Des élèves qui ont des besoins éducatifs particuliers
Lorsque j’ai consulté les collègues qui accueillent ces élèves en classe ordinaire ou en SEGPA pour les cours d’Histoire Géographie Education Civique sur les difficultés qu’i ls rencontraient, la réponse a été unanime : ils ne maîtrisent pas les principaux repères historiques et géographiques, peinent à se représenter le temps, ont des problèmes de structuration dans le temps, outre les questions liées au comportement en classe , et autres inattention, gesticulation, bavardages et prises de paroles intempestifs.
Les élèves ont été évalués en début d’année scolaire par le collègue coordonnateur sur les compétences des paliers 1 et 2 du socle commun dans les domaines des mathématiques et du français. Pour la plupart des élèves, il a constaté une acquisition partielle des compétences du palier 1, celles du palier 2 sont quasiment inexistantes. Aucune évaluation n’avait été menée en Histoire ni en Géographie.
Il fallait donc commencer par là. SACHA est un jeune garçon de 14 ans 6 mois, né le 19 octobre 2000 et il est inscrit dans le dispositif ULIS pour la troisième année consécutive et vient au collège seul en transport en commun. Il est inclus 14h30 dans sa classe de référence de 4 ème et effectue 10h30 de regroupement en ULIS auxquelles s’ajoutent 2 heures de suivi à l’extérieur (orthophoniste,SESSAD). Le palier 2 n’est pas acquis en ce qui concerne les apprentissages fondamentaux.
Sacha est un élève agréable et souriant. Inclus dans la 6 ème dont j’étais professeur principal 2 ans auparavant, il a continué à venir me saluer dans ma salle ou quand il me croisait dans les couloirs et évoque régulièrement certains chapitres étudiés ensemble. Il pratique l’humour avec aisance, tout en se basculant sur sa chaise avec une nonchalance calculée. Son regard est volontiers pétillant, même à 8h55 le lundi matin. Il discute sans difficulté avec les autres élèves de sa classe, d’ULIS et du collège mais aime surtout être seul, ou cherche une relation privilégiée avec l’adulte, spécialement l’Auxiliaire de Vie Scolaire Collectif. Son comportement en classe est approprié ce qui justifie qu’il soit inclus dans sa classe de référence plus de la moitié de son temps de présence dans l’établissement . Il manifeste depuis son entrée en 6 ème une réelle appétence scolaire et témoigne son envie de réussir par une participation en classe aussi active que possible. Il a à cœur de montrer qu’il sait et sait faire des choses et répond aussi volontiers aux diverses sollicitations, qu’elles émanent de l’AVSco ou de l’enseignant.
Sacha a donc besoin d’être valorisé dans cette participation orale active et efficace.
Quand Sacha est confronté à une difficulté, il est suffisamment autonome pour aller chercher spontanément les réponses qu’il cherche dans son cahier, manuel ou tout autre support à sa disposition. Cette attitude positive a rendu possibles les progrès de cet élève au fil des années.
Elle lui permet de réactiver des souvenirs plus ou moins précis des différents chapitres de 6 ème et de 5ème . En Histoire, il réagit à l’évocation de certains événements majeurs (ex. Première Guerre mondiale, même s’il pense que « 14 » et « 18 » étaient le nombre de personnes ou d’Etats concernés par le conflit…) mais ses connaissances ne sont pas suffisamment ancrées dans sa mémoire pour qu’il puisse les utiliser. Cette difficulté révèle vraisemblablement un problème de stockage trop superficiel ou de récupération de l’information. Il est cependant capable de raconter un événement dans l’ordre chronologique.
Sacha a donc besoin de procédures pour récupérer plus facilement l’information stockée et sans que le support soit nécessaire.
