LA TECHNOLOGIE HYDROLIENNE
Les chaines de production d’énergie hydrolienne sont très similaires à celles des systèmes éoliens. Les principaux composants constituant la chaine de conversion sont : la ressource (les courants marins), la turbine hydrolienne, le multiplicateur, le bloc convertisseurgénératrice et le système de raccordement au réseau.
La ressource
La marée
Pour produire de l’électricité, les hydroliennes exploitent l’énergie cinétique des courants de marée. La marée est un mouvement périodique contrôlant la variation du niveau des mers et des océans et les courants qui en résultent. La pleine mer et la basse mer désignent les instants où les niveaux d’eau sont maximaux et minimaux, respectivement. La différence de hauteurs d’eau entre ces deux instants s’appelle le marnage. Les forces de marée résultent principalement d’interactions gravitationnelles entre la Terre, la Lune et le Soleil. Dans l’univers, tous les corps s’attirent, plus ou moins, en fonction de leurs masses et de la distance qui les sépare. C’est ainsi qu’une molécule d’eau terrestre est soumise à la fois à la force gravitationnelle terrestre et aux forces d’attraction gravitationnelle des deux astres (Lune et Soleil). Ces deux astres exercent une attraction sur les océans qui créé des ondes de marée. Ces ondes se déplacent à la surface de la terre en fonction des positions relatives des astres et de la rotation de la Terre qui tourne sur elle même. La propagation des ondes de marée dépend également de la forme des côtes et de la morphologie des fonds marins. La Lune étant plus proche de la terre que ne l’est le Soleil, elle a un rôle prépondérant sur la marée. Lorsque la Terre, le Soleil et la Lune sont alignés, les effets de ces deux derniers se renforcent et par conséquent, il y a des grandes marées. On parle alors de périodes de vives eaux. Lorsque les astres sont en quadrature, les effets se compensent et les marées sont de faibles amplitudes. On parle alors de périodes de mortes eaux .
Concernant les courants, il existe trois types de courant de marée. Le courant de flot est celui qui se produit lors de la marée montante, le courant de jusant accompagne la marée descendante. Enfin, la période d’étale des courants (ou renverse) désigne le moment entre le flot et le jusant où le courant est presque nul.
Les sites hydroliens Français
Le gisement énergétique hydrolien français exploitable est estimé entre 5 à 14 Twh/ an, soit 2 à 3 GW installés. ce potentiel est fortement concentré en Basse Normandie et en Bretagne avec des gisements importants notamment dans le Raz Blanchard et dans le Passage du Fromveur. Le site du Raz Blanchard est situé entre le cap de la Hague à la pointe nord-ouest du Cotentin et l’île anglo-normande d’Aurigny, à l’entrée nord du passage de la Déroute. Ce site est caractérisé par des courants de marée moyens supérieurs à 2,5 m/s et une profondeur d’eau comprise entre 25 et 65 m. C’est l’une des zones les plus prometteuses au monde pour la production d’énergie hydrolienne. Coles et al. [13] ont utilisé un modèle Telemac2D de la Manche pour quantifier la ressource des courants de marée dans ce site. Les auteurs ont estimé que la puissance maximale pouvant être extraite du Raz Blanchard atteint 5,1 GW. Cette estimation est seulement 10 % inférieure à celle pouvant être extraite dans le passage Minas au Canada [14], le site ayant le plus grand gisement hydrolien au monde.
