Description de Lam3
Le logiciel Lam3 a été développé au milieu des années 90 par le CEMEF en commun avec Alcan et Arcelor pour la modélisation du laminage de produits plats [Hacquin96]. Il couple une méthode EF utilisée pour décrire le comportement élasto(visco)plastique de la tôle laminée à un calcul semi-analytique de la déformation élastique des cylindres. En pratique, le couplage est accompli par résolution itérative du problème « tôle » puis du problème « cylindre » (voir Figure I- 3). La méthode EF utilisée pour la pièce repose sur une formulation stationnaire. On cherche un champ de vitesses qui, tout en satisfaisant les équations d’équilibre, présente un caractère stationnaire. Une résolution simple en vitesse a été développée. Le terme correspondant à la pression hydrostatique est sous-intégré dans le principe des puissances virtuelles [Gratacos91]. Par conséquent, l’élément du maillage, hexaédrique, comporte huit points d’intégration pour toutes les variables, sauf pour la pression qui est calculée en un seul point. Le maillage n’est pas lié au mouvement matériel dans la direction de laminage. La géométrie finale de la pièce est inconnue a priori. Elle est déterminée à partir du champ de vitesses solution, en utilisant la méthode de lignes de courant. Celle-ci exprime que les trajectoires des noeuds sont les lignes tangentes au champ de vitesse en chacun de leurs points. Le maillage est structuré. On l’obtient par ajout de section bidimensionnelle de topologie identique dans la direction principale de l’écoulement. Les rangées longitudinales de nœuds peuvent être assimilées à des lignes de courant.
Atouts de Lam3
La formulation stationnaire offre plusieurs atouts. Elle permet à Lam3 de converger rapidement. Les temps de calcul sont faibles. La qualité de solution est grande puisque cette formulation permet de maintenir un maillage fin dans les zones de fortes déformations. Adapté au laminage, le maillage contribue aussi à la qualité de la solution. Il est structuré et fortement orienté dans la direction de laminage. Il est de plus anisotrope. Il est possible de mettre un grand nombre d’éléments dans l’épaisseur indépendamment des grandes largeur et longueur de la tôle. La zone de l’emprise est ainsi finement discrétisée, tout en limitant le nombre total de degrés de liberté.La méthode de calcul de déformations des cylindres, semi-analytique, est très rapide, précise et robuste [Hacquin98]. Les résultats de ce modèle ont été validés par l’expérience.
Limites de Lam3
Les problèmes posés par la quasi-incompressibilité conduisent à des systèmes mal conditionnés. Il a donc été choisi d’implémenter un solveur direct dans Lam3. L’inconvénient de ce type de solveur est le coût de stockage élevé pour la résolution et le temps de calcul pour des maillages à grand nombre de degrés de liberté. Cela limite sévèrement l’utilisation de maillages fins et de grandes dimensions, qui seraient maintenant nécessaires pour répondre à certaines questions industrielles plus complexes. Il a été en effet constaté que Lam3 présente de grandes difficultés de convergence, voire une absence de convergence, pour des produits de très faible épaisseur. Il faut également une certaine expertise pour générer le maillage initial. Par ailleurs, la propagation d’informations le long des lignes de courant nécessite autant de temps que suivant une approche incrémentale, dans le cas élastoviscoplastique. Les algorithmes d’intégration montrent des limites en stabilité de convergence. Le calcul semi-analytique de la cage présente de nombreux avantages, le principal étant un temps de calcul faible. Toutefois, un calcul EF tridimensionnel intégral (i.e. couplé tôle et cylindres) donnerait accès à la distribution des contraintes dans les cylindres (études de fatigue thermo-mécanique, d’usure…). Le passage à de nouvelles configurations de cage ne demanderait pas, a priori, de nouveaux développements, contrairement à Lam3. Cela est faisable, si on se réfère au travail de [Kim03], bien que cela reste coûteux en temps de calcul. Une comparaison a été réalisée entre ce modèle et Lam3 [Montmitonnet06b] : les résultats sur le profil de tôle sont quasi-identiques. Seule la phase stationnaire du procédé est modélisée. Il n’en reste pas moins que