En effet, Sacha a tendance à encore trop s’appuyer sur l’AVSco ou sur l’adulte selon les circonstances, ce qui traduit un manque d’autonomie dans le travail. De plus, il se montre trop influençable. En effet, il se laisse régulièrement embarquer dans des histoires de bagarre ou d’agitation quand il est en regroupement avec d’autres élèves de 3 ème SEGPA ou dans la cour de récréation. Ce constat dénote un manque certain de maturité, l’adolescence et l’effet de groupe n’aidant pas non plus, il est vrai…
La tâche écrite est très laborieuse pour Sacha si bien qu’il lui arrive de rechigner à faire un exercice s’il sent qu’il devra écrire beaucoup (ou trop, à son goût). Il a besoin de temps pour écrire ou d’écrire moins.
La lecture elle aussi est difficile et non porteuse de sens : Sacha déchiffre plus qu’il ne lit. Il lui faut l’aide de l’adulte pour revenir sur ce qu’il a déchiffré et lui apporter l’éclairage nécessaire pour répondre à un questionnaire par exemple. Cette situation rend la présence de l’AVSCo indispensable pendant les évaluations et un aménagement en ce sens est prévu l’an prochain puisque Sacha passera le Diplôme National du Brevet.
NOAH est un élève de 13 ans né le 17 décembre 2001. C’est sa première année dans le dispositif ULIS (faute de place durant son année de 6 ème ). Il passe 11h30 en regroupement et est inclus en 5 ème SEGPA durant 15h30 . Il bénéficie de deux séances d’orthophonie par semaine (soit 1 heure). Ses compétences du socle commun palier 2 sont à consolider. Noah est relativement petit comparé aux autres élèves de son niveau scolaire (et spécialement quand il est en ULIS avec les élèves de 3 ème SEGPA). Cette caractéristique physique a son importance car Noah déploie une énergie impressionnante pour s’imposer par d’autres moyens que sa carrure. Revêche au premier abord, son attitude a tendance à demeurer rétive.
Noah ne parvient pas à rester concentré très longtemps. Il manque de confiance en ses capacités à réussir et préfère refuser toute nouvelle tâche. Il répète sans cesse qu’il ne sait pas, il s’agit de la phrase qui sort de sa bouche le plus fréquemment, tel un leitmotiv.
Il a besoin d’être valorisé aux yeux des autres pour se sentir compétent et entrer dans la tâche.
Il conviendra d’encourager régulièrement toute démarche de prise de risque, s’il se trompe,il faudra lui montrer que l’on utilise l’erreur comme point d’appui pour construire les savoirs et savoir-faire.
Noah rechigne plus encore quand il s’agit de tâche écrite. Il a des difficultés à accepter l’erreur et préfère abandonner plutôt que demander de l’aide. Pourtant, Noah se repose beaucoup sur les adultes qui l’entourent pour l’aider à faire son travail . Il pose régulièrement la tête sur sa table pour signifier son ennui ou sa fatigue. En début de séance, il garde systématiquement son manteau, prétextant qu’il a froid. Il s’énerve rapidement et se braque quand on exige quelque chose de lui mais son humeur est versatile et il est de nouveau accessible quelques minutes plus tard. Agité, il gesticule sans cesse sur sa chaise mais « râle » également quand l’occasion lui est donnée de se lever et de faire une activité debout . Il trouve d’ailleurs toujours une bonne raison de ne pas se mettre au travail ou de ne pas finir celui qu’il a commencé.
Il semble évident que Noah a besoin d’un certain espace de liberté pour éviter que trop de contrainte n’annihile son envie (déjà limitée) de travailler. De plus, entrer dans la tâche sera toujours plus aisé pour lui si les activités proposées (spécialement en début de séance) sont accessibles et ludiques pour que travailler ne rime pas avec ennui.
Noah participe à l’oral mais ses interventions sont le plus souvent intempestives, non canalisées : Noah ne respecte pas les règles du groupe à propos de la prise de parole spécialement. Noah éprouve des difficultés à faire le lien entre les différentes notions vues en classe, il ne réactive pas les connaissances abordées lors des séances précédentes.
Il a besoin de visualiser les savoirs et de manipuler pour les encoder , les stocker et être capable de les récupérer plus facilement.
Cependant, Noah est toujours volontaire pour faire des mathématiques, du calcul, mental ou écrit. Il comprend les consignes simples et cherche à entrer en relation avec les autres.
