La publication des honoraires d’audit par les sociétés cotées françaises

Thématique générale étudiée dans la thèse : la publication des honoraires versés par les entreprises à leurs auditeurs 

Aux Etats-Unis, la publication des honoraires d’audit est instituée pour les sociétés cotées, à partir de 2001. L’objectif affiché par cette réglementation est le suivant : «donner aux investisseurs des informations sur la relation entre une entreprise et son auditeur » (SEC, 2000).

En France, sous l’impulsion de l’instance de régulation du marché boursier, la publication des honoraires d’audit est mise en place à partir de l’exercice 2002 pour une partie seulement des sociétés cotées (COB, 2002). Les sociétés concernées sont celles qui doivent publier des documents de référence ou des prospectus d’émission notamment lorsqu’elles réalisent une opération sur titre en cours d’année . En 2003, la loi de Sécurité Financière (LSF, 2003) a instauré la collecte de l’information sur les honoraires d’audit et sa mise à la disposition des actionnaires (ou associés) pour l’ensemble des entreprises, cotées ou non, au titre de l’exercice comptable 2003 ; il ne s’agit pas ici d’une obligation de diffusion à destination du public . Pour la période étudiée dans notre thèse (exercices comptables 2002 et 2003), la publication des honoraires d’audit n’est donc pas obligatoire pour l’ensemble des sociétés cotées. Postérieurement à notre période d’étude, à partir de l’exercice 2005, l’obligation de publication des honoraires d’audit sera étendue à l’ensemble des sociétés faisant Appel Public à l’Epargne, sous la forme d’un communiqué diffusé sur le site internet de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF, 2005). De plus, dans le cadre européen, en 2006, la Directive 2006/43/CE sur le contrôle légal des comptes a instauré la mise en place de la publication des honoraires d’audit dans l’annexe des états financiers dans le but de « rendre plus transparente les relations entre le contrôleur légal (ou le cabinet d’audit) et l’entité contrôlée » (Directive Audit, 2006).

AUDIT, GOUVERNEMENT D’ENTREPRISE ET INFORMATION COMPTABLE : ASPECTS THEORIQUES ET PRESENTATION DE LA PROBLEMATIQUE 

Présentation des fondements de la théorie de l’agence 

Séparation de la propriété et du management et définition de la relation d’agence 

Séparation de la propriété du capital et du management des entreprises 

Dans leur ouvrage intitulé The Modern Corporation and Private Property paru en 1932, Berle et Means observent le développement des sociétés par actions et constatent une séparation entre la propriété du capital et la gestion de l’entreprise (confiée à des personnes spécialisées dans cette activité). Selon les auteurs, les organisations sont entrées dans une nouvelle ère caractérisée par la prédominance des grandes entreprises à actionnariat diffus. En mettant l’accent sur la protection des droits de propriété individuels, Berle et Means expriment leur inquiétude quant à la domination de l’économie par un nombre restreint d’entreprises de très grande taille au sein desquelles des actionnaires nombreux détenant une faible fraction du capital seraient totalement désengagés de la gestion de l’entreprise et risqueraient d’être dépossédés par des dirigeants non-propriétaires. Berle et Means ne sont pas les premiers à constater les effets de la séparation de la propriété et du contrôle dans les grandes entreprises par action. C’est Adam Smith (1776) qui a le premier soulevé cette question en reconnaissant que dans les sociétés par actions, le management est assuré par les dirigeants, et que les actionnaires se contentent, bien souvent, de percevoir le dividende sans s’impliquer dans la gestion de l’entreprise. Dans ce contexte, Adam Smith souligne que les dirigeants de telles entreprises sont amenés à gérer les intérêts des actionnaires, et non leurs propres intérêts. Il est donc peu probable qu’ils prennent soin des intérêts des actionnaires avec la même « vigilance » que s’ils s’agissaient des leurs propres deniers. Adam Smith met ainsi en évidence le risque de voir apparaître des comportements de négligence ou de gaspillage dans ce type d’entreprises.

Berle and Means décrivent les caractéristiques des entreprises modernes à actionnariat diffus sur la base de trois propositions :
1. Les titres des grandes entreprises cotées à actionnariat diffus sont détenus par un si grand nombre d’actionnaires, qu’aucun d’entre eux ne détient une fraction significative du capital.
2. Les dirigeants de ce type d’entreprise ne détiennent qu’une très faible part des actions.
3. Les intérêts des actionnaires et des dirigeants divergent de façon significative, ce qui entraîne une diminution de l’efficience économique des entreprises.

