montée en puissance de la ville comme échelon primordial de l’action publique se couple avec le renforcement de la compétition inter-métropolitaine. Les villes tentent d’exister sur une scène la plus large possible – régionale, nationale voire européenne – et pour gagner la bataille de l’image, les pouvoirs publics se sont emparés des événements culturels
Le concept de « ville événementielle » ou « ville festive », largement consacré dans la littérature scientifique, émerge depuis les années 1980 au niveau français et international . Il illustre ce phénomène et sous-tend un élargissement de ce qui caractérise les villes, de ce qui représente leur potentiel ; ce n’est plus uniquement les infrastructures et des éléments physiques car à cela s’ajoutent les réseaux, l’intelligence collective et d’autres éléments immatériels . Au delà de l’aménagement urbain, l’image d’une ville, ce qu’il s’y passe, a pris une importance considérable.
Dans le cas de la ville de Nantes, Jean Blaise explique effectivement que le jeune maire Jean-Marc Ayrault lui a confié l’organisation des Allumées en 1990 avec la volonté de redynamiser l’agglomération nantaise et de montrer qu’il allait changer la ville :« Véritable outil d’aménagement et de développement urbain et métropolitain [l’événement est un] instrument dont on maîtrise de plus en plus les codes à la fois spatiaux et temporels ». D’une part, leur caractère éphémère joue un grand rôle dans ce qu’ils sont et dans la façon dont ils sont organisés. Les événements rythment le temps de la ville, ils organisent un récit de cette dernière . Les temps de fête sont considérés comme bénéfiques, fédérateurs ; ils permettent de recréer du lien social autrement dans un contexte marqué par la montée de l’individualisme. D’autre part, en investissant des lieux dans la ville, les événements culturels font souvent la part belle aux rencontres dans l’espace public et prennent place dans des endroits qu’il s’agit de faire (re)découvrir aux visiteurs. Outils de maîtrise du temps et de l’espace urbain ils peuvent imposer les priorités de l’aménagement et de la planification.
Cette tendance à l’inflation des événements culturels dans les villes se traduit notamment par la multiplication des festivals depuis la fin du XXe siècle, passant, en France, d’une dizaine en 1950 à plus d’un milliers aujourd’hui . Les villes cherchent à se doter d’un événement identifiable, auquel lier l’identité de la ville. Si les festivals se répètent à intervalle régulier et peuvent avoir des formats très variables, un second type d’événement incarne à une autre échelle cette folie de l’événement. Les « hallmark events » ou « mega events » – qui n’appartiennent pas nécessairement au domaine culturel – sont des événements one shot à portée mondiale, à très gros budget et qui ont un retentissement médiatique significatif. Dans cette catégorie, se placent les Capitales Européennes de la Culture ou encore les Jeux Olympiques. Le nombre de ces « mega events » n’augmente pas vraiment de manière exponentielle mais la compétition entre les villes hôtes s’est renforcée.
Différentes échelles d’événements s’entrecroisent donc et contribuent conjointement à confirmer cette tendance à l’événementialisation des villes. Un été au Havre 2017 se situe entre ces deux typologies d’événements avec une ambition forte et un budget important, mais qui n’est pas du niveau des Capitales Européennes de la culture ; il n’est pas non plus à ranger dans la catégorie des festivals du fait de son caractère unique. Cependant il s’inspire de ces deux types de manifestations et tente de s’approprier tout ce qui peut en faire un succès.
La culture au service de la ville Ce modèle reflète par ailleurs une conception de la culture fortement connectée aux dimensions économiques et touristiques, l’important étant « le rôle que les acteurs de la création et de l’innovation peuvent avoir en termes de dynamiques économiques et de développement urbain ». C’est la justification principale notamment en terme de dépenses et Edouard Philippe.
Enfin, la « ville événementielle » s’inscrit dans le mouvement de territorialisation des politiques culturelles initié dans les années 1980 en France.
Avec la montée en puissance du rôle des villes et un relâchement de l’Etat central, l’espace de référence pour l’action publique en matière de culture se trouve désormais au niveau municipal . Les maires peuvent s’en emparer et se différencier par rapport à d’autres villes grâce à leur offre culturelle. Pour Vincent Guillon, les villes « disposent désormais d’administrations culturelles compétentes, d’institutions culturelles de renom et se présentent comme des espaces de créativité en introduisant des éléments de différenciation artistique dans leurs politiques urbaines . » La culture est entremêlée dans la politique urbaine puisqu’elle est un élément de distinction entre les villes. Les élus peuvent s’en emparer pour tenter de faire valoir leur gestion et pour profiter des retombées que la culture peut produire.
La « ville événementielle » recouvre donc de multiples facettes qui finissent par composer un modèle solide applicable à un grand nombre d’entités, de villes qui se le sont approprié : « Bien plus qu’un outil marketing pour un territoire, il s’agit principalement d’une idéologie, d’une approche politique, d’une démarche volontariste et risquée (succès incertain) ». Cette dernière définition nous intéresse dans le sens où elle souligne fortement les enjeux politiques de tels événements ainsi que le risque associé à leur organisation.

