Août 2003, le gouvernement lance un programme national de rénovation urbaine à destination des quartiers difficiles. Un programme ambitieux destiné à changer en profondeur la physionomie de ces quartiers afin à mieux les intégrer au reste de la ville. L’habitat est au cœur de du programme puisqu’il est prévu la démolition et reconstruction de plus de 200 000 logements sociaux. Ce programme, caractérisé de « plan Marshall des banlieues » prend en fait la suite d’une succession de mesures mises en place depuis les années 1970 et destinées à résoudre les problèmes, notamment d’ordres sociaux, de ces quartiers.
Ces quartiers se caractérisent généralement par de grands ensembles construits par les pouvoirs publics dans les années cinquante et soixante. Ils ont permis de répondre à une très forte demande de logements pendant cette période d’urbanisation. L’habitat social réalisé représente alors une grande avancée pour les ménages et est signe de modernité. Cependant, rapidement après la réalisation de ces grands ensembles, de nombreuses contestations apparaissent. Les nouveaux quartiers ont généralement été construit en marge du tissu urbain, ils apparaissent ainsi souvent peu intégrés au reste de la ville ce qui créé une certaine indépendance. De plus, le départ dès les années 1970 des premiers ménages installés vers les communes périurbaines va laisser la place à des familles moins aisées voir en difficulté sociale ; les quartiers vont peu à peu devenir les lieux de rassemblement des familles les plus pauvres. Ceci ne favorisera pas leur intégration.
Retour sur la problématique des grands ensembles
La création de nouveaux quartiers pour répondre à une forte demande
La création des grands ensembles et cités HLM (habitation à loyer modéré) depuis les années 1950 jusqu’en 1970 a permis de répondre à la forte demande de logements faisant suite aux destructions de la guerre et à l’industrialisation et l’urbanisation du pays. De nouveaux quartiers programmés par les pouvoirs publics apparaissent alors en périphérie des centres urbains ; ils accueillent jusqu’à plusieurs dizaines de milliers de personnes. Dès sa première apparition, cette nouvelle forme d’habitation incarne la modernité et permet d’améliorer considérablement les conditions de logement des Français. Ce sont essentiellement les classes moyennes qui occupent alors ces nouveaux quartiers.
Face de cette amélioration du confort des logements, des critiques concernant ces nouveaux quartiers apparaissent rapidement. Les ensembles ont été construits dans l’urgence et de nombreuses insuffisances en équipements – de loisirs notamment – font apparaître certaines difficultés. De plus, les relations avec les centres-villes sont souvent difficiles, isolant ainsi les quartiers du reste de la ville.
Parallèlement à ce manque d’équipements et infrastructures, une partie des ménages voient leurs revenus s’accroître. Un certain nombre d’entre eux cherchent à améliorer leur cadre de vie et vont ainsi avoir la possibilité de quitter ces quartiers d’habitat collectif. En 1977, la réforme du financement du logement favorise l’accession sociale à la propriété ce qui encourage les ménages à acquérir une maison individuelle. En même temps, les cités HLM voient peu à peu leur population remplacée par des catégories sociales plus défavorisées aux situations professionnelles moins stables. Les quartiers des grands ensembles deviennent alors progressivement des lieux de regroupement des ménages les plus en difficultés.
La dégradation du cadre de vie de certains quartiers accompagnée par les difficultés sociales des ménages entraîne peu à peu l’émergence de « ghettos ». La population se sent exclue de la société. Les actes de vandalisme s’accroissent.
La nécessité d’une politique spécifique à ces quartiers « difficiles » : la politique de la ville
Face à ces nombreuses difficultés rencontrées dans ces cités HLM, les pouvoirs publics vont rapidement prendre conscience de la situation et vont mettre en place plusieurs actions. La politique de la ville désigne cette procédure particulière de discrimination positive spécifique à ces quartiers difficiles. Elle concerne aujourd’hui 751 quartiers classés en ZUS (Zone Urbaine Sensible) où résident près de 5 millions de personnes.
1977 : Habitat et Vie Sociale
Les premières actions de la politique de la ville ont véritablement commencé en 1977 avec la procédure « Habitat et Vie Sociale » (HVS) dans un but de réhabilitation des logements HLM les plus dégradés et d’amélioration de l’espace public. Le programme concerne une cinquantaine de quartiers et vise la réhabilitation des grands ensembles, portant à la fois sur les caractéristiques des logements, les espaces collectifs et les équipements de quartier. Un bilan effectué en 19831 mettra en avant le relatif échec de cette mesure expliqué notamment par la lourdeur de la procédure administrative ainsi qu’une intervention trop centrée sur le confort interne des logements plutôt que sur l’environnement et les équipements extérieures.
