La santé psychologique

La santé psychologique

Le fonctionnement optimal au travail

  Il n’existe actuellement que très peu de données probantes sur la santé psychologique ou sur le bien-être au travail, les enquêtes portant principalement sur le « mal-être» des employés. Ces données d’enquête révèlent néanmoins que le stress et les problèmes de santé psychologique prévalent dans la population active CVézina et al.,2006). Selon Statistique Canada, 62 % des travailleurs canadiens qui se disent stressés attribuent cet état psychologique à leur activité de travail (St-Hilaire, 2012). D’ailleurs,en 2010, 27 % des travailleurs canadiens rapportaient que la plupart de leurs journées de travail étaient stressantes (Statistique Canada, 2011). Cette situation semble infliger les travailleurs, alors que le tiers d’entre eux rapportent vivre des niveaux moyens ou élevés de détresse psychologique (plamondon, 2014). Différents coûts sont rattachés au stress et aux problèmes de santé psychologique. D’après Smetanin (2011), les coûts directs et indirects découlant de la santé psychologique représentent environ 50 milliards de dollars par année pour l’économie canadienne.

  Ces coûts ne sont pas négligeables, étant donné qu’ils sont généralement associés à une moindre performance organisationnelle (Driskell & Salas, 1996; Motowidlo, Manning, & Packard, 1986; Quick et al., 1997). Il va sans dire que le stress vécu et l’état de santé psychologique fragilisée des employés devraient nuire aux organisations, en favorisant, entre autres, l’absentéisme et le roulement du personnel. En effet, comme le stress est un important corrélat de l’insatisfaction et du mal-être au travail (LeBlanc, de Jonge, & Schaufeli, 2008), les employés qui démontrent peu d’intérêt, de vitalité et d’engagement psychologique au travail sont plus enclins à quitter leur organisation (Bakker, Albrecht, & Leiter, 20Il). Du même coup, ils seraient moins performants au travail. D’après différents auteurs (Brun, 2003; Brun & Dugas, 2005; Carpentier-Roy, 1995; Dejours & Bègue, 2009), la reconnaissance pourrait favoriser le fonctionnement des employés, notamment en prévenant certains problèmes de santé psychologique et enfavorisant leur bien-être. Bien que la reconnaissance soit généralement perçue comme essentielle à l’efficacité des organisations, peu de gestionnaires l’utilisent à bon escient.

  En effet, une étude de Laval (2011) réalisée auprès de gestionnaires de 445 organisations démontre que 80 % des organisations n’ont aucun objectifprécis en matière de gestion  de la reconnaissance. Ces résultats sont étonnants, étant donné que les participants rapportaient que les politiques de reconnaissance sont nécessaires et qu’elles s’avèrent généralement efficaces pour créer un environnement de travail positif, pour stimuler une culture de reconnaissance au sein de l’organisation et pour améliorer le moral, de même que le climat de travail. Cette étude suggère néanmoins que les gestionnaires sont sensibles aux bénéfices possibles de la reconnaissance au travail, tout en étant préoccupés par les effets qu’elle peut engendrer sur le fonctionnement de l’ organisation.

La santé psychologique

   La santé, qu’elle soit de nature psychologique ou physique, constitue une préoccupation constante des humains. Les organisations doivent donc y accorder une attention particulière pour obtenir un fonctionnement optimal. Le concept de santé a longtemps été considéré comme unidimensionnel, c’est-à-dire qu’il désignait l’absence de maladie (Brochon, Schweitzer, 2002, & Gravel, 2009). Or, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la santé psychologique se défInit comme: «un état complet de bien-être physique, mental et social […] et non seulement par l’absence de maladie ». En partant de cette défInition, on peut conclure que la notion de santé psychologique correspond davantage à un concept bidimensionnel, caractérisant tant l’absence de maladie que la présence de certains aspects positifs (Gravel, 2009). Keyes (2003) propose un modèle holistique qui permet de situer l’état de santé psychologique de l’individu. Ce modèle tient compte tant de la présence que de l’absence de la détresse psychologique et du bien-être (voir Figure 1). Un individu qui travaille dans un milieu délétère se retrouverait dans l’un des trois quadrants sousoptimaux, soit de détresse psychologique incomplète (2a), de détresse psychologique complète (1) ou de santé psychologique incomplète (2b). En revanche, un individu qui travaille dans un environnement qui lui est favorable et qui lui permet de satisfaire ses besoins fondamentaux devrait se situer dans le quadrant qui fait état d’une santé psychologique optimale (3). Dans ce quadrant, on remarque que le niveau de bien-être est élevé, et que le niveau de détresse psychologique est faible. Ce modèle tend donc à conceptualiser le caractère bidimensionnel de la santé psychologique.

