La sรฉcheresse et la salinitรฉ constituent des contraintes majeures limitant considรฉrablement la production vรฉgรฉtale. La salinitรฉ est donc un problรจme grave car elle rรฉduit ou empรชche la croissance et le dรฉveloppement des plantes surtout en zones arides et semi aride (Apse et al 1999). Chaque annรฉe la salinitรฉ gagne du terrain en raison de lโextension des surfaces irriguรฉes (utilisation dโeau impropre) du fort ensoleillement et de la faible pluviomรฉtrie qui engendre lโextension de la salinisation. Prรฉs de 1milliard dโhectares de terre dans le monde ne sont plus utilisables ร cause de la salinitรฉ (Jain et al 1989) ce qui reprรฉsente 7% de la surface de la terre.
La vallรฉe du fleuve Sรฉnรฉgal occupe une place centrale dans la stratรฉgie globale de dรฉveloppement de la Mauritanie et du Sรฉnรฉgal, car c’est une rรฉgion qui recรจle un bon potentiel agricole. Mais suite ร lโรฉdification des barrages de Diama ( ร 26 km de l’embouchure du fleuve) et de Manantali (ร quelque 1.000 km en amont), la rรฉgion ร connu de profondes modifications sociales et environnementales. Lโirrigation intensive qui y est pratiquรฉe permet de lever la principale contrainte pour la production, mais elle peut engendrer a long terme des risques pour lโรฉvolution des sols : salinisation et acidification. La salinisation, qui a accompagnรฉ l’amรฉnagement des barrages, pose des problรจmes environnementaux dans le delta et la basse vallรฉe. Ces zones ne sont plus comme autrefois lessivรฉes par l’eau douce du fleuve. Les sรฉcheresses et la diminution de l’ampleur de la crue ont entraรฎnรฉ le dรฉpรฉrissement de vastes peuplements d’Acacia nilotica, notamment au niveau du parc du Diawling, dont les sols sont soumis actuellement ร deux contraintes majeures: la salinitรฉ et l’aciditรฉ.
Dans la vallรฉe du fleuve Sรฉnรฉgal, A. nilotica est une des rares espรจces adaptรฉe ร ces sols salรฉs. Cette lรฉgumineuse joue รฉcologique et รฉconomique considรฉrable en offrant ombrage, abri, combustiblesโฆet assurant la fertilisation azotรฉe des sols par le biais de leurs potentialitรฉs symbiotiques. En effet, cette plante sโassocie ร des microorganismes du sol tels que les champignons mycorhiziens et les rhizobiums lui permettant dโamรฉliorer sa nutrition hydrominรฉrale. Lโexploitation du potentiel symbiotique mycorhizienne et rhizobienne de lโespรจce pourrait permettre dโattรฉnuer les effets nรฉfastes du sel sur la survie et la productivitรฉ des vรฉgรฉtaux tout en maintenant le couvert vรฉgรฉtal des zones dรฉgradรฉes.
Symbiose mycorhizienne
Les mycorhizes (du grec mukรชs =champignons et rhiza=racine) sont des associations entre les racines des vรฉgรฉtaux et les champignons symbiotiques du sol. Il sโagit dโune union mutualiste basรฉe sur des รฉchanges rรฉciproques actifs entre deux partenaires (champignons – plantes). Cette symbiose a รฉtรฉ mise en รฉvidence en 1885 par le botaniste allemand Franck, mรชme si son existence semble trรจs ancienne et remonterait au carbonifรจre, il y a 300 millions dโannรฉes environ (Stubblefield et al., 1988 ; Pirozynski et Dalpรฉ, 1989 ; Simon et al. 1993).De plus, il a รฉtรฉ avancรฉ par Taylor et Osborne (1995) que les vรฉgรฉtaux supรฉrieurs nโauraient pu conquรฉrir la terre ferme sโils nโavaient pas รฉtรฉ associรฉs ร des champignons mycorhiziens, soulignant ainsi le rรดle crucial quโont jouรฉ, et jouent encore, les mycorhizes dans lโรฉvolution des plantes terrestres. Les diffรฉrents types de mycorhizes qui existent se distinguent ร la fois par les groupes taxonomiques des partenaires symbiotiques impliquรฉs et par les structures typiques formรฉes par la symbiose. On distingue ainsi trois groupes principaux de mycorhizes sur la base de critรจres morphologiques : ce sont les ectomycorhizes, les endomycorhizes (constituรฉes des endomycorhizes ร peloton dโhyphes cloisonรฉs et des endomycorhizes ร vรฉsicules et arbuscules) et les รฉctendomycorhizes. Parmi les mycorhizes, celles ร arbuscules constituent la symbiose vรฉgรฉtale la plus commune car concernent environ 80% des plantes terrestres.
