Du plurilinguisme initial vers un monolinguisme national dans les Balkans : quelques repères historiques
Pendant les siècles qui ont précédé l’émergence des États nationaux dans les Balkans, dans les grandes formations étatiques comme l’Empire byzantin ou ottoman, nous constatons la coexistence de plusieurs langues au-delà de la langue officielle. Il s’agit de langues qui ont une distribution et des fonctions plus ou moins précises dans l’espace social et géographique. Nous savons aussi que cette réalité plurilingue était légitime, et que le multilinguisme social était toléré par l’État byzantin ou ottoman.En ce qui concerne les langues employées par l’État ottoman, nous pouvons constater une coexistence, toute limitée ou ponctuelle qu’elle soit, du turc ottoman avec une série d’autres langues. Nous savons, par exemple, que le grec a été employé de façon systématique, comme langue de la diplomatie ottomane de la fin du XVe jusqu’à la seconde moitié du XVIe siècle. Pendant cette même période, la Porte entretenait des chancelleries où l’on employait le serbe, le grec, l’arabe, le persan ou la langue ‘acemi, en fonction de la langue des sujets auxquels l’administration s’adressait. Ponctuellement, la correspondance interne de l’Empire pouvait se faire en une autre langue qu’en turc ottoman.D’autre part, dans les régions arabophones, la langue des tribunaux était l’arabe, les registres des tribunaux (kadî sicili) se tenaient en arabe, tandis qu’on traduisait vers le turc ottoman les documents rédigés en arabe. Le grec archaïsant qui est utilisé par l’administration ottomane est aussi la langue du Patriarcat oecuménique de Constantinople et, quelles que soient ses variantes,il constitue une langue commune à un groupe de savants, aussi bien laïcs que cléricaux. Il s’agit d’une langue commune écrite, qui est suffisamment codifiée,et qui est utilisée par excellence dans la gestion des affaires de l’Église, dans la liturgie orthodoxe, ainsi que dans les domaines du savoir concernant la théologie et la philosophie. Néanmoins, l’Église de Constantinople fait preuve de tolérance face au multilinguisme de ses fidèles. Les différentes langues, ou variétés d’une même langue, parlées par les orthodoxes de l’Empire, sont tout à fait compatibles avec l’idéologie oecuménique que le Patriarcat véhicule jusqu’au XIXe siècle : « N’oublions pas que jusqu’à la fin du XIXe siècle la tradition de l’orthodoxie […] continuait à agir de manière restrictive sur la reconnaissance de l’identité nationale. Au sein de cette tradition, les différents dialectes n’acquéraient pas un poids particulier puisque leur usage n’écartait pas celui de la langue de l’Église ; cette dernière était employée de façon parallèle, sans être en concurrence avec les dialectes locaux. Quoique la forme de la langue liturgique soit importante dans la tradition de l’orthodoxie, la survie des dialectes locaux et le fait de ne pas utiliser une langue unifiée sont des éléments qui n’ont pas d’importance particulière dans sa vision du monde. »Au-delà de l’administration et de l’usage officiel, les langues parlées et écrites dans l’Empire ottoman sont nombreuses et occupent un certain nombre de fonctions. Les langues, ou les variétés d’une langue, occupent des places différentes dans des champs de communication tels que l’enseignement, les cérémonies religieuses, le négoce au sein de l’Empire, les marchés urbains, le village, etc. ;elles varient également selon le milieu et l’origine sociale.