Cette proposition souligne également l’importance de ne pas confondre les concepts de bien-être et de santé psychologique. Le bien-être serait plutôt une composante ou un indicateur de la santé psychologique (Massé et al., 1998, Warr, 1987, 1990). L’optimisation du bien-être, qui peut notamment se manifester par l’attitude des employés, devrait résulter en une santé psychologique accrue. Bien qu’il soit difficile de s’appuyer sur une seule conceptualisation de la santé psychologique, ce mémoire se concentre sur une de ses manifestations positives: la vigueur, également désignée sous le terme de vitalité subjective dans les textes scientifiques. D’après Schaufeli, Salanova, Gonzalez-Roma et Bakker (2002), la vigueur correspond à un état psychologique positif rattaché à l’activité de travail qui se caractérise par un niveau élevé d’énergie, de volonté d’investir ses efforts dans le travail ainsi que de résistance mentale et de ténacité face aux difficultés. La vigueur représente un état psychologique opposé à l’épuisement émotionnel, qui constitue la dimension centrale de l’épuisement professionnel (Bakker, Schaufeli, Leiter, & Taris, 2008).

La satisfaction au travail

  La satisfaction au travail, une dimension attitudinale du fonctionnement, consiste en un état émotionnel positif et agréable résultant de l’évaluation personnelle d’un individu face à son expérience de travail (Locke, 1976). Plus précisément, cette attitude le dispose à répondre favorablement ou défavorablement aux exigences de son travail (Steers & Porter, 1991). Selon Hackman et Oldham (1976), la satisfaction au travail est surtout détenninée par les caractéristiques d’ un travail, c’est-à-dire par la nature d’ un certain travail et le contenu de ses tâches. Plus les tâches de travail sont stimulantes et ont une signification pour le travailleur, plus celui-ci est satisfait au travail. Hackman et Oldham proposent cinq caractéristiques primordiales que les tâches de travail doivent compter. Il s’agit de la variété des habiletés, de l’identification aux tâches, de l’ importance des tâches ainsi que l’ autonomie et la rétroaction. Lorsque les tâches de travail ont ces caractéristiques, elles favorisent la satisfaction des travailleurs. Sur le plan empirique, l’importance de ces cinq caractéristiques de travail a été reconnue pour prédire le degré de satisfaction des travailleurs (Bono & Judge, 2004). D’ailleurs, lorsqu’on demande aux gens d’ évaluer les aspects de leur travail (par exemple, le salaire, les promotions, les relations interpersonnelles, etc.) qui les rendent les plus satisfaits, ils identifient le contenu des tâches comme constituant l’ élément le plus important (Jurgensen, 1978; Rentsch & Steel, 1992). Cela souligne l’importance des caractéristiques du travail pour détenniner le degré de satisfaction au travail. Selon le modèle « Demandes-ressources au travail », ces caractéristiques reflètent des ressources au travail, en ce sens qu’elles facilitent la réalisation des tâches, tout en contribuant à l’atteinte des objectifs organisationnels. Les textes scientifiques demeurent toutefois silencieux quant au rôle de la reconnrussance au travail dans la satisfaction des employés.

