Le marché financier – Les agences de notation
Les marchés financiers jouent un rôle de plus en plus important sur le développement durable et de son corollaire, la RSE. En effet, les investisseurs institutionnels mais aussi les investisseurs privés intègrent de plus en plus cette dimension dans leurs choix d’investissement en privilégiant dans leur portefeuille les actions de sociétés s’étant engagées dans une démarche de RSE. 12% des actifs seraient gérés de manière socialement responsable aux Etats-Unis (la proportion étant inférieure à 1% en France). L’Investissement Socialement Responsable (ISR) se développe ainsi car un certain nombre de financiers ont acquis la conviction que la prise en compte de critères sociaux et environnementaux permet de mieux identifier les sociétés performantes, à moyen et long terme (voir à ce sujet la section II dans la partie 2 consacrée à l’ISR). Les fonds de pension, ces organismes chargés aux Etats-Unis de collecter l’épargne de la population active afin de financer la retraite, gèrent plus des deux tiers des fonds ISR. Par exemple, Calpers, fonds de pension californien, un des plus importants aux Etats Unis, n’investit plus que sur des valeurs socialement responsables. Il existe des indices boursiers spécialisés sur ce type de placement. Le premier indice composé des valeurs cotées les mieux notées sur un plan social et environnemental, a été lancé aux Etats-Unis, au début des années 90, par le cabinet KLD dirigé par Amy Domini. Depuis, les principales agences de notation ont construit le leur, souvent en partenariat avec les indices boursiers classiques. Aujourd’hui, on compte au moins 8 indices, dits «éthiques» : Aspi Eurozone, Calvert Social Index, Domini 400, Dow Jones Sustainability Index, Ethibel Social Index, FTSE4Good, Jantzi Social Index, MS.SRI. Un marché a vu le jour il y a quelques années, celui de la notation sociale (rating) avec la création d’agences de rating social et environnemental à la fin des années 90. En France, ces agences ont vu le jour en 1997, avec l’agence Arese dirigée par Geneviève Ferone. Leur rôle est d’évaluer et de noter la politique de responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Elles travaillent à partir d’analyses des documents publics, de questionnaires spécifiques, de rencontres avec des responsables d’entreprise. Chacune a sa propre méthodologie, ce qui ne facilite pas les réponses des entreprises et les comparaisons. La notation sociale et environnementale donne une appréciation sur la capacité d’une entreprise à s’adapter, à anticiper, à innover compte tenu de tout un faisceau de risques et de contraintes auquel elle est soumise. Les notations peuvent donc influencer les décisions d’investissement sur le long terme.
La presse, les médias
Le développement durable et la RSE sont des sujets d’actualité pour les médias aussi bien généralistes que spécialisés. Il n’est pas un jour sans qu’un quotidien, un hebdomadaire, un site Internet n’y consacre un article, voire un dossier complet. Les médias étant un relais d’information important, ils peuvent jouer un rôle considérable sur l’opinion publique en faisant parfois passer une image déformée d’une entreprise sur un sujet donné qui peut ne pas refléter la réalité sur le terrain (cf. fermeture de l’usine Lu par Danone sans doute mal relayée ou de manière incomplète ou partisane dans et par les médias). Par ailleurs, le développement des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) a favorisé une diffusion très rapide partout dans le monde. Les récentes catastrophes industrielles, les affaires financières ou les polémiques sur certains investissements ont montré la réactivité forte de l’opinion. Il s’agit donc bien d’une partie prenante à la promotion ou au discrédit de l’entrepriseLa presse, les médias Le développement durable et la RSE sont des sujets d’actualité pour les médias aussi bien généralistes que spécialisés. Il n’est pas un jour sans qu’un quotidien, un hebdomadaire, un site Internet n’y consacre un article, voire un dossier complet. Les médias étant un relais d’information important, ils peuvent jouer un rôle considérable sur l’opinion publique en faisant parfois passer une image déformée d’une entreprise sur un sujet donné qui peut ne pas refléter la réalité sur le terrain (cf. fermeture de l’usine Lu par Danone sans doute mal relayée ou de manière incomplète ou partisane dans et par les médias). Par ailleurs, le développement des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) a favorisé une diffusion très rapide partout dans le monde. Les récentes catastrophes industrielles, les affaires financières ou les polémiques sur certains investissements ont montré la réactivité forte de l’opinion. Il s’agit donc bien d’une partie prenante à la promotion ou au discrédit de l’entreprise