des phases transitoires existent : tête et queue de tôle, soudure entre bobines en laminage continu d’acier à froid, etc. Si le problème à étudier est précisément lié aux transitoires ou aux extrémités du produit, Lam3 n’offre pas de moyen d’analyse décisif (en réalité, il y a une option instationnaire dans ce logiciel, mais elle est beaucoup moins intéressante en comparaison à n’importe quel logiciel incrémental du commerce). Une opération de laminage actuellement d’un grand intérêt est le colaminage. Sa modélisation requiert de traiter plusieurs corps déformables en contact unilatéral avec glissement possible, avec différentes lois de comportement et de frottement. Cela n’est pas possible actuellement avec Lam3. Un enjeu de la modélisation du laminage de produits plats est de pouvoir prédire l’apparition de défauts géométriques : mauvais profil d’épaisseur, « tôles ondulées » (défauts de planéité), … Plusieurs tentatives de calcul d’un défaut de planéité ont échoué avec Lam3 [Marchand00]. Ces échecs sont attribués à la structure même du maillage, structuré en briques. L’élément héxaédrique ne respecte pas les conditions de compatibilité de BrezziBabuska. Il est trop rigide en flexion, ce qui limite très sérieusement ses capacités en particulier lorsqu’on a peu d’éléments dans l’épaisseur. Cela est le cas, pour des raisons de temps de calcul, lorsqu’on a de grandes surfaces de tôle fine à mailler. L’intérêt du diagnostic de Lam3 pour améliorer la qualité du produit en est grandement diminué. Une dernière limite du logiciel Lam3 est la maintenance. Lam3 a été développé sur la base de Forge3® au milieu des années 90, puis est resté figé. Dans le même temps, Forge3® a bénéficié d’importants développements, dont le parallélisme.
Vers Forge3®
Jusqu’à présent, le logiciel Lam3 est préférentiellement utilisé pour modéliser les procédés de laminage en raison des très faibles temps de calcul et de sa précision. Toutefois, il connaît un certain nombre de limites que nous avons détaillées dans le paragraphe I.2.1. Historiquement, Lam3 a été dérivé de Forge3® [Gratacos91, Hacquin96] et il a connu peu de développements par la suite, contrairement à Forge3®. Par comparaison, Forge3® est un logiciel en perpétuelle amélioration. Il peut traiter des problèmes à un plus grand nombre de degrés de liberté que Lam3 (quelques centaines de milliers de nœuds), grâce à deux principaux développements : la parallélisation basée sur une méthode de partitionnement de domaine[Marie97, Perchat00]. un solveur de type résidu conjugué avec divers préconditionneurs, avec une performance en N3/2 voire N, à comparer avec les N7/3 du solveur direct de Lam3 [Marie97]. Le parallélisme de Forge3 pourrait ainsi remédier aux coûts de calcul et de stockage considérables dans Lam3 pour les problèmes de produits plats minces. La formulation utilisée dans Lam3 est en effet difficilement parallélisable (et tout particulièrement avec l’approche retenue dans Forge3®) car elle est intrinséquement liée au calcul des surfaces libres. Forge3® est un logiciel multimatériaux et multidomaine. Il gère l’analyse couplée de plusieurs corps déformables de lois de comportement distinctes en contact [Barboza04]. La modélisation d’opérations de colaminage et même de placage par colaminage serait donc possible. Un calcul éléments finis intégral de la cage de laminoir ne pose pas de difficulté avec Forge3®. Les dernières versions de ce logiciel incluent des outils déformables dont l’analyse thermomécanique complète est possible. On peut, par ailleurs, représenter facilement tout type d’outil avec tout type de cinématique. Enfin, Forge3® est maintenant un logiciel plus général que Lam3. Bien que l’application première de ce logiciel soit le forgeage, elle est étendue à différents procédés d’extrusion, de laminage (transversal, circulaire [Traore01]), d’usinage, ou de soudage (FSW). Il est donc paru plus efficace de repartir de Forge3®, dans sa version actuelle, et d’étendre ses capacités à simuler le procédé de laminage, en mettant l’accent sur les spécificités de ce procédé :
l’essentiel du procédé relève du régime stationnaire ;
le remaillage n’est pas essentiel ;
les déformations des outils sont fondamentales (pour traiter les éventuels défauts géométriques).