La performance au travail

  La performance, une dimension comportementale du fonctionnement, est un concept qui est beaucoup étudié en ressources humaines et dans le domaine du comportement organisationnel. Toutefois, très peu d’auteurs parviennent à en formuler une défInition conceptuelle facile à opérationnaliser. Selon Campbell (1990), la performance au travail caractérise un ensemble de comportements et d’ actions permettant d’ atteindre les objectifs de l’ organisation. Elle peut se mesurer en fonction des compétences ou selon l’ atteinte des objectifs. Cela signifie qu’ elle varie considérablement d’ un secteur d’ emploi à un autre ainsi que selon le type de poste occupé. Motowildo (2003, p. 39) propose une autre définition de la performance : « La performance au travail est défInie comme la valeur totale attendue par l’ organisation des épisodes de comportements discrétionnaires qu’ exerce un individu pendant une période de temps donnée. » (tiré de Charbonier, Roussel & Silva, 2007). Ces définitions sousentendent que la performance d’ un individu peut varier dans le temps, mais qu’ elle peut être élevée ou faible selon les actions. Cependant, à tout moment, l’ organisation sera en mesure d’ évaluer l’ensemble des comportements afin d’ obtenir une évaluation globale de la performance de l’ employé. Certains comportements sont prescrits par l’employeur (par exemple, répondre aux exigences du poste), alors que d’autres sont hautement valorisés, ce qui amène certains employés à y souscrire et à déployer des efforts en ce sens (par exemple, l’ entraide). Borman et Motowidlo (1993) mentionnent que l’ efficacité d’ une organisation est le résultat d’efforts individuels qui ne sont qu’ en partie liés à la description du poste.

  Williams et Anderson (1991), quant à eux, proposent une typologie de la performance individuelle qui permet de distinguer les comportements discrétionnaires de ceux prescrits ou exigés par la nature des tâches à accomplir. Les comportements inhérents à la tâche (<< in-role ») correspondent aux actions visant à satisfaire aux exigences du poste. L’évaluation des gestionnaires s’effectue généralement par rapport à ce type de performance. Quant aux comportements discrétionnaires (<< extra-role »), ils caractérisent les efforts volontaires destinés à aider les autres (par exemple, prendre du temps pour aider un collègue qui ne parvient pas à s’acquitter de sa tâche) ou l’organisation (par exemple, signifier à l’avance son absence) (Bateman & Organ, 1983; Smith et al., 1983). Comme ils influencent le contexte psychologique et social de l’organisation, les comportements discrétionnaires s’avèrent aussi d’importants déterminants de la performance. Cependant, ils sont rarement évalués de façon concrète, c’est-à-dire avec un outil d’évaluation, mais ils sont généralement perçus de façon positive par le supérieur immédiat (Mackenzie et al., 1993; Podsakoffet al., 1993).

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Table des matières

Sommaire 
Liste des tableaux
Liste des figures 
Remerciements
INTRODUCTION
CHAPITRE 1: L’état des connaissances
1.1 Le fonctionnement optimal au travail
CHAPITRE 2: La problématique de recherche
2.1 La pertinence de la recherche
2.2 L’objectifet les questions de recherche
CHAPITRE 3: Les notions conceptuelles et cadre théorique 
3.1 La santé psychologique
3.2 La satisfaction au travail
3.3 La performance au travail
3.4 La reconnaissance au travail
3. 4. 1 La conceptualisation de la reconnaissance au travail
3.4.2 La reconnaissance etprogrammes de reconnaissance
3. 4. 3 Les composantes de la reconnaissance au travail
3.4.4 La classification des cibles de la reconnaissance
3.4. 5 Les sources de reconnaissance
3.4.6 Les effets de la reconnaissance sur les employés 
3.4. 7 Les effets de la reconnaissance sur l organisation
3.5 La motivation
3.5.1 La théorie de l autodétermination (TAD)
3.5. 2 Les effets de l autodétermination
3.5.3 Les sources de l autodétermination
3. 5.4 Le soutien et les obstacles à la satisfaction des besoins psychologiques fondamentaux
3.6 Le modèle conceptuel et les hypothèses
CHAPITRE 4: La méthodologie
4.1 Le devis de recherche
4.2 Les participants
4.3 Le déroulement de la cueillette de données
4.4 L’instrument de mesure
4.5 Le plan d’analyse de données
CHAPITRE 5: La description des résultats 
CHAPITRE 6: Discussion
6.1 Les contributions théoriques
6.2 Les contributions pratiques
6.3 Les limites
6.4 Les pistes de recherches futures
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE A: La lettre d’information et le formulaire de consentement
ANNEXE B: Le questionnaire

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