La psychologie du développement sous l’angle de la psychologie socioculturelle

La psychologie du développement sous l’angle de la psychologie socioculturelle

Longtemps, la psychologie du développement s’est essentiellement intéressée au processus de changement et de continuité du développement des enfants et des adolescents, avant de s’intéresser au développement de l’adulte. Les années 1970 ont vu émerger la psychologie développementale de la vie entière, également appelée Lifespan Developpemental Psychology (Baltes & Goulet, 1970). Cette approche s’intéresse au développement des êtres humains, aux processus de changements, d’acquisitions et de continuité qui jalonnent la vie d’une personne de sa naissance à sa mort (Lecerf, 2007). Les concepts centraux de cette approche ontogénétique énoncés par Baltes (1987), conçoivent le développement comme un processus répondant aux besoins et opportunités rencontrées par les personnes au cours de leur vie. Cette vision multidimensionnelle se détache de la vision linéaire et homogène proposée par la psychologie du développement qui énonçait le développement comme une succession de stades additionnels et invariants (Sapin, Spini, & Widmer, 2007). Ainsi, le développement d’une personne tout au long de sa vie peut être entrevu comme une évolution car : le développement ne consiste pas seulement en une augmentation de l’efficacité des processus psychologiques, mais représente un système dynamique de compromis entre gains et pertes, qui peuvent survenir tout au long de la vie (Lecerf, 2007, p.88).

Dans cette même perspective, les êtres humains naissent, se développent et vivent dans un environnement social et culturel dans lequel ils évoluent et avec lequel ils interagissent. La psychologie socioculturelle du développement nous permet dès lors de saisir les enjeux de l’interdépendance entre ces différents environnements, à travers lesquels les individus assignent un sens à la réalité, à leur réalité. Cette approche postule l’importance particulière de l’expérience humaine individuelle ou héritée, dans un contexte historique et une temporalité donnés (Zittoun, 2012a). L’approche socioculturelle, « en tant que psychologie, elle s’intéresse à la personne qui sent et qui raisonne, qui se souvient et qui imagine des alternatives » (Zittoun, 2012b, p.263). Elle concède une importance particulière à l’attribution de sens des individus face aux changements auxquels ils sont confrontés et aux ajustements pour s’y adapter.

Selon Valsiner (2007) la portée de ces changements varie selon qu’ils soient « transitifs » ou « intransitifs ». Par changements transitifs, l’auteur se réfère à des changements cycliques, périodiques sans incidence majeure dans la vie d’une personne. En revanche, l’incidence des changements intransitifs requiert un remaniement de la manière de penser, de se conduire, de comprendre le monde et les choses ; une accommodation à son nouvel environnement qui a changé. Suivant Zittoun (2012c, p. 264) : « la notion développementale de changement désigne une telle restructuration réussie ». La perspective socioculturelle du développement permet d’appréhender le changement comme un épisode, une transition dans la trajectoire de vie d’une personne nécessitant selon les circonstances une réévaluation du sens de l’expérience vécue, qui comporte la redéfinition de sa place et de son rôle dans cet environnement transformé (Zittoun, 2012b). Ainsi que nous venons de le voir, le développement et les transformations qui ont lieu tout au long de la vie nécessitent l’articulation de différents paramètres tels que la saisie d’opportunités, les expériences de vie et le sens conféré aux changements.

Ces éléments rendent possible l’accommodation au nouvel environnement. Ce travail se focalisant sur des adultes qui, à un moment de leur vie reprennent des études universitaires afin de redéfinir leur trajectoire professionnelle, il nous paraît utile de nous arrêter un instant sur les adultes dont nous allons parler.