Le Havre sur les traces de Lille et de Nantes

Un été au Havre 2017 a été élaboré dans cette lignée, et tous les points développés précédemment semblent s’aligner avec la vision attachée à l’événement.
Comme abordé précédemment, le maire se place volontiers dans un schéma de promotion de sa ville grâce à cet événement culturel. C’est ce qui a défini l’orientation de cet anniversaire et notamment le choix de Jean Blaise en tant que directeur artistique.
Si les célébrations des 500 ans du Havre sont issues de l’idéologie et du modèle de la ville événementiel, elles le sont aussi des cas français dans lesquels cette méthode à été éprouvée. Les exemples les plus saillants de cette utilisation de l’événement culturel sont ceux de Nantes ou de Lille, souvent cités comme des réussites. La régénération de territoires désindustrialisés et en crise grâce à la culture constitue un modèle qui se répand et qui, pour Le Havre, apparaît comme particulièrement pertinent. C’est donc sans surprise que des similarités apparaissent entre le cas havrais et les modèles nantais et lillois.
Avec la présence de Jean Blaise aux commandes de la programmation, il ne fait aucun doute qu’une certaine patte nantaise est présente dans Un été au Havre 2017. Au cœur de l’événement, on retrouve la notion de parcours dans la ville et l’importance de la justesse des œuvres dans le paysage urbain. Au Havre comme pour le Voyage à Nantes, l’événement est surtout concentré sur une multitude d’interventions localisées dans le centre de la ville. Les artistes appelés à participer sont également issus du cercle, des connaissances de Jean Blaise : on lui doit en partie le retour de la compagnie Royal De Luxe au Havre, grâce à des liens très forts avec Jean-Luc Courcoult . Mais il n’empêche que, malgré des méthodes de travail similaires, Jean Blaise porte une grande attention à l’identité du Havre et à ce que l’événement colle au mieux à la ville : « Reste à comprendre cette ville, à l’aimer, à la mettre en scène, à repérer celles et ceux qui lui inoculent leur énergie et leur talent, à être avec elle audacieux mais juste, à faire sourdre son étrangeté et son évidente poésie . »
Quant au cas lillois, l’année de Capitale Européenne de la Culture en 2004 a largement inspiré les acteurs havrais ainsi que la suite donnée à cette année riche avec Lille 3000 . La forte présence du collectif Art Point M, originaire de Roubaix, dans le programme donne notamment une certaine coloration : la parade d’ouverture d’Un été au Havre prévue le 27 mai 2017 rassemble pour sa préparation et pour le défilé des havrais mobilisés à travers des centres sociaux et des associations. Des élèves en formation couture et coiffure sont sollicités pour préparer les participants le jour de cette Magnifik Parade. Art Point M est également en charge de la programmation des soirées électro à la Gare Maritime, tandis que pour Lille 2004 ils avaient créé un club éphémère de musiques électroniques . La plupart des animations, des activités, des évènements de Lille 2004 et de Lille 3000 étaient localisés dans le centre ville de Lille, dans un territoire très précis : la partie la plus touristique. Les quartiers populaires ont été assez peu exposés sauf pour des activités ponctuelles et pour le réseau des maisons Folie.

