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Étude des profils de tension et de courant – mise en place d’un modèle wave-to-wire
An de pouvoir étudier en détail le comportement des systèmes de puissance et les solutions visant à améliorer l’intégration des systèmes houlomoteurs au réseau électrique existant, il est nécessaire de disposer d’un modèle dit « wave-to-wire », soit un modèle représentant toutes les étapes de conversion, depuis la vague jusqu’au réseau électrique. Ce modèle permet d’avoir accès à toutes les variables d’intérêt et de tester des stratégies de contrôle pour les composants électriques de la chaîne de conversion [52].
La modélisation wave-to-wire
Des modèles de type wave-to-wire sont développés depuis plusieurs années dans le but d’étudier la conversion d’énergie primaire, mais aussi de déterminer les eets que peuvent avoir les stratégies de contrôle appliquées sur les systèmes de conversion de l’énergie mécanique en énergie électrique (qu’ils soient direct ou qu’ils incluent une interface hydraulique) sur le reste du système. En eet, le contrôle des systèmes de récupération de l’énergie houlomotrice a longtemps été limité au contrôle hydrodynamique, qui considère souvent une version grandement simpliée du système de conversion de l’énergie électrique en énergie mécanique (power take-o ou PTO).
Ce type de modèle permet aussi de réaliser un pré-dimensionnement des équipements électroniques nécessaires. Ainsi, dans leur étude de la qualité de l’énergie produite par une ferme de otteurs à mouvement vertical, Tedeschi et Santos-Mugica [54] insistent sur l’importance de l’approche système pour la modélisation, une approche fragmentée pouvant mener à des solutions économiquement ou techniquement inacceptables.
Les modèles wave-to-wire peuvent être divisés en diérentes étapes [55] : la ressource (les vagues), l’absorption (système houlomoteur), la génération (génératrice électrique) et la conversion (électronique de puissance). La gure 2.1 illustre ces étapes pour un système houlomoteur à entraînement direct (direct drive).
Figure 2.1 Diagramme de la chaîne wave-to-wire dans le cas d’un convertisseur direct
Des modèles de complexités diérentes ont été développés précédemment, avec des objectifs divers.
Certains modèles, appelés aussi wave-to-wire, simulent uniquement une partie de la chaîne.
En général il s’agit de la partie hydrodynamique et mécanique de la conversion d’énergie houlomotrice (ressource et absorption), avec des représentations diérentes du PTO. C’est le cas du modèle du SEAREV présenté par Josset et al. [56] ou encore du modèle de bouée oscillante et de son PTO hydraulique présenté dans [57].
Des modèles englobant une partie plus importante de la chaîne de conversion (conversion mécanique et conversion électrique) ont aussi été développés précédemment à ce travail, pour diérents principes de récupération de l’énergie houlomotrice : colonnes d’eau oscillantes [58], systèmes à déferlement [59] mais aussi systèmes directement mus par la houle.
Pour ces derniers, les modèles sont aussi spéciques au type de houlomoteur utilisé et au PTO considéré : certains modèles intégrent la description de la dynamique d’un PTO hydraulique ([60], [61]) tandis que les systèmes direct-drive (tout électriques) ont aussi fait l’objet de plusieurs modèles de représentation de la vague au réseau.
Ainsi, Tedeschi et al. [62] ont présenté un modèle wave-to-wire pour lequel le système houlomoteur considéré est une bouée avec un seul degré de liberté (heave, mouvement vertical).
Le PTO est constitué d’une machine électrique tournante contrôlée par un convertisseur à modulation de largeur d’impulsions bidirectionnel. Le but de ce modèle est de tester des stratégies de contrôle du système houlomoteur en fonction du dimensionnement de la chaîne de conversion complète.
De même, Wu et al. [63] ont aussi proposé un modèle pour l’étude du comportement dynamique du système Archimede Wave Swing (AWS) lorsqu’il est connecté au réseau électrique. Pour ce système, une génératrice électrique linéaire reliée à un convertisseur back-to-back est utilisée.
Certains de ces modèles ont été réalisés dans le but d’étudier la connexion des houlomoteurs au réseau électrique. C’est le cas pour le modèle du Lifesaver décrit dans [64], ainsi que pour le modèle de ferme de colonne d’eau oscillante développé par Blavette et al. [65].