La symbiose mycorhizienne arbusculaire
Les symbioses mycorhiziennes arbusculaires, trรจs rรฉpandue ร cause de lโubiquitรฉ des champignons concernรฉs. Ces associations sont rencontrรฉes dans presque toutes les familles du rรจgne vรฉgรฉtale (kendrick, 1992) soit 80 % des plantes terrestres (Heigelen et al., 1992) Le terme ยซ arbuscule ยป caractรฉrisant les champignons MA dรฉcrit la structure typique formรฉe par toutes les espรจces de cet ordre. Les arbuscules prennent lโapparence dโun arbuste (Gallaud 1905 ; Brundett et al., 1984) et se retrouvent ร lโintรฉrieur des cellules corticales de la racine. Ils sont le lieu dโรฉchange entre les deux partenaires (champignon et plante hรดte), ils ont une vie รฉphรฉmรจre et ne se rencontrent que dans les cellules vivantes. Certains champignons arbusculaires produisent en plus des vรฉsicules qui sont des organes de rรฉserves .
A ce jour on dรฉnombre environ 150 symbiotes arbusculaires (Walker et Trappe, 1993). Ils ne peuvent รชtre cultivรฉs seuls (en absence de la plante hรดte) et sont qualifiรฉs de biotrophes obligatoires. Leur cycle biologique dans le sol repose entiรจrement sur la prรฉsence de racines vivantes de la plante hรดte (Hepper, 1987).
Plusieurs travaux ont montrรฉ que le bon fonctionnement de la symbiose plante – champignon permettent une amรฉlioration de la nutrition minรฉrale (Khaled et al. 2003), une rรฉsistance aux stress environnementaux tels que la sรฉcheresse la salinitรฉ le froid les pathogรจnes (Dehne, 1982 ; Sylvia et williams, 1992 ; Manga, 2005) et une amรฉlioration de lโenracinement et de la floraison. Ces champignons symbiotiques utilisent les dโhydrates de carbone que les plantes produisent par photosynthรจse (Harley et Smith, 1983) et fournissent en รฉchange aux vรฉgรฉtaux des substances minรฉrales essentielles et de lโeau .
Classification des champignons MA
Selon la classification de Morton et Benny, (1990), les mycorhizes arbusculaires appartiennent aux zygomycรจtes et ont รฉtรฉ regroupรฉs en ordre, celui des Glomales avec deux sous-ordre : les Endogonales et les Glomales. Lโessentiel des espรจces connues appartiennent ร la famille des Glomacรฉes (Pirozynski et Dalpรฉ, 1989). Dans la nouvelle classification (Schรผรler et al., 2001 ; Walker et Schรผรler, 2004), les champignons MA sont regroupรฉs sur la base dโรฉtudes molรฉculaires sous lโembranchement des Glomeromycota (anciennement Glomales). Cette classification rapproche les champignons MA des Ascomycรจtes et des Basidiomycรจtes contrairement ร la classification de Morton et Benny, (1990).
Les avantages de la mycorhization
Une meilleure nutrition hydrominรฉrale
Une plante mycorhizรฉe sโavรจre mieux nourrie et mieux adaptรฉe ร son environnement. En effet il a รฉtรฉ montrรฉ que les mycorhizes accroissent sensiblement la rรฉsistance ร la sรฉcheresse, et a la salinitรฉ (Sylvia, 1995 ; Mukerji, 1996 ; Abdelilah et al., 2000) grรขce ร une augmentation du volume de sol explorรฉ par les hyphes fongiques (Gianinnazzi-Pearson et Dem, 1982 ; Cornel et al. 1982), ร une augmentation de la conductivitรฉ hydrique et ร une meilleure absorption dโeau (Safir et al. 1972). Coperman et al. (1996) Ont montrรฉ que la tomate (Lycopersicon esculentum) cultivรฉe en prรฉsence de champignon MA, prรฉsente une augmentation du seuil de tolรฉrance au sel et production de matiรจre sรจche plus รฉlevรฉe par rapport ร une plante non mycorhizรฉe. Cependant, tous les mรฉcanismes impliquรฉs dans ces processus ne sont pas bien connus. Il a รฉtรฉ avancรฉ que les champignons MA pourraient capturer ou exclure le NaCl et de ce fait confรฉrer aux plantes une meilleure t tolรฉrance au sel (Hildebrandt et al., 2001). Selon Allen et Cunnungham (1983), la tolรฉrance ร la salinitรฉ serait due a une hyperactivitรฉ de la pompe Na/K qui รฉchange le sodium cytoplasmique contre le potassium rhizosphรฉrique. Cette hyperactivitรฉ de la pompe Na/K est sous tendue par une importante consommation dโATP (Adรฉnosine triphosphate). Lโaugmentation