Structure anatomique des membranes
Les membranes fœtales constituent une interface entre la mère et le fœtus. Elles sont composées d’une juxtaposition de trois couches: L’amnios et le chorion d’origine fœtale et la décidua d’origine maternelle .L’amnios a une épaisseur maximale de 0.08 mm et se compose de cinq couches distinctes de versant fœtal au versant maternel: épithélium amniotique, la membrane basale, la couche compacte, la couche fibroblastique et la couche spongieuse. La couche spongieuse constitue une zone de glissement entre amnios et chorion. L’amnios est formé de collagène et des glycoprotéines, il est avasculaire et non innervé.
Le chorion mesure jusqu’à 0.4 mm d’épaisseur et se compose de trois couches: La couche réticulaire, la membrane basale choriale et une troisième couche composée des cellules déciduales et de trophoblaste. Il contient également de collagène et il est avasculaire.
La décidua est d’origine maternelle. Elle est composée de cellules d’origine endométriale et d’un abondant tissu extracellulaire. L’interface entre le chorion et la décidua permet la diffusion des nutriments du versant maternel vers le versant fœtal et sert également de barrière immunologique entre les deux compartiments.
Le squelette architectural des membranes est essentiellement constitué par des protéines fibreuses et une matrice extracellulaire polysaccharidique de type protéoglycanes. Les collagènes I, III, IV, V et VI sont les acteurs essentiels de cette structure qui comporte également d’autres composants tels que la laminine, l’élastine, la fibronectine, les intégrines et le plasminogène.
Rupture des membranes
En cours de grossesse, il existe un équilibre entre les processus de dégradation et de renouvellement des membranes. Leur intégrité est maintenue par une faible concentration des matrix métalloprotéinases (MMP) qui dégradent le collagène et une activité importante de leurs inhibiteurs tissulaires. En fin de grossesse, la tendance s’inverse et la dégradation progressive des membranes est un processus physiologique .
Il est certain que l’augmentation de la pression intra-amniotique sous l’effet des contractions est insuffisante pour expliquer ce phénomène, puisqu’elle existe des ruptures sans contractions, tandis qu’une activité contractile soutenue avant terme respecte le plus souvent la poche des eaux .
La rupture spontanée quel que soit le terme est expliquée essentiellement par l’amincissement focalisé des membranes dont trois mécanismes principaux sont mis en jeu: Les contraintes physiques (étirement et tension des membranes), de l’accentuation de l’apoptose, et d’un déséquilibre entre la production et la dégradation de la matrice extracellulaire (Augmentation de MMP8 et MMP9, diminution de TMP1 et TMP3) .
Facteurs des ruptures prématurées
L’infection
L’infection est apparue comme un des facteurs majeurs de la rupture prématurée des membranes. La contamination intra-utérine pourrait survenir selon les quatre modes suivants:
La voie vaginale par une ascension des germes à travers le col utérin. Cette voie est classiquement la plus observée.
La voie hématogène par la transmission transplacentaire. La voie péritonéale par contamination par les trompes de Fallope à la suite d’une infection intrapéritonéale. La voie transutérine à la suite d’un geste invasif .
Dans la majorité des cas, il s’agit d’une infection ascendante, et les germes les plus souvent retrouvés sont:
Les germes aérobies (streptocoque B, Escherichia coli, Gardenella vaginalis et d’autres germes à Gram négatifs). Les mycoplasmes (mycoplasma hominis, Ureoplasma urealyticum). Et plus rarement des germes anaérobies.
Facteurs mécaniques
La surdistension utérine est un facteur favorisant la RPM avant le travail. Elle peut être liée à un hydramnios, à une grossesse multiple, à une macrosomie ou à l’existence des contractions utérines. Cette surdistension augmenterait la production locale de prostaglandines E2 Arikat et al. ont observé et décrit la séquence de rupture membranaire in vitro en cinq étapes :
La distension des membranes. La séparation de l’amnios et de la choriodécidual.
La rupture de la choriodécidual. La distension non élastique de l’amnios. La rupture de l’amnios .
Facteurs hormonaux
La progestérone joue un rôle important dans l’inhibition des contractions utérines et son action a été évoquée dans la prévention du travail prématuré et de la RPM, la sécrétion de la progestérone a été mise en évidence au niveau de l’amnios, du chorion et de la decidua. Le dosage des récepteurs par Western Blot montre une prédominance des récepteurs B en cas d’absence du travail, et prédominance des récepteurs A en cas du travail .
Gotkin et al. ont montré sur des échantillons de chorion placentaire une diminution significative de la production de l’IL-6 induite par les lipopolysacharides en cas d’exposition préalable des tissus à la progestérone .
Sato et al. ont montré que la progestérone diminuait la teneur en MMP-1 et en MMP-3 au niveau des fibroblastes du col de l’utérus et augmentait la teneur en TIMP .
