La sténose aortique
Principales techniques et modalités d’imagerie pour évaluer la structure et la fonction de la valve aortique:
Cathétérisme cardiaque:
Le cathétérisme cardiaque est une méthode d’investigation hémodynamique permettant de mesurer la pression sanguine et le débit cardiaque. Elle peut être utile pour évaluer la sévérité hémodynamique de la SA. Avant l’avènement de l’échocardiographie, il s’agissait d’une méthode de choix pour évaluer la SA puisqu’elle permettait une évaluation précise des paramètres hémodynamiques. Aujourd’hui, ses applications concernent surtout des patients nécessitant une angiographie coronarienne préchirurgicale, des patients chez qui les données et les images d’échocardiographie sont sous-optimales, des patients présentant des discordances entre les trouvailles cliniques et échocardiographiques, ou encore des patients dont le diagnostic demeure incertain malgré l’utilisation de plusieurs méthodes d’imagerie non invasives (23). La présence d’une SA entraîne une restriction des feuillets ce qui empêche le sang de passer. Cette résistance au passage du sang crée une augmentation de la pression ventriculaire et la formation d’un gradient de pression. L’évaluation de la sévérité de la SA par cathétérisme cardiaque permet entre autres de mesurer les gradients de pression, d’analyser les ondes de pression (formes), de mesurer le débit cardiaque, et parfois, de calculer l’aire valvulaire aortique. Les gradients de pression sont généralement mesurés à l’aide de deux sondes qui permettent de mesurer simultanément les pressions dites « en amont » et « en aval » de la valve aortique. Trois mesures peuvent alors être faites : celle du gradient de pression maximal, celle du gradient de pression moyen et celle du gradient de pression pic-à-pic qui correspond à la différence entre la pression maximale dans le VG et la pression maximale dans l’aorte. L’estimation de l’aire valvulaire aortique peut quant à elle être obtenue selon la formule de Gorlin (23, 136). Cette dernière qui témoigne de l’aire d’ouverture de la valve aortique représente un indice de sévérité de la sténose mais présente la limite d’être dépendante du débit, ce qui peut surestimer la sévérité chez les patients présentant un bas débit. Par ailleurs, cette méthode a été initialement mise au point pour évaluer l’aire valvulaire d’une sténose mitrale, donc pourrait ne pas être adaptée pour ce qui se passe du côté de la valve aortique.
L’échocardiographie Doppler:
L’échocardiographie Doppler transthoracique est une modalité d’imagerie utilisant le principe des ultrasons. Les ultrasons vont pénétrer dans le corps et être réfléchis par les structures cardiaques en mouvement pour générer une image ou par les globules rouges du sang pour permettre l’évaluation des gradients de pression et des vélocités. Le technologue en échocardiographie place une sonde au niveau du thorax du patient et fait l’acquisition des images sous différentes vues ou fenêtres d’acquisition (sous xiphoïdienne/sous-costale, apicale, parasternale long-axe, parasternale court-axe, suprasternale/sus-sternale et parasternale droit) à l’aide du mode-M et du bidimensionnel pour évaluer les structures cardiaques et le Doppler pour évaluer les vélocités du sang ou des parois cardiaques (Figure 4-1). Cette technique non invasive, peu coûteuse et reproductible est la méthode de choix pour l’évaluation du cœur et de ses différentes composantes. Elle présente un fort potentiel pour distinguer les structures intracardiaques, possède une bonne résolution temporelle et permet une bonne évaluation hémodynamique. L’échocardiographie Doppler est la méthode de référence pour l’évaluation de la SA et de sa sévérité hémodynamique. Elle permet d’évaluer l’anatomie et la fonction valvulaire, la présence d’autres valvulopathies concomitantes, les dimensions et la géométrie du VG, les fonctions systolique et diastolique du VG et éventuellement du ventricule droit, les oreillettes et les vaisseaux sanguins (principalement l’aorte) (23). C’est en général le premier examen utilisé pour confirmer la présence d’une BVA et/ou d’une SA (32). L’échocardiographie Doppler présente une sensibilité de 76-92 % et une spécificité de 60-96 % pour la détection d’une BVA .
Évaluation de la sténose aortique
Que la valve aortique soit bicuspide ou tricuspide, la sévérité de la SA est déterminée par l’évaluation de la sévérité hémodynamique (Figure 4-3). La SA provoque un rétrécissement progressif de l’ouverture de la valve ce qui va au fur et à mesure provoquer l’accélération du flot sanguin passant à travers la valve, augmenter le gradient de pression entre le VG et l’aorte et enfin, diminuer l’aire valvulaire aortique. Les quatre paramètres les plus couramment utilisés sont donc la vélocité transvalvulaire maximale (Vmax), le gradient de pression transvalvulaire moyen (ΔPmoy), l’aire valvulaire aortique (AVA) et l’aire valvulaire aortique indexée à la surface corporelle (AVAi) (Figure 4-4). La mesure et le calcul de chacun de ces critères proviennent d’équations dérivées de la mécanique des fluides .
Mesure de la calcification valvulaire aortique
La mesure de la CVA par tomodensitométrie peut être faite selon plusieurs méthodes. La calcification peut être mesurée de manière volumétrique, mais dans le cadre du projet de ce mémoire, la méthode décrite par Agatston et al. (146) a été utilisée. Brièvement, la méthode d’Agatston exprime la calcification valvulaire aortique sous la forme d’un score de calcification, en unités arbitraires (UA). Ce score définit la calcification comme étant 4 pixels adjacents ayant une densité supérieure à 130 unités Hounsfield .
L’imagerie par résonance magnétique:
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque est une autre modalité d’imagerie non invasive. L’appareil d’IRM ressemble beaucoup à celui de la tomodensitométrie avec sa table coulissante qui permet d’insérer le patient dans un tube cylindrique. Lors de l’examen, le patient est couché et un électrocardiogramme (utile pour la synchronisation avec la prise d’images) et une antenne sont posés sur le thorax du patient. Cette technique d’imagerie combine l’utilisation d’un puissant champ magnétique et d’ondes radio pour effectuer l’acquisition des images. Sous l’effet du puissant champ magnétique, les atomes d’hydrogène contenus dans le corps humain s’alignent dans la même direction, ils sont ensuite temporairement stimulés par des ondes radio, puis à l’arrêt de cette stimulation, ils vont restituer l’énergie accumulée sous la forme d’un signal qui sera capté et traité par ordinateur. L’IRM est une modalité d’imagerie qui permet de couvrir toutes les vues cardiaques sans émettre de radiations et de faire une bonne évaluation du flot (150).
Utilité et applications de l’imagerie par résonance magnétique
L’examen d’IRM est particulièrement utile et bon pour évaluer la fonction myocardique, la viabilité du myocarde, l’évolution et le suivi des volumes cardiaques, la fraction d’éjection ou encore l’évolution de la taille et de la masse ventriculaire (23). En outre, l’injection d’un liquide de contraste, le gadolinium, durant l’examen peut permettre d’accentuer le contraste et de mieux visualiser certaines régions du cœur comme les cicatrices d’infarctus. L’IRM permet également la détection et la quantification de la fibrose myocardique, un élément important à évaluer puisqu’elle peut altérer la fonction myocardique (150).
En termes d’évaluation de la valve aortique, l’IRM présente 100 % de sensibilité et 95 % de spécificité pour détecter une BVA (151). Elle peut détecter et quantifier une SA (zone de turbulence du flot sanguin détectée par IRM) et possède une bonne corrélation avec le Doppler pour l’évaluation de la SA (152). Elle peut évaluer les ΔP et déterminer l’AVA par planimétrie d’un patient atteint de SA. Pour les IA, elle est particulièrement utile pour mesurer les volumes ventriculaires et régurgitants. Son principal intérêt reste cependant l’évaluation des répercussions des valvulopathies sur la fonction ventriculaire (dilatation du ventricule et développement de fibrose). Enfin, les images d’IRM peuvent également permettre de faire des mesures de l’aorte ascendante (32) et ainsi permettre un suivi des dimensions en cas de dilatation, cela même si la tomodensitométrie reste la méthode classique et la méthode la plus précise pour cette dernière indication. L’une des applications particulièrement intéressantes en IRM pour évaluer l’aortopathie reliée à la BVA est la possibilité d’évaluer le flot sanguin par IRM 4-dimension. Cette méthode permet d’étudier les turbulences et les vortex créés par la valve aortique bicuspide, leurs impacts dans la détermination du type de dilatation aortique et les zones de la paroi aortique particulièrement touchées et fragilisées par ces stress hémodynamiques (23, 153).
Problématiques reliées à l’évaluation de la sévérité de la sténose aortique :
Discordance des critères hémodynamiques à l’échocardiographie Doppler :
Environ 30 % des patients évalués par échocardiographie Doppler présentent une discordance entre les paramètres hémodynamiques évaluant la sévérité d’une SA (11, 147). Généralement, la discordance survient entre le gradient de pression transvalvulaire moyen (ΔPmoy) qui va indiquer une SA de grade modérée/non sévère (<40 mmHg) et une aire valvulaire aortique (AVA) qui va indiquer une SA de grade sévère (≤1 cm²). Les discordances retrouvées ont plusieurs explications potentielles.
Impact de la localisation du calcium
La localisation du calcium sur la valve est un autre facteur qui pourrait interférer et influencer la relation entre la CVA et la sévérité hémodynamique. En effet, dépendamment de la localisation du calcium sur la valve, les propriétés hémodynamiques de la valve pourraient être plus ou moins altérées.
Statistical analysis
The continuous variables were tested for normality of distribution and homogeneity of variances with the Shapiro-Wilk and Levene tests, respectively. Continuous data were expressed as mean ± standard deviation. AVC and AVCd were expressed as median [interquartile range] and transformed with the use of square root for normalization. Comparisons between aortic valve anatomy groups (TAV vs. BAV) were done with Student’s t-test or Wilcoxon-Mann-Whitney test as appropriate. Categorical data were expressed as percentage and compared with the Chi-square test or Fisher’s exact test as appropriate. The TAV and BAV groups were subdivided into 2 subgroups according to the respective median of age (72 years for TAV and 51 years for BAV). To assess the relationship between anatomic and haemodynamic severity of AS, we analyzed the correlations between AVCd and MG using Spearman’s rank correlation coefficients (ρ, rho coefficient). Multivariable linear regression analyses were used to identify the independent determinants of MG among age, AVCd, aortic valve anatomy (BAV vs. TAV), anthropometric parameters (height, weight, body surface area, and body mass index), and risk factors including hypertension, diabetes, dyslipidemia, history of smoking, and coronary artery disease. Age, sex, AVCd, and valve anatomy were forced into the multivariable models, whereas other factors were entered in the models if their p value on univariable analysis was <0.10. Statistical analyses were performed with SPSS (version 23, SPSS, Chicago, Illinois) and SigmaPlot (version 11.0, Systat Software, San Jose, California) and a p value <0.05 was considered statistically significant.
Conclusion:
L’évaluation de la sévérité de la SA demeure un défi avec près de 30 % des patients qui présentent une discordance entre les paramètres hémodynamiques évalués par la méthode de référence : l’échocardiographie Doppler. Les patients avec une TVA, quel que soit leur âge, présentent une bonne corrélation entre la sévérité hémodynamique de la SA et la sévérité anatomique définie par la calcification valvulaire obtenue par tomodensitométrie. Les patients plus âgés avec une SA sur BVA présentent également une bonne association entre les sévérités hémodynamique et anatomique et cette dernière est similaire à celle retrouvée chez les patients avec TVA. Chez ces patients, la CVA semble donc être un indice fiable pour corroborer la sévérité hémodynamique dans les cas discordants ou incertains. Au contraire, il faut être plus prudent avec l’utilisation de la CVA chez les jeunes patients avec une BVA étant donné que les faux-négatifs sont plus nombreux (peu de calcifications, mais une SA hémodynamiquement significative). Cependant, d’autres études avec des cohortes plus importantes de patients avec BVA sont nécessaires pour confirmer ces résultats et mieux comprendre la physiopathologie de la BVA et son association avec la SA. En outre, il sera intéressant d’investiguer et de confirmer le rôle de la fibrose valvulaire, particulièrement chez lesjeunes femmes présentant une SA sur BVA.
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Table des matières
Introduction
1 La valve aortique.
1.1 Généralités : le cœur, les cavités et les valves cardiaques.
1.2 La valve aortique : anatomie et structure
2 La bicuspidie valvulaire aortique
2.1 Diagnostic et pronostic
2.2 Physiopathologie
2.3 Classification et prévalence des sous-types de bicuspidie valvulaire aortique
2.4 Composante génétique de la bicuspidie aortique
2.4.1 NOTCH1
2.4.2 GATA5
2.4.3 eNOS.
2.5 Complications valvulaires
2.5.1 La sténose aortique.
2.5.2 L’insuffisance aortique
2.5.3 L’endocardite bactérienne
2.6 Complications vasculaires
2.6.1 Dilatation de l’aorte.
2.6.2 Dissection aortique
2.6.3 Coarctation aortique
2.7 Impact du sous-type de bicuspidie valvulaire aortique
2.8 Autres anomalies/syndromes fréquemment associés à la bicuspidie valvulaire aortique
3 La sténose aortique
3.1 Étiologies et épidémiologie
3.2 Physiopathologie : brève description de la physiopathologie du développement et de la progression de la maladie
3.2.1 Rôle des lipides .
3.2.2 Rôle de l’inflammation.
3.2.3 Rôle de la fibrose
3.2.4 Rôle de la calcification valvulaire
3.2.5 Similitudes et différences dans le développement et la progression de la sténose
aortique : valve tricuspide versus valve bicuspide
3.3 Facteurs de risque : développement et progression de la sténose aortique
3.4 Impact de la sténose aortique sur le ventricule gauche : surcharge de pression et
remodelage ventriculaire
3.5 Diagnostic, symptômes et traitements
3.5.1 Diagnostic et symptômes
3.5.2 Traitement de la sténose aortique
3.5.3 Spécificités reliées à la bicuspidie valvulaire aortique : indications et interventions
chirurgicales sur la valve aortique et sur l’aorte
4 Principales techniques et modalités d’imagerie pour évaluer la structure et la fonction de la valve aortique
4.1 Cathétérisme cardiaque
4.2 L’échocardiographie Doppler
4.2.1 Caractéristiques échocardiographiques d’une valve aortique bicuspide
4.2.2 Évaluation de la sténose aortique
4.2.3 Évaluation de la calcification valvulaire aortique
4.2.4 Limites et inconvénients de l’échocardiographie Doppler
4.3 La tomodensitométrie.
4.3.1 Mesure de la calcification valvulaire aortique
4.3.2 Seuils de calcification déterminant une sténose aortique sévère.
4.3.3 Mesure de l’aire valvulaire aortique.
4.3.4 Limites et inconvénients
4.4 L’imagerie par résonance magnétique
4.4.1 Utilité et applications de l’imagerie par résonance magnétique.
4.4.2 Limites et inconvénients.
4.5 Spécificité et sensibilité des différentes modalités d’imagerie pour la détection de la
bicuspidie valvulaire aortique
5 Problématiques reliées à l’évaluation de la sévérité de la sténose aortique
5.1 Discordance des critères hémodynamiques à l’échocardiographie Doppler
5.2 Facteurs modulant la relation entre la calcification valvulaire aortique et la sévérité
hémodynamique de la SA
5.2.1 Impact du sexe
5.2.2 Impact de la localisation du calcium
6 Article inséré
6.1 Résumé
6.2 Abstract
6.3 Key messages
6.4 Introduction
6.5 Methods
6.5.1 Patient population
6.5.2 Clinical data
6.5.3 Doppler echocardiography data
6.5.4 Multidetector Computed Tomography (MDCT) data
6.5.5 Statistical analysis
6.6 Results
6.6.1 Characteristics of the study population
6.6.2 Relationship between valve calcification and haemodynamic severity 67
6.6.3 Determinants of AS haemodynamic severity
6.7 Discussion
6.7.1 Effect of valve anatomy and age on the relationship between haemodynamic and
anatomic severity
6.7.2 Clinical implications
6.7.3 Limitations
6.8 Conclusion
6.9 Acknowledgements
6.10 Contributors
6.11 Funding
6.12 Competing interests
6.13 Patient consent
6.14 Ethics approval
Discussion
Conclusion
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