Les ONG
Les ONG, largement connues du grand public, ont un rôle de vigie, de lobbying d’information, et font pour cela largement appel à la communication et aux médias. Elles publient régulièrement des informations sur les méthodes de gestion des entreprises et en dénoncent les errements. Leur mission consiste aussi à élaborer et publier des chartes, à mener des audits sollicités par les entreprises ou à mettre en place des partenariats avec elles. On trouve des ONG :
• coopératives ou de terrain, qui entreprennent de se rapprocher des entreprises (mécénats, partenaires ponctuels ou institutionnels, relations de concertation, etc.), cherchent à peser sur les modalités de la mondialisation,
• hostiles ou militantes, qui refusent toutes formes de coopération avec les entreprises, qui dénoncent, remettent en cause, regroupent des acteurs pour combattre par la contestation (campagnes de lobbying, boycott,…),
• de veille, qui mettent à disposition une information la plus exhaustive et objective possible,
• participatives, organisant la collaboration entre les différentes catégories de parties prenantes sur des thèmes d’intérêt commun (investissements directs à l’étranger, commerce équitable), Certaines sont spécialisées dans la défense des droits de 1’homme comme Amnesty International, Human RightWatch, dans l’écologie et l’environnement comme WWF, Greenpeace, les amis de la Terre, luttant contre la mondialisation comme ATTAC, etc. A priori, les ONG bénéficient d’un crédit favorable auprès du public dans une sorte de jeu de rôle du faible par rapport aux forts, qu’ils s’agissent des Etats, des grandes firmes multinationales ou des institutions mondiales comme le FMI (Fonds monétaire international), la Banque mondiale, 1’OCDE et l’OMC. Elles disposent donc d’atouts importants et jouent sans aucun doute un rôle majeur dans le regard que l’on pose sur certaines entreprises.
Les arguments invoqués contre la responsabilité sociale corporative
Les principaux opposants à la responsabilité sociale corporative étaient les fervents défenseurs des thèses économiques néoclassiques. L’argumentation de ces opposants s’articule autour de deux éléments fondamentaux : les droits de propriété d’une part, et la division fonctionnelle de la société d’autre part. Dans des textes abondamment cités et critiqués, écrits à un moment où le communisme constituait pour certains, une véritable menace, Milton Friedman (1962,1970) et Théodore Levitt (1958) s’objectent à la responsabilité corporative en réaffirmant les principes de l’économie capitaliste et du pluralisme politique qui sont à la base de la société américaine. Ces auteurs insistent tout particulièrement sur le fait que le rôle du dirigeant d’entreprise est de maximiser l’avoir des actionnaires d’une part et de contribuer à la dynamique vertueuse fonctionnelle de la société d’autre part.
¾ La vision de Milton Friedman : Pour Friedman, l’entreprise ne peut avoir de responsabilités car il s’agit d’une personne artificielle dont les responsabilités sont, elles aussi, artificielles. L’entreprise est un instrument appartenant à des actionnaires qui peuvent en faire ce qu’ils veulent, et dont l’intérêt premier est de faire des profits. Quant au dirigeant, Friedman explique qu’il est employé par les actionnaires et qu’à ce titre, il doit mener l’entreprise à leur guise, c’est à dire en maximisant ses profits. Ainsi, toute action contraire à la maximisation des profits corporatifs contrevient au mandat du dirigeant.
¾ Le point de vue de Théodore Levitt : Levitt rappelle qu’un système capitaliste où règnent la démocratie et la liberté personnelle doit être fondé sur une société pluraliste dans laquelle le pouvoir est décentralisé et où peut exister une diversité d’opinions.