C’est aussi le cas du modèle utilisé pour l’étude de la qualité de l’énergie produite sur la plateforme BIMEP (Biscay Marine Energy Platform) dans [54] et du modèle plus générique de Forehand et al. [66]
Discussion sur l’architecture électrique de la ferme et le mode de transport de l’électricité choisis pour le modèle wave-to-wire
Les opérateurs de réseau commencent à classier les centrales électriques suivant qu’elles soient découplées du réseau ou directement connectées, comme le montre le code de réseau rédigé par l’ENTSO-E en 2012 [18] qui dénissait des contraintes d’intégration au réseau en fonction de la puissance nominale de la centrale, de la tension au point de connexion et du type d’interface avec le réseau [48].
S’il y a encore peu de fermes houlomotrices eectivement installées en mer, il est quand même possible d’observer une architecture commune pour un certain nombre d’études concernant l’interface avec le réseau [55] [63]. Cette architecture est inspirée de l’expérience gagnée dans le domaine de l’énergie éolienne, similaire à l’énergie houlomotrice de par bien des aspects.
Il s’agit de découpler complètement le système houlomoteur et sa génératrice électrique du réseau électrique, à l’aide de convertisseurs d’électronique de puissance connectés dos-à- dos (un redresseur puis un onduleur – convertisseurs back-to-back). Cette interface, qui sert notamment à favoriser les échanges de puissance entre la génératrice et le réseau électrique en annihilant l’impact de la diérence de fréquence entre les deux réseaux AC, permet aussi de ne pas transmettre directement au réseau électrique les uctuations de puissance causées par les vagues.
Cependant, le coût d’un tel système peut atteindre jusqu’à 100% du coût de la génératrice.
De plus les composants d’électroniques de puissance créent des harmoniques supplémentaires, qui doivent alors être atténuées par diérentes méthodes de ltrage.
Après l’étape de conversion à l’aide des convertisseurs d’électronique de puissance, l’énergie doit être transmise au réseau par un câble de transmission sous marin, reliant la sous-station de la ferme houlomotrice au réseau côtier. Cette étape peut être réalisée en haute tension alternative AC (HVAC) ou continue DC (HVDC).
La transmission en AC est utilisée depuis de nombreuses années et bénécie d’un retour d’expérience important pour le transport d’énergie oshore sur de longues distances. Historiquement, ce type de transmission était favorisé car il était très dicile, avec un système DC, d’augmenter susamment la tension de transport pour transporter la puissance sur de longues distances à cause des chutes de tension induites par les pertes en RI2. Cependant, ces dernières années, le développement de l’électronique de puissance a conduit à un regain d’intérêt pour la transmission HVDC.
En eet, les pertes induites dans les câbles sur de longues distances sont plus faibles pour une transmission HVDC qu’une transmission HVAC (pas de perte par eet de peau et pertes beaucoup plus faibles par eet de couronne). De plus, grâce à l’absence d’inductance dans les lignes DC, il est plus facile de réguler la tension, et leur contrôlabilité est beaucoup plus avancée.
Les câbles AC possèdent une forte capacitance (de l’ordre de 150 kVar/km pour les câbles 33 kV polyéthylène XLPE) ce qui conduit à générer un courant réactif important. Ceci diminue la capacité de transport du courant actif et implique donc l’ajout de mécanismes de compensation le long de la ligne. Cette capacitance importante peut aussi induire des résonances entre les réseaux onshore et oshore, conduisant à des distorsions dans le prol de tension. De plus, les deux réseaux sont étroitement couplés et les défauts apparaissant dans l’un des réseau apparaissent aussi de l’autre côté.
Si la transmission DC requiert moins de conducteur que la transmission AC (deux conducteurs pour trois en AC triphasé), la station terminale dans le cas d’une transmission DC est beaucoup plus onéreuse que pour une transmission AC. Ainsi, la transmission HVDC ne devient plus intéressante économiquement qu’après une certaine distance de câble (breakeven distance) qui est de l’ordre de 500km pour les câbles on-shore et 50km pour les câbles o-shore [67] (2.2).
La transmission HVDC peut donc être considérée comme un complément à la transmission HVAC, qui n’est pas encore vouée à disparaître, du fait notamment de la facilité d’augmenter et abaisser la tension en AC.
Pour le modèle wave-to-wire considéré il a donc été choisi d’utiliser une transmission HVAC, notamment pour la connaissance actuelle de ces systèmes.