Des élèves aux multiples intelligences
Lors d’une séance, je leur ai proposé le questionnaire trouvé dans l’ouvrage Vaincre ses difficultés scolaires grâce aux intelligences multiples de Renaud Keymeulen . J’ai adapté le vocabulaire au niveau de compréhension des élèves, raccourcissant certaines formulations pour que l’exercice ne les lasse pas trop rapidement. Ils s’y sont prêtés de bonne gr âce, un peu trop même pour l’un d’entre eux qui a validé presque tous les items, ce qui m’a contrainte à affiner mon diagnostic à l’aide d’une autre grille d’observation. J’aurais préféré n’utiliser que la méthode d’observation mais ne les voyant qu’une heure par semaine, mes possibilités étaient trop limitées. A la faveur des heures de regroupement qui lui offre nt une meilleureconnaissance des élèves, Monsieur Gambier a par ailleurs validé mes conclusions.
NOAH
Le test de Noah a mis en évidence une intelligence logico -mathématique dominante, des intelligences kinesthésique et interpersonnelle prononcées.
Ses réponses correspondent parfaitement à ce que j’avais coché en amont dans la grille d’observation des IM : il aime calculer, trouver l’erreur, la solu tion à un problème, marche rapidement pour rejoindre sa salle de classe, a besoin de bouger même (surtout) quand il est assis, préfère être à l’extérieur, l’EPS aux matières plus « théoriques », arrive souvent au collège avec des hématomes parce qu’il a joué les casse-cou. C’est un enfant qui a un contact facile avec les autres, adultes compris ; il préfère travailler en groupe, se montre soucieux (curieux aussi) de ce que ressentent les autr es, ne refuse jamais d’expliquer à ses camarades ce qu’ils n’ont pas compris lorsqu’il s’agit d’un sujet qui ne le met pas en difficulté. SACHA Quant à Sacha, ses intelligences dominantes s’avèrent être les intelligences visuo-spatiale et intrapersonnelle, ce qui correspond aussi logiquement à ce qui j’avais observé par ailleurs : il aime dessiner, et couvre ses cahiers de smileys. En classe, il écrit tout en écoutant. Il préfère apprendre en s’aidant de couleurs (les cartes heuristiques sont un support pertinent pour l’aider à mémoriser), a un bon sens de l’orientation (le cycle de course d’orientation en 6 èmeavait été un de ceux où il avait été le plus performant durant son année scolaire), visualise dans sa tête quand il cherche à se souvenir de quelque chose, particulièrement en Géographie avec les cartes et les croquis de synthèse qui sont nombreux dans le programme de 4ème. S’il cherche le contact de l’adulte, il aime être seul, ne cherche pas absolument à rejoindre le groupe, exprime aisément ses opinions, ses intérêts, ses projets personnels (même quand ils se résument à jouer à la console de jeux vidéo), il a été le seul à ne pas rechigner lors du passage du test pour identifier les IM, témoignant ainsi de sa capacité à réfléchir sur lui-même.
Etant donné le profil des élèves évoqués tout au long de cette première partie, j’ai décidé d’axer mon travail sur l’acquisition des principaux repères historiques en me servant de la théorie des intelligences multiples de Howard Gardner et de proposer une évaluation des apprentissages sous forme d’un jeu construit avec les élèves.
Où puiser des idées pour les aider à réussir en Histoire ?
La théorie des intelligences multiples au service des élèves TFC d’ULIS
Dans le projet de l’ULIS pour l’année 2014-2015, il est proposé de personnaliser les apprentissages grâce à la théorie des intelligences multiples afin d’aider les élèves à progresser en prenant confiance en leurs capacités.
La théorie des intelligences multiples a été développée par Howard Gardner qui a relevé 8 formes d’intelligence. « Chaque intelligence doit pouvoir se développer, être observable chez certaines populations tels que les prodiges ou les « savants » ; on doit pouvoir la localiser dans le cerveau et la représenter par des symboles ou dans un système de notation. […] Nous possédons de manière variable chacune des huit intelligences ; nous les combinons et les utilisons de diverses façons qui nous sont très personnelles. […] Les nombreux élèves qui n’arrivent pas à prouver qu’ils possèdent les intelligences scolaires traditionnelles développent une faible estime d’eux-mêmes. […]
Les intelligences sont des outils permettant d’apprendre, de résoudre des problèmes, de créer ; tous les êtres humains peuvent les utiliser.»