1981 : Développement Social des Quartiers
Après la création de la Commission Nationale pour le Développement Social des Quartiers (CNDSQ) en octobre 1981, un nouvelle procédure (le Développement Social des Quartiers) est mise en place tout d’abord de manière expérimentale sur 16 puis 22 quartiers. La démarche sera élargie à 148 quartiers en 1983 et durera cinq ans. Le programme met les acteurs locaux (élus, commerçants, habitants…) au cœur du dispositif d’action et permet notamment d’agir directement sur les causes des dégradations constatées. Le bilan effectué en 1988 est plutôt positif : 40% des logements sociaux des quartiers DSQ sont réhabilités pour un coût total de près de 9 milliards de francs.
Le début des années 1980 voit également les premières démolitions. Durant l’été 1983, ce sont trois tours du quartier des Minguettes à Vénissieux qui sont démolies. La raison évoquée est principalement la volonté de créer un choc psychologique .
1983 : Mission Banlieues 89
Parallèlement au programme DSQ, une autre procédure est mise en place avec la création de la mission « Banlieues 89 », initiée par Roland Castro en novembre 1983. Cette mission permet, sur la période 83-89, de promouvoir près de 400 projets urbains grâce aux financements du FNU (Fond National Urbain). Les aménagements restent cependant limités devant les faibles moyens mobilisés (226 millions de francs pour l’ensemble des quartiers).
1994 : Les Contrat de Ville
En 1994 sont inaugurés les premiers contrats de villes qui correspondent à un engagement pluriannuel entre l’Etat et une collectivité locale afin de mettre en oeuvre conjointement une action de développement social urbain à l’échelle de l’agglomération ou de la commune destinée au traitement prioritaire des quartiers sensibles. Le contrat a une durée de cinq ans. En mars 2006, le contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) succède au contrat de ville.
1994 : Les Grands Projets Urbains
Parallèlement aux contrats de ville, l’Etat va mettre en place une procédure lourde concentrée sur seulement 14 sites (de l’échelle du quartier à l’échelle communale) présentant les plus grandes difficultés. L’objectif est de modifier en profondeur les territoires concernés en agissant directement sur le bâti ou plus généralement sur l’urbanisme : démolition d’immeubles, reconstruction, création de centres commerciaux, instauration de nouvelles dessertes en transport en commun, création de zones d’activités… Les moyens financiers sont au rendez-vous avec la mobilisation de plus de 10 milliards de francs. La procédure se poursuivra jusqu’en 1999 où elle sera remplacée par les Grands Projets de Ville .
1999 : Le programme national de renouvellement urbain
Lancé par le Comité Interministériel des Villes en 1999, un programme national de renouvellement urbain est mis en place pour la période 2000-2006. L’objectif est de recentrer l’intervention sur les quartiers, parfois de manière radicale et sur de nombreux domaines (école, habitat, emploi…). Ce programme s’appuie sur deux dispositifs : les GPV (Grand Projet de Ville) et les ORU (Opération de Renouvellement Urbain).
– Les GPV prennent la suite des GPU (Grand Projet Urbain) mis en place en 1994 sur 14 quartiers. Le nouveau programme élargit son champs d’action à plus de 50 quartiers mais les objectifs restent globalement les mêmes : intervenir lourdement sur les quartiers et essayer de mieux les insérer dans les agglomérations.
– Les ORU sont des opérations semblables mais moins lourdes que les GPV. Elles concernent 70 quartiers.
2003 : Le programme national de rénovation urbaine (PNRU)
En 2002, le nouveau gouvernement a poursuivi cette politique de « reconstruction des banlieues ». La loi du 1er août 2003 « d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine » (dite loi Borloo) renforce en effet le renouvellement urbain. Le terme de « rénovation urbaine » se substitue à celui de renouvellement urbain mais les objectifs restent les mêmes avec la mobilisation de gros moyens financiers : 30 à 35 milliards d’euros sur la période 2004-2011. Le programme sera élargi à l’ensemble des Zones Urbaines Sensibles.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LA RENOVATION URBAINE : UN VASTE PROGRAMME POUR MODIFIER EN PROFONDEUR LES QUARTIERS EN CRISES
1. Retour sur la problématique des grands ensembles
2. Le programme national de rénovation urbaine
3. La question centrale de la mixité sociale
DEUXIEME PARTIE : LE PROGRAMME NATIONAL DE RENOVATION URBAINE : OUTIL DE DEDENSIFICATION DE L’HABITAT SOCIAL
1. Démolir pour reconstruire mieux
2. Analyse des opérations de reconstruction dans plusieurs PRU
TROISIEME PARTIE : LA DIVERSIFICATION DE L’OFFRE EN LOGEMENTS DANS LES QUARTIERS SENSIBLES. QUELLE PLACE POUR LES INVESTISSEURS PRIVES ?
1. Quelle diversification de l’offre de logements à La Duchère ?
2. Des programmes immobiliers de qualité et favorables à la mixité sociale
3. Un phénomène de diversification des logements généralisable ?
CONCLUSION
BILBLIOGRAPHIE
TABLE DES ILLUSTRATIONS
GLOSSAIRE
TABLE DES MATIERES
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