Le modèle wave-to-wire est construit à l’aide de Matlab-Simulink et des boîtes à outils Simscape et SimPowerSystems, développées pour la modélisation de systèmes électrotechniques et d’électronique de puissance. La gure 2.3 présente le schéma simulink du modèle wave-to-wire.
Étape d’absorption – Cas d’étude du houlogénérateur
SEAREV
Le système houlomoteur considéré dans cette étude est le SEAREV, un convertisseur d’énergie des vagues développé par le laboratoire LHEEA de l’Ecole Centrale de Nantes [68]. Il s’agit d’un système composé d’un corps ottant, complètement clos, dans lequel est suspendu un volant pendulaire à masse excentrée. Ce dernier va osciller sous l’action de la houle, se comportant comme un pendule. Le mouvement relatif créé entre le otteur et la roue pendulaire est alors converti en énergie électrique.
Ce système possède plusieurs avantages. En eet, toutes les parties mobiles et les parties les plus sensibles à l’environnement marin (dont les composant électroniques et les liaisons mobiles) sont situées à l’intérieur du otteur, ce qui permet de diminuer les besoins en maintenance et d’augmenter leur durée de vie, notamment en évitant la corrosion et le biofouling (formation d’une couche d’organismes vivants, comme des moules par exemple, sur une surface immergée).
Les variations du niveau de la mer n’ont pas d’eet sur le système, et celui-ci ne nécessite pas de référence externe, ce qui permet d’utiliser un dispositif d’ancrages souples.
Le système pendulaire ne présente pas de butée, ce qui le rend particulièrement résistant aux états de mers extrêmes.
Une maquette à l’échelle 1 eme, testée dans le bassin de houle de l’Ecole Centrale de Nantes en 2006, a permis la validation du principe et l’étude de la conversion électromécanique de l’énergie. Une deuxième maquette à l’échelle 1 eme a été utilisée pour des tests de survie en bassin, avec des vagues au réel de plus de 30m.
Pour le SEAREV, un PTO hydraulique et un PTO électrique ont été envisagés.
PTO hydraulique pour le SEAREV [56] :
Il s’agit d’une solution utilisant une pompe hydraulique à fort couple et faible vitesse.
Cette pompe est directement branchée sur le pendule et la transmission des eorts mécaniques se fait à travers l’arbre commun. Le circuit hydraulique est donc composé de :
Un accumulateur à haute pression
Un accumulateur à basse pression (réservoir)
Un pont de clapets anti-retour
Un moteur hydraulique à cylindrée variable
Des électrovannes à commande
Le moteur hydraulique est commandé par une stratégie de régulation : la pompe n’est raccordée au pendule que si la vitesse de ce dernier est comprise entre un seuil minimal et un seuil maximal (déni par le constructeur). Le moteur, lui, fonctionne lorsqu’il y a de l’huile dans l’accumulateur haute pression.
Des ltres passe-bas permettent de contrôler la pression dans l’accumulateur haute pression an de permettre une sortie lissée pour tous les groupes de vagues.
PTO électrique pour le SEAREV :
Le SEAREV est l’un des seuls houlomoteurs à pouvoir permettre l’utilisation d’une génératrice tournante en entrainement direct. C’est pourquoi les équipes du LHEEA et du SATIE (Ecole Centrale de Nantes et ENS Cachan) ont mis au point un projet de machine à entraînement direct avec une génératrice tournante associée à un convertisseur électronique et une stratégie de pilotage adaptée, à la place de la solution hydraulique présentée précédemment. Ces travaux sont notamment présentés dans les thèses de M. Ruellan [69] et de J. Aubry [50].
En plus de convertir l’énergie mécanique en énergie électrique, la génératrice amortit le mouvement du pendule en générant un couple de frottements visqueux, proportionnel à la vitesse de rotation. Ce couple d’amortissement peut être utilisé pour maximiser l’énergie produite par le système tout en diminuant les pics de puissance.
La génératrice peut éventuellement être précédée d’un moyen d’adaptation mécaniqu du mouvement (pignon, crémaillère, boite à engrenage, vis à bile, …). Cependant, au vu des très faibles vitesses de rotation observée, un tel système peut s’avérer superu.