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Table des matières
Chapitre I. Introduction
I.1. Le laminage de produits plats
I.1.1. Présentation du procédé
I.1.2. Modélisation du laminage des produits plats
I.2. Logiciels de simulation EF utilisés
I.2.1. Lam3 : un logiciel spécifique au laminage
I.2.1.1. Description de Lam3
I.2.1.2. Atouts de Lam3
I.2.1.3. Limites de Lam3
I.2.2. Forge3®
I.2.2.1. Description de Forge3®
I.2.2.2. Forge3® et le laminage
I.3. Contexte de l’étude
I.3.1. Vers Forge3®
I.3.2. Vers une formulation Arbitrairement Lagrangienne Eulérienne (ALE)
I.4. Objectifs de la thèse
I.5. Plan de la thèse
Chapitre II. Présentation bibliographique : la méthode ALE
II.1. Présentation de la méthode ALE
II.1.1. Description de l’ALE
II.1.1.1. Formulations lagrangienne et eulérienne
II.1.1.2. Formulation ALE
II.1.2. Formulation mathématique de l’ALE
II.1.3. Résolution d’un problème ALE
II.1.3.1. Approche directe
II.1.3.2. Approche découplée
II.1.4. Le schéma de mouvement du maillage
II.2. Gestion du maillage dans une approche découplée
II.2.1. Gestion du maillage surfacique
II.2.1.1. Sur-discrétisation de la frontière E.F.
II.2.1.2. Interpolation de la surface E.F. à l’aide de splines
II.2.1.3. Barycentrage surfacique & Calcul des normales nodales
II.2.1.3.1. Barycentrage
II.2.1.3.2. Calcul des normales nodales
II.2.2. Gestion du maillage volumique
II.2.2.1. Méthode d’interpolation transfinie
II.2.2.2. Méthodes de type Laplacien
II.2.2.2.1. Approche explicite : régularisation par barycentrage
II.2.2.2.2. Approche implicite : problème de minimisation sous contrainte
II.2.2.3. Méthodes basées sur un modèle physique : analogie aux ressorts
II.3. Transport
II.3.1. Transport des variables nodales
II.3.1.1. Approche convective : le transport amont
II.3.1.2. Approche par interpolation inverse
II.3.2. Transport des variables stockées aux points d’intégration
II.3.2.1. Techniques de recouvrement par patch élémentaire (PR)
II.3.2.2. Techniques de recouvrement nodal : SPR (Superconvergent Patch Recovery)
II.4. Conclusion intermédiaire
Chapitre III. Présentation de la méthode ALE existante dans Forge3®
III.1. Description de la gestion du maillage
III.1.1. Adaptation de maillage : estimation d’erreur
III.1.2. Gestion du maillage volumique
III.1.3. Gestion du maillage surfacique
III.2. Transport
III.3. Particularités de la mise en données en ALE
III.4. Applications de cette formulation
III.5. Conclusion intermédiaire
Chapitre IV. Une nouvelle gestion du maillage surfacique
IV.1. Limite de la formulation ALE existante pour des écoulements de matière stationnaires majoritairement tangentiels
IV.1.1. Instabilités de surface libre
IV.1.2. Origine des instabilités
IV.2. Nouvelle méthode de gestion de maillage surfacique : la projection
IV.2.1. Présentation de cette méthode
IV.2.2. Différentes procédures en fonction de la localisation du nœud : plan, arête, coin
IV.2.2.1. Détection automatique de la localisation du nœud
IV.2.2.2. Surfaces planes ou légèrement courbes
IV.2.2.3. Arêtes
IV.2.2.4. Coins
IV.2.3. Traitement spécifique des nœuds contenus dans un plan de condition limite
IV.2.3.1. Surface du plan de condition limite
IV.2.3.2. Arêtes d’un plan de condition limite
IV.2.3.3. Coins d’un plan de condition limite
IV.2.4. Validation
IV.3. Choix libre du pas de temps : sous-incrémentation du calcul itératif de la vitesse de maillage
