La construction de la personne et l’exploration du monde
Il s’agit également d’ « Apprendre en se remémorant et en mémorisant ». Les opérations de mémorisation chez les jeunes élèves dépendent de l’aspect émotionnel des situations et du vécu d’événements répétitifs que l’enseignant a nommé et commenté. Organiser « des retours réguliers sur les découvertes et acquisition antérieures pour s’assurer de leur stabilisation ». L’école se mobilise pour « Apprendre ensemble et vivre ensemble » et ainsi « Se construire comme personne singulière au sein d’un groupe ». Ici l’accent est mis sur les règles de la communication et de l’échange dans la classe. Organiser des temps de paroles collectifs afin que chacun s’exprime en respectant « les droits (s’exprimer, jouer, apprendre, faire des erreurs, être aidé et protégé) et les obligations dans la collectivité scolaire (attendre son tour, partager les objets, ranger, respecter le matériel…) » est primordial dès le début de la scolarisation afin que les élèves « puissent développer leur estime de soi, s’entraider et partager avec les autres ». Les enseignements de l’école maternelle sont organisés en cinq domaines d’apprentissage. Ainsi, l’atelier « Corps et Langage » s’inscrit dans le domaine n°1 « Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions », le domaine n°2 « Agir, s’exprimer, comprendre à travers l’activité physique », le domaine n°4 « Construire les premiers outils pour structurer sa pensée » et le domaine n°5 « Explorer le monde ». On retrouve dans certains domaines d’apprentissage la notion de représentation de soi, du corps dans l’espace, par rapport aux autres, aux objets à travers des activités physiques et sportives, artistiques, des activités liées à la découverte de l’environnement proche. Le programme du 26 mars 2015, prévoit pour le domaine « Explorer le monde » la compétence « Se repérer dans le temps et l’espace » dont un des objectifs est la consolidation de la notion de chronologie. Ainsi, l’enseignant doit créer les conditions « pour que les relations temporelles de succession, d’antériorité, de postériorité, de simultanéité puissent être traduites par les formulations verbales adaptées (avant, après, pendant, en même temps, etc.) ». « Se repérer dans l’espace » signifie faire l’expérience de l’espace et le représenter. L’enseignant doit créer « les conditions d’une accumulation d’expériences assorties de prises de repères sur l’espace en permettant aux enfants de l’explorer, de le parcourir, d’observer les positions d’éléments fixes ou mobiles, les déplacements de leurs pairs » et doit favoriser « l’organisation de repères que chacun élabore, par l’action et par le langage, à partir de son propre corps afin d’en construire progressivement une image orientée ». Le programme insiste sur la production de dessins et la mise en place d’échanges langagiers entre les élèves afin qu’ils puissent restituer leurs actions, leurs déplacements. A la fin de l’école maternelle l’élève doit pouvoir « utiliser des marqueurs temporels adaptés (puis, pendant, avant, après…) dans des récits, des descriptions ou des explications » ; « situer des objets par rapport à soi, entre eux, par rapport à des objets repères » et « se situer par rapport à d’autres, par rapport à des objets repères ».
Le vocabulaire à l’école maternelle
Le vocabulaire fait partie intégrante de la langue. Boisseau (Philippe, 2011), ancien inspecteur de l’éducation nationale et maintenant conférencier sur « l’apprentissage de l’oral à l’école maternelle », insiste sur l’apprentissage de mots de vocabulaire variés en contexte dès la petite section de maternelle. L’acquisition orale de nouveaux mots dès le premier pas à l’école permet à l’élève de mieux mémoriser ces mots là, et donc de mieux les restituer. Selon lui, la construction de la syntaxe orale est « le moteur qui rend possible l’acquisition d’un vocabulaire de plus en plus riche. Un mot même simple, n’est bien acquis par l’enfant que s’il l’a découvert et sait l’utiliser dans des contexte syntaxiques oraux variés à sa portée ». Il préconise les situations à thèmes : la cuisine, le sport, la salle de bain ect. Et aussi des jeux tels que des « kims » sur les couleurs, lotos sur les animaux, les albums-écho … L’enfant apprend en jouant. Boisseau est associé à des listes de mots de vocabulaire spécifique à chaque classe du cycle 1. Il s’appuie sur la priorité d’apprendre et d’utiliser en maternelle les mots les plus fréquents du quotidien de l’enfant. Ces listes ont été établies afin de lutter contre les inégalités socio-culturelles qui ont des conséquences désastreuses sur la réussite scolaire et sociale des élèves. L’école étant un lieu qui favorise l’égalité des chances, ces listes permettent à tous les élèves quelque soit leur milieux socio-culturel ou familial d’accéder à un vocabulaire nécessaire au développement du langage et à la construction de la personne. Les listes prévoient l’acquisition de 750 mots en petite section (cf Annexe 1) et de 1750 mots en moyenne section. Pour répondre à cet objectif, Boisseau préconise les jeux, et les activités à thème, structurés et réguliers au long du cycle.