Adultes ? Notre recherche s’intéresse aux processus qui conduisent des adultes opérant une reconversion professionnelle volontaire à travers des études universitaires. Ainsi que nous l’avons expliqué en préambule, si dans un premier temps, nous nous étions intéressée à étudier ce phénomène à un moment spécifique du cycle de vie – le mitan de la vie-, nous avons abandonné cette idée, pensant que la réorientation professionnelle, ou la redéfinition des trajectoires de vie n’était pas propre aux personne dans cette tranche d’âge mais au contraire pouvait se produire à tous les âges de la vie adulte. C’est pourquoi nous pensons qu’il est opportun d’énoncer, de manière non exhaustive, de quels adultes nous parlons dans le cadre de ce travail. Heslon nous interroge : « à partir de quel l’âge devient-on adulte ? Jusqu’à quel âge continue-t-on de l’être ? » (2009, p. 17). Cette question nous interpelle et nous fait remarquer qu’en effet, il n’est pas rare que lorsque l’on parle d’adultes, ce vocable, renvoie en premier lieu à l’âge de la personne dont il est question.

Ainsi que le retrace l’auteur, jusque dans les années 1970-1980, le droit de vote, l’obtention du permis de conduire, l’entrée dans la vie active ou encore l’avènement de la parentalité sonnaient le glas de l’adolescence et indiquait, sans retour possible, l’entrée dans l’âge adulte. Ce statut spécifique et irrévocable semblait correspondre à un « paradigme de la normalité ». Aujourd’hui, en revanche, « on n’entre plus d’un coup dans l’âge adulte, on n’en finit pas de le devenir, à la faveur de multiples transitions successives » qui jalonnent les différentes étapes de la vie (Heslon, 2009, p.19). La succession de ces phases qui vont du jeune adulte à la séniorité, sont ponctuées de multiples questionnements, ruptures, transitions, réorientations professionnelle-s, et divers engagements sociaux. A travers les propos de l’auteur, on entrevoit l’idée d’un constant ré-amménagement dans les différents pans de l’individu, comme énoncé par la psychologie socioculturelle du développement. Ainsi que le souligne Boutinet (1995), ce qui définit nos modes de vie actuels c’est : « la perte d’automaticité et d’uniformité des étapes de notre vie adulte ; ces étapes sont dorénavant jalonnées de choix, de perspectives sans cesse à redéfinir » (p.52).

A travers ce point de vue, on peut observer que l’idée de redéfinition des perspectives de Boutinet (1995) nous renvoie à l’importance de l’attribution de sens des différentes expériences vécues au cours de la vie, mentionnées par Zittoun (2012b). La catégorisation des différents stades et âges ne peut plus être aussi clairement définie. C’est le cas par exemple lors de la transition adolescence – âge adulte, qui manifestement n’intervient pas pour toutes les personnes au même moment, tant du côté psychologique que biologique. C’est pourquoi, ainsi que nous l’explique Anatrella (2003), il a inventé le terme « adulescents » qui renvoie à une catégorie de jeunes adultes dont l’âge varie de 24 à 30 ans, et qui est en quête d’autonomie. Selon l’auteur, ce qui est caractéristique de cette population, c’est la confrontation aux difficultés structurelles comme le chômage à l’issue de leur formation, les multiples changements d’emploi, la prolongation des études et de fait une dépendance financière à leurs parents ou à un tiers qui subviendrait à ses besoins. Dès lors on semble assister à une confusion des âges et/ou des étapes, qui pourrait être justifiée par l’allongement de la vie qui donne aux jeunes adultes l’illusion qu’ils disposent davantage de temps « pour s’engager dans l’existence » (Anatrella, 2003, p.42).

La crise

Dans son sens trivial, la crise est un phénomène qui surgit dans la vie d’une personne de façon impétueuse, brusque et imprévue. Lorsqu’elle apparait, « elle submerge la personne dans l’ici et le maintenant, laissant individu et structures sans imaginaire d’avenir » (Baubion-Broye 1998, p. 13). Ainsi que le souligne Mazade (2011), la notion de crise désigne un évènement imprévu, occasionnant un état d’anxiété et de fragilité qui précède et conduit à la rupture. Utilisée dans les recherches sur les trajectoires de vie, cette notion donne la possibilité d’analyser le déséquilibre que des évènements critiques et imprévisibles occasionnent ainsi que les conséquences des ruptures et des transitions qui s’en suivent. Selon Baubion-Broye (1998), la survenue d’épisodes critiques dans la vie d’une personne, s’inscrit dans une temporalité régentée par l’urgence. L’urgence de trouver des solutions, des réponses, dans le but de pallier au déséquilibre engendré. La crise appelle la prise de décisions rapides, opportunes et reconstituantes afin d’atténuer l’effet de surprise et l’absence d’anticipation (Baubion-Broye, 1998).