Les huit formes d’intelligence sont :
1. l’intelligence verbo-linguistique est la capacité de penser avec des mots, d’utiliser le langage pour comprendre et exprimer ce qui est complexe et de percevoir les structures linguistiques sous toutes leurs formes.
2. l’intelligence logico-mathématique est la capacité de compter, calculer, quantifier, d’analyser des propositions et des hypothèses, d’exécuter des opérations mathématiques complexes, de tenir un raisonnement logique.
3. l’intelligence corporelle-kinesthésique permet de manipuler les objets et de manifester des habiletés physiques qui exigent une grande précision, d’utiliser son corps d’une manière fine et élaborée, de s’exprimer à travers le mouvement, d’être habile avec les objets.
4. l’intelligence visuelle-spatiale est la capacité de penser en trois dimensions. Elle permet de percevoir des images extérieures et intérieures, de recréer, de transformer et de modifier des images. Elle facilite la production ou le décodage de l’information graphique.
5. l’intelligence musicale est caractéristique des individus qui font preuve d’une grande sensibilité au ton, à la mélodie, au rythme et à la sonorité.
6. l’intelligence interpersonnelle est la capacité de comprendre, d’entrer en relation avec les autres, d’interagir efficacement avec eux.
7. l’intelligence intrapersonnelle porte sur la capacité de se construire une perception exacte de soi-même et d’utiliser cette connaissance pour planifier et diriger sa propre vie.
La frise chronologique : un jeu d’ULIS !
De l’intérêt de la frise chronologique pour encoder les repères historiques
L’utilisation de la frise chronologique représente l’intérêt majeur de permettre aux élèves de visualiser d’un simple coup d’œil le temps qui passe, représenté à l’horizontale ou à la verticale. Pour les élèves dotés d’une intelligence « visuelle-spatiale » dominante, la mémorisation se fera d’autant plus facilement si les événements, dates ou personnages sont couchés sur le papier.
Pour les autres types d’intelligence, construire la frise elle-même permet d’encoder plus facilement : les intelligences « kinesthésiques » apprécient de pouvoir manipuler, bouger, s’approprier physiquement le support de leurs savoirs, les intelligences « logicomathématiques » mettent leur facilité de calcul au service du respect de la proportionnalité, de la mise en ordre chronologique. Les intelligences « intrapersonnelles » auront à réfléchir à la pertinence des dates ou événements choisies quand les « interpersonnelles » s’épanouiront dans la mise en place d’un projet collectif autour d’un ensemble de tables réunies pour l’occasion, afin de voir se fédérer toutes les intelligences du groupe en vue d’atteindre le même objectif.
En outre, une fois la frise chronologique construite, elle pourra resservir en d’autres occasions.
Jouer pour apprendre les repères historiques : quand une frise chronologique devient un jeu
Après m’être interrogée sur les objectifs visés, et avant de me lancer dans la conception du jeu, je devais m’interroger sur la pertinence de mon choix pour les att eindre. Pourquoi un jeu sera-t-il supérieur à une autre activité pour l’atteindre ? En effet, tout ne peut pas être abordé sur le mode ludique et le jeu ne doit pas être une fin en soi.
L’objectif visé n’est pas seulement l’acquisition des principaux repères historiques mais plutôt de réveiller les élèves, de faire entrer le plaisir dans la classe. Pour que l’apprentissage rime plus souvent avec plaisir, pour faire naître et développer l’intérêt et la motivation des élèves, de favoriser leur action et leur réflexion et d’accroître un investissement qui n’est pas toujours à son maximum.