Malgré le potentiel hydrodynamique important du Raz-Blanchard et sa proximité de la côte, aucune turbine hydrolienne n’a été testé sur site à cause du retardement de projets dans cette zone. Les projets de parcs pilotes qui en étaient à leurs débuts dans le RazBlanchard ont été abandonnés en raison de l’arrêt des investissements dans les turbines OpenHydro et Alstom. Cela a eu un impact sur d’autres projets tels que Nepthyd et Normandie Hydro. Cependant, à mesure que la technologie de l’énergie hydrolienne se développe, de nouveaux projets sont attendus. Par exemple, un partenariat a été présenté le 18 octobre 2018 à Cherbourg entre la région de Normandie et la société britannique Simec Atlantis Energy (SAE) pour créer l’entreprise Normandie Hydrolienne. L’entreprise compte construire un parc pilote qui comprendrait dix hydroliennes d’une capacité totale de 20 MW [15]. Les deux entreprises Hydroquest et CMN (Constructions Mécaniques de Normandie) prévoient également d’installer un parc pilote dans le RazBlanchard [16].
Le passage du Fromveur est situé quant à lui, au nord de la mer d’Iroise (Finistère, France). Il sépare l’archipel de Molène et l’île d’Ouessant à travers un chenal de 2 km de large et environ 4 km de long. la hauteur d’eau moyenne dans le passage du Fromveur est de 50 m tandis que les courants de marée peuvent atteindre dans cette zone les 4 m/s [17]. Le Passage du Fromveur a été identifié par le gouvernement français comme l’un des principaux sites pour l’implantation d’hydroliennes dans les eaux côtières françaises. Une zone restreinte de 4 km2 (zone AMI) a donc été identifiée dans le passage du Fromveur pour le développement de futurs projets industriels .
Hydrolienne
Le principe de fonctionnement des hydroliennes ressemble en grande partie à celui des éoliennes. Il consiste à exploiter l’énergie cinétique du fluide en mouvement pour mettre en mouvement les pales. Cette énergie cinétique est transformée en énergie mécanique (un couple mécanique) puis en énergie électrique grâce à une génératrice. Exploiter les courants de marée pour produire de l’énergie électrique n’est pas une idée nouvelle. La première turbine permettant d’exploiter les courants de marée a été développée par l’entreprise Underwater Electric Kite en 1981 [18]. Cependant, la faisabilité commerciale de cette technologie n’a commencé réellement à progresser dans le monde qu’à partir de 2003, lorsque l’entreprise Marine Current Turbines Ltd (MCT) a installé à Lynmouth, sur la côte nord du Devon, la première turbine hydrolienne expérimentale d’une puissance de 300 kW et d’un diamètre de 11 m [18], [19]. Cette progression a été accompagnée par un emballement du nombre de concepts d’hydroliennes avec des architectures et des conditions d’utilisation très variées, laissant présager la structuration non pas d’un seul mais de plusieurs marchés hydroliens [4]. En effet, en 2003, selon l’Agence Internationale d’Energie, il n’existait que cinq concepts différents. Alors qu’en 2009 plus de 50 concepts d’hydroliennes ont été recensé par le département américain de l’énergie [18]. L’essentiel des hydroliennes qui existe aujourd’hui peut être classé dans deux grandes familles : les hydroliennes à flux axial et les hydroliennes à flux transverses.
Les hydroliennes à flux axial
Les hydroliennes à flux axial sont les plus développées aujourd’hui. Elles utilisent un axe de rotation parallèle à l’écoulement et sont souvent appelées « hydrolienne à axe horizontal ». Comme la direction des courants est variable, la turbine peut soit fonctionner dans les deux sens (la turbine est presque symétrique) soit disposer d’un système de rotation lui permettant de faire constamment face à l’écoulement. Ce système d’orientation de la nacelle offre un meilleur rendement à la turbine car elle est toujours bien alignée avec le courant. Cependant, sa présence diminue la fiabilité mécanique de l’hydrolienne et peut également générer une augmentation des coûts de fabrication et de maintenance. Les turbines à flux axial sont dans la plupart des cas des turbines tripales auto-démarrantes. Elles sont souvent équipées d’un système d’orientation des pales pour pouvoir contrôler la puissance extraite et la poussée exercée en fonction de la vitesse du courant. Enfin, notons qu’elles sont parfois carénées pour canaliser l’écoulement et augmenter leurs performances.