La ville événementielle, concept surinvesti ?

Traitée dans de nombreux ouvrages, cette approche, si elle reste éclairante sur bien des points, tend à englober des dimensions diverses sur les événements culturels et à les aplanir en appliquant le concept de « ville événementielle » comme un rouleau-compresseur.
Ce modèle met en lumière la construction d’un événement type transposable et adaptable dans toutes les villes mais qui conserve toujours les mêmes objectifs, les mêmes logiques. Sa mise en place semble se faire sans difficultés comme si il était accepté en tant que paradigme central, passage obligé. Il tend à faire du contexte local un simple détail qui ne change en rien la nature de l’événement et sa signification.
La ville est réifiée, transformée en un acteur global ; elle est considérée immédiatement comme un « acteur collectif » sans que ne soient identifiés les mécanismes qui permettent l’agrégation des différentes entités qui portent ces événements. Empruntant ce concept à des auteurs comme Patrick Le Galès qui analysent le rôle des villes en Europe , les auteurs intéressé par la ville événementielle ne cherchent cependant pas à mettre en lumière les mécanismes de constitutions des groupes d’acteurs dans la ville.
Le traitement géographique et urbanistique tend à minimiser les aspects politiques et les jeux d’acteurs qui régissent le processus d’organisation des événements en se focalisant sur l’échelle de la ville dans son ensemble comme si elle était homogène. L’événement fini par être presque uniquement appréhendé en terme d’aménagement urbain et de légitimation de certaines décisions concernant l’espace urbain. Si l’événement culturel est effectivement au premier abord le produit d’une idéologie et d’une vision globale de la ville, la façon dont les différents acteurs s’en emparent, la façon dont ils interagissent entre eux peut considérablement modifier le résultat.

Changer de focale : la question des acteurs

Pourtant la question des acteurs est évoquée comme un fil rouge, une trame que l’on retrouve dans de nombreux textes sur la ville événementielle sans qu’elle ne soit jamais réellement au cœur de la démonstration. Pour Maria Gravari-Barbas, « l’évènement culturel [est] une « matière première » malléable, dont peuvent se saisir les différents acteurs ». Le paradigme de la ville événementiel est intéressant à définir puisqu’il fournit un cadre à l’action culturelle municipale dans de nombreuses villes mais il faut par la suite se pencher sur les forces qui portent l’événement pour apercevoir les particularités d’un cas ou d’un autre et pour saisir les enjeux propres à chaque ville sur le long terme.
Certains textes abordent partiellement cette question et identifient l’enjeu des rapports entre les acteurs porteurs du projet ou participants comme celui de Maria Gravari-Barbas et Sébastien Jacquot.