Les langues dans le Royaume grec, les langues des Grecs
Tant dans le Royaume que dans l’Empire, au lendemain de la constitution de l’État (1830), les pratiques linguistiques des Grecs, ou même de ceux qui sont revendiqués comme Grecs par le nouvel État, composent un paysage assez complexe. Dans les paragraphes qui suivent nous essaierons de retracer les grandes lignes de cette réalité, en illustrant notre exposé de quelques exemples. L’établissement de l’État en 1830, bouleverse, dans les territoires qui constituent le Royaume, une écologie de communication, dominée dans les usages formels par le turc ottoman et le grec de l’Église orthodoxe et dans les usages informels, par la coexistence des dialectes du grec moderne avec d’autres langues.Après 1830 s’instaure progressivement une nouvelle écologie de communication,où l’on observe le recul des variétés régionales du grec et des autres langues aussi,ainsi que l’émergence et la diffusion de deux variétés communes. Au lendemain de l’Indépendance, les variétés régionales du grec dominent l’espace dans les échanges oraux, tant dans le Royaume que chez les populations grécophones de l’Empire. Il s’agit de variétés pouvant être plus ou moins véhiculaires ou strictement confinées à un endroit et dans un groupe de gens : le parler des Grecs d’Istanbul d’un côté, et le tzakonien de l’autre, en sont des illustrations. On peut encore rencontrer des Grecs qui ont comme première langue une autre que le grec moderne, lequel occupe la place de la langue seconde ; les Hydriotes et les Spetziotes, à titre d’exemple, sont albanophones, tandis que le grec est assez souvent leur langue seconde. Le bilinguisme se retrouve, par ailleurs, au-delà des langues régionales. Il arrive que les Grecs de 1830 parlent aussi une ou plusieurs langues autres que le grec moderne, et qu’ils écrivent aussi cette ou ces langue(s) : c’est le cas, par exemple, des milieux des savants grecs d’Istanbul qui sont assez souvent bilingues, voire trilingues (grec – turc – français). Quant à la variété orale commune, il faut tout d’abord situer son « berceau » et le moment historique de sa naissance, afin de cerner sa portée et son évolution pendant le XIXe siècle. Les neuf années d’hostilités de la guerre de l’Indépendance (1821-1830), qui ont rassemblé, dans un même espace géographique, principalement dans le Péloponnèse, des populations de langues et de dialectes différents, ont été le déclencheur de l’émergence d’une nouvelle langue commune. Cette « rencontre » des Grecs (ou de personnes qui allaient le devenir suite aux événements) pendant la guerre de l’Indépendance, tous porteurs de cultures locales et de dialectes/langues différentes, allait s’officialiser avec l’établissement de l’État en 1830. Les différents milieux qui se côtoient les décennies suivantes dans les plus importantes villes grecques aident à la formation et à la consolidation d’une langue commune. Si nous ajoutons qu’Athènes allait devenir, pendant tout le XIXe siècle, un lieu de contact de Grecs de toute provenance géographique et sociale, nous pouvons comprendre les facteurs qui ont contribué à l’émergence et à l’expansion de la nouvelle langue commune.
Démoticisme , démoticistes et démotique
Le terme démoticisme est un terme qui apparaît et acquiert du sens, à une période historique précise, à savoir au début du XXe siècle, et dans un contexte social et politique particulier. Plus précisément, il est lié à l’avènement du mouvement démoticiste, notamment dans le Royaume grec au tournant du XXe siècle. D’après Tziovas, le démoticisme a émergé « at the turn of the last century to denote primarily the tendancy by certain intellectuals, litterateurs, linguists and pedagogues to impose demotique language as the literaly language and as the basic educational instrument. Demoticism, however, cannot be considered as a unified and homogeneous intellectual movement but simply as a movement whose representatives shared some basic principles and assumptions such as the advocacy of demotic language, the recognition of Solomos’ poetry and the whole