La plupart des projets hydroliens adoptent ce concept de turbines tripales à flux axial. Nous citerons ci-dessous deux exemples de projets ayant adopté ce concept:
❖ Le projet d’énergie marine MeyGen [21] : C’est la plus grande installation de production d’énergie hydrolienne au monde. Durant la première phase du projet, quatre hydroliennes tripales à flux axial ont été installées. Chaque turbine produit une puissance de 1.5 MW avec un rotor de 16 m de diamètre. Une de ces turbines a été fabriquée par l’entreprise Atlantis . Les trois autres ont été fabriquées par l’entreprise Andritz Hydro Hammerfest . L’installation de ces 4 hydroliennes servira de précurseur au développement de la phase 2 et 3 du projet. Ces deux phases restantes permettront d’atteindre 398 MW.
❖ Le projet de démonstrateur pré-industriel Sabella D10 : La PME finistérienne Sabella a immergé en 2015 une hydrolienne d’une puissance de 1 MW et d’un diamètre de 10 m . La turbine a été installée dans le Passage du Fromveur. C’est la première machine française à avoir été raccordée au réseau (à l’île d’Ouessant).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1. ETAT DE L’ART
1.1 Introduction
1.2 La technologie hydrolienne
1.2.1 La ressource
1.2.2 Hydrolienne
1.2.3 Fondation
1.2.4 Multiplicateur
1.2.5 Génératrice
1.2.6 Connexion au réseau électrique terrestre
1.3 Architecture électrique des parcs d’hydroliennes
1.3.1 Composants du système de connexion électrique
1.3.2 Topologie de raccordement du réseau électrique de parcs d’hydroliennes
1.4 Opérations de maintenance
1.5 Outils d’optimisation
1.6 Projet OceanQuest
1.6.1 Principaux objectifs du projet
1.6.2 Démonstrateur HydroQuest
1.7 Conclusion
CHAPITRE 2. MODELISATION ENERGETIQUE ET ECONOMIQUE D’UN PARC D’HYDROLIENNES
2.1 Introduction
2.2 Modélisation énergétique du parc d’hydroliennes
2.2.1 Pré-analyse des données hydrodynamiques
2.2.2 Les effets de sillage
2.2.3 Evaluation des pertes dans le réseau électrique par calcul de l’écoulement de puissance
2.3 Modélisation des coûts des composants du parc d’hydroliennes
2.3.1 Coût des hydroliennes
2.3.2 Coût du système électrique
2.3.3 Coût des opérations de maintenance
2.4 Conclusion
CHAPITRE 3. METHODES ET TECHNIQUES D’OPTIMISATION
3.1 Introduction
3.2 Méthodes d’optimisation
3.2.1 Optimisation et définitions
3.2.2 Méthodes de résolution des problèmes d’optimisation
3.2.3 Etat de l’art sur les approches d’optimisation dans le contexte des énergies marines renouvelables
3.2.4 Optimisation séquentielle et optimisation globale
3.3 Formulation du problème d’optimisation
3.3.1 Optimisation séquentielle
3.3.2 Optimisation globale
3.4 Optimisation de l’architecture d’un parc d’hydroliennes
3.4.1 Optimisation du nombre d’hydroliennes et de leur positionnement
3.4.2 Optimisation de la topologie de connexion électrique
3.4.3 Méthode d’optimisation globale
3.5 Conclusion
CHAPITRE 4. APPLICATIONS ET RESULTATS
4.1 Introduction
4.2 Hypothèses générales
4.3 Impact de la taille du parc et du choix du site sur le coût de production de l’énergie
4.3.1 Hypothèses et caractéristiques du parc
4.3.2 Description des configurations testées
4.3.3 Résultats et discussion
4.4 Configuration optimale du Point de Collection d’Energie Offshore
4.4.1 Description des configurations testées
4.4.2 Résultats et discussion
4.5 Comparaison de l’approche séquentielle et de l’approche globale
4.6 Conclusion
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUE
LISTE DES FIGURES
ANNEXES