Un été au Havre 2017 par le prisme des jeux d’acteurs

Un été au Havre témoigne bien de la généralisation de l’événement culturel, exploité avant tout comme un élément de marketing territorial. On comprend bien qu’il s’inscrit dans une idéologie qui veut faire de la ville un acteur homogène, un acteur en lui-même capable d’attirer les touristes et les entreprises grâce à sa personnalité . Le fait que le Groupement d’Intérêt Public ai pris le nom « Le Havre 2017 » montre cette volonté de s’afficher comme un groupe représentant la ville entière et de souligner son unité. D’ailleurs, nombre de havrais ignorent la réelle constitution de ce GIP et considèrent que la Ville est seule à organiser et à financer l’événement.
Cependant, cette vision ne permet pas de saisir toute la complexité de ce que représente cet événement pour la ville du Havre et des changements qu’il apporte, qu’il sous-tend. Pour mieux comprendre comment se construit le 500 e anniversaire du Havre, on considère qu’il est nécessaire de prendre comme focale les acteurs impliqués dans la planification, la production et l’organisation de l’événement. À une analyse macro sur l’événement, on préférera un point de vue micro pour suivre à l’échelle des acteurs territoriaux les conséquences de cette orientation claire de l’événement et son format particulier pour la ville du Havre. Ce choix gagne en pertinence surtout parce que l’événement est encore en cours de construction. Les choix des acteurs, les relations qu’ils tissent entre eux peuvent encore orienter les célébrations du 500 e anniversaire. Ils définissent ce qui permet de constituer la ville en « acteur collectif ».
Le modèle de la ville événementielle nous a donc permis de poser un cadre et d’identifier la filiation idéologique d’Un été au Havre 2017 ainsi que de comprendre la démarche et les attentes globales soulevées par cette manifestation d’ampleur. Mais il nous semble désormais que ce paradigme n’est fécond que de manière superficielle pour véritablement comprendre les enjeux politiques de l’organisation d’un tel anniversaire sur le territoire du Havre. Pour appréhender totalement les rapports de forces et les enjeux de pouvoir, il est nécessaire de se pencher sur les différents acteurs qui prennent part à cet événement.

Stratégies d’acteurs et enjeux locaux

Un écosystème composé d’acteurs variés

Rassembler les acteurs publics pour piloter le projet : le rôle du GIP

Pour financer ce projet, le maire du Havre décide de mobiliser d’autres acteurs publics que la Ville. Constituer un Groupement d’Intérêt Public permet de mettre en commun des fonds plus facilement et de profiter de la souplesse de reversation des subventions propre à ce type de groupement tout en affirmant son objectif nonlucratif, d’intérêt général . « Personne morale de droit public dotée de l’autonomie administrative et financière », le GIP fournit un cadre de travail avec des instances de représentation et de délibération pour les grandes décisions dans lesquelles toutes les parties prenantes ont leur mot à dire . Dans ce processus, Thomas Malgras, aujourd’hui directeur du GIP, a eu un rôle essentiel notamment pour que les fondateurs s’entendent et acceptent de collaborer :
« Il fallait mettre en lien les acteurs publics, surtout les quatre premiers qui ont d’abord créé le GIP, la Ville, le Port, la CODAH et la CCI. J’ai du synthétiser les attentes de chacun et montrer que c’était de leur intérêt de participer au financement de cette manifestation alors que c’est pas forcément des acteurs qui ont les mêmes intérêts. Par exemple, la CODAH a la compétence touristique et donc il fallait mettre en avant les intérêts, les retombées touristiques que l’événement pouvait avoir. »

La mission de d’implantation et de médiation : le rôle clé de MARC

Au sein du groupement, le co-traitant en charge de la médiation est l’association havraise MARC. Comme l’explique Florence Meurisse qui travaille sur l’événement avec Marlène Renault, leur mission se décline en deux volets. D’une part « il y a la proposition de Jean Blaise dont nous faisons la médiation et à l’intérieur de cette proposition, on ne s’occupe pas de ce qui relève d’acteurs qui ont déjà une culture de la médiation et leur propre façon de faire, comme le MuMa ou le Portique ». MARC s’occupe plus particulièrement des supports et des expériences de visite pour le projet du Fort de Tourneville, l’exposition French Line et toutes les œuvres dans l’espace public.
D’autre part, l’association est responsable de l’identification et de la mobilisation des acteurs pertinents du territoire. En cela, Florence Meurisse et Marlène Renault sont des « facilitatrices de contact » grâce à leur connaissance de l’écosystème local. Elles ont repéré les acteurs à solliciter : « les gens à proximité des œuvres ou des interlocuteurs, tout ce qui est lié à la parade d’Art Point M, le recensement des associations qui travaillent sur la couture, sur la coiffure, les photographes amateurs du territoire par exemple » mais aussi les commerçants, le monde enseignant… Elles ont également un rôle de conseil, de point d’entrée auprès de personnes qui peuvent être méfiantes par rapport à Un été au Havre 2017. Cela a notamment été le cas pour relayer le projet « Laisse toi prendre » auprès des enseignants. La présentation qui a eu lieu en juin a été l’occasion de tensions et MARC.