Au sein de ce système et en vertu de ses divisions institutionnelles, la fonction de l’entreprise, et même son essence, est de produire des profits. D’après Levitt, s’il existe un problème ce n’est pas tant que l’entreprise soit trop orientée vers les profits, mais bien qu’elle ne le soit pas assez. Ce n’est qu’en cas de défaillance des lois du marché à mener vers le bien public que l’intervention de l’Etat est justifiée. L’entreprise doit reconnaître ce rôle à l’État, mais doit le combattre s’il tente de s’immiscer dans ses activités, jusqu’à s’opposer aux lois qui la gênent. Tant que l’Etat et l’entreprise demeurent séparés, ils peuvent se combiner au grand avantage de la société. En fait, selon Levitt, le véritable danger ne réside pas dans le fait que le gouvernement contrôle l’entreprise ou vice versa, mais bien que les deux se fondent dans un seul et même pouvoir centralisé sans opposition et de manière inopposable. C’est à ce type de configuration sociale que risquerait de mener le discours de la responsabilité sociale corporative. Les critiques des courants de la responsabilité sociale et de l’éthique des affaires à l’égard des arguments de Friedman et de Levitt reposent sur des constructions théoriques inédites en rupture avec le modèle néoclassique. Conscients de l’inadéquation du modèle néoclassique pour rendre compte des phénomènes de concentration du pouvoir et de détérioration environnementale, ces courants ont proposé trois argumentations fondamentales distinctes présentées successivement.
Le paternalisme
Le paternalisme n’est pas à proprement parler une doctrine, mais plutôt une forme de management qui résulte précisément de courants de pensée divers réunissant des philosophes, des représentants de l’Etat, des industriels et des ingénieurs. Le paternalisme correspond au capitalisme libéral du premier siècle de la révolution industrielle. L’Etat n’intervient guère et laisse jouer la « main invisible » du marché. L’entreprise paternaliste assume alors des tâches de régulation que l’Etat ne veut pas prendre en charge. De la seconde moitié du XIXe au milieu du XX siècle, le paternalisme a largement imprégné l’industrie européenne et constate que la nécessaire liberté du chef d’entreprise produit des inégalités qui menacent les fondements de la société. La liberté dans la gestion doit donc s’accompagner d’une responsabilité sociale. Des hommes s’engagent dans cette voie, tels que M. Delessert – inventeur des Caisses d’Epargne ou M. Gerando – éthnologue et haut fonctionnaire, qui seront les promoteurs des premières formes de protection sociale, des écoles techniques, des logements ouvriers, etc. Bref, de ce qui deviendra le paternalisme. Au-delà de motivations généreuses et altruistes qui ont animé, à l’origine, le comportement de certains patrons, le sens et les objectifs de ce mouvement d’idées ont rapidement évolué. Il devient un instrument de neutralisation de la lutte des classes au sein de l’entreprise et de garantie de la stabilisé sociale. Le patronat paternaliste veut mettre en place une collaboration de classes, concilier la logique du profit et l’amélioration de la condition matérielle et morale des ouvriers. II a également une visée gestionnaire. Il s’agit d’attirer et de conserver la main d’oeuvre, mais aussi de former des ouvriers capables d’assurer une bonne productivité. L’enjeu social et sociétal constitue un autre ressort important. Le logement doit contribuer à structurer la cellule familiale. Allant au delà du versement d’un salaire, les paternalistes s’estiment responsables des conditions globales de vie de leur personnel (habitat, éducation, vie familiale, etc.), toutes choses que l’on retrouve dans bon nombre d’entreprises actuellement. Si ce mouvement s’est largement effacé du paysage industriel au cours du XXème siècle, il a été l’un des traits caractéristiques du management à la française. Le paternalisme, aujourd’hui négativement connoté, pourrait apparaître comme un mode de gestion aux antipodes de la RSE. Pourtant, l’efficacité de l’entreprise paternaliste repose sur une association de l’économique, du social et du sociétal, mais aussi sur l’affirmation d’une responsabilité morale du patron vis-à-vis de ses salariés, de leurs proches et même de la société.