Le Langage
Il semble avant tout primordial de définir ce qu’est le langage. C’est une « capacité,observée chez tous les hommes, d’exprimer leur pensée et de communiquer au moyen d’un système de signes vocaux et éventuellement graphiques » (Larousse) Piaget (Jean, 1997), biologiste et psychologue suisse à l’initiative du Constructivisme au début du XX siècle (1926), établit des stades de développements de l’enfant afin de cibler les apprentissages que l’enfant pourrait être capable d’assimiler en fonction de son âge. Selon lui l’acquisition du langage est progressive et dépendante du développement cognitif tout en étant en lien avec les interactions physiques de l’environnement. L’enfant progresse et se développe à travers différents stades qui déterminent des aptitudes cognitives et des compétences langagières. Le stade qui nous intéresse ici est celui de la période « pré-opératoire » (2-6 ans) ou apparaissent le dessin, le jeu de fiction, symbolique, l’image mentale. Au cours de cette période, qui se caractérise par l’avènement du langage, l’enfant devient capable de penser en terme symbolique, de se représenter des choses, des objets à partir de mots, de symboles oud’images. Il peut alors faire un lien entre le signifiant et le signifié. La socialisation, les sentiments moraux, les intérêts et les valeurs se mettent en place. L’enfant saisit également des notions d’espace ainsi que la distinction entre passé et futur. Il demeure cependant beaucoup orienté vers le présent et les situations physiques concrètes, ayant de la difficulté à manipuler des concepts abstraits. L’enfant n’apprend pas à parler seul mais acquiert des compétences langagières grâce à un facteur externe environnemental, dominant et primordial selon le psychologue biélorusse Vygotski (Lev, 2013) : les interactions. L’individu est alors le résultat de ses propres rapports sociaux et il ne peut se développer seul. L’approche interactionniste souligne qu’il n’y a apprentissage que s’il y a prise de conscience. C’est par le langage que l’enfant prend conscience de ce qu’il fait et par conséquent utilise ses propres savoirs-faire. On retrouve chez Wallon (Henri, 1879-1962), psychologue français, l’idée de stades de développement chez l’enfant. Il expose ainsi le stade sensorimoteur-projectif qui apparaît entre 1 et 3 ans. On peut apercevoir à ce stade une progression en motricité et en langage. L’enfant découvre les objets qui l’entourent, les autres et la relation de sa personne avec les autres. Il prend plaisir à découvrir et reproduire à répétition de nombreuses expériences, les sens s’éveillent et les objets sont identifiés. De 3 à 6 ans Wallon parle du « personnalisme » le stade où l’enfant est confronté au problème de l’affirmation de sa personne. C’est à ce stade que se met en place la symbolique du langage, que l’enfant fait le lien entre le signifiant et le signifié.
Le dessin
Au xx siècle, un philosophe français, Luquet (Georges-Henri, 1927) s’intéresse de près au développement du dessin de l’enfant. Il définit ce développement en différents stades. Pour cet objet d’étude nous nous appuyons sur le stade que Luquet appelle « le réalisme manqué » (3-5 ans). Selon le philosophe c’est à cette période que le dessin est un support de narration où l’enfant y raconte quelque chose. Dessiner devient alors un acte intentionnel avec l’intention de représenter quelque chose, de raconter. Par analogie, il trace des traits qui se rapportent à des objets connus. Cependant sa motricité étant en cours de développement, il ne parvient pas toujours à représenter véritablement la réalité. C’est à cette période également qu’il commence à reproduire des formes, à fermer ses traits. Le cadre scolaire y joue un rôle important. A l’école maternelle, il découvre la graphie des formes (rond, carré, droit, vagues, vertical, horizontale…), explore le monde, son environnement de différentes façons et c’est avec répétition qu’il parvient petit à petit à mémoriser et représenter ses images mentales et à maîtriser son geste. Il accède peu à peu au stade du « réalisme intellectuel » (entre 4 et 8 ans) où il représente d’avantage ce qu’il sait que ce qu’il voit.
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Table des matières
Introduction
Le cadre de l’étude et étude envisagée
I. Les ancrages institutionnels
I.1.L’expression de soi : le langage au cœur des programmes
I.2. Le corps et le jeu à l’école maternelle
I.3 La construction de la personne et l’exploration du monde
II. Les ancrages professionnels
II.1. La recherche en action: le projet d’une intervenante spécialisée
II.2. Plaisir et apprentissages
II.3 Le vocabulaire à l’école maternelle
III. Les ancrages théoriques
III.1. Le langage
III.2. Le jeu
III.3 Le dessin
IV. Le climat scolaire : améliorer la qualité de vie à l’école
Méthodologie de la recherche
I. La méthodologie choisie
II. Le recueil de données
III. Terrain et public
IV. Présentation de la grille d’analyse
IV.1. Le jeu favorise le développement du language
IV.2. Le dessin permet de développement de l’expression de soi
Analyse et interprétation du corpus
I. Le jeu favorise le développement du langage
I.1. Le jeu et le récit
I.2. Langage oral : raconter, verbaliser le vécu
II. Le dessin permet le développement de l’expression de soi
II.1. Les représentations du réel
II.2. Mémorisation et verbalisation du vécu
Conclusion
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