Heptanesian school, along with the exaltation of demotic songs and culture ». Certes, le mouvement démoticiste n’est pas unifié et homogène, notamment après 1920. Toutefois, considérer le démoticisme comme un mouvement essentiellement intellectuel ou linguistique est réducteur. Ce mouvement est avant tout social et idéologique. C’est un mouvement libéral, progressiste et rénovateur qui pose comme objectif prioritaire la réforme scolaire et linguistique. Il faut ajouter qu’il s’agit d’un mouvement idéologique des élites bourgeoises et que l’imposition du démotique en tant que langue nationale constitue l’objectif linguistique de certains milieux qui ont agi à l’aube du XXe siècle.Les démoticistes sont donc les intellectuels qui incarnent et encadrent ce mouvement, au long de cette période, et se rassemblent autour d’une série d’initiatives à caractère éducatif ou littéraire, autour de certaines associations et d’une série de revues littéraires, politiques ou autres. En outre, ils s’attribuent l’étiquette de démoticiste, depuis le début du siècle et sont conscients de constituer un groupe ayant un minimum de valeurs et d’objectifs communs. Par conséquent,l’usage des termes démoticisme ou démoticistes à une période antérieure à la dernière décennie du XIXe siècle constitue une projection qui fait abstraction de la particularité historique qui a généré le mouvement en question. Les initiatives et l’action des savants qui soutiennent une ou des variétés orales (voire peu littéralisées) du grec moderne, depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle, émergent et se concrétisent dans des conjonctures socio-historiques différentes de celle du début du XXe.Le grec moderne commun est peu littéralisé durant les trois quarts du XIXe siècle et nous ne pouvons pas parler d’efforts sérieux pour sa description et codification. Cette variété du grec moderne est désignée pendant la même période à l’aide de plusieurs étiquettes telles romaïque , démotique ,éolodorien . Le terme démotique allait prévaloir à la fin du siècle pour se substituer progressivement aux autres étiquettes. Ce même terme désigne également, dans la première moitié du XXe siècle, la, ou les normes qui se cristallisent à travers la littérature démoticiste ou à travers les efforts de description et de codification de la variété commune. En réalité, ce terme va s’identifier définitivement à la norme qui se cristallise pendant l’entre-deux-guerres, à savoir celle de Triantafyllidis. Un corpus linguistique ou/et métalinguistique (œuvres littéraires de référence, grammaire, dictionnaires) détermine de manière plus ou moins explicite l’usage et les règles, fixant un cadre au sein duquel se développent les pratiques langagières. La norme ne se réduit pas forcément à une œuvre de grammaire, mais elle doit toujours être considérée comme le reflet d’un ensemble de corpus.Nous proposons cette définition d’une façon conventionnelle, en tenant compte de l’objet de notre recherche, étant donné qu’il est impossible d’entrer dans le détail du débat portant sur le concept de la norme. Rappelons que les tentatives de définir ce concept sont fort nombreuses. Ce dernier, depuis le premier effort de systématisation par le Cercle Linguistique de Prague (1932), a fait l’objet d’approches multiples : des approches linguistiques (E. Coseriu, Sistema, norma, y habla, Montevideo, 1952, et L’homme et son langage, Louvain-Paris, 2001 ; A. Rey, « Usages, jugements et prescriptions linguistiques », in Langue française, 16, 1972, p. 4-28) sociolinguistiques (J. A. Fishman, « National Languages and Languages of Wider Communication in the Developing Nations », in Anthropological Linguistics, 11, 1969, p. 111- l’hellénique à la katharevousa. De même, étant donné que le terme katharevousa apparaît et prend sens au XIXe siècle, nous désignons par langue archaïsante l’ensemble des usages de l’écrit antérieurs à ce siècle. Bien évidemment, il ne s’agit pas « d’une langue » mais plutôt de variétés du grec, ou pour être plus précis, de sociolectes. Nous faisons ce choix terminologique, afin