Facteurs de risques infectieux
L’infection est considérée comme le facteur de risque principal de la rupture des membranes avant terme, elle peut être une cause comme elle peut être une conséquence.
L’association entre les infections génitales pendant la grossesse et la RPM a fait l’objet de nombreuses investigations, qui ont mis en évidence le rôle des infections cervico-vaginales et amniotiques et la survenue des RPM avant 37 SA.
Infections cervico-vaginales
Plusieurs revues de littérature ont mis le point sur le lien entre le type de l’infection et la RPM avant terme. Ces travaux montrent que la vaginose bactérienne, les infections à Trichomonas vaginalis, à chlamydia Trachomatis à streptocoque B et gonocoques sont associés à la survenue d’une RPM avant terme.Le rôle des infections à Mycoplasma Hominis et Ureoplasma Urealyticum reste très controversé.
Gisbert dans son étude rétrospective comparative a conclu que l’infection vaginale occupe une place importante parmi les facteurs de risques des RPM avant terme, puisqu’elle est retrouvée dans 39.3% des cas dans son groupe ambulatoire, contre 60% des cas dans son groupe hospitalier (p=0.04).
Camus relève une fréquence de 40% concernant les infections génitales basses qui est très augmentée par rapport à la population témoin. Les prélèvements bactériologiques vaginaux ont été positifs d’emblée dans 21% des cas .
L’estimation de l’infection génitale dans notre série n’a pas été possible, puisque aucune patiente n’a bénéficié d’un prélèvement vaginal. Toutefois l’anamnèse infectieuse a été positive chez 3 patientes soit une fréquence de 3%.
Infections urinaires
L’infection urinaire constitue un FDR fréquemment retrouvée dans la RPM avant terme, la patiente qui a une infection urinaire, court 3 fois le risque d’avoir une rupture prématurée des membranes .
Pour Gisbert l’IU est retrouvée dans 7% des cas dans le groupe ambulatoire contre 10.2% des cas dans le groupe hospitalisation .
Dans notre étude, nous avons noté 8 cas d’infection urinaire confirmée par la bactériologie (ECBU) soit une fréquence de 8%.
Infections amniotiques
L’infection intra-amniotique, représente la conséquence la plus préoccupante dans la rupture prématurée des membranes, la fréquence de la chorioamniotite diagnostiquées après amniocentèse est très élevée dans les ruptures avant terme, de 15 à 57% (35% en moyenne).
Diagnostic clinique
Interrogatoire
La rupture des membranes occasionne classiquement un écoulement vaginal du liquide amniotique qui apparait clair, d’odeur fade et parfois teinté ou mêlé à des particules de vernix, le plus souvent sans signe d’alerte. Dans 80% des cas, l’écoulement est abondant, continu, accru par une contraction utérine spontanée ou par la mobilisation transabdominale de fœtus (Le signe de Tarnier) . La patiente évoque elle-même le diagnostic qui est aisément posé dés l’admission en milieu obstétrical .
Quelquefois, l’écoulement est moins abondant, ou intermittent, prêtant à confusion avec la perte des urines ou des pertes cervico-vaginales. Dans la majorité des cas, le liquide est clair, mais dans certains cas le liquide peut être méconial ou sanglant .
Examen au spéculum
En présence d’un écoulement vaginal avant le travail, l’examen au spéculum stérile et non lubrifié est recommandé à l’admission, il objective la présence de liquide amniotique dans le cul de sac vaginal postérieur et l’écoulement de liquide par l’orifice cervical, l’écoulement est favorisé par la mobilisation de l’utérus, par le changement de position ou bien la toux.
Cet examen permet de confirmer le diagnostic dans la majorité des cas, de voir si le col est fermé ou ouvert, d’éliminer une éventuelle procidence du cordon ou du membre, il permet enfin de réaliser des prélèvements nécessaires à visée diagnostique et bactériologique .
Dans les cas ou l’écoulement est faible, notamment lorsque la rupture date plus d’une heure, leurs identification devient moins aisé, et risque de faux négatifs à l’examen sous spéculum à été estimé à 12% dans la population suspecte de rupture .
Dans notre étude, le spéculum n’a été réalisé que chez deux parturientes qui ont présenté des hémorragies du troisième trimestre.
Toucher vaginal
Dans les ruptures prématurées avant 37 SA, le toucher vaginal est déconseillé, puisqu’il ne rapporte pas des éléments supplémentaires par rapport à l’examen sous spéculum, d’autre part le toucher vaginal avant terme augmente le risque infectieux selon plusieurs auteurs .Alexander et al. dans un essai randomisé contrôlé sur l’intérêt des antibiotiques dans la RPM avant terme trouvent que le toucher vaginal dans les ruptures entre 24 et 32 SA chez les femmes en dehors du travail est associé à une durée plus courte dans la phase de latence, (3jours versus 5 jours),et ils ont montré que la pratique d’un ou deux TV ne s’accompagne pas d’une augmentation du taux de chorioamniotite, (27% versus 29%), d’endométrites (13% versus 11%), ni d’état septique précoce chez le nv-né (6% versus 5%) .