La frise chronologique dont nous venons de voir l’intérêt, sera donc notre plateau de jeu. D’après le réseau Ludus de l’Académie de Caen fondé par des enseignants d’Histoire Géographie , la pratique du jeu dans cette discipline est encore très marginale en France alors qu’elle est très développée et depuis longtemps dans les pays anglo-saxons. Rappelons que le jeu a pour intérêt de faire entrer le plaisir dans la classe. Et complétons le raisonnement : sans plaisir pas de désir, sans désir pas d’apprentissage, donc, sans plaisir pas d’apprentissage…
Depuis longtemps, les psychologues ont montré « que le jeu est une activité fondamentale de la construction de l’enfant, celui-ci, lorsqu’il arrive à l’école, lieu par excellence de son développement, va subitement devoir abandonner ce qui, jusqu’alors, était l’une de ses activités principales. L’on n’apprendrait bien que dans l’effort : «Travaille et tu comprendras !» Et si c’était le plaisir et non la souffrance qui était le moteur de l’apprentissage ? » (réseau Ludus) Jouer serait donc un excellent moyen de motiver les élèves y compris les moins «scolaires». En outre, en Histoire, le jeu donne la possibilité de faire vivre autrement des situations historiques trop souvent présentées de manière schématique et conceptuelle, ho rs de portée du collégien. Il offre un formidable terrain d’aventure aux enseignants désireux de changer leurs pratiques.
Le projet : l’Histoire en ULIS
Il s’agissait donc de faire de l’Histoire autrement en ULIS avec l’aide de la théorie des intelligences multiples de H. Gardner et du jeu pour permettre à des élèves d’ULIS présentant des troubles des fonctions cognitives d’acquérir les principaux repères historiques.
Nos rendez-vous du lundi matin
1 ère étape : se familiariser avec le temps en Histoire
Lors de la première séance, le 8 décembre 2014, je me suis présentée aux élèves du groupe en leur expliquant la raison et l’objectif du projet que je leur proposais. Ils ont manifesté une certaine curiosité et un enthousiasme modéré par la peur d’avoir à apprendre des dates par cœur !
Il s’agissait dans un premier temps de mesurer les difficultés qui pouvaient être les leurs à se repérer dans le temps. Nous a vons donc abordé une question au premier abord simple : « Comment mesure-t-on le temps qui passe en Histoire ? » à l’aide d’objets présentés grâce au vidéoprojecteur ou leur appartenant.
Cette étape avait pour but de les familiariser avec les outils de mesure du temps afin qu’ils réussissent à distinguer ceux qui servent au quotidien et ceux qui servent à l’historien. Ce faisant, je sollicitais l’intelligence « naturaliste »
L’évaluation par le jeu
A l’heure où j’achève cette rédaction, je n’ai eu le temps de tester que la version « contre la montre-coopératif » avec les élèves. Aussi ne pourrai-je présenter de conclusions sur les 2 variantes qu’à l’occasion de la soutenance du mémoire. Les grilles d’observations présentées en annexes différent selon les différentes règles pratiquées, une grille sur les connaissances et les compétences/capacités visées sera également complétée à l’issue des séances.
Noah, Sacha et leurs camarades se sont très facilement pris au jeu. Ils n’ont pas vraiment pris conscience que l’objectif était d’apprendre des repères. Après quelques parties, j’ai pu constater que Noah et Sacha se souvenaient des cartes précédentes, des erreurs déjà commises, par eux, par les autres… et un peu à la fois se sont appropriés les dates, les événements, les personnages. Ils ont commencé à acquérir une vision d’ensemble de la chronologie qui va leur permettre de construire leur propre procédure d’encodage. Noah s’est rendu compte qu’il pouvait mémoriser par l’image proposée avec le repère, même s’il s’est montré plus à l’aise avec les cartes-dates, ce qui est logique compte tenu de son profil d’intelligence « logico-mathématique ».
Pour éviter de mal placer une carte, Sacha a su prendre le temps de la réflexion pour mobiliser ses connaissances. Il a argumenté à voix haute avant de décider de placer les cartes pour convaincre ses camarades. Le fait de travailler ensemble s’est accompagné de quelques mésententes dans le groupe lorsqu’une carte était sujette à polémique. Noah criant plus fort que les autres pour compenser sa petite taille, le groupe s’est parfois trop rapidement plié à ses suggestions. Sacha a peiné à s’imposer même lorsqu’il avait la bonne réponse. Cet aspect de son intelligence « intrapersonnelle » le pénalisera vraisemblablement moins dans la version « contre la montre-compétition » et « la carte et l’écu ».