de lโabsorption du phosphore et du potassium par les MA pourrait รชtre nรฉcessaire au fonctionnement de la pompe Na/K. Lโamรฉlioration de la nutrition hydrique est corrรฉlรฉe ร celle de la nutrition minรฉrale principalement azotรฉe et phosphatรฉe (Safir et al., 1971 ; Hardie et Leyton, 1982 ; Gianninazi 2006). Ces deux minรฉraux รฉtant des facteurs limitants dans les pays tropicaux (Halley et Smith, 1989). Plusieurs travaux (Abdelilah et al. 2000 ; Giri et Mukerji, 2003) ont montrรฉ que lโabsorption de P est amรฉliorรฉe chez les plantes mycorhizรฉes. Il est en plus รฉtabli que cet apport dรฉpend de la plante et de lโisolat fongique. Les capacitรฉs lytiques du champignon sont largement supรฉrieures ร celle de la plante, ainsi donc la prรฉsence du champignon augmenterait la capacitรฉ de la plante ร solubiliser des formes peu solubles de phosphore (Gollote, 2006). Selon Bowenet Thรฉodorou (1967), cet apport en phosphore rรฉsulterait plutรดt de la prรฉsence de nombreux sites dโabsorption du phosphore en arriรจre de lโapex de la racine mycorhizรฉe. Lโazote est lโรฉlรฉment nutritif le plus indispensable aux cultures, la nutrition azotรฉe est aussi facilitรฉe par la mycorhization comme en illustre les travaux de Johansen et al., 1996 ; Ruiz-Lozano et Azcon, 2000 ; Manga, 2006 . Chez les lรฉgumineuses, dรฉjร avantagรฉes par leur symbiose avec les bactรฉries (fixatrices dโazote du genre Rhizobium), lโassociation mycorhizienne accroรฎt la fixation dโazote, surtout dans les sols pauvres en phosphore (Chevalier et al., 1990).
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Table des matiรจres
Introduction
CHAPITRE 1 SYNTHรSE BIBLIOGRAPHIQUE
1. La symbiose mycorhizienne
1.1. La symbiose mycorhizienne arbusculaire
1.2. Classification des champignons MA
1.3. Les avantages de la mycorhization
1.3.1. Nutrition hydrominรฉrale
1.3.2. Protection
2. La symbiose rhizobium-lรฉgumineuse
3. La salinitรฉ
3.1. Dรฉfinition
3.2. Effet du sel sur la symbiose
3.2.1. Effets sur les rhizobiums
3.2.2. Effets sur les champignons MA
3.2.2.1. Effets sur la germination sporale
3.2.2.2. Effets sur la croissance hyphale
3.2.2.3. Effets sur la croissance colonisation racinaire
3.3. Effets du sel sur la plante hรดte
4. Rรดle des microorganismes symbiotiques sur la tolรฉrance ร la salinitรฉ
4.1. Apport de la symbiose mycorhizienne
4.2. Avantage de la double inoculation (R+M)
5. Gรฉnรฉralitรฉ sur A. nilotica
5.1. Description
5.2. Phรฉnologie
5.3. Utilisation
CHAPITRE 2 MATERIELS ET METHODES
Site dโรฉtude et prรจlรฉvements
1.2. Potentiel mycorhizogรจne des sols รฉtudiรฉs
1.2.1. Prรฉparation des dilutions de sols
1.2.2. Prรฉparation des graines
1.2.3. Coloration et observation histologique des racines
1.2.4. Estimation du MPN par la mรฉthode de Cochran
2. Piรฉgeage des champignons
2.1. Extraction de spores
3. Efficience des champignons arbusculaires sur A. nilotica en condition de stress salin
3.1. Substrat de culture et matรฉriel vรฉgรฉtal
3.2. Inoculum fongiques et inoculation des plants
3.3. Dispositif expรฉrimental
3.4. Traitement salin
3.5 Paramรจtres mesurรฉs
La croissance
Le poids
La mycorhization
Taux de mortalitรฉ
3. 6. Analyse statistiques
4. Etude des Rhizobiums
4.1. Culture des plantes en tubes et inoculation
4.2. Isolement et constitution dโune collection de souches
4.3. Caractรฉrisation molรฉculaire des souches isolรฉes par PCR /RFLP
4.3.1. Amplification de la rรฉgion intergรฉnique 16S-23S
4.3.2. Analyse du polymorphisme de longueur des fragments de restriction
CHAPITRE 3 RESULTATS
1 Potentiel mycorhizogรจne(MPN) des sols
2. Piรฉgeage
3. Extraction des spores
4. croissance en hauteur
5. Effet de la concentration en sel (NaCl) et des symbiotes racinaires sur la production de matiรจre sรจche
6. Influence du sel sur la mycorhization
6.1. Observation des lames
6.2. Frรฉquence et intensitรฉ
7. Taux de mortalitรฉ
8. Analyse de la diversitรฉ des rhizobiums prรฉsents dans les nodules obtenus par piรฉgeage
CHAPITRE 4 DISCUSSION
Conclusions