de ne pas confondre la katharevousa du XIXe avec le grec liturgique, la variété juridique ou littéraire des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, auxquels nous faisons parfois référence dans notre mémoire.Dans le cadre de ce travail, il est également indispensable de distinguer le démotique de la langue du peuple ou langue populaire. Parfois, dans la littérature qui traite de la question de la langue, il existe un glissement terminologique du démotique, que l’on emploie comme synonyme du terme langue du peuple. Tout d’abord, il faut noter que le terme peuple, dont le contenu fluctue selon l’auteur ou sociales, une perspective anthropologique » in La norme linguistique, Montréal, 1983, p. 255-280, J.-C. Corbeil, « Éléments d’une théorie de la régulation linguistique » in E. Bédard, J. Maurais, La norme linguistique, Montréal, 1983, p. 281-303, J.-P. Bronckart, « Fonctionnement langagier et entreprises normatives », in S. Gilbert, J.-P. Bronckart, et alii (eds), La langue Française est-elle gouvernable?, Lausane, 1988, p. 109-132) ou encore sous le point de vue de la didactique des langues (G. Gagné, « Norme et enseignement de la langue maternelle », in La norme linguistique, op.cit., 1983, p. 463-509). Ainsi, pour ce qui est de notre recherche et en ce qui concerne le démotique, pendant les premières décennies du XXe siècle, nous pouvons parler de la norme d’Ekpedeftikos Omilos (ou si l’on veut celle de Triantafyllidis) et la norme de Psychari. La langue du peuple est en effet, la langue que l’on attribue à ce qui a été déterminé comme le peuple grec par les lettrés grecs dans la seconde moitié du XIXe siècle. Dans ce mémoire, nous employons le terme langue du peuple (ou bien langue populaire), ainsi que le terme peuple grec, lorsque nous rapportons les propos des auteurs examinés ou lorsque nous faisons référence à ces derniers, ou à leur discours, de façon directe ou indirecte. En effet, nous avons déjà expliqué que les populations qui constituent l’État national, ou celles qui sont revendiquées comme grecques, sont des locuteurs dialectophones, des locuteurs de la variété commune des centres urbains, ou bien des locuteurs de langues autres que le grec.La langue du peuple ne correspond donc à aucune réalité observable, tandis que le démotique, langue commune parlée dans les centres urbains et langue véhiculaire à la fois, constitue la base et la matière première qui donnera le grec moderne commun à travers l’usage et l’élaboration par les démoticistes du début du siècle ou les autres savants et spécialistes qui leur succéderont. En dernier lieu, il faut préciser que nous avons opté pour l’emploi du couple des termes grec ancien et grec moderne, au lieu du grec et grec moderne, car le terme grec ou langue grecque renvoie non seulement à la langue de l’Antiquité,mais aussi au grec dans sa diachronie, et dans ce cas on risque de le confondre avec le grec moderne. En revanche, lorsqu’on utilise le terme langue hellénique (ou bien tout simplement l’hellénique), il s’agit toujours du grec ancien.
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Table des matières
Remerciements
Liste des Abréviations
INTRODUCTION
A. Aperçu historique
1. Du plurilinguisme des Empires vers un monolinguisme national dans les Balkans: quelques repères historiques
2. Aperçu de la question de la langue avant 1850
3. Les langues dans le Royaume grec, les langues des Grecs
B. Objet de recherche
1.La formation d’une langue nationale, en Grèce, dans la seconde moitié du XIXe siècle
2.Les acteurs sociaux
3.Les sources : approche méthodologique et classification
C. De l’usage de quelques termes et de certains glottonymes dans notre recherche
1. Démoticisme, démoticistes et démotique
2. « Savants du XIXe » et « intellectuels démoticistes du XXe »
3. La langue nationale
4. Le grec moderne entre la « diglossia » et la « dimorphia »
PREMIÈRE PARTIE :LE RÔLE DE LA CONJONCTURE SOCIO-POLITIQUE DANS LA CONSOLIDATION DE LA LEGITIMITE DE LA LANGUE NATIONALE LEGITIMITE DE LA LANGUE NATIONALE
I. LA « MISSION DE LA LANGUE GRECQUE » ET LE « DROIT D’INGERENCE » DES SAVANTS OCCIDENTAUX