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODES
I. Type d’étude
II. Population cible
III. Constitution de l’échantillon
IV. Collecte des données
V. Variables
1. Les caractéristiques des parturientes
2. Les modalités de la prise en charge
3. Les éléments pronostiques
VI. Mesures
VII. Analyses statistiques
VIII. Considérations éthiques
RESULTATS
I. Profil épidémiologique
1. Age maternel
2. Parité
3. Origine géographique
II. Antécédents médico-chirurgicaux
1. Antécédents médicaux
2. Antécédents chirurgicaux
3. Antécédents toxiques
III. Antécédents gynéco-obstétricaux
IV. Suivi de la grossesse
V. Pathologies associées à la grossesse
VI. Examen clinique réalisé à l’admission
1. Température
2. Hauteur utérine
3. Contractions utérines
4. Aspect du liquide amniotique
5. Dilatation du col
6. Présentation
7. Nombre du fœtus
8. Bruits cardiaques fœtaux
VII. Bilan paraclinique réalisé à l’admission
1. Bilan infectieux
1.1. ECBU
1.2. NFS
1.3. CRP
2. Echographie obstétricale
2.1. Présentation
2.2. Quantité du liquide amniotique
2.3. Insertion placentaire
3. Enregistrement du rythme cardiaque fœtal
VIII. Prise en charge thérapeutique initiale
1. Antibiothérapie
2. Corticothérapie
3. Tocolyse
IX. Comparaison des résultats entre les deux groupes (Suivi à domicile versus suivi à l’hôpital)
1. Caractéristiques obstétricales des patientes dans les deux groupes
1.1. Terme moyen de la rupture dans les deux groupes: (SA)
1.2. Durée de la prolongation de la grossesse (en jours)
1.3. Antibiothérapie au cours de suivi
1.4. Complications observées au cours du suivi
1.5. Terme de l’accouchement (SA)
1.6. Mode de l’accouchement
1.7. Indications de la césarienne dans les deux groupes
2. Pronostic néonatal dans les deux groupes
2.1. Poids de naissance (g)
2.2. Score d’apgar à 1 min de vie
2.3. Transfert en milieu de réanimation néonatale
2.4. Pronostic néonatal
2.5. Décès néonatal
3. Pronostic maternel dans les deux groupes
4. Synthèse des résultats entre les deux groupes
4.1. Comparaison des caractéristiques obstétricales des parturientes présentant une RPM avant 37SA suivies en ambulatoire (Groupe A) ou en hospitalisation (Groupe B) au service de gynécologie et de l’obstétrique de Marrakech.
4.2. Comparaison du pronostique maternel et fœtal en fonction du lieu de surveillance en cas de RPM avant 37SA: Suivi en ambulatoire (Groupe A) ou suivi en hospitalisation (Groupe B)
DISCUSSION
I. Physiopathologie
1. Structure anatomique des membranes
2. Rupture des membranes
3. Facteurs des ruptures prématurées
3.1. L’infection
3.2. Facteurs mécaniques
3.3. Facteurs hormonaux
3.4. Défaut d’accolement membranaire
3.5. Stress oxydatif
3.6. Le site de la rupture des membranes
II. Profil épidémiologique
1. Fréquence des ruptures prématurées des membranes
2. Facteurs de risque de la RPM
2.1. Facteurs de risque non infectieux
2.2. Facteurs de risques infectieux
2.3. Facteurs de risques mécaniques
III. Diagnostic positif
1. Diagnostic clinique
1.1. Interrogatoire
1.2. Examen au spéculum
1.3. Toucher vaginal
1.4. Age gestationnel
1.5. Température à l’admission
1.6. Aspect de liquide amniotique à l’admission
2. Diagnostic paraclinique
2.1. Bilan maternel
2.2. Echographie obstétricale
2.3. Bilan infectieux
2.4. Bilan du bien être fœtal
IV. La prise en charge thérapeutique initiale
1. Hospitalisation initiale
2. Antibiothérapie
2.1. Intérêt de l’antibiothérapie
2.2. Antibiotiques: types, posologies et la voie d’administration
3. Corticothérapie
3.1. Intérêt de la corticothérapie
3.2. Corticothérapie: Molécule, Nombre de cures
4. Tocolyse
4.1. Intérêt de la tocolyse
4.2. Tocolyse: Molécule, nombre de cures, durée
V. Suivi à domicile versus hospitalisation conventionnelle
1. Caractéristiques obstétricales des patientes
1.1. Terme de la survenue de la rupture
1.2. Durée de la prolongation de la grossesse
1.3. Terme de l’accouchement
1.4. Complications gravidiques de la RPM
1.5. Mode de l’accouchement
2. Pronostic néonatal et maternel
2.1. Pronostic néonatal
2.2. Pronostic maternel
CONCLUSION
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