Un stage en production artistique

Si la question des acteurs apparaît comme centrale dans mon travail c’est parce que cette notion s’est trouvée omniprésente lors de mon stage. Auprès de Caroline Calchéra et Edouard Zeitoun, chargés de la production artistique, j’étais en relation avec des acteurs variés. Le poste de chargé de production artistique a été pensé spécifiquement pour accompagner Jean Blaise dans l’avancée des projets en établissant la faisabilité des œuvres, en mobilisant les acteurs essentiels à l’organisation. Nous étions également en contact direct avec les artistes impliqués dans l’événement pour les accompagner, des repérages sur place à la présentation puis au développement du projet pour Jean Blaise. Les artistes signent un contrat avec Artevia, sont défrayés par Artevia, qui refacture ensuite le tout au GIP – les relations avec les artistes sont donc cruciales et parfois théâtre de rapports de forces.
La relation avec les différentes parties prenantes d’Un été au Havre 2017 occupe la majorité du temps de travail de mes tuteurs d’autant plus que cela peut s’avérer chronophage en cas de tensions ou d’incompréhension. L’enjeu principal est en effet la temporalité du projet. L’ouverture des quatre mois de festivités a lieu dans un an, par conséquent la période est décisive pour l’avancée de chaque œuvre, de chaque exposition, de chaque fête. C’est le cas par exemple pour les œuvres dans l’espace publiques dont les plus monumentales doivent faire l’objet d’études techniques préalables, de devis – plusieurs pour pouvoir comparer -. Il revient à l’équipe de production artistique en lien avec l’équipe technique de trouver les entreprises compétentes pour des ouvrages parfois exceptionnels. J’ai été chargé entre autres de recenser puis de contacter des miroiteries en priorité basées en Normandie pour avoir une idée du coût d’une des propositions de Baptiste Debombourg (aujourd’hui annulée). Si l’on prend l’exemple de l’œuvre de Chiharu Shiota qui prendra place à l’intérieur de l’église Saint –Joseph, suspendue, l’équation se complique encore. La visite pour les détails techniques a du être faite avec Lionel Coisy, employé municipale au service des Bâtiments, il a fallu également rencontrer l’abbé Petit, responsable de la paroisse pour lui expliquer le projet. Après cela, il fallait solliciter la Commission des Arts Sacrés pour leur soumettre l’œuvre. En lien avec l’artiste, nous avons également sollicité le service des archives de la ville pour obtenir les plans de l’église. Et enfin pour l’installation de cette « tornade de laine rouge », Artevia doit faire appel à une société d’alpinistes, vu la configuration de l’œuvre. Les étapes sont donc nombreuses et chaque contact est nécessaire pour faire avancer le projet.

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Table des matières

Introduction 
I. La ville événementielle comme modèle pour Le Havre ? 
1. Un événement culturel pour célébrer les 500 ans de la ville
2. Le paradigme de la « ville événementielle » et de l’événement comme outil de régénération urbaine
3. Un modèle à enrichir et à dépasser : changement de focale
II. Stratégies d’acteurs et enjeux locaux 
1. Un écosystème composé d’acteurs variés
2. Le défi de l’implantation locale d’un « mega event »
3. La coordination d’acteurs et la gestion de projet au cœur de mon stage chez Artevia
III. Un été au Havre 2017, tournant dans l’action publique culturelle de la ville ?
1. L’enjeu de la gouvernance culturelle des villes
2. Un été au Havre 2017, un événement avec un fort potentiel
3. Les difficultés dans l’impulsion du changement au Havre
Conclusion
Annexes 
Bibliographie 

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