A. Changements et continuité dans la première moitié du siècle : vers la découverte du grec moderne en Europe
B. La guerre de Crimée et son impact sur la définition des objectifs nationaux
C. Le grec « langue véhiculaire » et « langue de civilisation » en Orient : l’émergence d’un projet et le fondement idéologique d’une stratégie
1. De l’insurrection à une « conquête pacifique » de l’Empire : Markos Renieris et la mission de la langue grecque
2. Suite et répercussions dans les milieux des lettrés grecs : les « sociétés littéraires » et la « propagation de l’hellénisme à l’Orient »
D. D’une langue commune de l’Orient à une langue universelle : le cas de d’Eichtal
1. Le projet de d’Eichtal : objectifs, moyens et acteurs
2. Le choix du grec : la « langue élue » de l’histoire
E. « L’universalité du grec » et le cadre historique des années 1860
1. La « question de la prononciation du grec ancien » : les hellénistes entre la théorie d’Érasme et le grec moderne
2. G. d’Eichtal : helléniste et saint-simonien
F. Suite et retentissements du projet de d’Eichtal
1. Échos de la publication et initiatives
2. Le débat
3. L’adoption de la prononciation grecque-moderne et son enjeu idéologique
G. Le poids des attentes européennes et la « dette grecque »
1. La fondation de l’ Association pour l’Encouragement des Études Grecques et la formation d’une conjoncture
2. « Droits et devoirs » des lettrés grecs
II. L’ÉMERGENCE DE LA LEXICOGRAPHIE DIALECTALE ET SON IMPACT
A. Apparition et aspect des recherches
1. Morphologie de l’activité éditoriale dans la seconde moitié du siècle
2. L’élan dialectologique de la seconde moitié du siècle
3. Étendue de la recherche lexicographique et profil des lettrés qui y sont engagés
4. La construction d’un objet : délimitation du terrain et constitution des corpus
B. Motifs et objectifs des travaux dans le cadre politique et idéologique de la période en question
1. La thèse de Fallmerayer et sa dynamique pour le développement des travaux dialectologiques
2. La topographie de la lexicographie dialectale et le « paradoxe » de la Macédoine
3. Les études dialectologiques face à l’intérêt des hellénistes pour le grec
4. Le « trésor lexical » et la langue cible
C. Origines linguistiques et origine nationale : le cas des régions « excentrées »
1. Le substrat proto-hellénique de Cappadoce
2. La Thrace des Pélasges et des Grecs
3. La transition du grec de l’Asie Mineure à Chypre
4. La théorie indo-européenne et l’usage du pélasgique dans l’hellénisation des origines linguistiques
D. L’impact de la dialectologie sur l’image du grec dialectal: parenté synchronique et parenté diachronique
DEUXIÈME PARTIE :HISTOIRE, PHILOLOGIE ET LINGUISTIQUE : LA VISION DE L’ÉVOLUTION DE LA LANGUE DANS LA PERSPECTIVE DE LA LÉGITIMATION DES OBJECTIFS POLITIQUES ET LINGUISTIQUES
III. « DÉGÉNÉRESCENCE » ET « RÉGÉNÉRATION » D’UNE LANGUE : LA RÉHABILITATION, ET LE REGARD SUR L’HISTOIRE DU GREC
A. L’aspect des études historiques du grec
B. La question de l’évolution du grec au carrefour des différentes disciplines
1. L’entrée de la linguistique comparée dans l’étude de la langue grecque : un bref aperçu historique
2. L’historiographie grecque au milieu du siècle
C. Mutations dans la conception de l’histoire du grec, dans la seconde moitié du siècle
1. L’Eglise – « Arche de la nation et de la langue »
2. L’archéologie des langues indo-européennes au service de la pureté linguistique
3. La « force morale de la nation » et la « puissance assimilatrice » du grec
D. La cristallisation des mythologies linguistiques
1. De la « corruption » à l’ « immutabilité » et à « l’unicité » du grec moderne
2. « La particularité historique du grec » et le cas du latin
3. Enjeux idéologiques et politiques
4. « Le grec – langue vivante », le latin et l’attitude des hellénistes occidentaux
E. La conception de l’évolution du grec et son impact sur sa nomenclature
IV. LA CONCEPTION DE L’ÉVOLUTION HISTORIQUE DU GREC ANCIEN DANS LA LÉGITIMATION IDÉOLOGIQUE DES OBJECTIFS LINGUISTIQUES: L’APPORT DE LA THÉORIE ÉOLODORIENNE