Mais il n’est pas rare qu’avant de parvenir à se (re)mobiliser, la personne en proie à cet état, demeure pour un temps plus ou moins long, en suspens dans une phase intermédiaire, de « moratoire » car l’évènement survenu restreint ses capacités de passer à l’action immédiatement (Mazade, 2011). Erikson (1972) définit cette phase moratoire comme « une période de délai accordée à quelqu’un qui n’est pas encore prêt à faire face à une obligation » (p.162). Suivant Grossetti (2006), une des particularités les plus saillantes de la crise, est la « contagion » des conséquences de l’évènement dans les différentes sphères de vie professionnelle et personnelle, (par sphère personnelle nous entendons familiale et sociale) de la personne (p.16).

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Table des matières

1.INTRODUCTION
1.1. PROLEGOMENES SUR LE CHOIX DU SUJET
1.2. PLAN DU TRAVAIL
2. CADRE THEORIQUE
2.1. LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT SOUS L’ANGLE DE LA PSYCHOLOGIE SOCIOCULTURELLE
2.2. ADULTES ?
2.3. TRAJECTOIRES DE VIE : DES RUPTURES AUX TRANSITIONS
2.3.1. LA CRISE 15 2.3.2. LA RUPTURE
2.3.3. LES TRANSITIONS
2.4. LA RECONVERSION PROFESSIONNELLE VOLONTAIRE SELON NEGRONI (2007)
2.4.1. LA VOCATION CONTREE
2.4.2. LE DESENGAGEMENT
2.4.3. LA LATENCE
2.4.4. LA BIFURCATION
2.4.5. LE REENGAGEMENT
2.5. L’IMAGINATION
2.6. DE LA NECESSITE DE LA MOTIVATION DANS LA RECONVERSION PROFESSIONNELLE VOLONTAIRE.
3. PROBLEMATIQUE
4. METHODOLOGIE
4.1. RECUEIL DES DONNEES : LE RECIT DE VIE
4.2. LE GUIDE D’ENTRETIEN
4.3. PERSONNES A L’ETUDE
4.4. LE RECRUTEMENT
4.5. LES ENTRETIENS
5. L’ANALYSE
5.1. PRESENTATION DES RESULTATS
5.2. ETIENNE
5.2.1. TRAJECTOIRE DE VIE : CRISES, RUPTURES ET TRANSITIONS
5.2.2. SENS CONFERE A LA RECONVERSION PROFESSIONNELLE VOLONTAIRE
5.2.3. LES RAISONS DE REPRENDRE DES ETUDES
5.2.4. QU’EST-CE QUE ÇA OUVRE MAINTENANT QU’IL A COMMENCE ?
5.3. DIEGO 60 5.3.1. TRAJECTOIRE DE VIE : CRISES, RUPTURES ET TRANSITIONS
5.3.2. SENS CONFERE A LA RECONVERSION PROFESSIONNELLE VOLONTAIRE
5.3.3. LES RAISONS DE REPRENDRE DES ETUDES
5.3.4. QU’EST-CE QUE ÇA OUVRE MAINTENANT QU’IL A COMMENCE ET PRESQUE FINI ?
5.4. CATHERINE
5.4.1. TRAJECTOIRE DE VIE DE CATHERINE
5.4.2. SENS CONFERE A LA RECONVERSION PROFESSIONNELLE VOLONTAIRE
5.4.3. LES RAISONS QUI ONT FAIT NAITRE LE DESIR DE REPRENDRE DES ETUDES
5.4.4. QU’EST-CE QUE CETTE RECONVERSION A OUVERT ?
6. DISCUSSION
7. CONCLUSION ET OUVERTURES

7.1. OUVERTURES POSSIBLES DE CETTE RECHERCHE
8. BIBLIOGRAPHIE
9. ANNEXE : GRILLE D’ENTRETIEN

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