Selon Stigler et Friedland (1983), ces propositions ne sont qu’en partie démontrées empiriquement dans l’ouvrage de Berle et Means. Cependant, elles mettent très tôt en évidence une réalité qui servira de point de départ aux développements futurs de la théorie de l’agence . Dans la mesure où, dans ce type de sociétés, ce n’est pas le propriétaire (actionnaire) qui gère lui-même l’utilisation des ressources qu’il apporte, il n’a pas le contrôle des investissements et de la pérennité de l’entreprise. Les actionnaires bénéficient certes des profits générés par l’entreprise, via les dividendes qu’ils perçoivent, mais ils ne sont pas incités à prôner une utilisation efficiente de leurs droits de propriété, car ils ont abandonné la totalité du contrôle de l’entreprise aux dirigeants (Berle et Means, 1932).

Définition de la relation d’agence

Jensen et Meckling (1976) définissent la relation d’agence comme un contrat en vertu duquel une personne (le principal) engage une autre personne (l’agent) pour réaliser une tâche pour le compte du principal impliquant que ce dernier délègue une partie de son pouvoir de décision à l’agent.

Comme les deux parties (le principal et l’agent) maximisent leur utilité, alors il est vraisemblable que l’agent n’agira pas toujours dans l’intérêt du principal. La relation entre les propriétaires du capital d’une entreprise et les dirigeants (ou managers) non propriétaires est une situation qui, selon Jensen et Meckling (1976), correspond à une relation d’agence typique (‘pure’). C’est pourquoi, les questions associées avec la séparation de la propriété et du contrôle qui caractérise les sociétés modernes à actionnariat diffus, sont au cœur des développements de la théorie de l’agence. Toutefois, le problème des conflits d’intérêts qui naissent au sein des relations d’agence peut être généralisé à nombre de situations impliquant des relations de coopération entre différents individus animés par des motivations divergentes, et la relation principal-agent est un « phénomène d’ampleur significative » et permettant d’analyser une part importante des transactions et des relations entre les individus (Arrow, 1991).

Les principales caractéristiques de la relation d’agence identifiées par Arrow (1991), sont les suivantes :
– Les décisions prises par l’agent ont des conséquences sur son utilité (bien être) et sur celle du principal.
– Le principal doit définir les règles de rétribution des efforts de l’agent. Le principal détermine la rémunération que recevra l’agent. Cette rémunération sera une fonction de l’observation que le principal fera du résultat des actions de l’agent.
– Le problème majeur posé par la relation d’agence est celui de l’incertitude liée au partage inégal de l’information entre les deux acteurs. La littérature économique met en évidence deux sources d’incertitude. La première découle de du fait que les actions de l’agent ne sont pas directement observables par le principal. La deuxième correspond au fait que la performance de l’entreprise est influencée par les actions de l’agent mais n’est pas uniquement déterminée par elles. En d’autres termes, l’observation de la performance de l’entreprise (qui pose déjà une question en soi) ne permet pas d’isoler les conséquences directes des actions de l’agent .

La relation d’agence met en évidence la divergence des intérêts entre le principal et l’agent, et la nécessité de mettre en œuvre des moyens de contrôle des actions de l’agent pour limiter les effets de cette divergence.

Conflits d’intérêts et coûts d’agence

Conflits d’intérêts entre principal et agent

Les conflits d’intérêts trouvent leur origine dans l’asymétrie d’information entre principal et agent et dans l’impossibilité de rédiger des contrats complets en raison de la rationalité limitée des individus et de l’incertitude. Différents types de conflits d’intérêts sont mis en évidence par la littérature. Nous présentons successivement les deux principaux conflits ayant fait l’objet d’abondants développements théoriques que sont : le conflit actionnaire-dirigeant et le conflit actionnaire-créancier.