IV.3.1. Limite de la projection locale
IV.3.2. Description de la méthode de «sous-incrémentation »
IV.3.3. Calcul du « sous pas de temps »
V.3.4. Calcul du champ de la vitesse matérielle sur la configuration intermédiaire
IV.4. Application à un cas simple de laminage
IV.4.1. Description du cas test
IV.4.2. Résultats
IV.5. Conclusion intermédiaire
Chapitre V. Traitement spécifique des surfaces courbes
V.1. Présentation du problème de non-conservation des surfaces courbes
V.1.1. Illustration sur le cas de laminage
V.1.2. Origine de ce problème
V.1.3. Vers une meilleure conservation des zones courbes
V.2. Détermination d’une surface courbe à partir d’une surface discrète
V.2.1. Interpolation locale d’une surface courbe
V.2.1.1. Interpolation d’une arête d’une face
V.2.1.2. Interpolation de la face
V.2.1.3. Validation sur une sphère
V.2.2. Interpolation sur une arête du domaine
V.2.3. Détermination de la normale nodale
V.3. Projection sur la surface lissée
V.4. Validation sur un cas simple de laminage
V.5. Conclusion intermédiaire
Chapitre VI. Stratégies pour des temps de calcul optimisés
VI.1. Calcul itératif de la vitesse de maillage
VI.1.1. Influence de la pondération sur la convergence du calcul
VI.1.2. Modification de la pondération du barycentrage
VI.1.3. Validation sur le cas de laminage : absence de pondération
VI.2. Initialisation du calcul préliminaire lagrangien
VI.2.1. Evolution du champ de vitesse matérielle suite au transport
VI.2.2. Influence du transport sur le calcul du champ de vitesse matérielle
VI.2.3. Influence du transport sur le temps de calcul total
VI.3. Réduction du temps de calcul dans le cas de procédés stationnaires
VI.4. Accélération du calcul incrémental dans le cas de procédés stationnaires
VI.4.1. Limite de la formulation ALE découplée
VI.4.2. Accélération du transport des variables en régime permanent
VI.5. Conclusion intermédiaire
Chapitre VII. Outils cylindriques déformables
VII.1. Description de la gestion du maillage d’un cylindre déformable
VII.2. Actualisation des nœuds situés dans une zone cylindrique
VII.2.1. Détermination de la surface réactualisée lagrangienne locale
VII.2.2. « Projection radiale »
VII.3. Actualisation des nœuds situés sur une zone plane
VII.4. Actualisation des nœuds situés sur une arête
VII.4.1. Détermination du réactualisé lagrangien de l’arête
VII.4.2. Projection
VII.5. Déformation de l’axe de l’outil cylindrique
VII.5.1. Suivi de la déformation de l’axe de rotation
VII.5.2. Détermination de l’axe du cylindre à un instant donné
VII.6. Validation
VII.6.1. Description du cas test
VII.6.2. Schéma d’intégration temporelle pour la formulation lagrangienne
VII.6.3. Maillage
VII.6.3.1. Maillage de la tôle
VII.6.3.2. Maillage du cylindre déformable
VII.6.4. Résultats
VII.7. Conclusion intermédiaire
Chapitre VIII. Applications
VIII.1. Cage rigide
VIII.1.1. Description du modèle
VIII.1.1.1. Géométrie et cinématique
VIII.1.1.2. Rhéologie et frottement
VIII.1.1.3. Maillage
VIII.1.2. Résultats
VIII.2. Cage déformable
VIII.2.1. Description du modèle
VIII.2.1.1. Mise en données sous Forge3®
VIII.2.1.2. Mise en données sous Lam3
VIII.2.2. Maillage
VIII.2.3. Résultats
VII.7. Conclusion intermédiaire
Chapitre IX Conclusion et perspectives
Conclusion
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