La réparation intégrale du préjudice corporel : réalités et perspectives

« QUE LA JUSTICE SOIT FORTE, QUE LA FORCE SOIT JUSTE ! ».

Cette citation tirée de l’œuvre de BLAISE PASCAL, les pensées, orne les murs de l’enceinte de la faculté de droit de LILLE, tel un perpétuel rappel au chemin de vie à suivre, comme un murmure lointain, une mise en garde séculaire contre les dérives à venir à l’égard de chaque individu qui pénètre en ces murs afin qu’il se sente investi d’une mission imposant d’agir avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité .

La « JUSTICE » est un maître mot qui semble ancré depuis la création des plus anciennes sociétés jusqu’à nos jours. Ce terme est empreint d’une signification que le temps et les nouvelles valeurs sociétales semblent avoir érodé jusqu’à en perdre sa substance.

Le terme « justice » trouve son application notamment dans la responsabilité juridique. La responsabilité juridique est l’obligation de réparer le dommage causé à autrui, dont un intérêt légitime a été injustement lésé par un acte contraire à l’ordre juridique, soit un acte illicite. L’objectif est de tenter d’effacer, par une réaction juridique, les conséquences du fait perturbateur imputable à quelqu’un, ce désordre créé et qui constitue une injustice. L’auteur du dommage doit rétablir l’égalité qui a été rompue à son profit et ainsi apaiser la victime.

Toute action en responsabilité implique en amont la rencontre dommageable de deux activités humaines . La responsabilité extra-contractuelle s’efforce de maintenir un équilibre entre deux éléments contradictoires, la sécurité des personnes et leur liberté d’agir. Conforme aux « normes internationales » , le droit, pour la victime d’un dommage causé par la faute de quelqu’un ou le fait d’une chose gardée, d’obtenir une indemnisation est un principe général du droit au respect duquel veille le Conseil Constitutionnel. À cet égard, le Conseil a consacré solennellement le principe selon lequel chacun doit répondre du dommage qu’il cause à autrui et que le droit français ne connaît aucun régime soustrayant à toute indemnisation le préjudice résultant d’une faute civile. Ce principe reflète des valeurs fondamentales de notre société. La doctrine lui reconnaît « quelque chose de constitutionnel »  , une « dimension constitutionnelle » , voire supranationale . Par ailleurs, le conseil apporte cette même légitimité à la Toutefois, si le principe de la responsabilité délictuelle a une valeur constitutionnelle, celui de la réparation intégrale ne possède pas cette qualité . En effet, ce principe à la particularité de devoir se rattacher à des droits ayant valeur constitutionnelle pour pouvoir exister et exercer ses effets. À cet égard, la doctrine fait œuvre d’ingéniosité pour pouvoir légitimer le plus efficacement possible le principe de réparation intégrale du préjudice. Aussi, le droit à réparation de la victime d’un dommage corporel trouverait sa justification dans le droit à la vie et à l’intégrité physique consacré par les différentes déclarations des droits fondamentaux, notamment la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la Déclaration universelle des droits de l’homme ou encore la Convention européenne des droits de l’homme. Certains auteurs envisagent le droit à l’intégrité physique comme un droit de la personnalité lequel pourrait être rattaché au principe de dignité de la personne humaine. Bien que ces tentatives de légitimer le principe de la réparation intégrale doivent être saluées, ce principe ne trouve toujours pas écho en droit positif. L’examen des normes supra-législatives, aussi bien de nature constitutionnelle que celles de nature conventionnelle, telles que les interprètent les juridictions concernées, ne permet pas de conclure à l’existence d’un droit fondamental à la réparation du dommage corporel. Comme le relève une partie de la doctrine , « la jurisprudence du Conseil constitutionnel comme celle de la Cour européenne des droits de l’homme ne permet donc pas à ce jour de dégager des fondements suffisamment précis afin de donner un cadre à la réparation du dommage corporel ».

Certains auteurs remarquent que la référence au droit à la sûreté, le principe de dignité de la personne humaine ou d’autres notions fondamentales telles que le principe d’égalité ou celui de solidarité n’apparaissent pas comme des supports juridiques adaptés pour fonder une demande en réparation, soit du fait de leur caractère insuffisamment précis, soit parce que le sens qu’en donne la jurisprudence est tel qu’ils ne pourraient être invoqués avec succès pour fonder une créance de réparation. Aussi en réaction à ce constat, une partie de la doctrine fonde le principe de réparation du dommage corporel sur les termes de l’article 16-1du Code civil issus de la loi n°94-653 du 9 juillet 1994 selon laquelle « chacun a droit au respect de son corps : le corps humain est inviolable ». L’absence de consécration constitutionnelle suscite une grande agitation auprès de la doctrine mais également auprès du législateur. Aussi, le Conseil constitutionnel, sans figer le droit de la responsabilité civile, freine les initiatives intempestives et irréfléchies du parlement dans ce domaine. Une incontestable volonté de constitutionnalisation du droit de la réparation intégrale du dommage corporel est palpable et l’intervention dudit Conseil est appelée à devenir de  plus en plus fréquente par le biais des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC).

Le principe de la réparation intégrale, connu sous le vocable latin de reparatio in integrum, s’illustre par l’adage « réparer le préjudice, tout le préjudice, mais rien que le préjudice ». Certains auteurs l’assimilent à une « utopie constructive » en ce sens qu’il constitue un objectif qui doit être approché mais sans pouvoir l’atteindre de manière constante. La valeur normative du principe de réparation intégrale n’a pas de valeur supralégislative, le Conseil constitutionnel lui ayant refusé implicitement ce statut. Bien que non reconnu de manière normative, ce principe est cependant appliqué de manière universelle au delà des frontières françaises. L’objectif de la réparation intégrale est de donner tout son sens à la responsabilité civile en rétablissant « aussi exactement possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu » .

Cet impératif nécessite de la part des acteurs du droit du dommage corporel de procéder in concreto à une évaluation la plus fidèle possible du préjudice subi, ce qui exclut donc toute évaluation forfaitaire. De même, l’application du principe induit l’interdiction d’accorder une réparation qui irait au-delà du strict quantum du dommage .

M.DINTHILAC énonce que « L’exigence de réparation des dommages subis est un impératif qui a pris toute sa dimension au cours des cinquante dernières années avec le développement du droit des victimes. Cette nécessité, particulièrement importante lorsqu’il s’agit de réparer des atteintes corporelles, soulève de nombreuses questions morales, juridiques, médicales et économiques. Mais quelle que soit l’approche, un principe domine, celui de l’équité. L’équité commande que la réparation soit juste et complète, ce qui doit se traduire par la recherche d’une réparation non seulement intégrale pour chacune des victimes mais aussi égale pour toutes celles qui se trouvent dans une situation identique» . Le droit de la réparation du dommage corporel est un domaine assez jeune qui traite de problématiques très sensibles corrélatives à l’impériosité des enjeux auxquels il doit se confronter. La responsabilité civile met en scène deux sujets, l’auteur du dommage qui est débiteur de l’indemnisation ainsi que la victime, créancière de celle-ci. L’interaction entre ces deux acteurs caractérise la dimension humaine empreignant la réparation intégrale du préjudice. Si a priori, chacun est capable d’énoncer ce qu’est une victime en l’illustrant d’exemples, la définition précise de ce terme reste mal aisée. Ce terme a servi dans de nombreux contextes et est usité dans divers domaines tels que la sociologie, l’histoire et le droit. Ce dernier offre une définition différente en fonction des branches sollicitées, que ce soit en droit civil , droit pénal, droit administratif, droit de la sécurité sociale ou encore le droit des assurances. La définition qui semble la mieux convenir reste celle de Mme HAGEGE, inspirée de l’analyse de M. CORNU, « le concept de victime est l’ensemble de personnes qui ont subi un ou plusieurs préjudices, et par là même qui en souffrent indépendamment de l’exploitation causale des faits qui les ont engendrés ».

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE PREMIERE : LES FAIBLESSES DU SYSTÈME
TITRE I : ETAT DES LIEUX
CHAPITRE I : FAIBLESSES DES OUTILS
Section 1 : Méthodes de détermination du préjudice inadaptées
§ 1 Profusion judiciaire
§ 2 Profusion législative
Section 2 : Défaillance des outils d’évaluation
§ 1 Évaluation disparate du taux d’incapacité
§ 2 Conversion monétaire complexe
CHAPITRE II :FAIBLESSES DES ACTEURS
Section 1 : Indépendance limitée
§ 1 Indépendance du juge
§ 2 Indépendance de l’expert
Section 2 : Opacité des décisions
§ 1 Défaut de motivation
§ 2 Déséquilibre des modes d’indemnisation
TITRE II : ETAT DES VOEUX
CHAPITRE I : ADAPTATION DE L’ESTIMATION DU PREJUDICE
Section 1 : Détermination stabilisée du préjudice
§ 1 Nomenclature pérenne
§ 2 Nomenclature normalisée
Section 2 : Harmonisation des outils d’évaluation
§ 1 Unification de l’évaluation médicale
§ 2 Unification de la capitalisation
CHAPITRE II : INDEMNISATION REGULARISEE DU PREJUDICE
Section 1 : Indemnisation inefficiente
§ 1 Indemnisation inégalitaire
§ 2 Recours extensible des tiers payeurs
Section 2 : Indemnisation simplifiée
§1 Incompatibilité des prestations de compensation et de réparation
§2 Indemnisation publique simplifiée
SECONDE PARTIE : DROIT PROSPECTIF
TITRE I : AUTONOMIE DU DROIT DU DOMMAGE CORPOREL
CHAPITRE I : CONSTRUCTION D’UN DROIT DU DOMMAGE CORPOREL
Section 1 : Encadrement de l’indemnisation
§1 Harmonisation des normes
§2 Pérennisation d’une stabilité juridique
Section 2 : Souplesse de l’estimation du préjudice
§1 Consécration de la soft law dans la détermination du préjudice
§2 Droit souple adapté à une matière évolutive
CHAPITRE II : UNIVERSALISME DU DROIT DU DOMMAGE CORPOREL
Section 1 : Harmonisation du droit du dommage corporel
§ 1 Reconnaissance commune du principe de réparation intégrale
§ 2 Harmonisation des pratiques de réparation intégrale
Section 2 : Réforme française en accord avec les valeurs européennes
§ 1 Projets novateurs
§ 2 Propositions pragmatiques
TITRE II : ÉVOLUTION PROPECTIVE DE LA REPARATION INTEGRALE
CHAPITRE PREMIER : PERSONNALISATION DE L’ESTIMATION DU PRÉJUDICE
Section 1 : Détermination du préjudice régulée par la pratique
§ 1 Contrôle du contenu de la nomenclature DINTHILAC
§ 2 Ouverture à de nouvelles méthodes
Section 2 : Barème médical universel
§ 1 Instrument de simplification normative
§ 2 Instrument en constante mutation
CHAPITRE II : SIMPLIFICATION DE L’INDEMNISATION
Section 1 : Juste évaluation monétaire du préjudice
§ 1 Quantification adaptée
§ 2 Individualisation de l’indemnisation
Section 2 : Consécration d’une indemnisation mixte
§1 Mixité du système québecois
§2 Consécration d’un système interne pragmatique
CONCLUSION

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