En 2005, le Canada a changé d’une façon significative la définition traditionnelle du mariage comme étant une union volontaire d’un homme et d’une femme à l’exclusion de tout autre. Cette année, la Cour Suprême du Canada a légalisé le mariage entre deux personnes du même sexe, ce qui a été codifié par la Loi sur le Mariage Civil. Huit ans plus tard, la France suit et adopte le « mariage pour tous » par la loi no 2013-404 du 17 mai 2013. Après un long débat, le mariage homosexuel est donc permis dans ces deux pays.
La nature de l’institution ou du contrat de mariage a vécu un changement fondamental pendant les dernières années en France et au Canada. Ce qui reste de la définition du mariage, qui est souvent décrite comme « traditionnelle » dans ces deux pays et dans la plupart des pays occidentaux, est principalement la prohibition des mariages polygamiques, une stipulation qui est codifiée dans l’article 293 du Code Criminel du Canada et dans l’article 433-20 du Code pénal de la France. Toute autre stipulation, sauf la prohibition du mariage des mineurs dans la majorité des cas, a été atténuée, a disparu ou la prohibition peut être contournée par l’application d’autres lois, surtout parce que le législateur a reconnu le besoin d’un changement.
Reflétant la législation civile et pénale canadienne, la prohibition du mariage polygamique a été directement confirmée par la Cour suprême de la Colombie Britannique dans un cas impliquant les membres de la secte mormone Fundamentalist Church of Jesus Christ of the Latter Day Saints (FLDS). En France, la polygamie apparait surtout devant les Cours dans le contexte de la jurisprudence concernant l’immigration de personnes polygamiques et des personnes voulant acquérir la nationalité française.
Dans les deux pays que nous allons comparer à l’issue de la présente thèse, la polygamie a été au centre des débats politiques dans le cadre de l’augmentation d’immigrants qui vivaient dans des relations polygamiques dans leur pays d’origine. En conséquence, la France a adopté des lois d’immigration et de nationalité plus strictes dans le but d’éradiquer la polygamie, tandis que le gouvernement conservateur du Canada pendant sa mandature de 2006 à 2015 a adopté une loi contre les « pratiques culturelles barbares », qui réitère les stipulations de l’interdiction existante.
À part des immigrants qui « importent » la polygamie, le Canada a une très petite population polygamique « de souche », les mormons dans l’Ouest du pays. Malgré le fait que la majorité des mormons ne pratique plus la polygamie, ce petit groupe continue cette pratique, ce qui a finalement forcé la Cour suprême de la Colombie Britannique à juger sur la prohibition de la polygamie. Finalement, la France ainsi que le Canada ont une petite population autochtone qui pratiquait la polygamie dans le passé – certaines Premières Nations au Canada et les habitants de Mayotte en France. Pour mieux comprendre les racines de la polygamie dans ces deux pays, il est important de rappeler les origines polygamiques en France et au Canada.
Parmi les pays occidentaux, le Canada est un des pays qui a fait comparativement souvent face à la polygamie, étant donné que la polygamie a été pratiquée avant, pendant et après la colonisation par les Européens. Généralement, il y a donc trois groupes principaux au Canada qui pratiquent ou qui pratiquaient la polygamie : les Premières Nations, les Mormons, et les « nouveaux » immigrants. Il est vrai que récemment la problématique de la polygamie est principalement associée aux Canadiens et aux Canadiennes de la religion mormone, surtout à cause du fait qu’un petit groupe de Mormons en Colombie-Britannique à l’Ouest du pays pratique ouvertement la polygamie et continue à contester la prohibition de la polygamie en justice. Ceci étant dit, certaines Premières Nations du pays pratiquaient la polygamie dans le passé, et aujourd’hui la polygamie est, comme en France, souvent «importée» par les immigrants récents musulmans. Il s’agit donc d’examiner ces trois groupes de plus près.
Le fait que cette religion émergente était en conflit avec la population non-mormone aggravait la situation considérablement, surtout à cause du désir des mormons de vivre en dehors des lois et de créer leur propre pays. L’opposition des mormons à l’esclavage et leur pratique de la polygamie n’aidaient pas à l’intégration de ses pratiquants pendant cette période de fondation. Malgré le fait que la polygamie n’était jamais légale sur le territoire des États-Unis, il y avait beaucoup plus d’inquiétude parmi les politiciens qui réalisaient que les mormons essayaient de dominer la politique sur tous les niveaux étatiques, dont locaux, régionaux et fédéraux. Les grandes communautés mormones en Ohio et au Missouri ont par conséquence été forcées par les gouvernements de ces états de finalement quitter leurs territoires, et ils sont tous partis à Nauvoo en Illinois pendant l’année 1839.
La polygamie a officiellement été reconnue par les mormons en 1843 lorsqu’ils se sont établis en Illinois, quand Joseph Smith a eu une révélation sur ce sujet. Les membres de la religion ont continué à être poursuivis en Illinois, encore une fois à cause de leur influence sur les institutions locales, et une foule enragée a tué Joseph Smith, qui était en prison pendant l’attaque. Son successeur, Brigham Young, a continué, de 1845 à 1848, à faire migrer les mormons par l’Iowa et le Nebraska jusqu’à l’Utah, où les familles mormones se sentaient assez isolées pour pouvoir vivre leur vie selon leur croyance religieuse. En 1850, le congrès des États-Unis créa l’État de l’Utah pour sédentariser l’immigration des mormons, et Brigham Young fut nommé gouverneur de ce nouveau territoire. En 1852, Brigham Young donna son approbation officielle à la polygamie, elle n’avait néanmoins pas été pratiquée excessivement jusqu’en 1856.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. LES ORIGINES DE LA POLYGAMIE AU CANADA
1. La polygamie historique au Canada
A) Les Mormons
B) Les Premières Nations
1) Relations polygamiques traditionnelles
2) Relations polygamiques entre aborigènes et colons et monogamie
2. La polygamie actuelle au Canada
II. LES ORIGINES DE LA POLYGAMIE EN FRANCE
1. La polygamie historique en France – Mayotte
2. La polygamie actuelle en France
III. LA POLYGAMIE CONTEMPORAINE : DÉCALAGE ENTRE DROIT ET FAIT
1. La polygamie en France et au Canada
2. Le besoin d’une analyse globale
CONCLUSION
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