A. La théorie éolodorienne et l’origine homérique des dialectes populaires du grec moderne
1. L’origine et la diffusion de l’approche éolodorienne
2. Langue littéraire et langue vernaculaire : les traces antiques de deux chemins parallèles
3. Le grec ancien au fil des siècles : une écologie linguistique immuable ?
4. Langue éolodorienne et langue homérique : l’association du modèle éolodorien à la lexicographie dialectale
5. Textes homériques et contexte historique
B. Le modèle éolodorien et son impact sur la réforme de la langue
1. Appuis scientifiques du modèle éolodorien : les outils de la linguistique historique
2. La katharevousa comme nouvelle koinè et la « véhicularité » en tant que droit historique
3. L’autorité des savants comme droit historique
4. La complémentarité des arguments linguistiques et historicistes
5. Cadres sociopolitiques et usages idéologiques
TROISIÈME PARTIE :LA CONCEPTION DE LA RÉFORME : ACTEURS, ACTIONS ET STRATÉGIES
V. LES ÉLITES LETTRÉES FACE À LA RÉFORME DE LA LANGUE
A. Fixation du grec moderne : l’autorité des savants et le « laisser faire » linguistique
1. La responsabilité collective de la communauté des lettrés et l’autorité individuelle
2. Engagement collectif, perspective temporelle ouverte et accomplissement des objectifs nationaux
3. Fixation et diffusion : deux procédures naturelles et associées
4. Le processus d’archaïsation comme une contrainte historique
B. Les concours de l’Université et la mise en place des projets puristes : projets linguistiques et développement des stratégies
1. L’université, les associations et les revues comme facteur d’alliance et terrain d’action au service des projets linguistiques
2. Le concours pour « l’histoire de la langue grecque moderne » : cadre et objectif
3. L’initiative d’Asopios vue en rapport à son projet linguistique et ses objectifs linguistiques
4. Le courant archaïste, le concours de la poésie et le rôle de Tsokanios dans les projets des puristes modérés
5. L’enjeu idéologique
6. Le rôle des concours universitaires, des revues et des associations dans la promotion des projets puristes
C. Les objectifs de la réforme, les priorités et la langue cible
1. Vernaculaires et langue commune : une cohabitation possible ?
2. Définition des priorités dans la réforme du grec
3. Quelle langue cible ?
VI. LES ÉLITES LETTRÉES FACE À L’ETAT
A. Politique linguistique de l’Etat grec : la politique du « laisser faire »
1. Académie des Lettres : une « lacune » dans la réforme de la langue?
2. Les traces d’une planification linguistique et le rapport des savants avec les institutions de l’État
B. Langue officielle : témoin identitaire et outil operationel pour le pouvoir politique
1. La formation d’une variété au service de l’appareil de l’État : initiatives privées, responsabilité collective et devoir national
2. L’efficacité de l’outil linguistique face à l’aspect identitaire de la langue
C. Les initiatives des autorités institutionnelles et les limites de la fixation
1. Critères de correction : priorités et enjeux
2. L’aspect de l’intervention de l’État : actions ponctuelles et encadrement
D. La réforme du grec moderne entre les élites lettrées et l’État : du « laisser-faire » à l’ « interventionnisme », vers la fin du siècle
1. La réforme de l’appareil éducatif et l’interventionnisme émergeant de l’État
2. La remise en question des fondements de la réforme et la réaction des lettrés
3. L’Assemblée face à la question de la reconnaissance officielle de la katharevousa
E. Les stratégies des intellectuels démoticistes face à l’héritage psycharien
1. Les contradictions du purisme et les limites de la katharevousa
2. L’émergence du mouvement démoticiste : ruptures et continuité
3. Les nouveaux intellectuels démoticistes : une génération parricide?
CONCLUSIONS
A. Récapitulation
B. L’histoire du grec moderne au XIXe siècle : lacunes et limites de la recherche contemporaine
C. L’héritage puriste : les « mythes fondateurs » de l’histoire du grec et l’idéologie linguistique
1. « L’unité inaliénable » et « la continuité ininterrompue » du grec
2. « Le caractère conservateur du grec »
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
Tableaux et statistiques des publications concernant l’activité éditoriale
Tableaux des principaux événements politiques et socioculturels
G. d’Eichtal : « De l’usage pratique de la langue grecque »
M. Renieris : « De l’impopularité de la cause grecque en Occident »
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