Le conflit actionnaire-dirigeant 

Jensen et Meckling (1976) abordent cette question en comparant deux situations d’entreprise. Dans un premier cas, le dirigeant détient 100 % du capital social, dans un deuxième cas, il cède une portion (ou la totalité) du capital à un (ou plusieurs) actionnaire(s) externe(s). Dans l’entreprise détenue à 100 % par son dirigeant, les décisions prises vont maximiser l’utilité de l’actionnaire-dirigeant. Lors de la vente d’une partie du capital à un actionnaire externe, une divergence d’intérêts apparaît entre le dirigeant et l’actionnaire non dirigeant. Selon Jensen et Meckling (1976), cette divergence d’intérêts provient du fait que le dirigeant n’assume plus la totalité des risques associés avec ses prises de décision. De plus, au fur et à mesure que la fraction du capital qu’il détient diminue, sa part de dividende décroît et sa motivation directe à maintenir des bénéfices élevés diminue en conséquence. Le dirigeant ne détenant plus qu’une faible fraction du capital pourra alors être incité à s’approprier d’autres formes de ressources de l’entreprise, sous la forme d’ « à-côtés » (perquisites). Les auteurs précisent que le conflit d’intérêts majeur entre dirigeant non propriétaire et actionnaire externe à l’entreprise provient de la diminution des incitations du dirigeant à développer des activités génératrices de bénéfices futurs et à prendre des décisions d’investissement de nature à garantir la pérennité des dividendes. Ces activités deviennent simplement contraires au maintien du bien-être immédiat du dirigeant non propriétaire car elles nécessitent des efforts trop importants, ce qui peut alors résulter en une diminution de la valeur de l’entreprise.

Fama et Jensen (1983a) se posent alors la question de la survie d’organisations dans lesquelles les agents chargés de prendre les décisions concernant la gestion de l’entreprise (dirigeants) ne supportent pas les conséquences financières directes de leurs décisions. Ils fondent leur argumentation sur la séparation du pouvoir de décision (aux mains de l’agent) et de la répartition du risque (supporté par le principal). Cette analyse du risque leur permet de montrer que la spécialisation nette entre la prise de décision (par les dirigeants) d’une part et la prise en charge du risque (par les actionnaires) d’autre part, peut être considérée comme optimale. En effet, en cas d’absence de séparation entre prise de risque et prise de décision, l’ensemble des dirigeantsactionnaires devrait être prêt à supporter des risques importants, ce qui limiterait significativement le nombre de dirigeants potentiels et ne serait pas en adéquation avec les besoins des grands groupes à actionnariat diffus. Dans ce cas, on voit que malgré l’existence de conflits d’intérêts coûteux entre les actionnaires et les dirigeants, cette forme d’organisation reposant sur la relation d’agence actionnaire-dirigeant correspond à une forme optimale. La question du contrôle de ces conflits d’intérêts et des coûts générés par ce contrôle est abordée plus loin dans le développement .

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : AUDIT, GOUVERNEMENT D’ENTREPRISE ET INFORMATION COMPTABLE : ASPECTS THEORIQUES ET PRESENTATION DE LA PROBLEMATIQUE
I. Présentation des fondements de la théorie de l’agence
II. Asymétrie d’information et production de l’information comptable
III. Gouvernement d’entreprise
IV. Rôle de l’audit externe comme mécanisme de contrôle et de réduction des coûts d’agence
V. Problématique générale de la thèse : coûts d’agence, gouvernement d’entreprise, publication et niveau des honoraires d’audit
CHAPITRE 2 : ÉTUDE DES DÉTERMINANTS DE LA PUBLICATION DES HONORAIRES D’AUDIT
I. Publication des honoraires d’audit : réglementation et pratique
II. Recherche sur les déterminants de la publication volontaire des honoraires d’audit
III. Problématique, question et hypothèses de recherche
IV. Méthodologie
V. Résultats empiriques
VI. Discussion des résultats
CHAPITRE 3 : ÉTUDE DES DÉTERMINANTS DU NIVEAU DES HONORAIRES D’AUDIT
I. Cadre réglementaire de l’audit
II. Structure du marché de l’audit
III. Recherche sur les déterminants des honoraires d’audit
IV. Problématique, question et hypothèses de recherche
V. Méthodologie
VI. Résultats empiriques
VII. Discussion des résultats
CHAPITRE 4 : HONORAIRES D’AUDIT PUBLIES ET PERCEPTION DE LA QUALITÉ DE L’AUDIT
I. Synthèse des résultats des deux études empiriques
II. Réflexion sur la perception de la qualité de l’audit à travers les honoraires d’audit publiés
III. L’utilisation des honoraires d’audit publiés comme mesure de la qualité de l’audit
IV. Honoraires d’audit et qualité de l’audit – présentation d’un cadre d’analyse
V. Quelques pistes de recherches futures sur les honoraires d’audit publiés
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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