La plastification des cartes s’est révélée être une étape incontournable. En effet, ils les ont largement manipulées, tordues au gré de leur réflexion, tournées et retournées comme si elles allaient leur dévoiler une information secrète qui leur aurait échappé jusqu’alors !
Il faudra néanmoins prévoir de leur représenter régulièrement l’activité pour les inciter à récupérer les repères ainsi mémorisés. Nous pouvons même envisager de poursuivre l’expérience durant les années à venir puisque le plus jeune élève du groupe vient d’arriver en 6ème, tandis que le plus âgé entrera en 3ème en septembre avec l’enjeu du DNB en ligne de mire. D’autres dates ou événements pourront être ajoutés, que les élèves amèneront de leurs cours. La fabrication de nouvelles cartes pourrait alors faire l’objet de séances ponctue lles.
CONCLUSION
Au moment de conclure ce travail, je dois reconnaître ma frustration de n’avoir pas eu plus de temps pour mettre en œuvre mon projet. L’organisation de l’année de formation au 2CASH, les incertitudes sur l’écriture de PPS pour certains élè ves avec lesquels j’avais envisagé dans un premier temps de travailler et les contraintes liées à la prise en charge de mes classes ont retardé la prise de décision si bien qu’en ne commençant à intervenir en ULIS qu’en décembre, il était peu probable que je puisse tirer une conclusion générale en fin de mémoire. Il est pourtant indéniable qu’à ce stade, le rapport au temps et à sa représentation qu’ont les élèves, a considérablement évolué et qu’ils ont à présent tous acquis la chronologie des différentes époques historiques. Une demi-douzaine d’événements historiques majeurs leur est maintenant familière, même s’il leur est encore difficile de récupérer les dates : une séance unique de pratique du jeu n’étant évidemment pas suffisante pour un encodage efficace.
Il me faut donc reporter une analyse plus complète, un constat de l’évaluation finale et envisager de les présenter à l’occasion de la soutenance de ce travail afin qu’il prenne tout son sens. Je pourrai alors répondre avec plus d’exhaustivité à des questions fondamentales comme « est-ce que mon jeu a fonctionné dans toutes ses versions ? », « est-ce qu’à l’issue de cette vingtaine de séances en ULIS Noah et Sacha ont acquis les principaux repères historiques visés ? », « y ont-ils pris plaisir ? », « quelles modifications peuvent être envisagées pour les prochaines années ? », « ont-ils sollicité d’autres intelligences que leur intelligence dominante pour atteindre les objectifs fixés ? ». Les réponses à toutes ces questions n’auront pas seulement pour but d’améliorer le jeu pratiqué lors de nos séances mais surtout de m’accompagner dans la poursuite de ma réflexion personnelle entreprise cette année à propos de mes pratiques pédagogiques, sur la place que je dois à l’avenir accorder de façon beaucoup plus systématique aux intelligences multiples et au jeu dans mon enseignement et ma manière d’évaluer tous l es élèves, qu’ils souffrent ou non de troubles des fonctions cognitives.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. À la rencontre de Noah et Sacha
A. Comment fonctionne l’ULIS du collège Flandre ?
B. Le groupe d’ULIS du lundi matin
C. Des élèves qui ont des besoins éducatifs particuliers
D. Des élèves aux multiples intelligences
2. Où puiser des idées pour les aider à réussir en Histoire ?
A. La théorie des intelligences multiples au service des élèves TFC d’Ulis
B. Que disent les textes officiels sur l’acquisition des repères historiques en fin de cycle 3 et en cycle 4 ? Quelles pistes pour des élèves TFC ?
C. La frise chronologique : un jeu d’ULIS !
3. Le projet : l’Histoire en ULIS
A. Nos rendez-vous du lundi matin
B. L’évaluation par le jeu
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES