La stabilité thermique de l’austénite de réversion

Les aciers d’apport 13%Cr-4-6% Ni : des aciers « soft martensitic »

Un acier inoxydable est dit martensitique lorsque sa microstructure est majoritairement constituée de martensite. Pour qu’il en soit ainsi, la teneur en Cr se situe habituellement entre 12 à 14% [2;3]. Ils offrent en général de meilleures propriétés mécaniques que les aciers austénitiques, ferritiques et duplex [2]. Un acier est dit supermartensitique si sa teneur en carbone est inférieure à 0,02%. Il est dit « soft martensitic » ( ou martensitique doux) si sa teneur en C est inférieure à 0,06% [2;3]. Ce bas taux de C entraîne la formation d’une martensite ayant une structure en lattes et dont la dureté est plus basse que celle d’un acier inoxydable martensitique conventionnel (comme l’acier AISI 410 par exemple). Pour compenser la réduction en C, du Ni est ajouté. Cet ajout favorise la formation d’austénite résiduelle et ou de réversion. Ces aciers sont entre autre utilisés dans les domaines de la pétrochimie et pour la fabrication des turbines hydrauliques [3]. Ils offrent une bonne résistance à la corrosion et à la cavitation-érosion. Ils sont reconnus pour leur ténacité élevée à basse température et pour leur bonne soudabilité [4-6]. C’est pour ces raisons qu’Hydro-Québec a choisi d’utiliser ce type d’acier pour la fabrication et la réparation de certaines de ses turbines hydrauliques.

L’une des particularités de ces aciers réside en la présence d’austénite résiduelle ou de réversion qui persiste dans la matrice martensitique à la température ambiante. L’austénite résiduelle est une austénite qui demeure après un refroidissement à partir de températures audessus de l’AC3. L’austénite de réversion est plutôt obtenue suite à un ou des revenus dont les températures se situent entre l’AC1 et l’AC3 (qui sont respectivement les températures de début et de fin de transformation de la martensite en austénite lors du chauffage). Les façons principales de faire varier leur quantité sont l’ajout d’éléments gammagènes, les paramètres d’austénitisation (durée et température), les paramètres du revenu et la vitesse de refroidissement. Ces aciers sont aussi considérés comme des « Low Temperature Transformation » (LTT). Leur transformation martensitique qui s’effectue aux alentours de Ms ≈ 150-300 0C [7] est rendue possible par l’ajout de Cr, Ni, Mn et Mo [8]. Le changement de cristallographie associé à la transformation austénite→martensite (CFC→CC) engendre une distorsion de la maille élémentaire et s’accompagne d’une augmentation de volume d’environ 2% [9]. L’augmentation de volume, associée à la transformation de phase, induit de la plasticité qui annihile l’accumulation des contraintes de tension induites par le gradient thermique produit entre la zone chaude et la zone froide lors de l’opération de soudage [7]. Ceci a pour effet de favoriser la formation de contraintes de compression dans la soudure et à proximité du joint soudé.

Participation globale des éléments gammagènes à la formation d’austénite

Les aciers utilisés pour la présente étude contiennent des éléments d’addition qui influencent la formation de l’austénite. Ces éléments sont Ni, Mn, Co, Cu, C, N. Ils sont ajoutés ou sont inhérents au procédé d’élaboration des aciers. Certains de ces éléments sont plus influents que d’autres sur le domaine austénitique, c’est-à-dire qu’ils favoriseront la formation et la rétention d’austénite dans la microstructure pour des températures plus basses. Une façon simple et rapide de comparer leur influence consiste à comparer le Ni équivalent. Cet indice est la somme des éléments gammagènes que contient un alliage et peut se calculer selon différentes équations [2]. L’influence des éléments dépend à la fois de leur quantité et du coefficient qui leur est attribué. L’indice du Ni équivalent sert surtout lors de l’utilisation de diagrammes de constitution (Shaeffler, Espy, WRC, etc.) qui sont utilisés pour prédire les phases que contiendra une soudure à partir des compositions chimiques des aciers à assembler. Par exemple, en prenant l’équation du diagramme d’Espy (équation 1-1), C et N sont les éléments qui ont les coefficients les plus élevés (30). Ces éléments sont alors considérés comme fortement gammagènes. Il en faut donc moins que les autres éléments pour influencer le Niéq. Le Ni avec un coefficient de 1, Mn constant pour des teneurs allant de 0 à 10% et Cu avec 0,33 sont donc moins influents. Par exemple, 1% Ni dans un alliage augmentera le Niéq de 1, alors qu’il ne faudra que 0,033% de C pour avoir le même effet. Pour vérifier l’influence d’un élément, il suffit de l’enlever du modèle et de comparer le résultat obtenu avec le résultat qui tient compte de cet élément. Ce concept sera utilisé au chapitre 2.

Effet de la température Iwabuchi et al. [14], Robichaud [15], Zou et al. [16] et Song et al. [13] ont étudié l’effet de la température pour des aciers de type 13%Cr-4%Ni. Iwabuchi et al. ont effectué un revenu de 2 heures, Robichaud de 1 heure, Zou et al. de 3 heures et Song et al. de 0,5 heure. Les courbes qu’ils ont obtenues sont présentées aux figures 1.3 à 1.6. Les courbes des figures 1.3 à 1.6 prennent une forme de cloche et montrent des différences importantes. Les teneurs maximales en austénite et leurs températures associées sont différentes, soit 23% à 577 oC pour Iwabuchi et al. [14], 17% à 630 oC pour Robichaud [15], 11,5% à 600 oC pour Zou et al. [16] et 6% à 610 oC pour Song et al. [13]. Les pics se situent aussi à des températures différentes et certaines courbes ne commencent pas à 0 % d’austénite (sauf pour l’étude de Song et al.). Ces différences peuvent être attribuées aux compositions chimiques des trois aciers et au temps de maintien des revenus. En effet, les compositions chimiques des aciers (tableau 1.1) et les temps de revenu sont différents. Nécessairement, ces paramètres influencent la température de l’AC1, la largeur et la hauteur de la cloche. Par exemple, en utilisant l’équation du TWI (équation 1-2 [10]) pour un acier 13%Cr-4%Ni, on obtient un AC1 de 595 oC pour Iwabuchi et al. [14], de 631 oC pour Robichaud [15], de 636 oC pour Zou et al. [16] et de 607 oC pour Song et al. [13]. Il est évident que les AC1 calculés sont différents les uns des autres et qu’il en est de même pour les AC1 réels. Ce différentiel entre les AC1 expliquerait le décalage de température entre les quatre courbes, mais n’expliquerait pas la grande différence entre les teneurs en austénite mesurées. Le tableau 2.2 compare les résultats des auteurs mentionnés précédemment.

Kimura et al. [17] et Robichaud [15] présentent chacun une courbe qui délimite la zone de l’austénite pour un acier 13%Cr-4%Ni en fonction de la température de revenu (figure 1.7). Les deux courbes sont très similaires quoique Kimura et al. [17] obtiennent un maximum d’environ 25% d’austénite pour un revenu de 0,5 heure contre environ 18% pour un revenu de 1 heure pour Robichaud [15]. Le domaine de l’austénite stable à la température ambiante s’étend de 550 oC à 725 oC pour Kimura et al. [17] contre 575 oC à 680 oC pour Robichaud [15]. La différence de composition chimique des aciers expliquerait encore une fois cette différence des résultats puisque que chacun des éléments influence le domaine austénitique. La courbe de Robichaud montre que de l’austénite se formera entre 570 oC et 680 oC et que le maximum est atteint vers 630 oC. En dessous de 630 oC, toute l’austénite formée lors du revenu est stable et le restera après le refroidissement. Son Ms et Mf sont alors plus bas que la température ambiante. Au-dessus de 630 oC, une partie de l’austénite formée sera instable et se retransformera en martensite durant le refroidissement.

Au-dessus de 680 oC, toute l’austénite formée durant le revenu sera instable et se retransformera en martensite avant d’atteindre la température ambiante. Le Ms et le Mf de l’austénite se situent alors au-dessus de la température ambiante. Haynes [18] présente une cloche d’austénite pour un acier 13%Cr-6%Ni (figure 1.8) tandis que Leem et al. [19] montre celles d’un acier 13%Cr-7%Ni-3%Si ayant été refroidi au four et à l’air (respectivement F.C et A.C sur la figure 1.9). En comparant avec les courbes des figures 1.3 à 1.6 (pour des aciers de type 13%Cr-4%Ni), un pourcentage de Ni plus élevé permettrait d’obtenir, pour une même température de revenu et un temps de maintien d’une heure, une plus grande fraction volumique d’austénite de réversion. Toutefois, l’acier 13%Cr-7%Ni-3%Si (figure 1.9) en contient moins. Le Si pourrait en partie contrer l’effet du Ni en augmentant la proportion en éléments alphagènes. Une plus forte teneur en Ni permettrait donc de former plus d’austénite de réversion que dans les aciers contenant 4% Ni, mais à condition que la teneur en éléments alphagènes ne soit pas trop élevée.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Les aciers d’apport 13%Cr-4-6% Ni : des aciers « soft martensitic »
1.2 Participation globale des éléments gammagènes à la formation d’austénite
1.3 Effet du Ni
1.4 Effet de la température et du temps de revenu sur la quantité et la stabilité thermique de l’austénite de réversion
1.4.1 Effet de la température
1.4.2 Effet du temps de maintien
1.5 Stabilité thermique et mécanique de l’austénite de réversion
1.5.1 Effet du traitement thermique
1.5.1.1 Effet de la température de revenu
1.5.2 Effet de la microstructure
1.5.2.1 Effet des phases environnantes
1.5.2.2 Taille des grains d’austénite
1.5.2.3 Morphologie de l’austénite
1.6 Formation de l’austénite de réversion
1.7 La plasticité de transformation (effet TRIP)
1.7.1 Définition
1.7.2 Transformation sous déformation mécanique
1.7.3 Transformation sous déformation mécanique si l’austénite a été préalablement écrouie à température élevée
1.8 Effet de la présence d’austénite sur la propagation de fissure
1.9 Comportement de l’austénite en fatigue oligocyclique
1.10 Retour sommaire sur l’objectif de l’étude et la revue de la littérature
CHAPITRE 2 DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE
2.1 Dépôts de 410NiMo et d’un acier 13%Cr-6%Ni sur acier UNS S41500
2.2 Composition chimique des aciers
2.3 Teneur en éléments gammagènes des aciers
2.4 Traitements thermiques
2.4.1 Austénitisation des dépôts
2.4.2 Dureté après austénitisation
2.4.3 AC1 et Ms des dépôts
2.4.4 Températures et durée des revenus
2.4.5 Microstructures après les revenus
2.5 Préparation des échantillons pour la mesure du % d’austénite de réversion
2.5.1 Préparation des échantillons
2.5.2 Mesure du % d’austénite par DRX
2.6 Localisation de l’austénite de réversion et mesure de sa teneur en Ni
2.7 Essais de fatigue oligocyclique
CHAPITRE 3 PRÉSENTATION, ANALYSE DES RÉSULTATS ET DISCUSSION
3.1 Effet du % de nickel sur la température de revenu, la dureté et la quantité
d’austénite de réversion à la température ambiante
3.2 Effet de la martensite et de l’austénite sur la dureté
3.3 Localisation de l’austénite de réversion et du Ni dans la microstructure
3.3.1 Cartographies chimiques par METB
3.3.2 Localisation de l’austénite de réversion par MET
3.3.3 Morphologie de l’austénite de réversion observée par MEB
3.4 Stabilité thermique de l’austénite de réversion
3.5 Effet du % de nickel sur la stabilité mécanique de l’austénite de réversion à la température ambiante
3.5.1 Évolution du % d’austénite de réversion en fonction du nombre de
cycles lors des essais de fatigues oligocyclique
3.5.2 Évolution de la contrainte maximale lors des essais de fatigue oligocyclique
3.5.3 Évolution de la dureté après les essais de fatigue oligocyclique
3.5.4 Retour sommaire sur les résultats obtenus
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS ET TRAVAUX FUTURS
ANNEXE I Procédures de soudage
ANNEXE II Dilatométrie
ANNEXE III Design des éprouvettes de fatigue
ANNEXE IV Spectres typiques de diffraction-X
BIBLIOGRAPHIE

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