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Table des matières
1 Introduction
1.1 Contexte et état de l’art sur la houlogénération et l’intégration au réseau de sources d’énergie uctuantes
1.1.1 L’énergie de la houle
1.1.1.1 Formation et diusion des vagues
1.1.1.2 Caractérisation et représentation de la houle
1.1.1.3 Prédiction des états de mer
1.1.1.4 Estimation de la ressource mondiale
1.1.2 Les systèmes houlomoteurs
1.1.2.1 Trois grands principes de récupération de l’énergie de la houle
1.1.2.2 Chaînes de conversion d’énergie mécanique en énergie électrique – Power Take O (PTO)
1.1.2.3 Sites d’essais en mer
1.1.3 Intégration au réseau électrique
1.1.3.1 Les contraintes imposées par les gestionnaires de réseaux
1.1.3.2 Lissage de la puissance produite
1.2 Objectifs et positionnement scientique de la thèse
2 Étude des prols de tension et de courant – mise en place d’un modèle wave-to-wire
2.1 La modélisation wave-to-wire
2.2 Discussion sur l’architecture électrique de la ferme et le mode de transport de l’électricité choisis pour le modèle wave-to-wire
2.3 Étape d’absorption – Cas d’étude du houlogénérateur SEAREV
2.4 Étape de génération
2.5 Étape de conversion
2.5.1 Introduction aux modèles moyens
2.5.2 Redresseur
2.5.3 Hacheur survolteur
2.5.3.1 Modèle du hacheur survolteur
2.5.3.2 Contrôle du couple électromagnétique à l’aide du hacheur survolteur
2.5.4 Onduleur
2.5.4.1 Modèle de l’onduleur
2.5.4.2 Régulation de la tension du bus DC et de la puissance réactive
2.5.5 Comparaison entre les modèles moyens et les modèles détaillés
2.5.6 Câble et réseau électrique
2.6 Prise en compte des pertes le long de la chaîne
2.7 Conclusion
3 Étude de la qualité de la puissance injectée au réseau à l’aide du modèle wave-to-wire
3.1 Contrainte de icker
3.1.1 Calcul du icker – le ickermètre
3.1.2 Évaluation du icker pour diérents états de mer
3.1.3 Inuence des caractéristiques du réseau électrique (angle d’impé- dance et niveau de court-circuit) sur le coecient de icker Pst
3.1.4 Inuence du câble de transport
3.2 Variations de tension
3.3 Alimentation sans faille (Fault Ride Trough FRT)
3.4 Échelon de tension lors de la connexion ou de la déconnexion
3.5 Fluctuations de puissance instantanée
3.6 Conclusion
4 Lissage de la puissance injectée au réseau électrique
4.1 Intégration d’un système de stockage dans la chaîne wave-to-wire
4.1.1 Choix du système de stockage – Les supercondensateurs
4.1.2 Gestion de l’énergie dans le système de stockage
4.1.2.1 Filtre passe-bas
4.1.2.2 Filtre à moyenne glissante
4.1.2.3 Limiteur de rampe
4.1.3 Dimensionnement du système de stockage d’énergie
4.1.3.1 Première estimation de la capacité nécessaire à l’aide du modèle énergétique du système de stockage
4.1.3.2 Optimisation du coût du stockage et prise en compte du vieillissement et des pertes
4.1.3.3 Exemples de dimensionnement du module de supercondensateurs et coût associé
4.1.4 Intégration du stockage au modèle wave-to-wire
4.1.4.1 Le modèle de supercondensateur
4.1.4.2 Modélisation du convertisseur
4.1.4.3 Gestion du système de stockage
4.1.5 Étude de la qualité de la puissance injectée au réseau avec l’apport du stockage
4.2 Étude du lissage dû à la dispersion spatiale des systèmes houlomoteurs
4.2.1 Connexion de plusieurs systèmes SEAREV dans le modèle wave-to-wire
4.2.2 Ajout d’un système de stockage dans la ferme houlomotrice
4.3 Conclusion
5 Simulation temps réel et hardware in the loop
5.1 Utilisation d’un simulateur temps réel
5.1.1 Pourquoi la simulation temps réel ?
5.1.2 Implémentation d’un simulateur temps-réel pour le modèle wave-towire
5.2 Intégration d’équipements hardware réels dans le modèle
5.2.1 La simulation Hardware in the loop
5.2.2 Plateforme SEASTORAGE
5.2.3 Utilisation du banc d’essai – quelques résultats
5.3 Conclusion
6 Conclusion générale et perspectives
6.1 Bilan et conclusions
6.2 Poursuite des travaux en cours et perspectives
Annexes
A1 : Modèle hydro-mécanique du SEAREV sous Matlab Simulink
A2 : Vérication de la conformité du ickermètre utilisé dans le modèle wave-to-wire
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