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Table des matières
INTRODUCTION
1 ERE PARTIE : LE CONCEPT, L’HISTOIRE ET LES ACTEURS DE LA RSE
I – Les principales définitions de la RSE
I.1 – Les chercheurs ou l’approche théorique
I.2 – Les dirigeants ou hommes d’entreprise
I.3 – Les tiers
I.4 – Notre définition de la RSE
II – Les acteurs de la RSE et groupes de pression
II.1 – Les acteurs supra nationaux
II.1.a) Sur le plan mondial
II.1.b) Sur le plan européen
II.2 – Les pouvoirs publics
II.3 – Les salariés
II.4 – Les syndicats
II.5 – Le marché financier, les agences de notation
II.6 – La presse, les médias
II.7 – Les écoles
II.8 – Les groupes d’influence
II.9 – La société civile
II.10 – Les consommateurs
III – Des origines au concept actuel de RSE
III.1 – Fondements de la théorie économique : une émergence controversée
III.1.a) Les arguments invoqués contre la responsabilité sociale corporative
III.1.b) L’approche moraliste
III.1.c) L’approche contractuelle
III.1.d) L’approche utilitaire
III.2 – Concepts clefs de la responsabilité sociale de l’entreprise
III.2.a) Le cadre analytique développé par Sethi
III.2.b) Le concept intégrateur proposé par Wood
III.3 – Le point de vue historique des affaires et de la RSE
III.4 – Les principes fondateurs de la RSE
III.4.a) Quelques siècles auparavant
III.4.b) Plus près de nous avec la révolution industrielle
III.4.c) Le XXème siècle et l’émergence de la RSE
III.5 – Les chartes et codes de bonne conduite
2 EME PARTIE : LA SITUATION ACTUELLE ET LES PRATIQUES DES ENTREPRISES
I – Pourquoi la RSE s’affiche comme un élément incontournable de certaines entreprises ?
I.1 – Les sources de motivations de l’entreprise à s’engager dans la RSE
I.1.a) L’expression des valeurs clés
I.1.b) L’expression d’une stratégie
I.1.c) Une réponse à contrainte
I.2 – Les bénéfices et risques à s’engager ou non dans une démarche de RSE
II – La RSE en pratique
II.1 – Comment la RSE se matérialise-t-elle dans l’entreprise ?
II.1.a) AXA
II.1.b) BNP Paribas
II.1.c) Covama
II.1.d) Danone
II.1.e) Lafarge
II.1.f) Monoprix
II.1.g) Total
II.2 – Quels investissements ? Quel coût ? Quel retour sur investissement ?
II.3 – La RSE et les PME
II.3.a) Une démarche de progrès
II.3.b) Les outils d’évaluation accessibles aux PME
II.3.c) Les SCOP, un exemple à suivre en matière de RSE
II.4 – Les rapports de RSE
II.5 – La gouvernance d’entreprise
II.6 – L’Investissement Socialement Responsable
II.6.a) Les critères éthiques
II.6.b) Les motivations des investisseurs
II.6.c) Les fonds de partage et produits financiers solidaires
II.6.d) Le label du comité inter-syndical sur l’épargne salariale (CIES)
II.6.e) Les acteurs de l’ISR
II.6.f) Le marché de l’ISR
II.6.g) Les enjeux de l’ISR et ses perspectives
3 EME PARTIE : LA DRH, ACTEUR INCONTOURNABLE DE LA MISE EN ŒUVRE DE LA RSE
I – Le DRH : acteur incontournable ou acteur porteur de la RSE dans l’entreprise ?
II – Les actions et enjeux pour la DRH
4 EME PARTIE : POUR UN DRH, COMMENT METTRE EN ŒUVRE LA RSE
I – Les questions essentielles à se poser en tant que DRH
II – Les conditions de réussite de mise en œuvre d’une démarche de RSE
CONCLUSION
LEXIQUE
BIBLIOGRAPHIE
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